Intervention de Delphine Batho

Séance en hémicycle du 13 décembre 2012 à 9h30
Principe de participation du public défini à l'article 7 de la charte de l'environnement — Présentation

Delphine Batho, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie :

Madame la présidente, monsieur le vice-président de la commission mixte paritaire, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les députés, avant que nous n'entamions les derniers débats sur le rapport de la commission mixte paritaire, je voudrais remercier tous ceux qui ont apporté leur pierre à ce projet de loi relatif à la mise en oeuvre du principe de participation du public dans un esprit d'ouverture et de rassemblement, en particulier le président de la commission, Jean-Paul Chanteguet, et, bien sûr, la rapporteure, Sabine Buis.

Vous le savez, depuis que le projet vous a été soumis en première lecture, le contexte juridique de nos discussions a évolué, puisque le Conseil constitutionnel a rendu, le 23 novembre dernier, deux décisions sur des questions prioritaires de constitutionnalité relatives à la méconnaissance de l'article 7 de la Charte de l'environnement. Ces décisions ont confirmé que nous sommes sur la bonne voie. Le Conseil constitutionnel a ainsi jugé contraire à l'article 7 le fait de limiter le champ d'application de la procédure actuelle de participation électronique aux seuls actes réglementaires. Le projet de loi y répond, puisque nous étendons ce dispositif aux décisions d'espèce et aux décisions individuelles. Le Conseil constitutionnel a également confirmé, en statuant sur un arrêté municipal pris en matière de réglementation de la publicité, que les décisions des collectivités locales entraient bien dans le champ du principe de participation du public, ce qui confirme la nécessité de l'ordonnance prévue à l'article 7 du projet.

Le Conseil constitutionnel a également précisé que n'étaient concernées par le principe de participation que les décisions ayant une incidence « directe et significative » sur l'environnement. Le projet de loi mentionne, quant à lui, les décisions ayant « une incidence » sur l'environnement. Nous maintenons cette formule, qui est celle de la Charte de l'environnement et qui sera sans doute interprétée à la lumière de la jurisprudence du Conseil constitutionnel.

Pour le reste, c'est-à-dire la procédure concrète à respecter pour appliquer le principe de participation, le juge constitutionnel n'a rien dit. Nous sommes donc renvoyés à notre imagination et à notre efficacité.

J'en viens au texte adopté par la commission mixte paritaire il y a un peu plus d'une semaine.

Je constate, tout d'abord, que ladite commission n'est pas revenue sur l'article 7, qui prévoit l'habilitation nécessaire pour prendre une ordonnance sur le fondement de l'article 38 de la Constitution. Je sais que le Parlement est très attaché à ses prérogatives et qu'il ne se dessaisit pas volontiers de son rôle de législateur. Je me suis engagée devant vous à respecter une méthode et un calendrier de concertation pour l'élaboration de cette ordonnance, en y associant les associations d'élus et les parlementaires. Au terme de cette concertation, le Gouvernement ne tardera pas à vous présenter l'outil de ratification. J'en ai pris l'engagement, ainsi que le ministre chargé des relations avec le Parlement, Alain Vidalies, la semaine dernière au Sénat.

Je constate également avec satisfaction que la commission mixte paritaire n'est pas revenue sur les dispositions instituant le Conseil national de la transition écologique, dont la création avait été décidée lors de la conférence environnementale et qui devra nous permettre de franchir une nouvelle étape dans le dialogue social et environnemental. La création de ce conseil nous était apparue absolument nécessaire dans le cadre de la mise en oeuvre de la feuille de route relative à la transition écologique.

C'est surtout sur l'article 1er du projet de loi que se sont concentrées les discussions en commission mixte paritaire et que la rédaction du texte a le plus évolué. La procédure proposée est, pour l'essentiel, une procédure électronique et dématérialisée. Tout en confirmant l'intérêt de cette modalité de consultation, le Parlement a alerté le Gouvernement sur la nécessité de prendre en compte la fracture numérique. En effet, tous les Français n'ont pas encore accès à un ordinateur et à internet. C'est pourquoi le projet prévoit, d'abord, la possibilité de formuler des observations par voie postale – il s'agit d'un amendement du Sénat maintenu en CMP –, ensuite une mise à disposition sur demande dans les préfectures et les sous-préfectures des projets de textes ou de décisions mis en consultation – il s'agit ici d'un amendement de l'Assemblée maintenu en CMP.

La CMP a maintenu l'obligation d'informer le public trois mois à l'avance des décisions et des textes qui seront mis en consultation afin que chacun puisse s'y préparer dans de bonnes conditions. Elle a également maintenu le délai minimal de mise à disposition du public, qui serait porté à vingt et un jours au lieu de quinze jours aujourd'hui.

Le principe de participation du public implique que les observations soient prises en compte par l'autorité compétente en amont de la prise de décision. Le public doit donc pouvoir s'assurer en toute transparence que toutes ses observations ont été analysées avec attention. C'est pourquoi le texte impose à l'autorité compétente l'élaboration d'une synthèse écrite de ces observations. Est ajoutée à cette obligation générale une nouvelle obligation : celle de présenter un document séparé indiquant les motifs de la décision. La CMP a maintenu cette disposition issue d'un amendement dont nous avons longuement discuté en première lecture à l'Assemblée, disposition sur la portée juridique de laquelle le Gouvernement s'était interrogé.

Enfin, pour répondre à une demande du Sénat que soient organisés des forums électroniques en ligne permettant des interactions entre les participants au débat, le Gouvernement s'était engagé à organiser une expérimentation.

Cette expérimentation était une proposition de la commission du développement durable de l'Assemblée nationale. Le Gouvernement s'y est rallié, car il doit expertiser le coût de la généralisation de tels dispositifs – qui impliquent le recrutement de modérateurs –, sa faisabilité pour les collectivités locales notamment, ou les questions juridiques posées par le fait que la responsabilité légale est assumée par l'hébergeur en cas de propos injurieux. À cette première expérimentation s'est ajoutée une seconde expérimentation, dont l'objectif est de tester la mise en place d'un garant du débat désigné par la Commission nationale du débat public.

Telle est, dans ses grandes lignes, la rédaction de l'article 1er élaborée par la commission mixte paritaire. Cette rédaction, qui a peu bougé, traduit l'enrichissement du texte tout au long du débat, que ce soit à l'Assemblée nationale ou au Sénat.

Je réserve toutefois une place à part à un amendement adopté au Sénat, puis supprimé à l'Assemblée nationale et réintroduit en CMP, soumettant la procédure de délivrance des permis de recherche miniers concernant des hydrocarbures à la procédure définie à l'article 1er du projet de loi. Même si j'ai bien compris la décision de la CMP, j'ai déjà eu l'occasion de dire que le Gouvernement n'était pas favorable à cette disposition. Nous sommes en effet engagés dans la réforme du code minier qui devrait comporter des dispositions similaires, et même encore plus ambitieuses, en matière d'information préalable du public. Il nous semble donc dommage d'anticiper le débat sur cette réforme, dont les travaux seront présentés devant les commissions compétentes des deux assemblées.

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