Indépendamment de la qualité du rapport de Michel Issindou, je suis à la fois surpris et irrité que l'on nous présente des amendements qui réécrivent les fondements de la médecine du travail sans nous laisser le temps de les expertiser. Ce n'est pas raisonnable ! Si ces amendements sont maintenus, je voterai contre.
Je souhaite cependant faire quelques remarques de fond. La notion d'aptitude est aussi complexe que discutée, et son usage peut avoir des conséquences néfastes pour les salariés – par exemple un licenciement. On ne peut donc pas, sous prétexte que ces amendements seraient réclamés depuis longtemps par le patronat, refonder la médecine du travail en s'appuyant sur l'avancée qu'a représentée la loi de 2011 – avancée que, à l'époque, je le reconnais, notre groupe avait combattue.
Un excellent rapport du Conseil économique, social et environnemental a montré que le travail de nuit est délétère. L'idée d'un suivi particulier des travailleurs de nuit est donc parfaitement légitime.
Quant à l'opportunité, pour les salariés, des dispositions fondamentales qui nous sont proposées, je rappelle que le Conseil de l'Ordre, qui n'est pas le plus grand défenseur des médecins du travail, mais qui a une certaine qualité d'expertise, s'est prononcé très défavorablement à l'égard de ce rapport, de même que les syndicats professionnels de médecins du travail.
On peut s'offusquer de voir qu'on nous soumet ainsi trois amendements que personne n'a lus. Je comprends bien qu'il s'agit d'une traduction législative du rapport. Mais on s'appuie, pour ce faire, sur le constat d'un manque d'effectifs et d'une absence de prévisionnel en matière de médecine du travail, mais cela revient à supprimer un feu rouge à un croisement, sous prétexte que le trafic y est intense ! Ce n'est pas ainsi que je fonctionne et je voterai contre ces amendements, s'ils sont maintenus. Nous pourrons toutefois avoir un débat utile en séance publique, après une expertise scrupuleuse de ces dispositions.