Monsieur Accoyer, vous ne faites ici que répéter ce que vous aviez déjà dit lors de notre deuxième réunion : selon vous, il ne faut rien changer. Nous avons pourtant mené des auditions nombreuses, intéressantes, sur la question des partis, du scrutin… et les débats ont été nourris. Votre conclusion est pourtant demeurée strictement identique : le problème, ce sont les acteurs, ce n'est pas la machine.
Je vous rejoins sur certains points, par exemple la professionnalisation, que vous regrettez ici tout en étant élu depuis 1989 ! Il est difficile d'affronter nos propres contradictions, mais c'est, je crois, l'exercice auquel nous devons nous livrer ici. J'ai pour ma part évolué, sur la question de la proportionnelle par exemple.
Sur le fait que seuls les acteurs comptent et que les institutions n'ont aucune part dans les crises, vous avez tort. J'ai été à la tête, vous le savez, d'un parti politique qui voulait opérer une synthèse plutôt intéressante entre des gens issus pour beaucoup de l'extrême gauche et des statuts d'essence presque libertaire, où en particulier la proportionnelle tenait une grande place. Mais ces statuts créaient un intérêt objectif à présenter une motion supplémentaire, puisque cela permettait mécaniquement de disposer de plus d'élus : il y avait une prime à la division, statutairement organisée, même si elle n'était pas pensée pour cela… L'idée des écologistes était de représenter toutes les sensibilités politiques du parti, mais le résultat était bien qu'avec 3 %, 4 %, 5 % des voix, on pouvait obtenir un poste dans les organes de direction ; certains militants plutôt issus de l'extrême gauche n'ont pas manqué de s'en apercevoir.
Nous avions aussi quatre porte-parole, qui représentaient les différentes sensibilités : certains – qui appartenaient à l'opposition interne – pouvaient ainsi tenir des conférences de presse au siège même du mouvement pour s'opposer à des prises de position du secrétariat national ! Ce n'est pas là un problème de personnalité ; c'est un problème d'organisation. Dès lors que nous nous sommes organisés pour donner une prime au regroupement – même si nous demeurons des adeptes et des pratiquants de la proportionnelle – et pour avoir une expression publique plus unitaire, nous avons résolu bien des problèmes. Je suis donc très profondément en désaccord avec l'idée que seuls les hommes comptent.
Vous l'avez dit, très poliment, je vous l'accorde, mais vous l'avez dit : la différence entre Jean-Marc Ayrault et Manuel Valls, c'est que l'un a suffisamment de caractère pour s'opposer au Président de la République quand l'autre était tout mou.