Intervention de Christophe Sirugue

Séance en hémicycle du 6 juillet 2015 à 21h30
Accessibilité des établissements des transports et de la voirie pour les personnes handicapées et accès au service civique pour les jeunes en situation de handicap — Article 3

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Sirugue, rapporteur de la commission des affaires sociales :

La réponse à la question que vous venez de formuler est le principe même de l’Ad’AP. Dans le cas d’un petit ERP qui demande peu de travaux, l’Ad’AP couvre un délai d’un à trois ans : on peut n’avoir besoin que d’un an ou de deux, ou des trois. Dans une commune possédant un patrimoine plus important – je le dis à notre collègue Bricout qui connaît bien le texte, pour en avoir été rapporteur pour avis – s’appliquent les agendas avec ERP multiples, dont nous avons débattu tout à l’heure : l’Ad’AP peut s’étendre jusqu’à quatre, cinq ou six ans. Ne voit-on pas là l’illustration que ce texte s’adapte à la réalité de la difficulté que peut rencontrer un responsable d’ERP ?

C’est l’enjeu même des Ad’AP, le principe même du texte que nous examinons, que de ne pas procéder comme pour la loi du 11 février 2005 – une grande loi au demeurant, je le redis sans états d’âme, mais qui a été mise en place sans aucune expertise tout au long de son déroulement, dans l’idée que, dix ans plus tard, l’accessibilité aurait été réalisée partout. De fait, objectivement, beaucoup de choses ont été faites en dix ans. Cependant, faute d’un calendrier obligeant à tenir les délais, certains ont réalisé, peu avant la fin de 2014, qu’ils ne seraient pas prêts pour le 1er janvier 2015.

Or, le principe est ici très différent : si l’on a besoin de trois ans, il faudra rendre compte, au terme de la première année, de ce qui a été inscrit pour un an – c’est la raison pour laquelle je me suis opposé à l’amendement de Mme Laclais. Lorsqu’on déclare avoir besoin de trois ans pour achever l’accessibilité, il faudra, si l’on s’est par exemple engagé à installer la rampe d’accès la première année, s’assurer au terme de cette année que la rampe est installée. S’il est prévu de réaliser la deuxième année certains éléments permettant d’atteindre l’étage supérieur, il faudra aussi s’assurer qu’ils sont réalisés, et ainsi de suite.

L’Ad’AP, outil imaginé au terme de la concertation portée par la sénatrice Claire-Lise Campion, est précisément destiné à éviter de commettre à nouveau les erreurs de la loi du 11 février 2005. C’est donc bien cette adaptation-là qui est visée. Il ne s’agit pas, en revanche, d’accepter un Ad’AP à moitié réalisée, car le principe même du dispositif est de donner un peu plus de temps à ceux qui en ont besoin, à la condition que ce délai soit encadré.

Qu’est-ce, alors, qui fait tousser certaines associations ? Je reprendrai l’exemple du métro évoqué par notre collègue : pour certains responsables d’ERP possédant un patrimoine très important, comme la RATP ou la SNCF, l’accessibilité demande plus de trois ans – cette idée nous satisferait, mais sa réalisation serait impossible, car les sommes nécessaires pour la mise en accessibilité se chiffrent en milliards, notamment pour le métro, que je prends parfois et où il faut faire attention en descendant de la rame. Pour ces ERP, le dispositif mis en place permet d’étendre le délai jusqu’à neuf ans, en espérant qu’il sera tenu. Les services doivent exercer à cet égard une vigilance, afin que les Ad’AP soient respectés.

Mme Laclais m’a cité un exemple – je ne dirai pas où il se situe – qui pourrait être une forme de détournement du dispositif : un ERP qui n’a pas nécessairement besoin de neuf ans pour réaliser les travaux de mise en accessibilité peut être tenté de les étaler le plus possible afin d’y consacrer chaque année une toute petite somme. Il revient alors aux services de l’État – je parle sous le contrôle de Mme la ministre – de juger si l’Ad’AP peut ou non être retenu. Une commune qui consacrait jusqu’alors 400 000 euros par an à l’accessibilité et présenterait subitement un Ad’AP de neuf ans pour ne plus y consacrer que 90 000 euros serait-elle crédible ?

Ce débat est nécessaire entre les services et les établissements, dans un environnement dont on sait par ailleurs qu’il est difficile pour les collectivités. Il ne faut pas sortir de l’Ad’AP, car il s’agit de l’outil qui nous permet de tenir les choses et de donner de la souplesse sur plusieurs années, tout en nous assurant que les choses sont réellement faites.

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