Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le dialogue social mérite mieux, les entreprises méritent mieux. Ce sont les mots qui me viennent à l’esprit devant ce projet de loi, à bien des égards consternant, tant sur la forme que sur le fond. Je ne comprends pas ce qui nous pousse à légiférer dans une telle précipitation et à décider de l’avenir de nos entreprises au doigt mouillé.
Pour comprendre, il faut refaire la triste chronologie de ce projet de loi. Nous serons sans doute plusieurs à le dire, mais les délais ubuesques méritent d’être soulignés, encore et encore, tant la situation est navrante.
Voici donc le rappel de la chronologie. Le Gouvernement avait annoncé, en cas d’échec des négociations entre les partenaires sociaux, qu’il reprendrait la main en proposant un projet de loi. Jusqu’ici, tout va à peu près bien ! Mais les négociations ont échoué le 22 janvier et le Gouvernement a décidé trois mois plus tard qu’il fallait se dépêcher. Pourquoi ? Mystère ! Le projet de loi a été examiné en conseil des ministres le 22 avril et en commission à l’Assemblée le 19 mai. Le choix initial de la procédure accélérée n’annonçait rien de bon. En effet, engager la procédure accélérée sur un texte censé être le Grand Soir de nos entreprises et visant à simplifier le dialogue social constituait déjà un motif d’inquiétude.
Cela n’a pas manqué ! Le rendez-vous s’annonçait raté, les avancées timides et les vrais sujets éludés ! À la lecture du contenu du projet de loi, on s’est très vite rendu compte que seul le débat parlementaire pouvait changer les choses. Mais le pire était encore à venir. L’examen du texte en première lecture en séance a eu lieu une semaine seulement après l’examen en commission et nous avons eu moins de quarante-huit heures pour déposer des amendements entre les deux alors que des modifications importantes avaient été effectuées. En particulier, le rôle des commissions paritaires régionales interprofessionnelles défini à l’article 1er a été revu afin de conférer à celles-ci des pouvoirs inédits et des possibilités d’ingérence.
Ce dérapage, personne ne l’a vu venir ! Nous espérions à l’époque, naïvement peut-être, que les débats feraient évoluer le texte. Mais tenez-vous bien, chers collègues, ce n’est pas fini : le vote solennel au Sénat a eu lieu le 30 juin et la commission mixte paritaire s’est réunie deux heures plus tard pour se conclure en trente minutes seulement ! Après l’échec de la CMP, le texte est naturellement revenu à l’Assemblée pour une nouvelle lecture mais vingt-quatre heures plus tard ! Comme la CMP a terminé ses travaux à dix-neuf heures dix, le dépôt d’amendements devait être achevé le lendemain midi !