Intervention de Philip Cordery

Séance en hémicycle du 8 juillet 2015 à 15h00
Déclaration du gouvernement sur la situation de grèce et les enjeux européens

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilip Cordery :

…et imposait à la Grèce, accord après accord, des cures d’austérité plus dures les unes que les autres, qui ont eu pour seul effet d’enliser le pays dans la crise.

Aujourd’hui, c’est par le dialogue, la solidarité et la responsabilité que nous entrevoyons un accord et nous nous en félicitons, car la sortie de la Grèce de l’euro serait dramatique.

Au niveau économique et social, d’abord, et au premier chef pour les Grecs eux-mêmes : un retour de la drachme dévaluée entraînerait un appauvrissement des Grecs, salariés comme retraités, une hausse importante du prix des produits importés, de l’inflation et de la dette extérieure, et le désespoir de toute une jeunesse. Pour l’ensemble des Européens également, la sortie d’un membre de la zone euro signifierait la victoire des spéculateurs sur les marchés financiers et leur donnerait inévitablement des ailes pour attaquer d’autres États souverains.

Au niveau politique, ensuite, une Grèce déstabilisée serait la proie de l’extrême-droite, qui attend son heure. En outre, cela signifierait que l’euro, voire l’Union européenne, serait réversible – et cela, nous le refusons. Le projet européen est un projet d’intégration, ce ne peut être : un pas en avant, trois pas en arrière. Il y va de la viabilité de la construction européenne.

Au niveau géopolitique enfin, la position qu’occupe ce pays, au carrefour de la Méditerranée, du Moyen-Orient et des Balkans est stratégiquement déterminante, sans parler des enjeux migratoires. Rejeter la Grèce, qui fait partie de l’espace Schengen, entraînerait inévitablement un chaos dont les conséquences nous toucheraient tous collectivement.

La Grèce doit rester dans l’euro et, depuis ce matin, nous voyons les contours d’un possible accord. Dans son discours au Parlement européen, le Premier ministre grec, Alexis Tsipras, a annoncé qu’il allait engager des réformes structurelles permettant à tous les Grecs de contribuer équitablement à l’effort national. C’est une très bonne nouvelle. En effet, il existe une alternative à l’austérité et aux mesures consistant à faire payer les plus démunis, à couper les petites retraites ou à baisser encore davantage les salaires.

L’accord devra porter sur des engagements clairs de la Grèce. Une fiscalité plus juste, mettant à contribution ceux qui échappent à l’impôt, comme les oligarques et les cartels, les armateurs ou l’Église – rappelons qu’au plus fort de l’austérité, 56 % de la richesse nationale grecque était entre les mains des 10 % les plus riches –, une lutte sans merci contre la fraude et l’évasion fiscale, à laquelle l’Union doit s’associer, une baisse du budget militaire et une réforme des retraites abolissant les préretraites abusives : voilà les réformes qui devraient voir le jour.

Pour que l’accord soit durable, il devra s’accompagner d’un véritable plan de soutien à l’économie grecque et d’une restructuration de la dette.

Le constat est aujourd’hui évident : la Grèce ne pourra pas rembourser cette dette insurmontable, qui flirte avec les 180 % du PIB. Si les mesures proposées sont jugées sérieuses et réalisables, une nouvelle aide devra être débloquée pour la Grèce, sous forme de prêts à court terme, puis d’un plan du Mécanisme européen de stabilité. À long terme, la dette devra nécessairement être restructurée pour devenir viable – par un rééchelonnement ou une baisse des taux, certainement, mais, selon le FMI lui-même, une partie de cette dette devra aussi être annulée.

D’autres voies sont encore possibles et doivent être envisagées, comme la transformation d’une partie de la dette en certificats d’investissement ou en obligations liées à la croissance.

Les dirigeants européens doivent maintenant s’engager dans la voie du compromis, comme le proposent la France et d’autres. Il est de la responsabilité de l’Union européenne d’accompagner la Grèce sur la voie des réformes et la droite française, comme la droite européenne, doivent le comprendre aujourd’hui. C’est le sens de l’histoire et c’est l’intérêt du peuple grec et de tous les Européens.

La Grèce fait pleinement partie de l’Europe. Les principes de solidarité, d’union et de coopération sont à la base de la construction européenne. La période difficile que traverse l’Union ne doit pas être synonyme de recul, mais doit permettre de mettre en place une véritable coordination économique et une plus grande convergence fiscale et sociale.

L’intérêt particulier a trop souvent prévalu sur l’intérêt général ces dernières années, en Grèce, comme en Europe. Nous soutenons pleinement aujourd’hui le Gouvernement dans ses efforts pour faire triompher la primauté de l’intérêt général, du politique, de la responsabilité, et de la solidarité.

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