Intervention de Thierry Mandon

Séance en hémicycle du 13 décembre 2012 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2013 — Article 6

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThierry Mandon :

Je ne reviendrai pas sur l'historique de cet article et des amendements dits « pigeons ».

J'ai observé que l'article 6 faisait l'objet de nombreux amendements, mais je ne suis pas sûr que l'amender soit aujourd'hui la bonne méthode. En revanche, je pense qu'il faut le regarder de près et peut-être se doter d'un outil de suivi des conséquences de cet article dans les mois qui viennent, notamment sur un certain type d'entreprises.

En effet, cet article institue un régime dérogatoire au régime de la barémisation des plus-values de cessions. Ce régime dérogatoire peut tenir au statut du créateur d'entreprise, à un système d'exonération en cas de réinvestissement de la plus-value, à un régime d'abattement lié à la durée de détention des actions vendues, ou à des modalités particulières pour les départs à la retraite et les transmissions familiales.

Si, pour le tissu économique traditionnel, on peut anticiper assez facilement les conséquences de cet article, pour ce qui est des PME innovantes – celles que l'on appelle les PME de croissance, c'est-à-dire celles qui, finalement, ne distribuent jamais de dividendes, les résultats étant immédiatement réinvestis en fonds propres pour ces entreprises qui en ont besoin –, les perspectives et les conséquences sont plus difficiles à lire.

Je rappelle, d'un mot, l'importance de ces secteurs dans l'activité économique du pays. Ils représentent, en France, dans le secteur du numérique, par exemple, 3,2 % du PIB, contre 7,2 % dans des pays comme la Grande-Bretagne. C'est un secteur qui, ces quinze dernières années, représente 25 % de la croissance nette des emplois, soit 700 000 emplois créés en quinze ans. Ce sont donc des secteurs qui créent les emplois de demain.

Or, si je reprends les différents types de dérogations existantes, le départ à la retraite ou la transmission familiale ne les concernent pas. En effet, les dirigeants et les actionnaires de ces entreprises ont une moyenne d'âge de quarante-deux ans. C'est donc hors sujet. J'ajoute que le modèle économique de ces entreprises, par définition, exclut la transmission à des proches de la famille puisqu'il s'agit de cessions ou d'entrées en bourse.

Le statut de créateur d'entreprise ne les concerne pas non plus puisqu'une des conditions pour entrer dans ce statut est d'avoir des sociétés qui ont dix ans d'existence, ce qui n'est pas le cas.

Le réinvestissement de la plus-value ne les concerne pas davantage, puisqu'il faut avoir détenu au moins pendant huit ans 10 % du capital, ce qui, là encore, est très rare.

Seul peut les concerner le régime d'abattement lié à la durée de détention. Mais pour bénéficier pleinement de ce régime d'abattement, il faut avoir détenu des actions au moins pendant six ans, ce qui, là encore, est très long. Par ailleurs, du côté de l'actionnaire, il existe un régime fiscal des dividendes beaucoup plus favorable, car il bénéficie de plein droit d'un abattement de 40 %, alors que les start-up ne distribuent pas de bénéfices, ceux-ci étant réinvestis. Ces entreprises ne bénéficieront donc presque jamais de cet abattement de 40 %.

Un travail très précis doit être mené par un groupe de suivi sur l'impact de cet article sur les PME de croissance, afin, le moment venu, d'en tirer les enseignements.

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