Intervention de Bérengère Poletti

Réunion du 8 juillet 2015 à 9h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBérengère Poletti :

Si le vieillissement constitue bien l'un des principaux défis de notre époque, je ne suis pas sûre que ce texte soit vraiment en mesure de le relever.

Les départements versent l'APA à plus de 1,2 million de bénéficiaires pour un montant de plus de 5,5 milliards d'euros. Au niveau national, la dotation globale aux personnes dépendantes représente environ 22 milliards d'euros. Nous discutons de la répartition de la CASA, dont le produit s'est élevé à 645 millions d'euros l'an dernier et qui devrait représenter 710 millions d'euros cette année, selon les chiffres publiés hier par la CNSA. C'est dire combien cette taxe est dynamique !

Le texte nous inspire quelques réflexions sur la forme. Il a fallu une année complète avant d'engager la deuxième lecture du projet de loi, c'est bien long. Or, depuis le 1er avril 2013, les retraités imposables acquittent cette CASA qui est destinée précisément à financer les mesures du projet de loi dont nous discutons. À la fin de cette année, près de 2 milliards d'euros auront ainsi été prélevés pour financer une loi qui n'existe toujours pas à ce jour. Admettez, madame la secrétaire d'État, que cette situation est assez scandaleuse.

De plus, ce texte n'aborde pas le sujet épineux du reste à charge en établissement. Vous avez invoqué un manque de moyens qui nous concerne tous d'ailleurs, que ce soit l'État ou les collectivités. L'ancienne majorité en a souffert aussi en son temps, et nous aurions apprécié un peu plus de compréhension de votre part.

Avant l'adoption de la loi, une partie de la cagnotte CASA aura été utilisée pour combler le déficit du fonds de solidarité vieillesse (FSV), même si une fraction de cette ressource est désormais sanctuarisée, après l'intervention du Parlement au sein de la CNSA.

Vous avez promis une adoption définitive du texte avant le 31 décembre prochain, ce qui reste encore possible si nous passons la vitesse supérieure. Néanmoins, à supposer que cette adoption puisse intervenir avant la fin de l'année, une mise en oeuvre effective du texte au 1er janvier 2016 paraît de plus en plus illusoire, et la cagnotte pourrait bien continuer de gonfler après le 31 décembre. On peut donc se réjouir que nos collègues sénateurs aient inscrit le fléchage en pourcentages du produit de la CASA dans le texte, même si l'opération est un peu plus compliquée qu'il n'y paraît.

Quoi qu'il en soit et pour finir avec les questions de forme, je suis sûre que nous aurions pu trouver un juste milieu entre le recours à la procédure accélérée – auquel vous avez bien fait de renoncer – et de tels délais d'examen.

Quelques sujets peuvent faire débat dans ce texte, notamment à la suite de son passage au Sénat. En matière de gouvernance, nous sommes d'accord avec le Sénat, sauf en ce qui concerne le HCFEA. Sur ce point, nous partageons vos soucis d'efficacité, de transversalité et d'économies, madame la secrétaire d'État, et nous pensons que l'heure n'est effectivement pas à la multiplication des structures. Nous l'avions exprimé de cette manière lors de la première lecture.

Venons-en au problème du financement et de l'affectation en pourcentages de la CASA. Ce problème technique, que vous avez su décrire, est encore un peu plus compliqué qu'il n'y paraît. Il était important de raisonner en pourcentages et non pas en valeurs absolues puisque la CASA va augmenter chaque année, du fait qu'un nombre croissant de retraités va s'acquitter de cette taxe. En revanche, à l'intérieur des pourcentages, les conseils départementaux devront pouvoir obtenir une compensation complète, dès le départ, des dépenses supplémentaires qui leur seront demandées.

Il reste un autre sujet épineux, que vous avez aussi décrit, madame la secrétaire d'État : le double régime d'agrément ou d'autorisation des SAAD. L'Europe va nous demander de ne conserver qu'un dispositif. Pourquoi ? Quelques conseils généraux ont eu une attitude discriminante, ne traitant pas de la même manière les services du privé et les services associatifs ou publics. Les services privés ont engagé une procédure devant la CJCE, et ils vont obtenir gain de cause. Or les dispositions que vous nous proposez ne règlent en rien ce problème de discrimination. En outre, elles ne permettront pas aux personnes d'exercer leur libre-choix car, sur certains territoires, les services privés pourraient avoir des difficultés à entrer dans le nouveau système d'autorisation.

Pour terminer, j'apporte mon soutien aux propos de la présidente sur la problématique des personnes handicapées et âgées pour lesquelles nous aurons aussi à trouver des solutions. Le groupe Les Républicains soutiendra vos amendements sur ce sujet.

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