Madame la présidente, monsieur le rapporteur, je tiens à vous remercier pour ce rapport qui traite d'un sujet essentiel, et je regrette de ne pas avoir pu participer – comme je l'aurais souhaité – aux travaux de la mission.
On le sait, les moments de rupture dans l'organisation des cursus sont délicats à appréhender et participent au décrochage. Mieux gérer ces transitions, mieux accompagner les élèves, mieux les préparer, voilà qui ne peut que contribuer à la démocratisation de la réussite.
Cette démocratisation est bien le défi que devons relever aujourd'hui car, cela a déjà été dit ici même, notre système scolaire reproduit et aggrave les inégalités sociales – et cela vaut aussi pour le lycée et l'enseignement supérieur. Les choix d'orientation – si l'on peut parler de choix – en témoignent, ainsi que l'existence de filières d'excellence où la sélection est reine, notamment dans le supérieur. Mais on peut aussi, comme l'a fait notre rapporteur, évoquer cette filière « S », qui est à la fois une filière d'élite et, souvent, un non-choix.
Oui, il est grand temps de s'intéresser aux questions de la sélection, de l'orientation, des liens entre lycée et enseignement supérieur. Pour que la massification des études supérieures s'accompagne d'une démocratisation de la réussite, il convient en effet de changer d'approche. Je partage donc l'esprit de ce rapport, les constats qu'il dresse et une grande partie de ses préconisations.
Je pense aux propositions concernant le lycée, notamment celles qui tendent à renforcer la mixité sociale, les passerelles entre filières et entre séries, ainsi que l'accompagnement personnalisé. À cet égard, le modèle du lycée polyvalent, ou la mise en place d'un système plus modulaire, sont des idées à approfondir.
C'est en étant le plus à l'écoute des souhaits des élèves, en personnalisant leurs parcours et en cessant de les mettre dans des cases que nous progresserons. D'où l'importance de développer les passerelles, de réfléchir en termes de parcours de formation et non plus de filières, et de mettre en place des systèmes plus flexibles.
En France, la course au diplôme le plus prestigieux et obtenu le plus tôt possible empêche tout droit à l'erreur. Ce fameux diplôme, obtenu ou non, qui vous suit tout au long de votre vie professionnelle, conserve aujourd'hui encore plus de poids que toutes les expériences engrangées par la suite. C'est une conception élitiste qu'il convient de changer.
Quant à la réforme du baccalauréat, s'il faut mettre fin aux compensations entre matières lorsqu'elles n'ont aucun sens, je ne suis pas certaine que la fixation de seuils éliminatoires soit une réponse appropriée. D'autres moyens existent pour mettre en avant les compétences et vérifier en même temps l'acquisition des connaissances, par exemple en valorisant les projets au long cours ou le travail collectif.
Par ailleurs, je partage pleinement la nécessité de travailler sur les transitions. C'est là un point capital. II faut, comme le rapport le propose, observer les initiatives qui existent sur le terrain, ne pas avoir peur d'être inventif, et faire en sorte que l'orientation représente l'aboutissement de choix éclairés et construits dans le temps.
L'orientation des élèves, la façon dont les choix sont menés constituent des enjeux déterminants, sur lesquels il faut encore beaucoup avancer pour que l'élève élabore son projet. Le parcours d'information va dans le bon sens et il serait utile d'avoir des retours de terrain sur sa mise en place. Les conseils d'orientation lycée-supérieur qu'il est proposé de créer semblent également être une idée intéressante.
Mais il faut aussi regarder de près les moyens dévolus à l'université, car les réformes pédagogiques préconisées ne seront pas possibles sans un plan de financement massif. Il y a en effet, aujourd'hui, deux poids et deux mesures, selon qu'il s'agit des moyens alloués aux universités ou aux filières sélectives. Il serait nécessaire de disposer, pour chaque filière, de plus de données sur le taux d'encadrement et sur le budget par étudiant dans chacune des filières : un étudiant en classe préparatoire coûte bien plus à l'État qu'un étudiant en licence ! Or, on reproche à l'université d'échouer à démocratiser la réussite, de mal préparer à la vie professionnelle, sans pour autant lui donner les moyens de le faire, et en continuant de privilégier les filières sélectives réservées à un petit nombre.
C'est toute cette logique qu'il faut revoir, c'est toute cette architecture de l'enseignement supérieur qui doit être remise à plat.