Le rapport aborde l'un des plus grands problèmes de la société française actuelle : l'entrée des jeunes dans le monde adulte, à l'heure où environ un quart d'entre eux sont sans emploi et où l'université, plutôt que de former des esprits éclairés en quête de savoir, peut devenir une échappatoire face à l'inactivité. La période visée – les trois années qui précèdent le baccalauréat et les trois qui le suivent – correspond à la tranche d'âge des 15-21 ans, au cours de laquelle les jeunes sont confrontés à de nombreuses transitions : l'exploration de l'univers du travail, l'apprentissage de la socialisation dans un collectif de travail, les premières expériences d'autonomie par rapport à l'environnement familial, qui se concrétisent par l'indépendance budgétaire et résidentielle. C'est au cours de ces années que se construit l'identité sociale et professionnelle de l'individu. Il est important de privilégier cette autonomie à développer afin de ne pas tomber sur un autre écueil : celui d'une « secondarisation » de l'enseignement supérieur.
C'est dans cette optique que le rapport préconise une « meilleure association des représentants du monde professionnel dans la définition des formations ». Plusieurs propositions sont formulées dans cette perspective et font écho aux pistes offertes par les systèmes éducatifs nordiques, performants en la matière.
La qualité de la formation dans ces pays réside dans la multiplication des passerelles entre formation professionnelle initiale et formation secondaire générale. Le Danemark a lancé en 2010 un nouveau parcours de formation sur quatre ans, assurant à la fois l'accès à une formation professionnelle initiale qualifiante et la maîtrise des connaissances de la formation secondaire générale. De même, un autre programme baptisé « EUD 10 » offre aux élèves en première année de secondaire, c'est-à-dire âgés de 16 ou 17 ans, la possibilité d'essayer – avec droit à l'erreur – plusieurs formations professionnelles initiales afin d'identifier celle qui leur convient le mieux.
Dans les pays nordiques, chercheurs et doctorants sont également invités à susciter des vocations au sein de l'école. Pour reprendre la formule citée par Frédéric Reiss, c'est « l'inspiration d'abord pour qu'il y ait transpiration par la suite »…
Je suis réservé, en revanche, sur la notion de pédagogie appliquée à l'enseignement supérieur. Je comprends l'esprit dans lequel elle est mise en avant, mais, étymologiquement, paidia ageïn, c'est-à-dire « mener les enfants », me semble inadapté à l'enseignement supérieur où les enseignants-chercheurs tentent, au contraire, de stimuler et d'accompagner l'autonomie des étudiants.
Cela étant, je me félicite, monsieur le rapporteur, des propositions que vous avez formulées, en espérant qu'elles auront prochainement une traduction législative et qu'elles seront réellement expérimentées. La condition étudiante en France serait-elle à redéfinir à l'aune de ce rapport ? Il y a, par exemple, des propositions en matière d'accompagnement personnalisé qui vont dans ce sens.