Intervention de Christiane Taubira

Séance en hémicycle du 17 juillet 2015 à 9h30
Adaptation de la procédure pénale au droit de l'union européenne — Article 5 a

Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice :

Le présent amendement n’a plus aucun secret pour personne, tant chacun a été soucieux, tout au long de nos débats, de vérifier que chaque mot, chaque virgule étaient conformes à notre préoccupation à tous de trouver le moyen de conjuguer la nécessaire protection des enfants – public très vulnérable – confiés à l’autorité publique à travers diverses institutions, notamment l’éducation nationale, et la préservation de la présomption d’innocence.

Il n’y a aucune inquiétude à avoir concernant la transmission de l’information quand il s’agit d’une condamnation : celle-ci étant publique, la transmission va de soi. Ce point ne fait donc pas débat.

En amont de la condamnation, en revanche, il y a les poursuites et l’enquête ; c’est là qu’intervient le principe de la présomption d’innocence. En même temps, nous avons tous le souci de protéger les enfants. La question qui se posait à nous était donc de savoir à quel moment et sous quelle forme devait s’effectuer la transmission d’information : nous devions à la fois éviter de faire courir des risques aux enfants en cas de signalement et dès lors qu’une démarche judiciaire était engagée, et nous assurer de ne pas mettre en péril des enseignants – ou d’autres personnels n’appartenant pas forcément à l’éducation nationale –, lesquels pourraient faire l’objet d’une dénonciation sans être coupables, sachant que les procédures judiciaires peuvent prendre des mois, voire des années. Il me semble que nous sommes parvenus à la bonne rédaction.

Vous disiez, monsieur de Ganay, que nous ne croyions pas en l’amendement qui a permis d’aboutir à cette rédaction. Je vous assure du contraire. Seulement, nous connaissions la difficulté de traiter ce sujet. Le Gouvernement n’a cessé de dire sa gratitude aux parlementaires qui, tout en exprimant explicitement et fortement leurs interrogations – parfois même leurs réticences, voire leur intention de refuser cet amendement –, ont accepté de nous faire confiance en adoptant l’amendement en question lors de la lecture précédente, tout en sachant que nous avions pris l’engagement d’y revenir et de travailler de nouveau sur le texte.

Nous disposons aujourd’hui d’un dispositif irréprochable : il traite de la question de la transmission, que ce soit au stade de l’enquête, de la poursuite et de la condamnation. S’agissant de ce dernier stade, je le répète, la question de la violation du secret professionnel ne se pose plus, dans la mesure où la condamnation est publique : les personnels destinataires de l’information ne sont pas tenus par le secret professionnel et n’encourent donc aucune des conséquences pénales liées à sa violation.

Nous sommes convenus que, au stade de l’enquête, le procureur de la République puisse apprécier la situation à partir des éléments qui sont à sa disposition et que, lorsqu’il existe des raisons sérieuses de soupçonner que, même avant l’engagement de poursuites, la personne mise en cause doit faire l’objet d’un signalement, ledit procureur fasse procéder à la transmission d’information. Je remercie les parlementaires d’avoir consenti à cette mesure.

Au stade de la poursuite, la possibilité de transmission de l’information est également prévue ; au stade de la condamnation, elle est obligatoire.

Nous avons distingué deux situations. Premièrement, celle des personnes en « contact habituel », dit le texte, avec des enfants et des adolescents, pour les cas d’infractions sexuelles et de violences. Dans ce cas, les dispositions sont plus fermes et plus impérieuses.

Deuxièmement, dans le cadre général prévu par l’article 11-2, il s’agit toujours des personnes en contact habituel avec des enfants et des adolescents, mais dans d’autres cas que les infractions sexuelles et les violences. Cela concerne l’ensemble des agents publics, et la transmission se ferait au stade de la mise en examen.

Le présent amendement vise, au final, à apporter quelques aménagements et précisions aux modifications introduites par la commission des lois après notre discussion du mois de juin.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion