Dans la lignée des interventions précédentes, j'incite notre Assemblée à beaucoup de prudence et de retenue dans ce domaine, qui connaît une inflation législative constante. Aujourd'hui, il me semble plus nécessaire de clarifier et d'appliquer les règles que de renforcer encore les contrôles.
Vous proposez, monsieur le rapporteur spécial, d'organiser une transparence accrue en obligeant les partis politiques à remettre un rapport semestriel sur leurs comptabilité. Au secours ! Pourquoi pas un rapport trimestriel ou mensuel ?
Dans les communes rurales de 1 000 à 9 000 habitants, il sera absolument impossible de trouver un mandataire financier pour chaque candidat. Votre proposition trahit une méconnaissance des réalités du monde local. Pourtant, vous êtes maire. D'autre part, je ne suis pas sûr que les problèmes de transparence et d'organisation de la vie politique se trouvent principalement dans ces communes.
En revanche, vous êtes passé très vite sur une question pourtant essentielle à mes yeux : la clarification de la jurisprudence, qui est devenue incompréhensible. Aujourd'hui, il est impossible de savoir ce qui relève ou non des dépenses de campagne, ce qui doit ou non être imputé sur les comptes. Par exemple, en cas de déplacement, les frais d'hébergement ne sont pas considérés comme des dépenses de campagne. Quelle est la justification de cette règle ? De même, certains frais de déplacement peuvent être pris en compte, d'autres non.
L'élection de certains de nos collègues du Sénat a été annulée, alors que leur intégrité n'a absolument pas été mise en cause et qu'il n'y a pas eu le moindre doute quant à l'usage de l'argent. Seulement, il est désormais impossible de s'approprier les règles d'une complexité sans nom établies par la jurisprudence !
En outre, les comptes de campagne de certains collègues ont été réformés. Ainsi, la CNCCFP a refusé de considérer comme une dépense électorale la location d'une voiture au motif que le candidat n'avait pas déclaré la totalité des kilomètres parcourus dans le cadre de sa campagne. Ce collègue va devoir prendre lui-même en charge 6 000 euros supplémentaires !
La jurisprudence est devenue folle ! Je souscris entièrement aux propos de Patrick Ollier : c'est la démocratie des juges ! C'est inacceptable ! Il faut clarifier les règles, car l'incertitude juridique actuelle est très forte et néfaste. Or, vous n'avez fait qu'une seule proposition en la matière, monsieur le rapporteur spécial.
Par ailleurs, vous ne vous êtes pas prononcé sur l'éventuelle évolution des plafonds applicables aux dons. Actuellement, en France, les plafonds sont bas, ce qui garantit que personne n'est en mesure de dominer un parti ou de lui dicter sa ligne. En contrepartie, une certaine confidentialité est assurée aux donateurs. Souhaitez-vous en rester à ce cadre – ce qui me semblerait le plus raisonnable ? Ou bien souhaitez-vous changer d'approche, en relevant substantiellement les plafonds et en imposant, en contrepartie, une transparence complète ?
Enfin, vous avez abordé la question des associations qui ne sont pas déclarées en tant que parti politique de manière un peu prude. Or, celles-ci posent en réalité beaucoup plus de problèmes que les micropartis en termes de transparence : elles peuvent recevoir des dons qui dépassent les plafonds – les donateurs ne demandant pas de réduction d'impôt –, elles ne publient aucune information sur leur activité et elles ne sont pas contrôlées. Un certain nombre de responsables politiques, y compris de premier plan – je ne citerai pas de noms, mais nous en avons tous en tête –, recourent à des structures de ce type. Or, ils peuvent ainsi se retrouver dans la main de grands donateurs qui les contrôlent totalement. Ces structures sont bien plus néfastes. À une époque, Manuel Valls avait d'ailleurs dénoncé ces dérives.