François Hollande, lors de son discours d’inauguration du musée de l’histoire de l’immigration, le 15 décembre 2014, sept ans après l’ouverture de cet établissement au public, rappelait à juste titre l’apport des immigrés et des enfants d’immigrés aux sciences françaises, à la physique, à la chimie et aux mathématiques. Il évoquait tous ces étrangers, tous ces immigrés qui ont fait la fierté de la France, tous ces Prix Nobel et ces récompenses glorieuses, de Marie Curie, née Maria Sklodowska, à Artur Avila, franco-brésilien et lauréat de la médaille Fields. À l’heure où nous ouvrons le débat dans cet hémicycle sur le texte relatif au droit des étrangers, il est important d’avoir ces noms à l’esprit pour mieux avoir conscience non seulement de l’apport de l’immigration mais aussi d’un fait incontournable : des millions de Français ont des ascendants d’origine étrangère. Rappelons-le tout particulièrement à ceux qui oublient à quel point l’immigration est un élément constitutif de notre identité nationale.
Car ce débat, le débat sur l’immigration, a lieu dans un contexte dramatique, sur fond de guerres sanglantes et de crises humanitaires. La Méditerranée est devenue un cimetière marin, après une année 2014 où plus de 3 200 personnes sont mortes et plus de 130 000 ont été secourues, sans parler de drames plus lointains, dans le Sud-Est asiatique par exemple.
Prendre le chemin de l’exil, de l’exode, du départ, est une expérience des plus difficiles qui soient. Que peut-on faire face à cet immense défi ? Ce n’est assurément pas l’ambition de ce projet de loi que de répondre à cette question. On le sait, la crise humanitaire et migratoire que nous connaissons relève de la responsabilité de l’ensemble de l’Union européenne. Et vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, la position de la France est singulière dans le concert des nations.
Mieux intégrer et mieux expulser, c’est ainsi que l’on peut résumer l’équilibre du texte. L’une des mesures phare de ce projet de loi est un titre de séjour pluriannuel de quatre ans maximum, à mi-chemin entre l’actuelle autorisation d’un an et la carte de résident de dix ans.
Monsieur le ministre, vous avez parfaitement décrit la situation en exposant que les étrangers sont soumis à « un parcours administratif de combattant ». On dénombre 5 millions de passages en préfecture, alors que les étrangers titulaires d’un titre de séjour valable dix ans sont à peine 1,8 million. Les 700 000 étrangers titulaires d’un titre de moins d’un an doivent ainsi se rendre à la préfecture six ou sept fois par an pour se mettre en règle.
Votre diagnostic est donc juste. Nous espérons néanmoins que, sous couvert de désembouteiller l’administration, la carte pluriannuelle, renouvelable, ne devienne pas un moyen facile pour l’administration de limiter le nombre de cartes de résident de dix ans. Certes, vous avez donné des garanties, monsieur le ministre, qui semblent satisfaire notre rapporteur, mais entre les paroles d’un ministre qui passe et les pratiques des préfectures, il y a parfois un abîme...