Intervention de Pascal Cherki

Séance en hémicycle du 21 juillet 2015 à 15h00
Droit des étrangers — Article 2

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascal Cherki :

Je veux poser au ministre des questions d’ordre juridique. L’article L. 122-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile pose un principe : un étranger qui a résidé de manière légale et ininterrompue en France pendant les cinq années précédentes acquiert un droit au séjour permanent sur l’ensemble du territoire français. À la base de notre droit, il y a donc la durée de séjour régulier. C’est d’ailleurs pour cela que le projet de loi gouvernemental ne remet pas en cause les trois paliers de un, cinq et dix ans : plutôt que de prévoir cinq passages en préfecture, il vise simplement à regrouper les démarches en créant une carte de séjour pluriannuelle. Voilà ce qui justifie le palier de dix ans.

Au fur et à mesure, on a ajouté des conditions à la délivrance d’une carte de résident. Je rappelle que la condition relative à la maîtrise de la langue a été instaurée dans le cadre du contrat d’accueil et d’intégration, issu d’une loi de 2006 votée par une majorité de droite et qui, à l’époque, n’avait pas fait l’unanimité au sein des rangs de la gauche. Certains parlementaires, qui appartenaient alors à l’opposition, avaient développé les mêmes arguments que notre collègue Robiliard et manifesté de nombreuses réticences : sans nier le fait qu’il est utile et souhaitable de bien maîtriser le français, ils s’interrogeaient sur le lien automatique entre la maîtrise de la langue française et l’octroi de la carte de résident. La loi de 2006 venait en effet ajouter une condition à la délivrance de cette dernière.

Vous n’avez pas le droit contre vous, monsieur le ministre, puisque la directive européenne de 2003 permet de définir des conditions préalables d’intégration exigibles pour l’octroi du statut de résident. Comme la loi de 2006, la disposition que vous proposez à l’alinéa 2 est donc parfaitement conforme à l’article 5, paragraphe 2, de la directive de 2003. Un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 4 juin 2015 vient d’ailleurs de le confirmer, à propos de la loi néerlandaise infligeant une amende aux étrangers ayant déjà le titre de résident qui ne passent pas un examen de connaissance de la société néerlandaise.

La question que je vous pose est double, monsieur le ministre.

Premièrement, ne trouvez-vous pas préférable de dissocier, un peu sur le modèle de la loi néerlandaise, l’accès au statut de résident, qui doit rester fondé sur une durée de séjour régulier attesté, et les conditions d’intégration ?

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