Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure, chers collègues, je tiens tout d’abord à excuser l’absence de ma collègue Véronique Massonneau, qui devait initialement prendre la parole sur ce texte et qui ne peut malheureusement être parmi nous aujourd’hui.
Elle aurait souhaité dire combien ce projet de loi est une bonne nouvelle… en réponse à une bonne nouvelle – il est suffisamment rare de tenir un tel discours à cette tribune pour le souligner !
Car, oui, l’espérance de vie augmente dans notre pays : on vit plus longtemps, et c’est tant mieux. En 2035, les plus de soixante ans représenteront ainsi plus de 30 % de la population française. Nos systèmes de santé et de protection sociale ont permis cette évolution et nous ne pouvons que nous en réjouir.
Bien sûr, ce constat ne doit pas faire oublier un autre enjeu, celui de l’espérance de vie en bonne santé, lequel doit nécessairement appeler une meilleure prise en compte des défis posés par la santé environnementale comme la qualité de l’air ou celle de notre alimentation, pour ne citer que ces deux exemples.
En matière de santé environnementale, en effet, les marges de progression sont immenses et il incombe au législateur ainsi qu’à l’ensemble des acteurs de notre société de prendre la mesure de ces défis qui touchent particulièrement les personnes fragiles, donc, les personnes âgées, comme nous l’ont rappelé les derniers épisodes de pollution de l’air.
Toujours est-il que pour le moment, en France, l’espérance de vie augmente. Ce constat implique des transformations dans notre société car une population qui vit plus longtemps, c’est une population qui doit s’adapter aux conséquences de ce vieillissement sur son mode de vie, sur notre mode de vie.
Je parle bien de « notre » mode de vie car il ne s’agit pas de demander aux plus âgés de s’adapter à la société : inversement, c’est à notre société, c’est à nous de nous adapter aux besoins de ces personnes.
C’est tout le mérite de ce projet de loi, qui a pour ambition non de se concentrer uniquement sur les personnes âgées et sur les professionnels qui les accompagnent mais d’inclure chaque citoyen dans la prise en compte du vieillissement et de mobiliser toute la société afin qu’elle s’adapte à ces contraintes – je pense, par exemple, à l’adaptation des logements aux besoins de la personne, à leur accessibilité pour les personnes en perte de mobilité mais, aussi, à l’accessibilité de leur environnement tant urbain que rural.
Je pense également à la nécessaire organisation du soutien des aidants familiaux ou, encore, à l’aide au maintien à domicile, souhait souvent exprimé mais trop souvent refusé car les conditions de ce maintien ne sont pas rendues possibles.
Voilà autant de mesures qui doivent se concrétiser dans les faits pour répondre aux besoins de ces personnes.
Ces objectifs, que nous défendons depuis longtemps, nous les retrouvons dans ce texte et c’est une très bonne chose car il s’agit de voir bien plus loin que les seuls objectifs économiques, que certains appellent la silver economy.
L’objectif premier doit être de renouer les liens humains avec des personnes souvent délaissées et, par exemple, de permettre aux personnels soignants et aux aides à domicile de prendre le temps de nouer un vrai contact avec les personnes les plus âgées, souvent isolées et en manque d’interactions sociales dans une société où tout va toujours plus vite.
Ces dernières années, la question du vieillissement n’a été traitée que d’un point de vue financier. Si ces considérations sont importantes, elles ne font pas tout. Je salue donc l’esprit de ce texte, qui va enfin bien au-delà, même si nous aimerions aller plus loin encore, avec la mise en place d’un véritable service public de l’autonomie.
J’en profite aussi pour saluer le relèvement du plafond de l’allocation personnalisée d’autonomie, qui constitue l’une des avancées majeures et concrètes de ce texte. C’est l’une des réussites de la gauche au pouvoir en 2002, que je suis fière de pouvoir consolider aujourd’hui. La revalorisation à hauteur de 30 % des heures d’aide à domicile supplémentaires est une excellente nouvelle, qui favorisera le maintien à domicile et renforcera le lien social avec les personnes les plus fragiles.
Je tiens également à saluer la réintroduction de la reconduction automatique de l’aide à la complémentaire santé, l’ACS. Cette simplification des démarches est une bonne chose pour les personnes âgées, qui sont soumises à des formalités administratives si contraignantes, que certains retraités aux petits revenus renoncent parfois aux soins. C’est là un enjeu de simplification et d’accès au soin auquel nous apportons une réponse concrète.
En revanche, nous avons quelques inquiétudes concernant la fusion annoncée des maisons départementales des personnes handicapées – MDPH – au sein des maisons de l’autonomie. Nous souhaitons avoir la garantie que ces structures englobantes apporteront les mêmes qualités de services et d’accompagnement aux personnes en situation de handicap. Nous défendrons en ce sens un amendement sur les MDPH, pour nous assurer que la prise en compte du vieillissement ne se fasse pas au détriment de l’accompagnement des personnes en situation de handicap.
D’une manière générale, je regrette la quasi-absence de prise en compte dans ce texte des personnes en situation de handicap, qui sont pourtant tout aussi concernées par les problématiques liées au vieillissement. La question de la mobilité des personnes âgées fait en effet écho à celle des personnes en situation de handicap. Je tiens à ce titre à rappeler combien j’ai regretté l’adoption cet été du projet de loi ratifiant l’ordonnance relative à l’accessibilité. Il n’est pas acceptable que, de dérogation en dérogation, de délai supplémentaire en délai supplémentaire, l’accessibilité des transports, des voiries ou des établissements recevant du public soit sans cesse reportée. Cette situation conduit à l’exclusion d’un nombre trop important de nos concitoyens à mobilité réduite, qu’ils soient en situation de handicap, âgés, ou même, dans certains cas, les deux à la fois. Nous ne pouvons pas faire de grands discours prônant la société inclusive – discours auxquels je m’associe – sans dénoncer cette contradiction.
Je m’adresserai enfin à vous, madame la ministre : pouvez-vous nous donner des garanties, s’agissant du maintien des financements des structures d’accueil et d’aide aux personnes âgées, notamment dans le contexte de la réforme territoriale et des profondes modifications relatives à la compétence des différentes collectivités ?
La question du vieillissement, notamment en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes – EHPAD – n’est pas à prendre à la légère, car c’est une source d’inquiétude pour de nombreuses familles, du fait du manque de places, mais aussi d’un coût qui s’avère trop souvent exorbitant, comme d’autres collègues l’ont souligné.
Vous l’aurez compris, chers collègues, malgré ces quelques points, sur lesquels nous restons vigilants et attendons des clarifications, nous abordons l’examen de ce texte avec intérêt et enthousiasme. Nombreux sont les Français et les Françaises qui attendent que nous soyons à la hauteur de cet enjeu majeur.