Intervention de Laurence Rossignol

Séance en hémicycle du 16 septembre 2015 à 15h00
Adaptation de la société au vieillissement — Article 32

Laurence Rossignol, secrétaire d’état chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie :

Prenons un peu de recul et revenons un peu en arrière pour comprendre ce que nous sommes en train de faire. Sans vouloir porter atteinte d’une quelconque façon au dispositif Borloo, à son caractère novateur, à sa réussite, on peut néanmoins se poser la question de savoir s’il était judicieux de l’appliquer aux services d’aide aux personnes les plus vulnérables. Si cela était à refaire, peut-être n’agirions-nous pas de même.

Le succès du dispositif Borloo tient en très grande partie au fait qu’il a permis de développer de nombreux services à la personne. Cependant, le jardinage n’est pas tout à fait la même chose que l’aide à domicile auprès de personnes âgées ou de personnes handicapées dont nous n’avons pas manqué de rappeler la vulnérabilité.

En tout état de cause, la coexistence des deux régimes existe. Elle est une donnée sur laquelle les parlementaires, bien avant que je ne sois responsable de ces sujets, se sont penchés. Les sénateurs comme les députés ont publié de nombreux rapports qui tous ont abouti à la même conclusion, celle-là même que vous évoquez dans votre exposé sommaire : à savoir que l’existence d’un double régime juridique n’est pas une situation satisfaisante, ce que, au demeurant, personne ne conteste.

Dès lors se dégagent trois options. La première est le statu quo. Cela revient à constater que la situation n’est pas satisfaisante, mais que, tout compte fait – courage, fuyons –, nous pouvons encore nous en accommoder pendant quelques années.

La deuxième option consiste à faire le choix du régime d’agrément pour l’ensemble des services. La troisième, à opter pour l’autorisation. La commission des affaires sociales du Sénat a eu une position pour le moins radicale en proposant que tout le monde bascule dans l’autorisation tarifée, sans prévoir d’expérimentation et en fixant un délai, pas très long, à 2021.

Cette position présentait deux risques : provoquer une inflation des dépenses des départements liées à la tarification ainsi qu’une déstabilisation du secteur dans la mesure où l’amendement n’était assorti d’aucune disposition d’amortissement, de transition.

Je rappelle que la commission des affaires sociales du Sénat reflète la majorité politique du Sénat. Les deux rapporteurs du Sénat à l’époque étaient présidents de conseil général : l’un, de votre formation politique, monsieur Richard, et l’autre de la mienne. Ils ont travaillé en osmose et défendu les mêmes dispositions.

Après le vote de la commission des affaires sociales, nous avions dit que le changement de régime juridique nous paraissait brutal et comportait des risques inflationnistes et de déstabilisation du secteur.

Nous avons donc retravaillé en nous appuyant sur les rapports parlementaires, avec les députés et les sénateurs qui suivent ces sujets depuis longtemps. Mais durant ce laps de temps, nous ne sommes pas restés sans rien faire depuis 2012. Je rappelle qu’un fonds de restructuration doté de 130 millions d’euros a permis de soutenir 1 400 services publics associatifs ou privés commerciaux. Le critère d’aide retenu – ce qui est tout à fait légitime lorsqu’il s’agit d’argent public – était que le service intervienne à plus de 70 % auprès des publics fragiles.

Nous avons constaté que le fonds de restructuration avait probablement aidé une série de structures à passer les trois ans qui viennent de s’écouler, mais qu’il n’avait rien restructuré. Les difficultés étaient destinées à perdurer et on aurait pu abonder chaque année le fonds de restructuration. Or, à un moment donné, il faut avoir le courage de trouver des solutions durables.

Dans les solutions de restructuration, j’évoque les services polyvalents d’aide et soins à domicile – les SPASAD – qui sont très probablement l’un des principaux outils que nous ayons à notre disposition à l’avenir. Nous en parlerons à l’article 34.

Nous sommes arrivés à la conclusion qu’il fallait repositionner le secteur en opérant un basculement de l’ensemble des services dans le régime de l’autorisation, mais, comme vient de le dire Mme la rapporteure, en portant une attention toute particulière aux services d’aide à domicile qui, aujourd’hui, relèvent de l’agrément. Et en basculant pour quinze ans les agréés d’aujourd’hui, nous leur offrons incontestablement une certaine sécurité.

Les amendements que le Gouvernement a déposés et que nous examinerons tout à l’heure visent à améliorer l’article 32 bis. Il se trouve que cet article a donné lieu à de nombreuses interprétations erronées, je le dis très clairement. L’ensemble des fédérations a été reçu par moi-même et mon cabinet. Durant tout l’été, nous avons conduit un travail avec les parlementaires. Je considère donc que, grâce aux amendements qui ont été déposés, nous offrons un système sûr pour l’ensemble des structures, protecteur des finances publiques des départements.

Pour tout vous dire, je suis pour le moins étonnée de voir repris un certain nombre d’arguments qui ont été développés par une partie des entreprises agréées, et de constater que les questions de la maîtrise de l’offre et de l’obligation des départements, lesquels doivent assurer la couverture territoriale accessible à tous, aient complètement disparu de nos débats. Nous ne pouvons pas simplement être les représentants d’une partie du secteur de l’aide à domicile.

Nous sommes aussi en charge des finances publiques et nous avons l’obligation de donner aux départements, qui ont vocation à organiser cette offre, les moyens d’assurer au mieux leurs responsabilités.

Nous devons avoir à l’esprit plusieurs critères : la sécurisation de l’ensemble de l’existant ; la maîtrise des dépenses publiques des départements ainsi que la capacité des départements à assurer la couverture territoriale de l’accès aux soins à domicile. Tels sont les trois critères qui sont les nôtres aujourd’hui.

Après que l’Assemblée aura repoussé, ce que je souhaite, les amendements de suppression de l’article 32 bis, nous pourrons envisager d’aboutir à la cohérence et à la sécurité du système.

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