Intervention de Emmanuel Macron

Réunion du 15 septembre 2015 à 15h00
Mission d'information commune sur la banque publique d'investissement, bpifrance

Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique :

En ce qui concerne la gouvernance, il convient de distinguer le cas de Bpifrance de celui de l'AFD, qui me semble d'une nature très différente, compte tenu de leurs modalités d'intervention et de l'adossement recherché. Il en va du « 50-50 » actuel comme des gardes partagées : tout dépend de la discipline des deux parents. Sans doute peut-on améliorer et clarifier les règles de nomination afin d'aboutir à un meilleur équilibre. Mais les questions importantes sont celles de savoir si nous avons le bon niveau d'information, si nous savons définir les bonnes orientations et si nous savons nous-mêmes, État et Caisse des dépôts, ce que nous voulons et ce que nous voulons mesurer. Lorsque nous serons irréprochables dans ce domaine, nous pourrons être plus encore rigoureux avec l'opérateur. Pour aller au bout de ma pensée, cette question ne me semble pas être la priorité du moment, dès lors que l'action de cet opérateur public est un succès, y compris sur le terrain. En revanche, pour avoir été moi-même confronté à certaines incohérences optiques, j'estime également nécessaire, M. Emmanuelli, la clarification des rôles respectifs des différents acteurs que vous appelez de vos voeux.

Comment les choses s'articulent-elles ? La Banque publique d'investissement a vocation à financer les TPE et les PME et à investir dans des entreprises innovantes et stratégiques, notamment pour accompagner des entreprises vers des investisseurs privés de long terme. Dans le cas d'Ingenico, auquel vous avez fait allusion, c'est de cela qu'il s'agit : accompagner une entreprise en « haute mer » en recourant à Bpifrance faute d'avoir trouvé dans un délai bref un investisseur de long terme. L'APE, quant à elle, intervient dans le secteur des actifs stratégiques et des grandes entreprises. Mais il est vrai que les portefeuilles respectifs des deux opérateurs recèlent des incohérences et que, dans ce domaine comme en matière de gouvernance, une clarification est nécessaire. Je partage donc votre opinion sur ce point, M. Emmanuelli : nous devons clarifier la répartition des rôles, notamment parce que, pour des raisons historiques, certains actifs se trouvent dans le portefeuille de l'un ou de l'autre alors qu'ils ne correspondent pas à leur mission.

Quant au fonds de retournement, j'y suis, pour être clair, favorable. Vous avez raison d'indiquer que le FCDE n'en est pas un à proprement parler. Actuellement, nous utilisons le FDES et l'Aide à la réindustrialisation (ARI), qui sont des mécanismes discrétionnaires, à notre main, pour accompagner des retournements. Par ailleurs, certaines expériences sont concluantes. Deux régions, Rhône-Alpes et Franche-Comté – et j'ai écrit à leurs présidents pour que l'on puisse étudier la manière dont nous pourrions développer et généraliser leurs initiatives – sont parvenues à mettre en place des fonds régionaux de retournement. Nous réfléchissons donc – et mon engagement sur ce point est plein et entier, car je veux que nous aboutissions – à la création d'un fonds de retournement qui pourrait être détenu à 49 % par l'État, Bpifrance et les régions, et à 51 % par le privé. Nous ne développons pas suffisamment cette action, dont nous avons pourtant besoin.

En revanche, M. Emmanuelli, nous ne nous retrouverons peut-être pas sur les fonds de fonds. La logique est totalement différente. Lorsque l'on intervient à travers des fonds de fonds, on participe à l'écosystème de financement de l'économie. Aussi est-ce une bonne chose, me semble-t-il, que de ne pas intervenir dans leur gestion. Tout d'abord, nous ne pouvons pas interférer avec les règles d'indépendance et le contrôle qui relève de l'AMF. Ensuite, l'objectif de ces acteurs dépend de ce qu'ils ont vendu à leurs actionnaires, et nous avons décidé en conscience de cofinancer ces fonds. On peut donc éventuellement se demander, dans le cadre de la stratégie de Bpifrance, si l'on y met trop d'argent ou pas assez, mais il ne faut pas essayer de tuer deux oiseaux avec la même pierre et chercher à faire, à travers le financement des fonds de fonds, ce que l'on doit faire en direct. Là, nous contribuons à l'accélération du développement d'un écosystème de financement privé.

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