Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, chers et chères collègues, la représentation nationale est saisie d’un projet de loi relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine. C’est un moment important, un moment attendu. Certains diront qu’il y a d’autres priorités. C’est vrai : il y a bien des urgences démocratiques, des urgences sociales, humanitaires dans notre pays et de par le monde, mais, pour y répondre, il importe que les libertés soient garanties.
Oui, face aux conservatismes, aux totalitarismes, aux reculs de la pensée, il est urgent d’inscrire dans la loi de notre République la liberté de création et de donner à cette liberté les moyens de résister à toute tentative de la cadrer ou de la museler.
La culture a ce pouvoir fantastique d’être en partage. Sans la liberté de création, il n’y a pas d’émancipation ni d’empreinte de l’humanité. Et c’est ce levier qui est aujourd’hui, comme dans tous les moments noirs de l’histoire, la cible de ceux qui veulent assassiner la liberté pour asseoir leur domination.
Palmyre en est un symbole, Daech l’a détruite comme il tue, avec barbarie. Rappelons-nous, en 2001, l’Afghanistan, la destruction des bouddhas de Bâmiyân, et l’enfermement des femmes afghanes. N’oublions pas non plus les autodafés de l’époque de l’Inquisition.
Oui, liberté de création et liberté tout court sont inséparables. On peut évoquer l’interdiction faite à Molière de jouer Tartuffe ou plus récemment, la velléité de quelques élus de dicter aux populations ce qui est bien pour elles en matière culturelle, en décidant de la déprogrammation d’un artiste ou des achats de livres dans les bibliothèques ou encore, il y a peu, les dégradations d’une oeuvre d’art dans le parc du château de Versailles.
La République ne peut souffrir de censure d’où qu’elle vienne. Pour être pleinement égale et fraternelle, elle a besoin de liberté. La création artistique est et doit rester une dimension essentielle « de l’émancipation individuelle et de la citoyenneté » comme l’affirme à juste titre l’exposé des motifs du projet de loi qui nous est soumis. Notre commission a eu raison de maintenir, sans ajout ni condition, l’article 1er, affirmant la liberté de création.
Une liberté de création allant de pair sans se confondre avec la liberté d’expression, creuset de notre République. Une liberté d’expression qui a besoin des citoyens, des citoyennes, des auteurs, des éducateurs et des journalistes. Madame la ministre, l’examen de cette loi est une nouvelle fois pour moi, l’occasion de vous redire l’urgence d’inscrire à l’ordre du jour de notre assemblée la loi sur la protection des sources des journalistes, adoptée par notre commission.