Intervention de Virginie Duby-Muller

Séance en hémicycle du 28 septembre 2015 à 16h00
Création architecture et patrimoine — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVirginie Duby-Muller :

Présenté comme un des marqueurs culturels de ce quinquennat, le texte sur lequel nous commençons à débattre aujourd’hui révèle la grande fragilité de la politique culturelle du Gouvernement. Bien que pavé de bonnes intentions, ce projet de loi se limite pourtant à de grandes déclarations, sans vision d’ensemble ni perspective pour ce domaine si particulier, si singulier qu’est la culture française.

Il s’agit d’abord de relever un manque global de soutien financier. Si le budget de la culture en 2015 a été sanctuarisé, il entérine néanmoins des crédits en chute libre : sur les trois derniers exercices, les moyens sont en effet en baisse puisqu’entre la loi de finances pour 2012 et le projet de loi de finances pour 2015, les crédits de paiement de la mission « Culture » ont été réduits de 166 millions d’euros, soit une baisse de 6 % en trois ans ! Par ailleurs, madame la ministre, alors que vous confiez un rôle accru aux collectivités territoriales en matière de protection du patrimoine, l’État diminue leurs dotations ! Ce désengagement, qui inquiète des élus locaux de tous bords, induira un effet ciseau qui sera contre-productif.

Le texte que vous présentez aujourd’hui est l’incarnation du manque d’ambition de votre politique : celle-ci se limite à des aspects déclaratifs s’inscrivant dans une forme de droit mou, ainsi que l’a constaté le Conseil économique, social et environnemental. En outre, il s’agit d’un fourre-tout, un patchwork étendu sur un très vaste périmètre. Madame la ministre, quelques principes généraux ’ont malheureusement jamais fait une politique culturelle.

Je pense notamment à l’exploitation numérique de la musique : vous avez confié, au mois de mai, une mission parallèle à M. Marc Schwartz, que je salue pour ses travaux, alors que le projet était déjà en préparation. Pendant notre travail en commission, il y a deux semaines, lorsque nous parlions de la musique, des relations entre les producteurs et les musiciens, nous étions donc systématiquement renvoyés aux conclusions de la mission Schwartz, dont on vient d’apprendre l’échec. La question de la répartition des fonds provenant du streaming n’est par conséquent pas réglée et devra être tranchée dans l’hémicycle. Cela dénote un manque de méthode, de cohérence, voire un amateurisme ce qui a conduit à la situation ubuesque où nous nous trouvons aujourd’hui.

Enfin, à l’heure où la création et les modes d’accès à la culture sont révolutionnés par les nouvelles technologies, ce projet de loi aborde à peine la question du numérique et la contribution de ses acteurs au financement de la création. L’économie numérique, c’est pourtant le bouleversement de notre époque, et sa prise en compte, sa valorisation nécessitent évidemment l’adaptation des lois actuelles. Mais voilà encore un sujet éludé, ou plutôt reporté, qui laisse un manque important dans ce projet de loi, au profit de propositions avant tout cosmétiques ou d’affichage. On nous parle ainsi de politique culturelle, mais d’une manière lacunaire, ponctuelle, au fond sans créativité.

Espérons que les travaux parlementaires permettront de donner à ce texte un corps, une consistance.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion