Intervention de Virginie Duby-Muller

Séance en hémicycle du 28 septembre 2015 à 16h00
Création architecture et patrimoine — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVirginie Duby-Muller :

Il s’agira aussi de clarifier certaines mesures : je pense notamment aux contrats des artistes-interprètes et des artistes musiciens précisés à l’article 5. Vous avez accepté une première avancée sur le sujet en commission en approuvant un amendement précisant que les producteurs de musique adressent déjà des redditions de comptes semestriels aux artistes-interprètes et que cette obligation ne concernera pas, en toute logique, les artistes musiciens. Mais nous restons mobilisés sur de nombreux sujets et nous ne manquerons pas de faire des propositions pour donner une cohérence au texte.

Je souhaite aussi revenir sur un enjeu qui me tient particulièrement à coeur : celui de la copie privée. Le sujet est survolé dans le texte, qui reprend certes quelques propositions du rapport rendu en juillet dernier par Marcel Rogemont au titre de la mission d’information que je présidais. Ces propositions permettront d’améliorer la transparence, grâce notamment à la mise en place d’une base de données regroupant l’ensemble des sommes versées par les sociétés de perception et de répartition des droits au titre de l’action artistique et culturelle, ou encore de consacrer le quart du fruit des perceptions provenant de la copie privée à l’éducation artistique et culturelle.

Cependant, madame la ministre, trop de questions restent en suspens, auxquelles le texte ne parvient pas à répondre. Trente ans après sa création et en dépit de l’évolution dynamique des montants perçus qui, je le rappelle, s’élèvent tout de même à près de 235 millions d’euros par an, le dispositif de rémunération pour copie privée est confronté à des défis considérables : je pense notamment au développement du numérique et du cloud, qui révolutionnent les modes de copie et favorisent l’accès aux contenus en ligne. Le dispositif traverse aussi une crise importante, avec des difficultés de gouvernance, et est confronté à des questions comme la territorialité de la redevance ou le montant de la rémunération et son assiette, qui restent également problématiques.

Le temps est clairement venu de s’interroger sur ce dispositif et surtout de le moderniser, avec des avancées de bon sens en tenant compte des évolutions technologiques. Malheureusement, les amendements proposés par le Gouvernement et la majorité socialiste ne répondent que partiellement à ces enjeux. On nous a, par exemple, proposé un amendement actant la présence de représentants des ministères pour les études d’usages, sans demander expressément des experts reconnus logiquement pour leur compétence dans le secteur de l’industrie culturelle. Le récent rapport Maugüé demandait pourtant des études d’usages soumises à une vraie « expertise indépendante » via un collège de personnalités. Le rapport de Marcel Rogemont allait même plus loin en proposant la création d’une autorité administrative indépendante chargée de l’homologation des barèmes. Ces propositions récentes n’ont visiblement pas retenu l’attention du Gouvernement, et nous le regrettons.

La question de la copie privée est ainsi un exemple parmi tant d’autres du manque de vision stratégique de ce texte, qui rassemble des mesures éparses, sans cohérence globale, ne permettant pas de parler d’une réelle politique culturelle.

La culture n’est pas un luxe, c’est une nécessité. Pour citer André Malraux, « La culture ne s’hérite pas, elle se conquiert ». Madame la ministre, c’est justement une telle ambition que je réclame de votre part aujourd’hui pour donner au milieu culturel les moyens de se réformer, de s’épanouir et d’innover.

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