Intervention de Jean-Christophe Baudouin

Réunion du 16 septembre 2015 à 16h30
Commission d'enquête visant à évaluer les conséquences sur l'investissement public et les services publics de proximité de la baisse des dotations de l'État aux communes et aux epci

Jean-Christophe Baudouin, directeur des stratégies territoriales au Commissariat général à l'égalité des territoires, CGET :

Tous les chiffres dont nous disposons sont, en effet, de 2011 ou sont plus anciens. Le CGET se contente de traiter les données, mais ne les produit pas. Or l'INSEE préfère une consolidation complète avant toute transmission.

Observe-t-on une aggravation ou une évolution plus positive des inégalités ? En réalité, deux logiques sont à l'oeuvre. L'une s'attache au fait urbain, qui se développe partout. Les grands centres urbains portent la croissance, en particulier grâce à leurs centres universitaires. Mais il y a aussi dans ces agglomérations une hausse des bénéficiaires du RSA, car les marches, marges ou franges des aires métropolitaines les plus prospères peuvent abriter des poches de pauvreté. Cela témoigne d'une double capacité d'attraction et de répulsion. Du moins la loi sur les métropoles multiplie-t-elle déjà, monsieur le député, les possibilités d'interaction avec la périphérie.

Certes, dans beaucoup de pays européens, les grandes villes sont plus peuplées que les villes françaises. C'est le cas en Italie comme en Allemagne. Mais cela ne signifie pas qu'elles soient plus innovantes. La France compte des métropoles de 400 000 ou 500 000 habitants, telles Strasbourg, Montpellier, Nantes ou Bordeaux, où la French Tech s'affirme pleinement. La ville de Nantes est même souvent consultée – comme le fut autrefois et l'est encore aujourd'hui Fribourg – pour la qualité de son projet urbain. L'innovation territoriale n'est donc pas liée au nombre d'habitants ou à la taille, certaines zones extrêmement actives le montrent. De plus, la loi organise une dynamique de regroupement et de contractualisation. L'État propose des contrats de réciprocité qui mettent l'accent sur l'accord des centres avec leur périphérie, car une aire urbaine ne peut vivre sans son hinterland.

Quant aux CPER, je voudrais souligner que les volumes financiers annoncés vont susciter eux-mêmes près de un milliard d'euros de financement à l'échelle intra régionale. On voit que l'effet de levier fonctionne. J'ajoute que nous envisageons dans nos analyses tant la taille que la nature des investissements. Par le passé, tous n'ont peut-être pas renforcé l'attractivité des territoires. Si nous manquons encore d'instrument d'évaluation des politiques publiques, le Gouvernement nous a cependant demandé de procéder à des vérifications.

Un creusement des inégalités de revenus est, en effet, à déplorer, du fait de la hausse des plus élevés d'entre eux, notamment dans les régions frontalières. Ce sont non moins de 70 000 travailleurs frontaliers qui prennent, par exemple, chaque jour la direction du Luxembourg, car c'est de l'autre côté que se trouve la richesse. Cela se répercute aussi sur la richesse foncière. Chaque territoire doit cependant être examiné à part.

Le flux de RSA ne s'est pas tari. Toutefois, les métropoles présentent l'intérêt d'intégrer l'ensemble des faits sociaux et sociétaux présents sur leur aire géographique. Il ne faudrait pas que les problèmes sociaux ne soient pris en charge que par la périphérie, qu'elle soit lointaine ou proche, à parfois moins de vingt kilomètres du centre. Ce serait accepter la confrontation d'un monde de prospérité avec une altérité précaire. Nous devons travailler à l'éviter.

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