Intervention de Michèle Bonneton

Séance en hémicycle du 29 septembre 2015 à 15h00
Débat sur la situation et l'avenir de l'agriculture

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichèle Bonneton :

Devant l’urgence de la situation, le Gouvernement a pris des mesures qui étaient nécessaires, comme l’allégement des trésoreries, mais ce serait une grave erreur de s’en contenter. Tout juste ces mesures permettront-elles peut-être à nos agriculteurs de survivre jusqu’à la prochaine crise… Il faut donc envisager une remise sur pied durable du système agricole.

Nous disposons d’atouts considérables : une surface agricole importante – représentant près d’un demi-hectare par habitant –, une situation géographique et climatique favorable, qui permet une grande diversité de production, un savoir-faire issu de générations de paysans, des productions reconnues dans le monde entier, notamment grâce à nos labels de qualité, et une formation agricole que beaucoup nous envient.

Jusqu’à présent notre pays a également su résister, tant bien que mal, aux sirènes des OGM et du gigantisme en élevage, lequel fait fi du bien-être animal : un tel système, ainsi poussé à son paroxysme, n’apporte aucune solution.

L’agriculture industrielle et le système productiviste à tous crins ont depuis longtemps montré leurs limites. Les productions hors-sol, tels certains élevages, peuvent très facilement se délocaliser là où les coûts de production – main-d’oeuvre et aliments – et la protection de l’environnement sont plus faibles. La course au prix le plus bas est une impasse.

Il nous faut d’urgence dépasser ce modèle qui a entraîné une artificialisation des milieux, une utilisation généralisée de produits chimiques de synthèse – fortement émetteurs de gaz à effet de serre –, une dégradation prononcée, qui va devenir catastrophique, de notre ressource en eau, une chute de la biodiversité – songeons en particulier aux pollinisateurs – et une consommation considérable d’énergie fossile.

Le prix le plus bas – slogan habituel de la grande distribution – est un leurre. Ce que l’on ne paye pas directement, on le paye de manière plus sournoise : dans la destruction d’emplois, dans le trop bas niveau des salaires ou dans les externalités environnementales… Bref, ce que l’on ne paye pas en tant que consommateur, on finit par le payer en tant que contribuable, à travers ses impôts pour des réparations telles que la dépollution par exemple, ou en tant que citoyen, à travers entre autres les impacts sanitaires.

Nous vivons une époque mondialisée qui se caractérise par une grande volatilité des prix renforcée par des décisions contestables, comme la suppression des quotas laitiers décidée en 2008, et, parfois, par des problèmes géopolitiques impossibles à anticiper, comme le conflit en Ukraine.

Ensemble, nous devons résoudre une équation difficile et surmonter nos contradictions : promouvoir plus de libéralisme quand tout va bien, en ouvrant librement le marché à la concurrence, et demander par ailleurs plus d’interventionnisme quand cet excès de libéralisme entraîne des prix mondiaux non rémunérateurs.

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