Intervention de Fleur Pellerin

Séance en hémicycle du 30 septembre 2015 à 15h00
Création architecture et patrimoine — Après l'article 11

Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication :

La notion de territorialité du droit pose toutefois un problème majeur, vous en conviendrez : parce que les entreprises auxquelles vous faites allusion et qui gèrent ces plates-formes n’ont pas leur siège social en France, il est extrêmement difficile de leur imposer le respect d’une réglementation française. Nous rencontrons d’ailleurs cette difficulté dans beaucoup d’autres domaines.

Sachez par exemple que la France plaide depuis plusieurs mois auprès de la Commission européenne dans le cadre de la révision de la directive ad hoc pour qu’il soit permis d’imposer aux services de media audiovisuels en ligne – vous l’aurez compris, je fais allusion aux opérateurs tels que Netflix – les réglementations des pays de destination, c’est-à-dire des pays dans lesquels les oeuvres sont consommées ; Netflix serait ainsi contraint de respecter, en France, l’ensemble des obligations qui pèsent sur les diffuseurs d’oeuvres audiovisuelles français. Ce que nous essayons d’obtenir est un véritable renversement du droit en vigueur, puisque la réglementation appliquée aujourd’hui est non pas celle du pays de destination mais celle du pays d’origine, d’où la possibilité pour les entreprises d’optimiser leur implantation en choisissant les pays dans lesquels la réglementation est la plus souple ou la fiscalité la plus favorable.

La territorialité du droit est ce qui fait obstacle à ce que nous obtenions de ces opérateurs, de ces multinationales le respect du droit, des lois et règlements français. Nous n’arrivons pas non plus à leur imposer la contribution au financement de la création ni à les faire contribuer aux charges publiques au travers du versement de l’impôt sur les sociétés.

Je vous remercie donc d’avoir proposé cet amendement, car je partage totalement votre point de vue. Je constate d’ailleurs à cette occasion que vous êtes vous-même attaché à l’existence de quotas de musique française pour défendre la diversité de la création. Nous aurons l’occasion d’en reparler tout à l’heure. Si je partage totalement votre souhait, il me semble néanmoins que dans sa rédaction actuelle cet amendement risquerait de manquer sa cible et d’imposer des contraintes supplémentaires à des acteurs non pas étrangers mais français. C’est pourquoi je vous demande de bien vouloir le retirer. À défaut, l’avis sera défavorable.

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