Intervention de Fleur Pellerin

Séance en hémicycle du 1er octobre 2015 à 15h00
Création architecture et patrimoine — Article 20

Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication :

Voilà qui répond, en partie, à ce qu’a dit M. de Mazières. C’est donc la primauté de la démarche scientifique qui guide ce projet. L’archéologie préventive est le seul moyen de faire progresser l’histoire et de mieux nous connaître. C’est un bien commun et, à ce titre, un service public.

Par exemple, une fouille conduite par l’INRAP à Lavau, près de Troyes, a permis cet hiver de mettre au jour une nécropole active entre 1300 avant et 300 après Jésus-Christ, avec notamment une tombe à char monumentale comme il en existe très peu en Europe. Cette découverte scientifique considérable au plan international a été rendue possible grâce à l’archéologie préventive. Je sais que les élus locaux sont très attachés à la valorisation de telles découvertes ; je sais aussi que d’autres élus sont volontiers critiques, oubliant souvent que les délais sont strictement encadrés.

Mais les découvertes ne doivent pas masquer la réalité. Le fonctionnement de l’archéologie préventive depuis la loi de 2003, qui a conduit à une concurrence non régulée au regard des enjeux de service public, n’est aujourd’hui pas satisfaisant. Les excellents travaux menés par votre collègue Martine Faure, que je remercie chaleureusement à nouveau, l’ont clairement montré.

L’archéologie préventive est un service public qui fait intervenir des acteurs publics et des entreprises privées. Comme service public, elle doit être régulée : tel est l’objet de ce projet de loi. Ainsi, l’État sera le garant de la qualité scientifique en s’appuyant sur le rôle structurant que joue le Conseil national de la recherche archéologique – CNRA – et assurera une réelle maîtrise d’ouvrage scientifique. L’État assurera aussi un meilleur contrôle scientifique des projets présentés par les opérateurs, intervention en amont qui contribuera à réduire les délais. En effet, l’aménageur ne pourra plus retenir un opérateur qui risquerait ensuite d’être récusé par les services de l’État.

Troisièmement, la place particulière des collectivités territoriales est pleinement reconnue par les amendements déjà adoptés en commission. En outre, l’enjeu scientifique justifie pleinement la propriété publique du mobilier archéologique, qui constitue le bien commun de la nation. De grands savants viennent d’ailleurs de l’affirmer de nouveau dans le journal Le Monde daté d’hier, en déplorant que la propriété publique n’ait pas été instaurée plus tôt, à la différence de ce qui s’est fait dans de nombreux pays voisins.

Pour conclure, je dirai quelques mots des archéologues. Il faut penser à leur tâche, car ils travaillent dans des conditions difficiles. C’est un métier souvent pénible, où il faut aller vite – car les aménageurs sont légitimement pressés – et où il faut pourtant prendre le temps de fouiller, d’étudier, et de comprendre. L’archéologie, c’est souvent le métier d’une vie : c’est pourquoi il convient d’assurer des passerelles entre les différents acteurs publics et de renforcer les services régionaux de l’archéologie, afin de fluidifier et d’enrichir leur carrière. Comme je m’y suis engagée en commission, une concertation sera donc engagée d’ici la deuxième lecture, en lien avec ma collègue Marylise Lebranchu.

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