Je vais tout de même essayer de convaincre mon collègue Poisson car, me semble-t-il, il était favorable à la loi de 2005, précisée par la loi de 2008 à travers un article 37-3 du code de déontologie médicale. Comment le convaincre ?
En rappelant l’affaire Pierra, soit l’arrêt du traitement d’un patient incapable d’exprimer sa volonté, dont les lésions cérébrales étaient majeures et irréversibles, le corps médical ne l’accompagnant malheureusement pas par des soins et le laissant agoniser avec un encombrement pulmonaire et des convulsions, tout cela devant une famille impuissante. Cette situation est à mes yeux intolérable.
Lorsque l’on se trouve face à une personne cérébro-lésée, incapable d’exprimer sa volonté et dont le traitement de survie est interrompu, il est évident que l’on se doit de faire en sorte que sa fin de vie soit sinon sereine et apaisée, du moins, de ne prendre aucun risque potentiel de la faire souffrir.
En même temps, il convient d’accompagner la famille dans cette situation pour le moins difficile.
C’est ce que permet l’article 37-3 du code de déontologie, qui a été validé par le Conseil de l’ordre, par les sociétés françaises de soins palliatifs et par le Conseil d’État.
Cela a aujourd’hui force de loi, le code de déontologie servant éventuellement à déterminer des attitudes médicales, lesquelles sont validées devant les tribunaux.
Nous avons pensé qu’il était préférable d’inclure le contenu de cet article dans un dispositif adéquat dès lors qu’il se réfère à une éventualité qui est loin d’être négligeable puisque, nous le savons, des dizaines de milliers d’arrêts de traitements de survie – en particulier de respirateurs – se produisent en réanimation et qu’il n’est pas possible d’arrêter ces derniers sans faire un geste d’accompagnement et de sécurité visant à ne pas faire souffrir le patient. Le texte que nous proposons correspond à cette situation-là.
Je suis certain qu’en imaginant cette situation en réanimation, compte tenu de l’obligation d’arrêter un traitement parce qu’il serait déraisonnable qu’il en soit autrement, que l’accompagnement de la personne est obligatoire pour garantir à cette dernière – dans le respect de sa dignité humaine – l’absence de toute souffrance, vous ne pouvez qu’être convaincu, monsieur Poisson. Je connais, de surcroît, la pertinence de votre réflexion.