Intervention de Olivier Dussopt

Séance en hémicycle du 7 octobre 2015 à 15h00
Déontologie droits et obligations des fonctionnaires — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Dussopt :

Je suis, comme les orateurs précédents, très heureux que nous puissions enfin examiner le projet de loi relatif à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.

Deux ans après les lois du 11 octobre 2013 relatives à la transparence de la vie publique, ce texte en transpose les grands principes et les principales dispositions à la fonction publique, notamment pour ce qui est de la prévention des conflits d’intérêts. Trente ans après la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, le Gouvernement a souhaité actualiser et compléter les principes fondamentaux du statut général des fonctionnaires, alors même que ce dernier fait régulièrement l’objet d’attaques et de remises en cause. Le Gouvernement exprime ainsi, collectivement et avec force, son attachement à notre système de fonction publique. Nous considérons en effet que le statut général des fonctionnaires, héritier des grandes réformes engagées à la Libération, est fondé sur un réel équilibre entre les droits et les obligations de ces fonctionnaires, ce qui constitue un gage de continuité et de cohésion au service des citoyens et des collectivités publiques.

Le projet de loi que nous examinons aujourd’hui repose sur trois grands axes.

Le premier est la consécration de principes déontologiques dans le statut général des fonctionnaires. L’article 25 de la loi du 13 juillet 1983 reconnaîtra désormais explicitement des obligations déjà dégagées par la jurisprudence. Les fonctionnaires devront exercer leurs fonctions avec dignité, impartialité, intégrité et probité. Ils seront également tenus à l’obligation de neutralité et au respect du principe de laïcité. Tout cela figurait déjà dans la jurisprudence, mais méritait d’être affirmé en droit. L’article 1er du projet de loi précise aussi qu’il reviendra à tout chef de service de s’assurer du respect de ces principes par les agents placés sous son autorité.

Le texte introduit aussi, c’est à noter, la notion de conflit d’intérêts dans le statut général des fonctionnaires. En outre, il étend à d’autres fonctionnaires trois dispositifs déjà instaurés par les lois du 11 octobre 2013 à destination des plus hauts responsables publics : la déclaration d’intérêts, la déclaration de situation patrimoniale et la gestion sous mandat de certains instruments financiers, les deux derniers étant contrôlés par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

La réforme modifie également les règles de cumul d’activités applicables aux fonctionnaires et aux agents non titulaires de droit public selon deux principes fondamentaux, le respect de l’intérêt du service et la satisfaction de l’intérêt général, l’objectif étant de limiter les risques de conflits d’intérêts.

Le deuxième axe du texte relève de la modernisation des droits et obligations des fonctionnaires. Le projet de loi élargit le champ des personnes susceptibles de bénéficier de la protection fonctionnelle et celui des événements ouvrant droit à cette protection. En matière disciplinaire, la création d’un délai de prescription de l’action disciplinaire est actée – ce qui était attendu – tout comme l’harmonisation de l’échelle des sanctions entre les trois fonctions publiques.

Le troisième et dernier axe a trait à la volonté du Gouvernement de faire de l’État un employeur exemplaire. Concernant la situation des agents non titulaires, qui, comme le rappelait Françoise Descamps-Crosnier, occupent environ 17 % des emplois publics, le projet de loi oeuvre pour améliorer de manière concrète leur situation. Je ne retiendrai que deux points : le fait qu’un employeur public qui emploie un agent satisfaisant à la condition d’ancienneté requise du fait d’une succession d’emplois auprès de différents employeurs publics devra lui proposer la transformation de son contrat en CDI ; et le fait que la notion d’effectivité des services publics pour la transformation d’un CDD en CDI est supprimée. Tout cela participe, avec d’autres dispositions, à la résorption de la précarité dans la fonction publique et nous ne pouvons que nous en féliciter.

La commission des lois a considérablement étoffé et amélioré ce projet de loi, en particulier à l’initiative de notre rapporteure, François Descamps-Crosnier, dont je tiens à saluer le travail et la persévérance. Grâce à elle ont pu être intégrées dans le texte les dispositions issues d’une vingtaine d’articles de la première version du projet de loi qui avaient été supprimés par la lettre rectificative du Gouvernement. Pour être synthétique, ces évolutions portent surtout sur les questions de déontologie. À l’initiative de la rapporteure, nous avons notamment favorisé les échanges d’informations entre la commission de déontologie et la Haute Autorité et aussi renforcé les moyens de contrôle de cette dernière sur les déclarations de situation patrimoniale, tout en étendant l’obligation d’établir une déclaration d’intérêts et de patrimoine aux directeurs, à leurs adjoints et aux chefs de cabinet des exécutifs locaux.

S’agissant des droits et obligations des fonctionnaires, nous avons, encore à l’initiative de la rapporteure, réintroduit des dispositions relatives à la mobilité des fonctionnaires, notamment afin de simplifier la structuration des corps et cadres d’emplois autour des trois mêmes catégories hiérarchiques et de sécuriser les possibilités de mise à disposition hors de l’administration d’origine du fonctionnaire. Nous avons aussi généralisé au sein des sanctions du premier groupe l’exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours, qui n’existait que dans la fonction publique territoriale. Enfin, à l’initiative du groupe socialiste, nous avons amélioré la situation des lauréats dits « reçus collés » en prolongeant d’un an la durée de validité du concours et en mettant en place deux périodes de deux années reconductibles.

Enfin, s’agissant du devoir d’exemplarité de l’État, nous avons, comme cela a déjà été dit, abrogé la possibilité de recourir à l’intérim dans les fonctions publiques de l’État et territoriale et réintroduit les dispositions visant à améliorer les garanties de carrière des agents exerçant une activité syndicale dans la fonction publique. Je souligne, par parenthèse, que l’amélioration des garanties et la préservation des carrières sont une constante de l’action du Gouvernement : dans tous les textes relatifs à la décentralisation, les avantages acquis et les carrières ont été protégés par des articles spécifiques, de manière à éviter aux agents d’éventuelles mutations forcées dans le cadre de la réorganisation des collectivités territoriales.

Je terminerai en appelant l’attention de l’Assemblée et du Gouvernement sur un point : le principe d’égalité entre les membres coopérateurs dans les mutuelles et les sociétés mutualistes. En effet, en l’état actuel du projet de loi, il n’est pas respecté, puisque les fonctionnaires ne peuvent participer à un organe non exécutif d’une structure coopérative au nom de l’interdiction de cumul d’activités. Or, ce type de mandat n’est ni une activité professionnelle ni une activité lucrative. Les amendements que j’ai déposés, ainsi que ceux présentés par mes collègues Carrey-Conte et Juanico, permettront peut-être de revenir sur ce point.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion