Intervention de Simon Baldeyrou

Réunion du 30 septembre 2015 à 9h30
Commission des affaires économiques

Simon Baldeyrou, directeur général de Deezer France :

Je souscris à 100 % à tout ce que vient de dire Céline sur la vision qu'ont les Américains des Français : la taxation à 75 %, les trente-cinq heures, les mails après dix-huit heures… On peut faire beaucoup mieux en termes de communication pour montrer qu'en France, des sociétés réussissent, que des gens sont prêts à beaucoup travailler et qu'ils ont envie que les sociétés se développent.

Vous m'avez demandé comment on pouvait lutter contre des groupes mondiaux et se différencier par rapport à Google ou à Spotify. Il faut être malin. On est focalisé sur un seul sujet, on est innovant. Je pense que les sociétés françaises peuvent continuer à être particulièrement innovantes. En l'occurrence, nous n'aurons peut-être pas un service complètement globalisé ni le même partout. Chaque pays a ses spécificités propres, notamment dans la musique. La musique n'est pas universelle, ce n'est pas la même partout. Dans tous les pays du monde, la majorité des écoutes concernent des artistes locaux. Le monde n'est pas totalement unifié et il n'y a pas vocation à ce que tous les gens, dans tous les pays du monde, utilisent exactement les mêmes services.

Concernant l'adossement aux grands groupes, nous avons eu la chance de nous adosser à Orange, qui a été notre plus gros client pendant des années et qui a intégré dans ses offres celles de Deezer. Nous sommes l'exemple même d'une startup ayant réussi à s'associer à un grand groupe français et à trouver un modèle économique qui fonctionne. À l'époque, nous venions à peine de lancer nos abonnements ; nous avons créé une troisième voie, à savoir le fait que des opérateurs télécoms peuvent incorporer des offres de musique dans leurs offres tarifaires. C'est un modèle que nous avons développé dans une quarantaine de pays. Aujourd'hui, nous travaillons avec quarante opérateurs télécoms dans le monde, mais le premier à montrer l'exemple a été Orange.

Le fait que 50 % seulement des startups françaises utilisent le CIR et le JEI n'est pas simple à comprendre. C'est probablement parce que les entrepreneurs n'ont pas beaucoup de temps à consacrer à l'administratif. Tout ce qui peut simplifier sera bienvenu.

Pour ce qui est de la formation, j'ai une crainte pour les années à venir. Avec les nouvelles technologies, les gens vont devoir se former de plus en plus régulièrement. Les jeunes qui sortent d'une école d'ingénieurs étant formés aux nouvelles technologies, il faut impérativement que ceux qui sont déjà dans l'entreprise depuis cinq, dix ou quinze ans se forment en permanence. Si ce n'est pas le cas, il peut y avoir, dans le privé, des gens qui se trouvent au maximum de leurs capacités à trente ou quarante ans et sont ensuite dépassés. Dans le public, les carrières fonctionnent toujours à l'ancienneté. Le risque est de se retrouver en France avec un fossé entre le système privé qui, historiquement, employait des gens dont le salaire augmentait en fonction de l'ancienneté et un service public qui fonctionne toujours de cette façon. C'est ce qui me fait peur à très long terme, bien plus que le fait de se demander si les gens auront toujours le statut de salarié. Je pense que le modèle d'un salariat assez classique perdurera, contrat unique ou pas.

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