Intervention de Élisabeth Guigou

Réunion du 6 octobre 2015 à 17h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉlisabeth Guigou, présidente :

Mes chers collègues, nous accueillons Monsieur Mego Terzian, Président de Médecins sans frontières (MSF), Madame Claire Talon, membre du Bureau Maghreb et Moyen-Orient à la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH) et Monsieur Zias Al Issa, représentant l'Union des organisations de secours et de soins en Syrie. Je vous remercie d'avoir accepté notre invitation. Je précise que cette réunion est ouverte à la presse.

L'objet de notre réunion était initialement consacré à la situation en Syrie, mais compte-tenu de l'actualité récente il m'a paru opportun de l'élargir au bombardement de l'hôpital de Médecins Sans Frontières à Kunduz, en Afghanistan : ceci afin de témoigner tout d'abord notre solidarité à l'égard des victimes et de leurs familles et saluer le travail remarquable entrepris par Médecins sans Frontières dans ce pays et dans beaucoup d'autres. Cet hommage s'étend bien entendu à l'ensemble des personnels des ONG qui travaillent dans des conditions souvent extrêmement difficiles, parfois au sacrifice de leurs vies. M. Mego Terzian pourra naturellement éclairer notre commission sur les circonstances de ce bombardement à propos desquelles la France a demandé officiellement une enquête rigoureuse. M. Terzian pourra également délivrer le témoignage de son organisation à propos de la situation humanitaire en Syrie.

Sur la Syrie, je rappelle que le conflit aurait déjà fait plus de 240.000 morts depuis son éclatement en mars 2011. Sa violence s'est particulièrement accrue depuis février 2012, du fait de l'utilisation par le régime d'armes lourdes à l'encontre de sa population civile, - principale victime du conflit. Depuis lors, l'intensité des attaques n'a pas diminué. Les travaux de la commission d'enquête de l'ONU sur la Syrie soulignent régulièrement les multiples exactions commises par le régime de Bachar el-Assad et l'accusent de crimes de guerre – lesquels s'ajoutent à d'autres violations graves du droit international. Nous savons qu'il y a des crimes de guerre commis par toutes les parties au conflit et vous aurez certainement à coeur de le souligner. Mais d'après le Réseau Syrien des Droits de l'Homme, le régime porterait la responsabilité de 80% des victimes civiles syriennes aux forces gouvernementales. Partagez-vous cette conclusion ? Quelle est notamment l'ampleur des raids aériens du gouvernement syrien et des attaques au baril d'explosifs dont il est fait souvent état ? Que savez-vous également du nombre de victimes civiles dues aux bombardements américains ?

Je rappellerai aussi que le dossier chimique n'est pas clos. Si depuis le massacre chimique perpétré dans la Ghouta en août 2013, le démantèlement de l'arsenal chimique syrien déclaré est quasiment achevé, des doutes subsistent néanmoins sur son effectivité et son exhaustivité. La poursuite de l'usage de chlore a en effet été attestée par l'Organisation pour l'Interdiction des Armes Chimiques (OIAC) et la commission d'Enquête Pinheiro. Cette dernière reconnait d'ailleurs explicitement la responsabilité du régime.

J'évoquerai enfin les preuves qui s'accumulent contre le régime sur les actes de torture de civils à l'occasion de leur détention dans les prisons gouvernementales. Ces derniers sont relatés dans les multiples rapports de la Commission d'enquête de l'ONU (mais aussi de nombreuses ONG) et qualifiés explicitement de « crimes contre l'Humanité ».

A cet égard le rapport dit « César », du nom d'un ancien photographe de la police militaire syrienne qui a fait défection, vient corroborer les conclusions de la commission d'enquête concernant le recours systématique à la torture et les décès de détenus. Ce document rare, présenté devant le Conseil de Sécurité en avril 2014, compile plus de 55.000 clichés de détenus décédés, laissant apparaitre des signes de torture et de grave malnutrition. Sur la base des preuves accablantes apportées par le rapport, le Parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire pour « crime contre l'Humanité » le 15 septembre dernier après avoir été saisi par le Quai d'Orsay. Je passerai d'abord la parole à Monsieur Terzian pour commencer sur le bombardement de Kunduz et la Syrie, puis à Monsieur Al Issa pour prolonger l'analyse humanitaire et les violations du droit humanitaire en Syrie et enfin à Madame Talon, pour un point sur les violations des droits de l'homme et notamment le rapport César.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion