Vos rapporteurs ont d’ailleurs souligné longuement, et en détaillant ses effets, tout l’intérêt de ce transfert qui ne coûte rien mais sécurise l’avenir.
Deuxième point : ces résultats, nous les obtenons principalement par des économies sur la dépense.
Je voudrais prendre un peu de temps pour expliquer pourquoi ces économies, concernant la sécurité sociale comme l’ensemble des administrations publiques, sont indispensables.
En 2016, nous réaliserons au total 16 milliards d’euros d’économies au titre du plan de 50 milliards d’euros sur trois ans. Dans ce total, la contribution des administrations de sécurité sociale atteindra 7,4 milliards d’euros, pour l’essentiel dans le champ de la sécurité sociale proprement dit, le reste sur les régimes gérés par les partenaires sociaux.
Le champ de la sécurité sociale contribue donc fortement à l’amélioration globale du déficit public. C’est le fruit d’une politique résolue d’économies, sans sacrifier les droits des assurés et en maintenant notre priorité en faveur des Français les plus modestes.
Le rythme d’évolution des dépenses sociales prévu pour 2016 sera le plus faible enregistré depuis au moins vingt ans : 0,5 % seulement d’augmentation pour le régime général l’année prochaine, contre 0,8 % en 2015.
Faire des économies, c’est d’abord assurer aux Français que les dépenses sont efficaces et que leur argent est bien utilisé.
Ces économies sont, par exemple, réalisées sur les niches sociales. Dès lors que nous avons mis en place des allégements massifs de droit commun, nous sommes fondés à revoir certaines exonérations critiquées dans leurs caractéristiques ou inefficaces dans leurs effets.
II s’agit par exemple des exonérations applicables en outre-mer, qui seront réduites pour certaines entreprises – les grandes et celles peu exposées à la concurrence – et augmentées pour d’autres, là où il y a des enjeux en termes d’emploi et de croissance. II s’agit aussi de certaines exonérations « zonées » qui seront fermées pour l’avenir.
Ce choix est-il fondé sur un constat objectif et réfléchi ? Oui, puisque plusieurs rapports, de la Cour des comptes ou d’origine parlementaire, mettent en évidence la complexité et le coût de ces dispositifs.
Cette suppression a-t-elle un effet nocif pour l’emploi ? Non, puisque, comme le précisent ces mêmes rapports, les salaires les plus faibles bénéficieront des allégements généraux de cotisations.
Le volet fiscal de ces dispositifs est-il en cause ? Non, car seul le volet social a fait l’objet des critiques que j’évoque.
Cette suppression pose-t-elle un problème de sécurité juridique ? Non, puisque la fermeture du dispositif est sans effet sur les contrats en cours.
Sur ce sujet, plus encore que sur d’autres, j’incite chacun à faire preuve de cohérence. On ne peut pas sans cesse se poser la question de l’efficacité des exonérations et ne pas tirer les conséquences qui s’imposent lorsqu’on nous démontre de manière évidente que certaines sont moins efficaces que d’autres. Nous irons au bout de cette démarche.
Sur les dépenses d’assurance maladie, se fixer un objectif de progression inférieur à la tendance naturelle des dépenses, c’est également faire des économies. Il s’agit de s’assurer que les dépenses sont faites à bon escient, par exemple que les médicaments ne sont pas payés trop cher, ou qu’il n’y a pas d’actes et de prestations réalisés inutilement. Il s’agit aussi de rechercher la meilleure organisation des professionnels de santé, au sens médico-économique. Bref, il s’agit d’aller vers une meilleure qualité des soins au meilleur coût. C’est tout le sens du virage ambulatoire conforté par la loi de santé et dont les conséquences économiques sont intégrées au plan ONDAM 2015-2017.
Faire des économies, c’est revoir régulièrement nos modes d’intervention pour choisir les plus efficaces et les plus économes. Ces économies se fondent sur des diagnostics sérieux, établis notamment à partir des revues de dépenses lancées par la loi de programmation des finances publiques, adoptée l’année dernière.
C’est aussi réformer en profondeur. Ainsi, le projet de loi de finances, dont la première partie a été adoptée aujourd’hui même, prévoit une réforme des modalités de revalorisation de l’ensemble des prestations sociales. Cette réforme est également inscrite dans ce PLFSS pour les prestations qui en relèvent.
Le 1er avril, le Gouvernement aurait dû diminuer les prestations familiales de 0,7 point s’il avait appliqué strictement les dispositions en vigueur, qui prévoient une correction en cas d’inflation inférieure aux prévisions. Nous avons choisi de ne pas l’appliquer, mais il faut modifier cette règle pour l’avenir. Par ailleurs, les dates de revalorisation sont différentes selon les prestations – il y en a cinq au total –, de même que les indices pris en compte pour le calcul.
C’est pourquoi nous formulons deux propositions.
La première consiste à retenir seulement deux dates de revalorisation en les regroupant au 1er octobre pour les retraites, sans changement, et au 1er avril, qui est d’ores et déjà la date de revalorisation de la quasi-totalité des prestations de sécurité sociale, pour toutes les autres prestations.
La seconde proposition vise à supprimer tout risque de régularisation négative, puisque, dans le nouveau système, la revalorisation se fera uniquement en fonction d’évolutions connues, et non plus prévisionnelles. Cette réforme est neutre à long terme, l’inflation constatée et l’inflation prévisionnelle convergeant sur longue période. Elle conduit, du fait de la très faible inflation que nous connaissons actuellement, à un impact sur les finances publiques de l’ordre de 500 millions.
Enfin, je tiens à revenir sur les 7,4 milliards d’économie réalisés dans la sphère sociale en 2016. En effet, des interrogations se sont élevées sur ce point et je ne veux pas qu’il n’y ait pas d’ambiguïté sur la réalité de ces économies.
Le rapporteur pour avis de la commission des finances, dans son excellent rapport sur le PLFSS, se félicite, au-delà du détail des mesures, du réel ralentissement de la dépense sociale sur les dernières années.
Ces mesures se décomposent de la manière suivante : 3,4 milliards d’économies sur l’ONDAM, 1 milliard qui correspond à l’impact en 2016 de mesures déjà décidées – notamment en matière de politique familiale, du fait de la modulation des allocations familiales votée l’an dernier, qui produit des effets croissants en 2016, et de la montée en charge des mesures de la loi retraite, notamment de l’impact de la réforme du cumul emploi retraite et du décalage de la date de revalorisation des pensions du 1er avril au 1er octobre –, et 3 milliards correspondant à d’autres mesures.
En voici le détail : 500 millions sur les dépenses de gestion des organismes de protection sociale, 500 millions au titre de la réforme des modalités de revalorisation des pensions, déjà évoquée, 300 millions liés aux mesures de lutte contre la fraude et au ralentissement des dépenses d’action sanitaire et sociale des organismes, 1 milliard d’économies attendues à la suite de la négociation entre les partenaires sociaux au titre de la réforme des retraites complémentaires. À cet égard, et sous réserve des conclusions à venir, les grandes lignes de l’accord qui s’est esquissé en fin de semaine dernière devraient conduire à un résultat très proche de notre prévision. S’y ajoutent enfin 800 millions de nouvelles économies dans le champ de l’assurance chômage. C’est ce qui reste à confirmer en fonction de l’évolution de la négociation.
En troisième lieu, il me faut rappeler que, si nous faisons ces économies, c’est d’abord pour nous donner les capacités de financer notre politique et de nouveaux droits. Faire des économies, c’est aussi recréer des marges de manoeuvre pour financer nos priorités. C’est vrai pour l’État, que j’ai eu l’occasion d’évoquer devant votre assemblée, et pour la Sécurité sociale.
Il s’agit d’abord de financer notre politique de santé et de protection sociale. Notre démarche ne sacrifie pas les droits des assurés ; bien au contraire, elle les renforce.
Plusieurs mesures, que Marisol Touraine a présentées, améliorent les prestations aux assurés. Je pense notamment aux mesures de prévention de l’obésité ou du cancer du sein, à la création d’une garantie de pension alimentaire pour les familles monoparentales et aux mesures en faveur de l’accès des retraités et des salariés précaires à une complémentaire santé.
En matière de santé, par exemple, l’ONDAM est fixé pour 2016 à 185,2 milliards, soit 3,3 milliards de plus qu’en 2015. Je ne suis pas sûr que tout le monde en ait conscience, mais nous dépenserons en 2016 3,3 milliards de plus pour la santé des Français. Je l’explique souvent : les économies consistent à ralentir l’augmentation spontanée des dépenses et non à en réduire la valeur – alors même que, dans un autre champ, les dépenses de l’État baissent en valeur.
D’aucuns considèrent parfois que ce ne sont pas là de vraies économies. Il est pourtant évident que lorsqu’on dépense moins que le niveau auquel nous amènerait la tendance « sans rien faire », alors que la population augmente, que les soins et les produits de santé coûtent plus cher et que les Français vivent plus longtemps, c’est que, indubitablement, on a fait un effort d’économie.
S’agissant de l’assurance-maladie, je souligne que depuis 2012, l’objectif de dépense a été respecté chaque année et que nous avons pris toutes les dispositions afin de respecter l’objectif pour 2015. Publié le 7 octobre, l’avis du comité d’alerte – qui mériterait peut-être un autre nom – confirme cette maîtrise et valide en outre la construction de l’ONDAM pour 2016.
Un objectif d’augmentation de 1,75 % est exigeant. C’est d’ailleurs le taux le plus bas depuis la création de l’ONDAM, en 1997, mais il a été fixé en garantissant le respect de la qualité des soins aux assurés.
Par ailleurs, nous mettons en oeuvre des mesures en faveur de nos concitoyens.
Je pense d’abord à la suppression des cotisations minimales d’assurance maladie pour les exploitants agricoles et pour les travailleurs indépendants. Il s’agit d’une proposition du rapport des députés Sylviane Bulteau et Fabrice Verdier remis au Premier ministre. Elle s’inscrit dans une refonte plus globale des cotisations sociales payées en cas de revenu très faible. Nous proposons ainsi d’améliorer les droits à la retraite des travailleurs indépendants qui se trouvent dans cette situation.
Je pense aussi à la réduction du délai de carence pour le bénéfice des indemnités journalières. Les cotisations minimales du RSI seront plus faibles, plus justes et plus lisibles.
Ces économies nous permettent de financer notre politique économique en poursuivant la baisse des prélèvements sur les entreprises et les ménages. Le PLFSS met en oeuvre les mesures du pacte de responsabilité prévues pour 2016.
Je sais que, comme l’année dernière, nous reviendrons dans nos débats sur l’opportunité des baisses de cotisations sociales ou encore de la suppression progressive de la C3S. Comme j’ai eu l’occasion de le dire lors de la discussion générale du projet de loi de finances, nous attachons un prix élevé à la stabilité des orientations données en matière de prélèvements obligatoires.
S’agissant de l’existant, notre politique est simple et consiste à maintenir les dispositifs qui fonctionnent, tout en veillant à ce qu’ils restent utilisés pour satisfaire leurs objectifs initiaux. Je pense notamment au crédit impôt recherche, mais aussi au CICE, dont la transformation en allégement de cotisation est une perspective à terme. Ce dispositif ne doit pas être remis en cause alors même que les entreprises sont en train de se l’approprier pour de bon, comme le montrent les chiffres relatifs aux créances de 2015.
Nous mettons en place depuis deux ans une politique économique qui suit un cap clair et nous nous y tenons. Dès le mois d’avril 2014, le Premier ministre a annoncé dans sa déclaration de politique générale ses orientations et celles de son Gouvernement. J’invite chacun de ceux qui participent à nos débats à y revenir, pour constater que ces engagements ont été tenus.
Le texte soumis à votre examen met en oeuvre ces orientations. En 2016, nous prévoyons de réaliser pour les entreprises pas moins de 9 milliards d’allégements supplémentaires, auxquels contribueront deux mesures.
La première, la baisse de 1,8 point de cotisations sociales pour les salaires inférieurs à 3,5 SMIC, sera réalisée à compter du 1er avril. Pour une enveloppe constante, ce décalage permet de tenir compte des mesures décidées cette année en faveur des entreprises et dont certaines bénéficient dès 2015, comme le sur-amortissement, pour un coût de 500 millions par an.
La seconde est la baisse de la C3S, qui se poursuit. Comme l’année dernière, nous avons fait le choix d’un abattement en portant celui créé en 2014 de 3,5 millions à 19. Le choix de ce paramètre a deux mérites. Il favorise les TPE et les PME, en exonérant totalement 80 % des entreprises qui restaient redevables. Il fait profiter les entreprises industrielles d’une proportion importante de l’exonération, plus précisément de 250 millions sur un total d’un milliard. Celles-ci reçoivent ainsi plus que leur part dans la valeur ajoutée.
Enfin, nous menons cette politique pour financer notre modèle social et assurer sa pérennité. Vous ne manquerez pas de relever que, comme l’an dernier, c’est l’État, et non la Sécurité sociale, qui supporte intégralement le coût des baisses de recettes liées au pacte.
Je me souviens des questions qui avaient été soulevées en juin 2014 sur la réalité et l’ampleur de cette compensation. Aussi je tiens à souligner que, là encore, les engagements qui avaint été pris ont effectivement été tenus.