La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
La parole est à M. Bruno Nestor Azerot, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Madame la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, la dengue ou « grippe tropicale » est l’arbovirose la plus répandue dans le monde. Selon l’Organisation mondiale de la santé, plus de deux milliards de personnes sont exposées au risque de la dengue, soit les deux cinquièmes de la population mondiale, et il pourrait y avoir chaque année 50 millions de nouveaux cas de dengue à travers le monde.
La maladie est endémique dans plus de 100 pays d’Afrique, des Amériques, de la Caraïbe, de la Méditerranée orientale, de l’Asie du sud-est et du Pacifique occidental. La France est très exposée, puisque le virus circule désormais, de manière sporadique, voire endémo-endémique, dans vingt départements français de métropole, dans les départements français d’Amérique et de la Caraïbe – Guyane, Martinique et Guadeloupe –, dans les départements de l’Océan indien – Réunion et Mayotte –, et dans les territoires du Pacifique – Polynésie et Nouvelle-Calédonie. Je rappelle qu’en 2010, en Martinique, quinze personnes sont mortes.
Jusqu’à maintenant aucun vaccin n’existait. Mais ce n’est plus le cas. Les laboratoires de Sanofi Pasteur ont pu en mettre un au point, qui, en l’absence d’agrément européen, ne peut être mis en service en France. Ce vaccin français ne sera pas utilisé en France et dans les outre-mer français, mais au Mexique, dès le mois prochain, et dans la Caraïbe anglaise, en 2016. Cette situation est ubuesque et dramatique ! Madame la ministre, que comptez-vous faire pour que ce vaccin issu de la recherche française sauve des vies françaises ?
Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
La parole est à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
Monsieur le député, vous avez parfaitement raison de souligner l’enjeu que représente la dengue, alors que nous ne le faisons pas suffisamment dans l’Hexagone. Cette épidémie touche la moitié de la population mondiale et, dans les territoires d’outre-mer, nos compatriotes y sont exposés. La dengue rend malade et elle tue parfois. Face à cette situation, nous avons un espoir puisque, comme vous l’avez souligné, le laboratoire Sanofi Pasteur est en train de développer le premier vaccin au monde qui permettra de lutter contre les quatre formes de virus. J’ai eu l’occasion de visiter l’unité de Lyon où est fabriqué ce vaccin, en compagnie notamment de la ministre mexicaine de la santé.
Sanofi Pasteur n’a pas demandé d’autorisation de mise sur le marché européen de ce vaccin ; c’est pourquoi la procédure n’a pas été enclenchée. Il faut qu’une demande soit formulée pour que les autorités européennes, puis françaises puissent se prononcer. Dans le cas d’une épidémie exceptionnelle, le gouvernement français pourrait, comme les textes l’y autorisent, prendre des mesures exceptionnelles, passant par exemple par une utilisation de ce vaccin. Vous le voyez, monsieur le député, nous sommes déterminés, attentifs et mobilisés, mais nous espérons, bien sûr, que notre pays n’aura pas à connaître d’épidémie de dengue dans les prochains mois.
La parole est à M. Joël Giraud, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Ma question s’adresse à monsieur le ministre de l’intérieur.
L’attentat déjoué dans le Thalys, le 21 août dernier, a démontré la nécessité d’adopter des mesures supplémentaires pour garantir notre sécurité collective. Celles-ci doivent répondre à une triple exigence, parfois contradictoire : nous rendre moins vulnérables devant le risque terroriste ; garantir la fluidité du trafic ; ne pas être attentatoires aux libertés publiques. Même si le risque zéro n’existe pas et même si la vigilance collective des citoyens, ainsi que l’ont montré les courageux passagers et le contrôleur du Thalys, demeure une indispensable constante de la sécurité publique, les contrôles doivent être intensifiés pour réduire la menace.
Depuis que vous êtes en responsabilité au ministère de l’intérieur, vous avez fait de la sécurité dans les transports en commun un élément majeur de votre action, en liaison avec les ministres successifs en charge des transports. À cet effet, vous avez ressuscité le Comité national de sécurité des transports en commun, qui ne s’était réuni qu’une seule fois depuis sa création en 2008, un paradoxe pour un organisme annoncé à l’époque en grande pompe et qui a vocation à traiter de nombreux sujets, très au-delà de la seule problématique du terrorisme.
À cet égard, la question de la fraude dans les transports est déterminante. Dans son rapport annuel, la Cour des comptes a évalué à 500 millions d’euros par an – 300 millions pour la SNCF, 100 millions pour la RATP et 100 millions pour les transports urbains de province – le montant de cette fraude. Ce manque à gagner est partout et toujours compensé par les usagers honnêtes et les contribuables. La fraude prive les entreprises de transports de moyens précieux pour investir dans nos territoires, dans nos régions et pour améliorer la qualité de service au bénéfice des usagers. Au-delà de l’aspect financier, elle crée un malaise, un sentiment d’abandon pour ceux qui règlent leurs billets, un sentiment d’insécurité quand votre rame est envahie par des individus dont le respect d’autrui n’est pas la préoccupation première.
Monsieur le ministre, vous avez donc réuni hier, pour la deuxième fois, le Comité national de sécurité des transports en commun. Que peuvent concrètement en attendre les millions d’usagers quotidiens ? Quelles mesures pragmatiques comptez-vous prendre, avec quel calendrier de mise en oeuvre, pour que nous soyons plus efficaces face à la fraude et à l’incivilité, et mieux protégés contre la menace terroriste ?
Applaudissements sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et sur plusieurs bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Monsieur le député, vous venez de rappeler l’attentat déjoué du Thalys. Comme vous le savez, dans la foulée de cet événement terrible, Alain Vidalies et moi-même avons réuni l’ensemble des ministres de l’Union européenne en charge des transports ou de l’intérieur, de manière à poursuivre un travail que nous avions engagé au sein du Comité national pour la sécurité des transports, travail destiné, à travers un ensemble de mesures nouvelles, à lutter contre les incivilités, contre les violences de toutes sortes dans les transports publics et contre le terrorisme. Au cours de la réunion qui s’est tenue hier, nous avons mis en perspective un ensemble de mesures, en présence de Gilles Savary qui a mis sur le métier à l’Assemblée une proposition de loi très utile, sur laquelle il a beaucoup travaillé – et je tiens à le remercier pour son engagement.
Tout d’abord, il s’agit pour les agents de la SUGE – la surveillance générale – et du GPSR – le groupe de protection et de sécurisation des réseaux –, c’est-à-dire les agents des organismes de sécurité de la SNCF et de la RATP, de pouvoir procéder à des inspections visuelles, à des fouilles, à des palpations de sécurité sur des passagers. Si ces derniers refusent, ils ne pourront pas prendre les transports en commun. L’objectif est d’assurer la sécurité, notamment face au risque terroriste. Les officiers et les agents de police judiciaire auront les mêmes prérogatives.
Nous avons également souhaité que les procédures soient considérablement simplifiées : désormais, c’est le procureur de la ville de départ ou de la ville d’arrivée qui sera en situation de donner des autorisations générales pour l’ensemble des réquisitions alors que jusqu’ici, il fallait une autorisation des procureurs des villes traversées. C’est donc un élément de simplification considérable.
Pour lutter efficacement contre la fraude, qui représente 500 millions de pertes pour les entreprises de transport, nous avons décidé de faciliter l’accès à un certain nombre de fichiers.
L’ensemble de ces mesures doivent permettre de lutter efficacement, avec détermination et fermeté, contre toutes les formes d’insécurité dans les transports en commun.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Dimanche dernier, la Chancelière allemande, à l’occasion d’un déplacement à Istanbul, a proposé au Président Erdogan d’accélérer le processus d’adhésion de la Turquie à l’Union européenne en échange d’une meilleure coopération sur la question des réfugiés syriens.
Monsieur le Premier ministre, le gouvernement français soutient-il cette initiative ? Mme Merkel parlait-elle au nom de l’Union européenne ? Si ce n’est pas le cas, le gouvernement français a-t-il demandé des explications à la Chancelière allemande ?
Mme Merkel ne peut pas, après avoir grand ouvert aux réfugiés les portes de l’Allemagne, et donc de l’Europe, sans la moindre concertation avec ses partenaires, tenter de rattraper cette erreur en proposant un marchandage sur une adhésion de la Turquie à l’Union européenne qui n’est ni possible, ni souhaitable.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Depuis 2005, grâce notamment à l’initiative du Président Chirac, un référendum est nécessaire en France pour valider toute adhésion nouvelle. Chacun sait donc que le moment venu, la France opposera son veto à l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Dans ces conditions, je considère qu’il est dangereux de laisser ce marchandage se perpétuer. La Turquie est un grand pays, un pays avec lequel l’Europe doit compter. Mais je pense que ce n’est pas rendre service à la Turquie, ni à l’Europe d’ailleurs, que de lui mentir sur son avenir.
Pourquoi alors n’avez-vous pas arrêté les négociations quand vous étiez aux responsabilités ?
Monsieur le Premier ministre, c’est une question essentielle qui concerne l’avenir du continent européen et de la civilisation européenne : je vous demande de clarifier devant l’Assemblée nationale la position de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur plusieurs bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.)
Monsieur le député (« Monsieur le Premier ministre ! » sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains), la Turquie…
Mêmes mouvements.
« Ah ! » sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains
Mesdames, messieurs les députés de l’opposition, je débats suffisamment avec François Fillon, et de manière courtoise, pour que vous me permettiez de lui répondre, d’autant plus que c’est une question lourde.
Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen. « Dehors ! » sur certains bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
C’est une question lourde, disais-je, et je vais y répondre précisément.
La Turquie, vous l’avez dit, est un grand pays et un partenaire stratégique de la France et de l’Union européenne, notre allié au sein de l’OTAN depuis 1952 et engagé depuis plusieurs années dans un processus de rapprochement avec l’Union européenne. La Turquie se trouve au coeur d’enjeux stratégiques majeurs, notamment s’agissant du conflit syrien. Elle est soumise à d’importantes pressions, qu’il s’agisse du flux de réfugiés – elle accueille aujourd’hui sur son territoire plus de 2,2 millions de personnes – ou du terrorisme – comme le drame d’Ankara l’a rappelé il y a quelques jours. La Turquie doit par ailleurs clarifier ses objectifs par rapport à ce qui se passe en Syrie.
Le contexte politique en Turquie est sensible à l’approche des élections législatives du 1er novembre, et personne ici ne méconnaît la situation actuelle et les débats qui ont lieu au sein de la société turque. Notre intérêt commun est de poursuivre le dialogue engagé depuis plusieurs années et de la soutenir dans l’effort qu’elle fournit aujourd’hui pour l’accueil des réfugiés syriens. Car si nous ne la soutenons pas, ainsi que d’autres pays que je ne veux pas oublier – le Liban et la Jordanie –, nous savons que la crise des réfugiés que nous connaissons en Europe sera encore plus dramatique et plus grave. C’est pourquoi le Conseil européen du 15 octobre a décidé la mise en place d’un plan d’action entre l’Union européenne et la Turquie afin d’approfondir notre coopération. Il s’agit de garantir des conditions de vie dignes et humaines aux réfugiés accueillis sur le sol turc, de lutter contre les réseaux de passeurs et de renforcer le contrôle des frontières extérieures. De son côté, l’Union européenne apportera également un soutien financier accru à la Turquie pour l’aide humanitaire et sous forme de fonds qui permettront de développer l’hébergement, l’insertion professionnelle et la formation des réfugiés. Cette aide est également nécessaire au Liban et en Jordanie.
Vous l’avez dit, la Turquie est un grand pays, et nous savons que quand il faut chercher une solution pour la Syrie, nous avons besoin, comme vous le rappelez souvent, de discuter avec toutes les grandes puissances, notamment avec les pays voisins de la Syrie, ce qui est son cas.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
L’engagement de l’Europe est à cet égard indispensable. Il ne modifie cependant pas notre position vis-à-vis de la Turquie pour avancer dans la libéralisation des visas et dans le processus de négociation de l’adhésion. En tant que pays candidat, la Turquie est engagée dans une négociation selon des règles qu’elle a elle-même acceptées. Nous souhaitons que les pourparlers avancent dans les domaines où elle est prête.
Depuis 2005, quatorze chapitres sur trente-cinq ont été ouverts, et un a été fermé. Même si ce n’était pas votre question, je rappelle que onze des chapitres ouverts l’ont été sous la présidence de Nicolas Sarkozy, quand vous étiez Premier ministre, et un seul l’a été depuis l’arrivée de François Hollande à la Présidence de la République. Le Chef de l’État l’a rappelé : l’issue de ces négociations est incertaine, la question de l’adhésion turque reste une perspective de long terme qui devra, le moment venu, être approuvée par le peuple français. Il ne peut donc y avoir aucun marchandage, aucun chantage, mais il y a nécessité d’apporter une aide à ce pays.
Enfin, et je vous réponds encore très directement, monsieur Fillon, monsieur le Premier ministre : l’Allemagne est soumise à un défi considérable, c’est en grande partie – mais pas seulement – son choix ; la France est solidaire dans de tels moments. Nous n’avons pas la même approche, ne proposons pas les mêmes réponses, n’ayant pas par ailleurs le même afflux de réfugiés. Mais devant cette assemblée, et parce que c’est une constante de la politique française, j’affirme que pour avancer en Europe, y compris pour apporter une réponse au problème que vous avez soulevé, mais aussi au défi des réfugiés, et bien sûr aux autres défis que connaît l’Europe, la solidarité et le lien avec l’Allemagne sont indispensables.
Je ne participerai pas pour ma part, alors que Mme Merkel appartient à la même formation politique que vous au niveau européen, le PPE, à
« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen
une mise en cause de ce pays, pour des raisons qui dépassent peut-être ce qui se passe dans cet hémicycle. C’est une constante importante.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur quelques bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
J’ai rappelé quelle était la position de la France par rapport à la Turquie et à son adhésion. Quant au lien et à la solidarité avec l’Allemagne, nous les revendiquons. C’est une constante. Nous n’en changerons pas au gré des campagnes électorales !
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur plusieurs bancs du groupe écologiste.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le secrétaire d’État chargé du budget, le Président de la République a décidé une troisième baisse des impôts pour les ménages dans le projet de loi de finances pour l’an prochain, que notre assemblée va adopter dans quelques instants.
En 2016, nous continuerons donc à baisser l’impôt sur le revenu des Français.
Plus de 8 millions de contribuables bénéficieront de cette baisse pour un montant total de plus de 2 milliards d’euros
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Cette baisse représentera un montant de 200 à 300 euros pour la plupart des célibataires concernés, et de 300 à 500 euros pour les couples. C’est autant de pouvoir d’achat redonné aux Français.
Mêmes mouvements.
Lors de la discussion, j’ai souhaité, par le biais d’un amendement, que notre majorité a voté, que notre assemblée accentue cette baisse des impôts en permettant également une diminution de la fiscalité locale et de la redevance télévisuelle pour les foyers aux très faibles revenus.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
En effet, la remise en cause progressive de la demi-part des veuves, décidée par l’ancienne majorité, conduit, encore aujourd’hui, de nombreuses personnes isolées aux revenus modestes à devenir redevables des impôts locaux, alors qu’elles en étaient exonérées jusque-là. Plus généralement, trop de personnes non imposables sur le revenu doivent aujourd’hui s’acquitter d’impôts locaux sans commune mesure avec leurs moyens.
Avec cet amendement voté par notre assemblée, le revenu fiscal de référence sera revalorisé bien au-delà de l’inflation. Cette mesure va permettre, en 2016, à de nombreux contribuables – personnes âgées, personnes handicapées, veufs, veuves – qui ne dépasseront pas ce seuil, d’être exonérés de taxe d’habitation et de taxe foncière.
Cet amendement va également permettre aux foyers les plus modestes de bénéficier d’un plafonnement de la taxe d’habitation en fonction du revenu.
Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous indiquer à notre assemblée le gain de pouvoir d’achat que cette mesure va engendrer pour nos concitoyens modestes ? Comment le Gouvernement envisage-t-il de la financer ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Dès 2016, le Gouvernement engage, vous l’avez dit, madame la députée, un rapprochement de la fiscalité sur l’essence et le gasoil. Le prix de l’essence sera minoré d’un centime par rapport à son évolution prévue et celui du gasoil suivra l’évolution inverse.
« C’est bien ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Ces deux mesures conjointes procureront environ 245 millions d’euros de recettes supplémentaires pour l’État, car les Français sont davantage consommateurs…
…de gasoil que d’essence. Le Gouvernement s’engage à redistribuer ce montant pour alléger l’impôt des Français les plus modestes.
L’amendement que vous avez défendu, madame la députée, et qui a été adopté par l’Assemblée, prévoit de relever le seuil à partir duquel des retraités modestes, des veuves, des personnes handicapées peuvent bénéficier de réductions d’impôts locaux, qu’il s’agisse de la taxe d’habitation, de la taxe foncière ou, plus modérément, de la contribution à l’audiovisuel public. Le coût de cette mesure s’élève à 100 millions d’euros.
Le Gouvernement envisage toutefois, dans la discussion parlementaire, de relever davantage ce seuil afin que davantage de bénéficiaires puissent en récolter le produit.
Du fait de votre amendement, madame la députée, ce seront 100 000 foyers environ qui bénéficieront de cette réduction d’impôts locaux, pour une valeur moyenne d’environ 660 euros par foyer fiscal. À l’issue de la discussion parlementaire, le nombre de foyers bénéficiant de réductions d’impôt correspondant aux recettes supplémentaires induites par les mesures de fiscalité sur les carburants devrait être doublé.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à M. Yannick Favennec, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Monsieur le Premier ministre, la situation qui règne sur le site du futur aéroport de Notre-Dame-des-Landes, dans ma région des Pays de la Loire, est devenue inacceptable, insupportable et très inquiétante.
Le 20 août dernier, les gendarmes de Loire-Atlantique ont été victimes d’une agression extrêmement violente, menée par des hommes masqués et armés.
Le 22 septembre, un juge et des huissiers, qui ne faisaient qu’exécuter une décision de justice, ont été contraints de rebrousser chemin.
Le 8 octobre, un chauffeur routier ligérien s’est fait dépouiller de son chargement après avoir été menacé par des hommes cagoulés, armés de barres de fer et d’armes blanches.
Le 10 octobre, une maison inoccupée de la campagne du nord de Nantes est prise d’assaut par des individus qui revendiquent désormais sa propriété.
Monsieur le Premier ministre, la cadence des violences s’intensifie et les actes des zadistes portent de plus en plus atteinte à l’ordre public et à la sécurité des riverains. Le Président de la République, sommé de prendre position par de nombreux élus locaux, a déclaré la semaine dernière à Saint-Nazaire : « À un moment, il faudra engager des procédures ».
Est-ce là l’affirmation de l’autorité de l’État ? Est-ce là l’affirmation de notre État de droit ? Quand, monsieur le Premier ministre, prendrez-vous la décision claire et ferme d’évacuer ces délinquants, ces hors-la-loi, pour rétablir l’ordre public sur ce territoire ligérien, pour que commence enfin la construction d’un aéroport très attendu ?
Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants et sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains.
Monsieur le député, je vous réponds, comme je l’ai fait la semaine dernière au Sénat, où j’ai eu l’occasion de répondre aux attentes des élus qui partagent le même sentiment et qui soutiennent ce projet. J’ai eu l’occasion de le dire aussi bien au Premier ministre Jean-Marc Ayrault qu’au président de la région Pays de la Loire, Jacques Auxiette, ou à la maire de Nantes, Johanna Rolland.
Le tribunal administratif de Nantes a rejeté, au mois de juillet, l’ensemble des recours déposés contre les arrêtés préfectoraux qui autorisaient le lancement des travaux du futur aéroport du Grand Ouest à Notre-Dame-des-Landes. Cette décision confirme donc la parfaite conformité du projet au droit et le respect des procédures encadrant la réalisation des projets d’infrastructures.
Le projet, déclaré d’utilité publique en 2008, peut donc reprendre.
Ce projet, vous l’avez rappelé, monsieur le député, est soutenu par l’ensemble des collectivités locales. Il est nécessaire non seulement à la région Pays de la Loire, mais aussi, d’une manière plus générale, au Grand Ouest de notre pays.
Il est nécessaire pour des raisons économiques. Contrairement à ce que l’on entend, il est bon pour l’environnement.
Ségolène Royal vous écoute avec le sourire, monsieur le Premier ministre !
Enfin, il est nécessaire pour la préservation des populations, car nous connaissons le nombre de personnes – 42 000 – qui sont survolées par les avions décollant ou atterrissant à l’aéroport Nantes Atlantique.
La décision du tribunal étant d’application immédiate, le projet va pouvoir se poursuivre normalement, en concertation avec les collectivités locales et la Commission européenne, dans un grand souci d’exemplarité environnementale et en respectant scrupuleusement les procédures nationales et communautaires.
Nous allons donc poursuivre ce projet. Je vous réponds très directement, monsieur le député. Notre pays est un État de droit : au fur et à mesure que ce projet va se mettre en oeuvre, il est hors de question de céder, non pas à ceux qui le contestent de manière pacifique, mais à ceux qui le contestent de manière violente. L’autorité de l’État c’est-à-dire la mise en oeuvre du projet, doit leur être imposée.
Monsieur le député, vous pouvez donc compter sur l’engagement du Gouvernement, donc de l’État, pour la mise en oeuvre du projet et pour que cessent ces mises en cause de l’autorité de l’État par une minorité violente qui doit trouver une réponse ferme, celle de l’autorité de l’État.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à M. Laurent Degallaix, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Ma question s’adresse à Mme la secrétaire d’État chargée de la famille.
Il y a quelques semaines, c’était la rentrée des classes. Elle s’est plutôt bien déroulée, et elle m’a permis, comme beaucoup de mes collègues j’imagine, de faire le tour des écoles de ma circonscription et de ma ville – celle de Valenciennes en l’espèce. Or j’ai été interpellé régulièrement cette année par les enseignants qui déplorent que trop d’enfants n’aient pas le matériel scolaire de base nécessaire pour suivre une scolarité dans de bonnes conditions : cartable, cahiers, classeurs…
Le phénomène n’est pas nouveau, il est connu, mais il semble s’amplifier d’année en année et atteint un pic aujourd’hui, alors même que, dans un contexte budgétaire difficile, votre gouvernement a maintenu l’allocation de rentrée scolaire pour plus de 3 millions de familles. On voit bien qu’en période de crise aiguë, comme celle que nous vivons actuellement, cette allocation est détournée de son objectif premier au détriment du bien-être et du confort des enfants.
Face à ce constat, ne serait-il pas judicieux qu’ensemble, nous réfléchissions à un changement de mode opératoire pour le versement de cette allocation, lequel pourrait, pour une part, prendre la forme de bons d’achats exclusivement destinés à l’acquisition de matériel scolaire ou d’un versement direct aux écoles, collèges ou lycées, ce qui permettrait de réaliser des achats groupés afin d’acquérir soit plus de matériel, soit du matériel de meilleure qualité.
Je pense, madame la secrétaire d’État, qu’une telle mesure serait salutaire pour les enseignants, qui retrouveraient alors de meilleures conditions de travail, mais aussi, et surtout – puisque c’est l’enfant qui est au coeur du dispositif –, pour les élèves qui bénéficieraient ainsi, de manière équitable, des mêmes outils pour réussir au sein de cette école de la République, pour laquelle nous avons tous, sur ces bancs, un attachement particulier.
Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants, sur quelques bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie.
Monsieur le député, la question de l’allocation de rentrée scolaire et de son versement est un peu un marronnier,…
…mais d’habitude, c’est plutôt un marronnier de septembre que de novembre !
Vives exclamations sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants et du groupe Les Républicains.
Néanmoins, je vais vous répondre.
Ce que vous observez renvoie à une question que nous nous sommes nous-mêmes posée. Avec la Caisse nationale des allocations familiales et les associations familiales – l’Union nationale des associations familiales, Familles de France –, nous avons étudié le budget annuel d’un enfant scolarisé dans une famille et le montant des allocations attribuées à celle-ci. L’allocation de rentrée scolaire est versée chaque année, à l’occasion de la rentrée scolaire, sous condition de ressources, à 3 millions de familles, soit 5 millions d’enfants
« Oh ! Bravo ! » sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
J’appelle votre attention sur le fait que 45 % de ces 3 millions de familles sont des familles monoparentales, donc en grande difficulté.
La question de savoir si cet argent est ou non utilisé pour les enfants a trouvé une réponse dans les différentes enquêtes que je viens de signaler.
Toutes révèlent que dans 95 % des cas, l’argent est bien utilisé pour les enfants.
Il sert à payer soit les fournitures scolaires, soit les abonnements de transport scolaire, soit les inscriptions à la cantine, soit les tenues vestimentaires – autant de dépenses qui, pour une famille, sont étalées sur toute l’année.
Votre proposition serait d’autre part très coûteuse pour la Caisse nationale des allocations familiales, car il faudrait éditer des titres, choisir des prestataires…
Enfin, j’imagine difficilement, dans un supermarché, la discussion avec la personne à la caisse pour savoir si ce pantalon en taille 14 ans est bien destiné à l’enfant qui est présent !
Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants et du groupe Les Républicains.
En dernière analyse, à quoi sert votre question ? Probablement pas à veiller sur l’équilibre des comptes des familles, mais, comme toujours, à jeter la suspicion sur les familles les plus modestes !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour le groupe Les Républicains.
Le projet de loi de finances pour 2016 sera voté dans quelques instants, après de longs débats en séance publique.
Monsieur le Premier ministre, nous ne sommes pas rassurés par ce budget. L’objectif de déficit pour 2016 paraît inatteignable, les effectifs de l’État repartent à la hausse, le taux des prélèvements obligatoires ne baisse pas et les dépenses continuent d’augmenter. Voici la réalité : un budget sans courage qui ne traite pas les vrais sujets, un budget sans cap qui met la poussière sous le tapis.
Début septembre, le Gouvernement a adressé à 8 millions de contribuables dont la fiscalité évoluait un courrier leur annonçant la baisse de leur impôt. S’agissant de la forme, pouvez-vous, monsieur le Premier ministre, nous indiquer le coût de cet envoi massif, effectué alors que vous prônez la télédéclaration et le télépaiement ? Quant au fond, un salarié qui bénéficiait jusqu’en 2013 des heures supplémentaires défiscalisées n’a pas vu son impôt baisser depuis votre arrivée au pouvoir ; une personne retraitée qui a eu trois enfants et qui bénéficiait à ce titre d’une majoration de 10 % défiscalisée n’a pas vu son impôt baisser depuis votre arrivée au pouvoir ; un couple avec trois enfants qui a subi la baisse du quotient familial n’a pas vu son impôt baisser depuis votre arrivée au pouvoir : vous baissez les impôts de certains, mais vous augmentez les impôts de tous les autres !
Monsieur le Premier ministre, pensez-vous vraiment que la baisse de la fiscalité via une revalorisation de la décote fera oublier aux Françaises et aux Français votre déroute fiscale ?
Vous procédez à des réajustements dans la perspective des prochaines échéances électorales. Hasard du calendrier, la majorité des bonnes nouvelles concerneront l’après-2017. Mais les Français ne sont pas dupes, ils ont compris que vous faisiez de la récupération politique !
Monsieur le Premier ministre, quel est le coût de l’envoi de ces courriers pour le contribuable ? Sommes-nous déjà officiellement en précampagne électorale ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
« Et des cotillons ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.
Madame Dalloz, je ne sais pas qui est en campagne électorale,…
…mais je vous conseillerais, sur un sujet aussi sérieux, d’utiliser des arguments plus proches de la réalité !
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Parlons de choses simples. Les impôts des Français vont-ils baisser dans le cadre du budget qui est en cours de discussion ?
« Non ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.
Votre « non » est totalement ridicule : chacun sait que les impôts vont baisser pour les entreprises (« Non ! » sur les bancs du groupe Les Républicains) – 9 milliards de baisse –, pour les ménages (« Non ! » sur les bancs du groupe Les Républicains) – 2 milliards de baisse –, après 3 milliards de baisse cette année.
Madame Dalloz, au lieu de parler de je ne sais trop quel… comment dites-vous ?… « mouvement » que nous avons effectivement signalé à ceux qui en bénéficiaient, parlez de baisse !
N’ayez pas peur de la réalité : quand les impôts baissent, dites-le !
Or ils baissent clairement,…
…puisque 12 millions de foyers fiscaux sur 17 millions voient leur impôt baisser.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Une partie de ceux dont vous aviez augmenté les impôts, par exemple en supprimant la demi-part des veuves, ceux-là, nous allons leur permettre de ne plus en payer, et fermer la parenthèse que vous aviez ouverte en faisant payer les gens modestes alors que vous épargniez ceux qui avaient beaucoup plus d’argent.
Mêmes mouvements.
Nous, nous menons une politique de justice : ceux qui peuvent payer plus payent plus, mais ceux que vous aviez, et nous aussi à votre suite, appelés à contribuer pour lutter contre les déficits, à eux, nous rendons aujourd’hui une part des efforts qu’ils ont faits. Voilà la justice,…
…voilà la réalité ! Et, comme l’a fort bien expliqué M. Christian Eckert, grâce à l’amendement de Mme Pires Beaune, nous allons, le Parlement va baisser les impôts locaux d’un certain nombre de personnes, en particulier âgées, qui avaient augmenté à cause de vous !
Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains.– Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à Mme Geneviève Gosselin-Fleury, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le ministre de la défense, la France est aujourd’hui engagée sur plusieurs fronts extérieurs : Mali, Centrafrique, Irak et Syrie.
Elle doit aussi faire face à un front intérieur pour assurer la sécurité des Français, notamment dans la lutte contre le terrorisme. Ces différentes menaces présentent des frontières mouvantes et difficiles à cerner, tant les enjeux sécuritaires sont imbriqués. Dans ce contexte, aucune dimension, aucune vulnérabilité ne doit être négligée. À cet égard, la cyber-sécurité devient un enjeu de plus en plus central pour assurer la sécurité de nos compatriotes.
Défi technologique et humain, la cyber-sécurité avait déjà fait l’objet d’une dimension particulière dans le cadre de la loi de programmation militaire. Vendredi, le Premier ministre a présenté la stratégie française en la matière.
Les entreprises, les citoyens, les administrations font face à un accroissement des cyber-attaques de toutes sortes : il est indispensable de renforcer la riposte française en la matière.
La stratégie présentée permet la mobilisation de nouveaux moyens : extension de la protection à tous les acteurs de l’économie, dispositif national d’assistance pour les citoyens et les PME victimes d’actes de cyber-malveillance, engagement des principaux opérateurs français à crypter systématiquement les courriels de leurs clients, soutien à tous les acteurs français de la cyber-sécurité pour favoriser leur croissance.
Monsieur le ministre, notre majorité soutient pleinement la stratégie présentée vendredi. Pouvez-vous nous dire quelles missions sont confiées au ministère de la défense en matière de cyber-sécurité, et quels sont les résultats attendus ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame la députée, vous l’avez rappelé : le Premier ministre a annoncé vendredi dernier le déploiement d’une stratégie nationale ambitieuse en matière de sécurité numérique, à laquelle le ministère de la défense contribue de manière cohérente s’agissant particulièrement de la cyber-sécurité, de la cyber-défense. Vous le savez, très peu de temps après mon arrivée au ministère de la défense, j’ai mis en oeuvre le pacte « Défense Cyber », qui s’est traduit par plus de 1 milliard d’euros d’investissements dans la loi de programmation militaire, y compris dans sa version actualisée, et par le potentiel de création de 1 000 agents dédiés à cette spécificité très particulière.
Dans ce cadre, nous avons mis en oeuvre le Centre d’analyse de lutte informatique défensive, le CALID, placé auprès de l’état-major des armées, qui surveille les réseaux du ministère de la défense et travaille en complémentarité avec l’ANSI – Agence nationale pour la sécurité des systèmes d’information.
La question principale qui se pose à nous est celle de la formation et de la qualification des agents dédiés à cette nouvelle filière de sécurité. C’est pourquoi j’ai créé le pôle d’excellence Cyber, qui regroupe les services de la défense, les services de l’État, et les grands industriels, pour préparer les formations nécessaires à cet enjeu de souveraineté. Récemment encore, j’ai pu constater que cette prise de conscience était internationale, en réunissant à Paris un premier forum mondial sur la cyber-sécurité auquel ont assisté les cyber-commandeurs des différents pays concernés.
La France assurera cet enjeu nouveau de souveraineté pour le XXIème siècle.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame la ministre de l’énergie, comme le titre ce soir le journal Le Monde, EDF s’apprête à signer demain, à Londres, un contrat avec le gouvernement britannique et le président chinois pour construire deux réacteurs à Hinkley Point, pour la somme pharaonique de 34 milliards d’euros.
« Bravo ! » et applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains.
Même l’ancien secrétaire d’État à l’énergie de Mme Thatcher estime que ce contrat serait « le pire deal jamais conclu », avec un prix d’achat garanti pour trente-cinq ans au double du prix de l’électricité britannique, 30 % plus élevé que le prix de l’électricité renouvelable.
Le PDG d’EDF lui-même a reconnu qu’il avait échoué à faire participer les investisseurs étrangers prévus, tant les échecs de l’EPR les inquiètent.
Seuls les Chinois participeraient, mais dans l’unique but de devenir incontournables sur le continent européen. La dépendance croissante du nucléaire français et britannique envers les Chinois pourrait d’ailleurs faire sourire : on nous a tant vanté le mythe de l’indépendance nationale ! Cette dépendance inquiète même les militaires.
Une troisième question taraude nos voisins : pourquoi acheter à prix d’or de vieux modèles EPR du XXème siècle qui ne marchent nulle part, alors même que la France y renonce, puisque EDF et Areva travaillent déjà à un EPR nouveau modèle ? Même les agences de notation, qui visiblement ne croient pas à l’avenir du nucléaire, annoncent qu’elles dégraderont la note d’EDF si le contrat est signé.
Madame la ministre, s’endetter pour des décennies afin de financer un tel projet, est-ce bien la priorité d’EDF ? L’État actionnaire compte-t-il, sans autorisation du Parlement, permettre à EDF de consacrer ses faibles marges financières à des projets du siècle dernier, aux dépens des énergies d’avenir que sont les énergies renouvelables ? Le contribuable français, qui paiera déjà très cher la folie des grandeurs d’Areva, a-t-il vocation à payer toutes les factures de la mégalomanie du nucléaire français ?
Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.
La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.
Monsieur le député, permettez-moi d’abord de vous dire qu’aucune idéologie ne justifie que l’on porte atteinte aux intérêts d’une grande entreprise française !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen. – « Bravo ! » et applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains.
Cette entreprise va en effet – et vous devriez vous en réjouir – signer un partenariat industriel de première importance. J’espère que ce ne sera pas le seul, et qu’à la suite de ce partenariat industriel avec le Royaume-Uni, d’autres seront signés avec la Chine, l’Inde et le Japon.
EDF est en effet engagée – et vous ne pouvez pas l’ignorer, puisque vous avez voté la loi de transition énergétique – dans le mix énergétique français. C’est la première entreprise productrice d’énergie renouvelable en France. Nous avons donc réussi à atteindre un juste équilibre, grâce – entre autres – au débat parlementaire, entre la part du nucléaire – qui reste importante même si elle est ramenée de 75 % à 50 % du mix énergétique et électrique – et la montée en puissance des énergies renouvelables.
Seconde observation : en effet, ces partenariats industriels permettront d’améliorer la performance de la production d’énergie nucléaire qui, je le rappelle, est une énergie décarbonée. L’État actionnaire assume parfaitement ces choix industriels : ce sont de bons choix. Je regrette donc le ton de votre question, qui tend à jeter le discrédit sur une grande entreprise française qui, je l’espère, connaîtra d’autres succès industriels permettant de créer de l’activité et des emplois sur le territoire français.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Socialiste, républicain et citoyen et du groupe Les Républicains.
Monsieur le Premier ministre, chiffres spectaculaires, courbes mirifiques, annonces extraordinaires et démonstrations en tous genres : le Gouvernement est devenu expert dans l’art d’annoncer les bonnes nouvelles.
La dernière en date est la suppression de l’effort fiscal national pour plusieurs millions de contribuables, vous venez d’en reparler.
« Et les Rafale ? » sur de nombreux bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Mais ce trompe-l’oeil ne cache-t-il pas en réalité une multitude de mesures qui coûteront cher, très cher aux Français ? Nous voulons la vérité !
Pourquoi encore et toujours de nouvelles augmentations, notamment des impôts locaux, compte tenu du report, sur les collectivités locales, de l’effort fiscal national et des taxes foncières sur les terrains non bâtis ?
« Le Rafale ! Le Rafale ! » sur de nombreux bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Qu’est devenue la promesse de pause fiscale, lorsque vous ajoutez 3,4 milliards d’euros à l’impôt sur le revenu, déjà hyperconcentré, d’un Français sur deux ? Comment justifiez-vous qu’un couple avec deux enfants gagnant 4 000 euros par mois paie plus d’impôts qu’en 2012 ? Pourquoi toujours et encore pénaliser les classes moyennes qui servent depuis trois ans de portefeuille à votre majorité ?
Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur plusieurs bancs du groupe écologiste.
Ils ont déjà payé 20 milliards d’impôts supplémentaires depuis 2012 ! Ce ne sont plus simplement des haut-le-coeur que vous provoquez, mais de l’allergie, oui, de l’allergie fiscale !
Mêmes mouvements.
Grâce à vous, docteur, nous sommes devenus champion du monde, mais en impôts de toutes natures. Savez-vous qu’à partir de 2016, il y aura autant de taxes que de jours dans l’année ?
Alors, monsieur le Premier ministre, surprenez-nous ! Vous qui avez su faire preuve d’une imagination prolifique en termes d’imposition, n’hésitez pas à mettre votre talent au service de tous les Français en faisant preuve d’équité et d’efficacité dans le domaine économique. Baisser les impôts sans discrimination,
Protestations sur de nombreux bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur plusieurs bancs du groupe écologiste
baisser les dépenses sans modération, c’est possible : d’autres l’ont fait avant vous, ici en France mais aussi ailleurs chez nos voisins européens. Alors, pourquoi pas vous ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Nous allons faire des économies dans le budget de la défense !
Vous vous faites, monsieur Dassault, le défenseur des classes moyennes,
Rires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur plusieurs bancs du groupe de la gauche démocrate et républicaine et du groupe écologiste
tout en nous adressant une rafale de compliments.
Mêmes mouvements.
Je vous en remercie mais, plus sérieusement, je veux dire la vérité aux Français, à savoir que les baisses d’impôt que vous propose le Gouvernement, et que d’ailleurs vous ne contestez pas, concernent les classes moyennes et les plus modestes. Et parallèlement, monsieur le député, aucune augmentation d’impôt n’a été prévue pour les autres.
Quant à ce que vous dites sur la concentration de l’impôt sur le revenu, je rappellerai deux chiffres. Aujourd’hui, 10 % des Français paient 67,4 % de l’impôt sur le revenu : retenez ce chiffre. Savez-vous qu’en 2011, les 10 % des Français les plus aisés payaient 72 % du même impôt ?
Murmures sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
L’impôt sur le revenu n’est donc pas plus concentré aujourd’hui qu’en 2011, monsieur le député ; et si plus de la moitié des Français ne le paient pas, tous paient la TVA et la CSG, qui sont, de loin, les deux impôts qui rapportent le plus.
Soyez donc rassuré, monsieur le député : le projet de loi de finances pour 2016 épargne cette fois l’ensemble des Français tout en concentrant les baisses d’impôt sur les foyers modestes et les classes moyennes, dont vous avez si bien parlé.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à Mme Isabelle Le Callennec, pour le groupe Les Républicains.
Ma question s’adresse au ministre de la défense.
La France, monsieur le ministre, est en guerre. Vous devriez donc être concentré à 100 % sur l’objectif.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains ; protestations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Or, depuis vendredi, vous êtes officiellement candidat aux élections régionales en Bretagne.
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Vous êtes donc un ministre en campagne, exception gouvernementale et nouvel avatar de la République exemplaire de M. Hollande. Comme M. Bartolone, vous allez continuer à utiliser les moyens de l’État à des fins de propagande électorale.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains. – « Non ! » sur de nombreux bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Et Sarkozy ?
À l’issue des élections, le Président de la République décidera de votre sort. Cette allégeance à celui dont la cote de popularité ne cesse de chuter, y compris en Bretagne, est totalement contraire à la capacité d’affirmation et au courage qui font la réputation des Bretons.
Et puis d’ailleurs, quelle est la raison profonde de votre souhait de briguer une troisième fois la présidence de la région ?
Celle-ci n’a cessé de décliner depuis onze ans que vous-même et vos amis en ont la responsabilité. Elle a pourtant d’immenses atouts, mais aussi de solides défis à relever, économiques, sociaux et environnementaux. Cette région, j’ose le dire, vous l’avez trahie
« Oh ! » sur de nombreux bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Au moment des redécoupages, le 6 mai 2009, vous étiez, selon vos dires, un acharné de la réunification ; le 18 janvier 2014, vous vous prononciez même pour la dissolution des Pays de la Loire. Chacun sait que, en vérité, vous avez milité pour le statu quo. Cela revenait à tirer une balle dans le pied d’une région déjà affaiblie par les crises à répétition.
Huées sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Lamentable !
Pourquoi, comme ministre breton, n’avez-vous pas défendu l’intérêt supérieur des Bretons ?
Mêmes mouvements. – Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Madame la députée, s’il y a quelqu’un qui, dans cet hémicycle, confond le débat politique national et la campagne des élections régionales en Bretagne, c’est bien vous.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Vous avez salué le ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, et votre question est un aveu de faiblesse : vous redoutez le candidat Jean-Yves Le Drian en Bretagne.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur quelques bancs du groupe écologiste.
Chacun, pour peu qu’il fasse preuve d’honnêteté intellectuelle, connaît et reconnaît les qualités de Jean-Yves Le Drian, les qualités non seulement humaines, mais aussi en tant que ministre de la défense.
Mêmes mouvements.
C’est un grand ministre de la défense, à 100 % engagé dans sa tâche, et reconnu par les militaires d’abord, car son abnégation a permis au chef de l’État de faire des choix importants en soutien à la défense nationale, confrontée aux dangers extérieurs et à la menace terroriste.
« Gardez-le, alors ! » sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
Il a également le soutien des industriels, car c’est aussi grâce à lui que la France, sur un certain nombre de dossiers, a remporté des succès incontestables…
Je pense par exemple, M. Olivier Dassault en sera d’accord, à la vente des Rafale, que personne n’avait réussi à réaliser auparavant.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Jean-Yves Le Drian est aussi un ministre apprécié des Français parce qu’il est un bouclier, un homme d’État, et parce qu’il place l’intérêt général au-dessus des querelles politiques dont vous venez, madame la députée, de vous faire le chantre.
Comme d’autres sur ces bancs, lorsque vous étiez au pouvoir ou aujourd’hui dans cette majorité et ce gouvernement, il s’engage politiquement, pour la majorité comme pour la région Bretagne, qu’il porte au coeur, en dépit de vos reproches.
Il est Breton, et laissez les Bretons faire leur choix librement dans quelques semaines.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur quelques bancs du groupe écologiste.
Enfin, il a déjà eu l’occasion de le dire, et nous l’avons nous-mêmes dit, avec le Président de la République : il y a des règles qui s’appliqueront au soir du second tour de l’élection, et chacun les connaît. Je ne doute donc pas des choix qui seront faits par Jean-Yves Le Drian.
Et ceux qui, aujourd’hui, prétendent nous donner des leçons sont les mêmes qui disent vouloir revenir sur le non-cumul des mandats, qu’ils accusent d’être une erreur.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Cette règle, nous l’appliquons et continuerons à l’appliquer en 2017 ; plus personne, contrairement à ce que vous racontez et à ce que raconte Nicolas Sarkozy, ne la remettra en cause, car elle représente un approfondissement de la démocratie souhaité par les Français.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur quelques bancs du groupe écologiste.
Alors, madame la députée, cherchez d’autres querelles ; concentrez-vous sur les questions de fond, parlez de l’avenir de la France et de l’avenir de la Bretagne. Jean-Yves Le Drian, lui, gardera son esprit, sa vision de la France et de la Bretagne, car c’est un homme d’État : il faut savoir de temps à autre, madame la députée, se mettre à ce niveau.
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe écologiste.
La parole est à M. Michel Vauzelle, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, après la Bretagne, nous allons parler de la Provence. En octobre 2013, une bactérie, Xylella fastidiosa, a été détectée dans le sud de l’Italie : elle a ravagé les oliveraies de toute cette région.
Une autre souche de cette bactérie a ensuite touché la Corse, cet été, et depuis peu, un arbuste a été identifié, dans la commune de Nice, comme présentant des symptômes inquiétants.
Cette bactérie peut être mortelle non seulement pour les oliviers, mais aussi pour les arbres fruitiers, les plantes maraîchères et les vignes et elle se propage très rapidement. Or, à ce jour, aucun traitement n’existe pour la combattre.
Les autorités d’État ont rapidement défini la zone d’éradication du foyer ainsi que la zone tampon. Je les remercie d’avoir mis en place les mesures nécessaires, notamment l’identification et l’arrachage des végétaux sensibles.
Une surveillance intensive a également été mise en place. La carte des territoires où prospère l’olivier correspond, nous le savons, aux rivages de la Méditerranée. En France, en particulier en Provence et en pays niçois, la qualité exceptionnelle des olives et de l’huile d’olive est reconnue dans le monde entier.
Une épidémie destructrice des oliviers, comme en Italie, serait, pour la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, une catastrophe économique, agricole, mais aussi touristique et sociale. On n’imagine pas la Toscane, pas plus que la Provence, sans oliviers.
Cette menace met en péril le secteur agricole, déjà lourdement frappé, comme vous le savez, monsieur le ministre, par les difficultés du riz comme des cultures végétales – qui touchent également la Provence – en Camargue.
Monsieur le ministre, comment trouver le juste équilibre entre l’urgence de la protection sanitaire de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur et la nécessité de ne pas faire peser de contraintes trop lourdes sur les pépiniéristes ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le député, vous avez évoqué une bactérie, Xylella fastidiosa, qui sévit effectivement en Italie depuis 2013, année au cours de laquelle elle y a été détectée. Depuis lors, elle a causé la disparition de milliers d’arbres et d’oliviers, en particulier dans les Pouilles.
Il a d’ailleurs fallu qu’à mon initiative la France force l’Europe à prendre des décisions et prenne un décret limitant les échanges d’arbres entre l’Italie et la France, ce qui n’avait pas été fait jusque là.
Monsieur le député, il faut être précis sur le sujet qui nous préoccupe : la bactérie Xylella fastidiosa qui a touché les oliviers en Italie n’est pas celle que nous avons découvert en Corse et dans les Alpes maritimes. En effet, la souche qui a atteint ces deux parties du territoire touche des plantes ornementales qui, pour la plupart, en tout cas en Corse, ont été importées il y a dix ans.
Depuis 2014, nous avons donc mis la France sous surveillance renforcée, et nous faisons dorénavant en sorte de détecter les problèmes dès qu’ils se posent. Dès que c’est le cas, des mesures doivent être prises, en particulier l’éradication, afin d’éviter la propagation.
Vous l’avez dit, monsieur le député : il faut être rigoureux dans la mise en place de l’arrachage et de la désinsectisation immédiate, afin d’éviter la propagation de la bactérie. Il faut en effet éradiquer celle-ci. C’est le rôle des préfets dans tout département touché : celui de Corse a d’ailleurs agi dans ce sens, et celui des Alpes maritimes fera de même.
Il leur faudra éradiquer la bactérie et éviter sa propagation tout en maintenant une activité économique qui ne peut pas ne pas tenir compte des risques encourus. Tel est l’objectif que nous poursuivons depuis plus de deux ans.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Ma question s’adresse à Mme la ministre de la justice, que je ne vois pas. Je dois dire d’abord que pour manifester place Vendôme, il va bientôt falloir prendre son tour longtemps à l’avance, tant l’ensemble des professions judiciaires et juridiques est exaspéré.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Hier, c’était les policiers ; jeudi, les gardiens de prison ; et aujourd’hui, c’est l’ensemble des avocats de France qui est en grève en raison de la réforme nocturne et menée sans concertation du financement de l’aide juridictionnelle.
Vous avez augmenté le budget, relevé le plafond, et étendu le périmètre de ses missions mais, comme vous n’avez pas les moyens de vos largesses, vous les faites financer par d’autres, dont les avocats.
D’une part, vous diminuez certaines rémunérations déjà souvent payées au tarif du baby-sitting et, d’autre part, vous prélevez, en 2016 comme en 2017, un impôt sur les caisses autonomes des règlements pécuniaires des avocats, les CARPA. Vous avancez ensuite l’idée d’une taxe sur les cabinets.
Or, les CARPA se trouvent déjà très contraintes : elles financent en effet seules l’entière gestion de l’aide juridictionnelle, qui concerne un million de justiciables tous les ans, ainsi que les écoles du barreau. Elles ne pourront donc pas supporter cette ponction sans compromettre l’accès au droit.
Mes questions sont les suivantes. Confirmez-vous que 35 millions d’euros inscrits au budget de l’aide juridictionnelle n’ont pas été dépensés en 2014 ?
Estimez-vous pertinent de bloquer le fonctionnement de la justice et de prendre le risque d’avoir à récupérer la gestion de l’aide juridictionnelle, qui était jusque ici assurée, tout en refusant de recevoir les professionnels ? Il est vrai que j’entends dire que la garde des sceaux aurait changé d’avis sur ce point : nous verrons cela demain.
Enfin, envisagez-vous d’écouter les propositions qui vous ont été faites, d’abandonner cette réforme injuste et de ne pas frapper les avocats quand ils manifestent, comme ce fut le cas à Lille ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Monsieur le député, je vous prie d’excuser l’absence de Mme Taubira qui se trouve au Sénat où elle accomplit son travail de relation avec le Parlement.
Depuis quinze ans, vous le savez mieux que quiconque, des rapports et des propositions s’accumulent, car aujourd’hui le système de l’aide juridictionnelle s’essouffle. Si rien n’est fait, il risque même l’agonie.
Nous avons toujours affirmé notre ambition de le réformer, afin de le rendre durable, plus juste et plus rémunérateur pour les avocats qui font de l’aide juridictionnelle – ce qui n’est pas le cas de la majorité d’entre eux – car ils assurent ainsi une véritable mission d’intérêt général.
L’État, dans le contexte budgétaire que vous connaissez, a lui-même fait des efforts considérables : 345 millions d’euros en 2014 et 405 millions l’année prochaine. Une longue concertation a également été menée.
Les progrès que nous mettons en place se traduisent dans les faits d’abord pour les justiciables, puisque 100 000 justiciables supplémentaires auront le droit d’être pris en charge.
Les avocats seront également mieux rémunérés.
En effet, l’acte de référence va passer de 22,5 euros à 24,2 euros. Des aides particulières seront attribuées aux barreaux situés dans les zones rurales dans lesquelles de longs déplacements sont souvent nécessaires : 25 millions d’euros seront affectés à cette aide juridictionnelle prioritaire.
Aujourd’hui, il est effectivement proposé que les CARPA participent au nouveau dispositif. Comme vous le savez, ce sont des caisses qui sont gérées par les avocats par lesquelles transitent les fonds des justiciables et de l’État. Elles ont également la responsabilité des produits financiers générés par le placements de ces fonds. Cette participation est d’ailleurs limitée à deux ans. Des discussions doivent se poursuivre.
Le Gouvernement recevra demain les trois organisations représentatives des avocats. Mais soyez positif : faites que cette réforme avance, monsieur le député, plutôt que d’être toujours dans l’opposition !
La parole est à Mme Françoise Descamps-Crosnier, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Ma question s’adresse à Mme la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité.
Madame la ministre, jeudi 15 octobre, le troisième comité interministériel consacré au Grand Paris a permis de réaffirmer notre ambition et notre vision pour la région parisienne et pour la France.
D’ici à trois mois, la région capitale aura changé de visage, avec la mise en place, au 1er janvier 2016, de la métropole du Grand Paris et de la nouvelle carte intercommunale en grande couronne. Il s’agit d’un chantier immense, qui mobilise les énergies des élus et des agents territoriaux franciliens, de même que les services de l’État.
Ce chantier institutionnel vise avant tout à structurer l’action publique territoriale pour mieux répondre aux objectifs que nous nous sommes fixés, notamment la lutte contre les inégalités territoriales. Il s’agit de faire en sorte que personne ne soit exclu des futures dynamiques métropolitaines.
C’est cette volonté qui accompagne les efforts réalisés en matière de transports, comme l’extension à l’ouest du RER E ou le Charles de Gaulle Express. Ces développements vont désenclaver des territoires entiers et contribuer à rapprocher les Franciliens, comme le fait le tarif unique du Pass Navigo depuis le 1er septembre.
C’est cette volonté d’égalité territoriale qui accompagne l’action engagée en matière d’aménagement et de logement, avec la mise en oeuvre prochaine des contrats d’intérêt national et de nouvelles opérations d’intérêt national pour les sites prioritaires. Ces dispositifs viennent compléter les efforts déjà programmés comme la prochaine génération de programmes de renouvellement urbain.
C’est enfin cette volonté qui a inspiré l’annonce, et je tiens à la saluer, d’un nouveau zonage pour la redevance sur les créations de bureaux. Cette mesure prévue pour le projet de loi de finances rectificative sera un gage d’égalité territoriale entre la métropole et la grande couronne francilienne. Il s’agit d’un signal fort.
Madame la ministre, les 12 millions d’habitants de l’Île-de-France attendent la réalisation de nos projets. Pouvez-vous nous rappeler l’ambition du Gouvernement pour nos territoires ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à Mme la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité.
Vous l’avez rappelé, madame la députée, le Premier ministre a réuni jeudi dernier un comité interministériel sur le Grand Paris, qui est une nouvelle étape pour une grande ambition pour l’Île-de-France : bâtir une métropole innovante, durable, solidaire, qui réponde aux préoccupations des Franciliens et soit un moteur de croissance pour tout le pays.
Le Gouvernement poursuit deux objectifs principaux, améliorer les conditions de déplacement des Franciliens et construire un modèle de développement qui profite à tous les territoires. Pour cela, l’État agira en faveur de quinze territoires dits d’intérêt national pour faire émerger des projets d’aménagement et de logement, ambitieux, mêlant excellence environnementale et excellence sociale. Pour les accompagner, des contrats d’intérêt national seront signés entre l’État et les collectivités dans les six mois à venir, pour définir les grands axes de ces projets ainsi que leurs modalités de mise en oeuvre, notamment sur le plan juridique.
Sur ces sites, l’État mobilisera les moyens de nos services déconcentrés, mais également de nos établissements publics. Il donnera aux collectivités locales de nouveaux moyens financiers, je pense notamment à l’aide aux maires bâtisseurs, dont les premiers versements vont intervenir dans les toutes prochaines semaines, et il va engager une profonde réforme de la redevance pour création de bureaux.
Comme vous le voyez, madame la députée, le Gouvernement est convaincu de l’importance du Grand Paris pour lutter contre les inégalités territoriales. Les annonces du dernier comité interministériel apportent une nouvelle fois la preuve de notre ambition pour la région capitale.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le Premier ministre, dans un rapport paru la semaine dernière, la Cour des comptes s’inquiète de la baisse des dotations de l’État aux collectivités territoriales, environ 11 milliards d’euros sur la période 2015-2017, avec le risque évident d’un recul inquiétant de l’épargne brute des collectivités locales. D’ici à 2019, les communes verraient leur capacité de désendettement grimper à douze ans, contre moins de huit en 2014.
Les élus préparent leurs budgets sans visibilité, et il est à craindre que les deux tiers des collectivités se trouvent dès 2017 face au mur.
Dans ce contexte particulier, à la veille de la création de la métropole Aix-Marseille-Provence, nous redoutons une mise en route fonctionnelle délicate, voire une paralysie, dès le début de l’année, aucun financement n’étant prévu à ce jour pour son fonctionnement.
Vous avez répondu très récemment à un courrier que je vous avais adressé cet été que des amendements seraient prévus au projet de loi de finances. Pouvez-vous nous rassurer sur les points suivants, fondamentaux pour la création de notre métropole ? Pouvez-vous nous assurer que la métropole sera bien bénéficiaire du fonds de péréquation, cela pour garantir l’équilibre financier du territoire métropolitain et de sa ville centre, Marseille ? Pouvez-vous aussi vous engager à faire figurer explicitement dans le projet de loi de finances un montant significatif déterminant pour le lancement de cette métropole ? Chacun conviendra en effet que la dotation dite « exceptionnelle » de 50 millions n’est pas à la hauteur de vos ambitions métropolitaines pour un territoire de quatre-vingt-douze communes et de 1,8 million d’habitants.
Vous voulez que nous soyons au rendez-vous ? Nous y serons, mais, pour que nous puissions écrire l’Histoire, il faut nous en donner les moyens.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains.
La parole est à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.
Sur la métropole Aix-Marseille-Provence, monsieur le député, un certain nombre d’engagements ont été pris par le prédécesseur de Manuel Valls, Jean-Marc Ayrault.
Il y a deux éléments. Il y a d’abord la baisse des dotations aux collectivités territoriales. Toutes les communes de France sont touchées, plus ou moins, en fonction de leur situation, et le Premier ministre, Manuel Valls, a pris l’engagement d’accorder 1 milliard d’aide à l’investissement. Nous pourrions en discuter longtemps. Il y a par ailleurs la justesse de la répartition.
Aix-Marseille-Provence, notamment parce qu’il y a un certain nombre de quartiers relevant de la politique de la ville mais aussi de grandes zones en difficulté, bénéficiera d’une péréquation. Vous le savez, car dans le poste qui est le vôtre à Marseille Provence Métropole, vous avez sans doute déjà fait des projections pour l’année prochaine, les choses vont plutôt bien.
Nous avons pris l’engagement de regarder de près pourquoi Marseille, en particulier à l’intérieur de sa métropole, avait une DSU extrêmement faible par rapport aux autres grandes métropoles ou quartiers équivalents en France, et dans quelques jours, dans le projet de loi de finances, nous proposerons à l’Assemblée nationale de revoir les règles pour que la DSU ne fasse pas subir à certains, dont Marseille, ce rang mauvais qui fait que la dotation est trop basse. Vous aurez donc une bonne surprise, vous aurez une meilleure DSU, une meilleure dotation de péréquation.
Enfin, nous nous sommes engagés, et nous tiendrons parole, à ce que les dotations d’Aix-Marseille-Provence et de Paris ne pénalisent pas l’ensemble des enveloppes de DGF.
La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Claude Bartolone.
Dans les explications de vote, la parole est à M. Éric Alauzet, pour le groupe écologiste.
Monsieur le président, monsieur le ministre des finances et des comptes publics, monsieur le secrétaire d’État chargé du budget, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure générale, chers collègues, l’examen du projet de loi de finances en première lecture a permis de réaliser deux avancées majeures grâce à des amendements auxquels se sont associés les écologistes. La taxation au 31 décembre 2016 des transactions financières intra-day, qui sont les plus spéculatives, constitue une avancée majeure vers une vraie taxe Tobin, d’autant plus essentielle qu’elle s’accompagne d’un abondement du fonds de développement. Par ailleurs, nous avons enfin engagé la convergence de la taxation du diesel et de l’essence, respectivement augmentée et diminuée d’un centime.
Ces deux décisions donnent un sens profond à l’action de notre majorité, en particulier à son ambition de contrôler la finance et la transition énergétique. Ce budget restitue également deux milliards d’euros aux ménages au titre du pacte de solidarité, effaçant tout ou partie des hausses d’impôts constatées entre 2010 et 2013 après les trois milliards d’euros constatés en 2015. C’est une bonne nouvelle pour les Français. Cela représente 200 à 500 euros de pouvoir d’achat supplémentaire pour dix-sept millions d’entre eux. En ajoutant les économies de dix milliards d’euros réalisées par les ménages grâce à la baisse du prix du pétrole, quinze milliards d’euros sont disponibles pour la demande des ménages !
Ce budget octroie également neuf milliards d’euros supplémentaires au pacte de responsabilité. Les parlementaires aimeraient pouvoir dire avec certitude aux citoyens que ces milliards sont bien utilisés par les entreprises pour relancer l’activité et l’emploi. Le Président de la République et le Premier ministre participaient hier à une conférence sociale. C’est l’occasion de rappeler que la notion de pacte suppose des engagements, une évaluation et le respect des engagements. Ce budget procède de la recherche d’un équilibre difficile sur le trajet exigeant de la baisse de la dépense publique de cinquante milliards d’euros. Cet impératif pèse tout particulièrement sur les collectivités locales. Nos communes, nos départements et nos régions sont amenés à une adaptation rapide et difficile pour maintenir les services publics comme les investissements. Le vote d’un crédit d’un milliard d’euros en seconde partie de la loi de finances visant à stimuler les investissements s’avère indispensable pour en limiter l’impact.
Nous mesurons ici la démagogie du discours de nos collègues de l’opposition qui n’ont de cesse de réclamer des économies de 120 milliards d’euros tout en fustigeant la baisse des dotations aux collectivités locales. Quelle inconséquence ! Gouverner, mes chers collègues de l’opposition, c’est une responsabilité face à la réalité. Et la réalité, c’est une dette colossale résultant à la fois de quarante ans d’insouciance et d’un système financier incontrôlé. Elle est en partie légitime et en partie illégitime. Nous sommes désormais contraints d’en assurer l’équilibre. Comme nous ne sommes pas au niveau de dérive de la Grèce, nous ne pouvons pas compter sur une remise de dette partielle. Pour autant, ce serait folie de faire reposer l’entière responsabilité de l’équilibre du budget sur la baisse de la dépense publique alors que tant de recettes échappent à l’impôt en raison de la fraude et de l’évasion fiscale. C’est pourquoi il faudra transposer dans le prochain projet de loi de finances rectificative les propositions de l’OCDE visant à restaurer la base fiscale des multinationales afin que les entreprises paient l’impôt là où elles réalisent leurs activités.
Ce budget comporte aussi des moyens renforcés pour la transition énergétique, comme nous le verrons lors de l’examen de la seconde partie. Dans l’attente d’une proposition globale en loi de finances rectificative au cours des prochaines semaines relative à la fiscalité écologique et notamment la trajectoire de la contribution climat-énergie dont une part devrait abonder les moyens de l’agence de financement des infrastructures de transports, il importe d’appréhender globalement les dépenses en faveur de l’environnement sans s’en tenir à la seule baisse du budget de l’écologie, contenue en 2016 à quatre-vingt-dix millions d’euros. Il faut prendre en compte le surplus de 500 millions d’euros sur le crédit d’impôt transition énergétique, l’investissement sur trois ans de 1,2 milliard d’euros en faveur des programmes « Territoires à énergies positives », « Territoires zéro déchets, zéro gaspillage » et « Villes respirables en cinq ans » à hauteur de 500 000 euros pour les territoires concernés ou encore l’augmentation de la contribution au service public de l’électricité.
sur les bancs du groupe écologiste.)
La parole est à M. Joël Giraud, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Monsieur le président, monsieur le ministre des finances, monsieur le secrétaire d’État chargé du budget, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure générale, chers collègues, nous autoriserons dans quelques instants le Gouvernement à percevoir les impôts qui pour baisser significativement, à hauteur de deux milliards d’euros pour les foyers moyens et modestes, n’en constituent pas moins le moyen le plus significatif pour agir et réformer notre pays. L’évolution spontanée des recettes dépassant la progression des dépenses de quasiment dix milliards d’euros, nous pouvons dire que nous sommes clairement orientés vers une diminution très sensible du déficit budgétaire et en passe de respecter nos engagements européens en la matière. Comme je l’ai dit à cette tribune mardi 13 octobre lors de la discussion générale, le groupe RRDP se félicite de la poursuite de l’allégement des prélèvements obligatoires qu’il appelle de ses voeux depuis le début de la législature.
La réforme du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu recueille également notre assentiment. Nous regrettons que le toilettage des niches fiscales n’ait pas été plus important cette année et constatons que la maîtrise des dépenses fiscales liées au CICE est compliquée alors qu’une mesure fine de l’efficacité de ce dispositif n’est toujours pas possible faute de données statistiques suffisamment probantes. Nous nous félicitons par ailleurs de l’engagement d’exclure du dispositif du CICE les opérateurs privés menant des activités d’archéologie préventive, confirmé lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances, ce qui évite de créer une distorsion de concurrence au détriment des acteurs publics et de maintenir un effet d’aubaine sur des activités par définition impossibles à délocaliser.
Nous nous félicitons également de l’adoption de certains de nos amendements, même s’ils l’ont été contre l’avis du Gouvernement. L’extension de l’assiette du FCTVA aux dépenses d’entretien de la voirie, pour 300 millions d’euros, constitue un effort appréciable pour les communes, en particulier rurales, car ce poste de dépenses grève lourdement leur budget. L’atténuation de la baisse du plafond de la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises pour 2016, de 20 millions d’euros, favorisera la soutenabilité de l’effort pour le réseau des chambres de commerce et d’industrie et permettra de se rapprocher de la trajectoire triennale fixée par la loi du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques, qui prévoyait de limiter la baisse du plafond des taxes affectées aux opérateurs à 135 millions d’euros. Cela laisse ouvert le débat, en deuxième partie du projet de loi de finances, sur une meilleure péréquation au profit des chambres de commerce et d’industrie en difficulté, en particulier dans les zones rurales et isolées, car elles favorisent l’innovation et la formation dans les zones reculées.
Nous nous félicitons également de l’extension de l’amortissement fiscal supplémentaire exceptionnel sur certains achats d’équipements industriels aux poids lourds fonctionnant au gaz naturel et au biométhane carburant pour une durée de deux ans et pour un coût de 5,2 millions d’euros.
Nous saluons également l’élargissement de l’assiette de la taxe sur les transactions financières aux transactions intrajournalières, afin d’augmenter les financements pour la solidarité internationale et la lutte contre le changement climatique. Cette disposition a l’immense mérite d’anticiper la future transposition de la directive européenne, tout en permettant de satisfaire les engagements du Président de la République en matière de financement de la solidarité internationale. Je suis d’autant plus satisfait de cette disposition que nous avons modestement contribué, lors de son examen en séance publique, à éviter qu’elle ne soit censurée par le Conseil constitutionnel. Nous approuvons la nouvelle hausse du budget pour l’aide au développement, auquel sera affecté 25 % du produit de la TTF.
Par ailleurs, nous sommes satisfaits de la déclaration du secrétaire d’État, en séance, au sujet de l’augmentation, à hauteur de 20 millions d’euros, de la participation de la Société de financement local afin d’aider les hôpitaux publics ayant contracté des emprunts toxiques.
Autant de motifs de satisfaction – je n’aurai pas le temps d’évoquer l’élargissement du FCTVA aux locations de longue durée, l’allégement de la fiscalité locale ou l’augmentation du budget de France Télévisions – qui conduiront d’autant plus les députés du groupe RRDP à adopter cette première partie du projet de loi de finances que le climat apaisé qui a présidé à l’examen des recettes de l’État pour 2016 a permis de rapprocher des points de vue et de dégager des lignes de forces, illustrant ainsi que la bonne volonté et la nécessité de réussir valent mieux que les postures et leur cortège d’hypocrisie. Permettez-moi toutefois d’insister sur la nécessité de transparence absolue qui doit présider à la réforme de la DGF, que nous espérons tous la plus équitable possible, dans un budget contraint.
Applaudissements sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
La parole est à M. Nicolas Sansu, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, nous voici au terme de la discussion de cette première partie de la loi de finances pour 2016, discussion courtoise mais vive, qui n’aura pas amené les inflexions que nous aurions souhaitées et que les députés du groupe GDR ont défendues durant tout le débat. Ainsi, avec ce budget, le Gouvernement aura acté la disparition de l’ambition de 2012. Finie, la nouvelle architecture fiscale si indispensable à la justice sociale et à l’efficacité économique. Finie, la confiance républicaine dans les élus du peuple qui oeuvrent patiemment et passionnément dans tous nos territoires. Fini, le respect du peuple par la prise en compte des souffrances sociales et le soutien aux plus fragiles, qui sont soumis à un quotidien de plus en plus dur et violent.
Les faits sont têtus : plus de 5 millions de nos concitoyens sont privés d’emploi ; plus de 9 millions vivent sous le seuil de pauvreté ; et jamais, nous n’avons généré tant de millionnaires ; jamais, les dividendes versés n’ont été si conséquents, au service, d’abord, d’une caste sans scrupule ! Oui, l’égalité, si chère à la gauche, l’égalité constitutive de notre république a été abîmée. L’égalité retrouvée, c’est la fraternité assurée. L’égalité bafouée, c’est la porte ouverte aux divisions, à la haine, au repli. Or ce projet de loi de finances pour 2016 a oublié l’égalité.
Encalminé dans la dictature de l’oligarchie financière, celle qui rassemble les multinationales, les banques, la Banque centrale européenne, les banques centrales des États et les gouvernements, en faisant valser les hommes et les femmes d’un siège à l’autre, tels MM. Juncker, Draghi, ou Villeroy de Galhau, notre pays s’est soumis aux canons du libéralisme ! Tout se passe comme si vous aviez décidé de peaufiner les gammes et la partition d’orientations libérales, que les grosses caisses et les tromblons de la droite ambitionnent de jouer avec ardeur dans les prochaines années.
Pour 2016, ce qui est significatif n’est pas visible : c’est la montée en puissance du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – CICE – et du pacte d’irresponsabilité, déjà votés et non amendables. Ce qui est significatif, ce sont les 9 milliards d’euros supplémentaires donnés aux entreprises sans contrepartie ni sélectivité. Ainsi, en trois ans, la part des entreprises à l’effort collectif s’est effondrée. L’impôt sur les sociétés est devenu une chimère, passant de 52 à 32 milliards d’euros, avec un taux élevé mais mité par tant de niches fiscales que les plus gros y échappent. La non-sélectivité du CICE, si décriée par Christian Eckert avant qu’il ne devienne secrétaire d’État, a conduit à un échec terrible : chaque emploi préservé ou créé est estimé à 100 000 euros annuels. Quel gâchis !
Alors, on nous oppose la baisse de l’impôt sur le revenu, qui profiterait à 7 millions de nos concitoyens issus des classes moyennes et modestes. Mais la question de l’impôt, celle des prélèvements ne saurait se limiter à l’impôt sur le revenu. Pour 2016, selon vos estimations, nos concitoyens paieront 4 milliards d’euros de TVA en plus, un montant bien supérieur à cette baisse d’impôt annoncée de 2 milliards ! Cette évolution de la TVA contribue à concentrer l’impôt sur les plus modestes, et non l’inverse, comme l’affirment à tort ceux qui, à droite, ont toujours voulu remettre en cause la progressivité des prélèvements.
Le renoncement à la promesse de 2012 d’engager une réforme fiscale d’ampleur, au service de la justice fiscale mais également à la hauteur des enjeux environnementaux et climatiques actuels, aura été un grand échec. C’est aussi un échec et un reniement de voir le sort réservé aux collectivités locales dans ce budget. C’est surtout une faute politique et une erreur économique. La diminution des dotations de 3,7 milliards d’euros, évolution poursuivie d’année en année, outre qu’elle entraînera des hausses de l’imposition locale, aura des conséquences sur l’activité des territoires, sur l’emploi local et nos PME, et sur les services publics de proximité. Les territoires, notamment les plus fragiles, sont encore plus mis en danger par une réforme de la DGF précipitée et pas forcément juste.
Aussi, tout en saluant la première avancée sur la taxe sur les transactions financières, à propos de laquelle les mots de M. Sapin restent ambigus, rien n’a bougé sur la question majeure de l’évasion et de la fraude fiscale des multinationales. C’est pourtant là que réside le gisement de recettes ! Ce vol organisé, avec la complicité de certains États, nous fait perdre ainsi chaque année 60 à 80 milliards d’euros. Telle est la violence des riches !
En définitive, la partie recettes de ce budget pour 2016 ne fait qu’accroître une austérité qui fait si mal à la majorité de notre peuple. Des choix inefficaces, injustes et qui amènent désillusion et colère. Les députés du Front de gauche auront porté le fer sur une nouvelle progressivité de l’impôt, sur le nécessaire soutien aux collectivités, sur la remise en cause de niches fiscales destructrices de notre modèle social. Ce combat continuera, n’en doutez pas.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, à trop oublier les couches moyennes et modestes, à piétiner l’Histoire et l’ambition de la gauche, les récoltes de décembre devraient être proches de la disette, car non seulement vous avez trompé le peuple de gauche en vous tournant vers les libéraux, mais vous lui avez aussi demandé de payer la chambre. Les députés du Front de gauche se prononceront contre un volet recettes bien loin des exigences d’égalité.
Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Sur l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2016, le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Dominique Lefebvre, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, j’ai, au début de notre discussion budgétaire, affirmé la détermination du groupe socialiste, républicain et citoyen à faire adopter ce projet de loi de finances pour 2016 dans le respect de ses équilibres généraux : baisse du déficit, maîtrise de la dépense publique, baisse des prélèvements obligatoires, affirmation de nos priorités politiques. Nous nous sommes en effet engagés en 2012 devant les Français à redresser la France dans la justice et le progrès.
Redresser la France dans la justice et le progrès, c’est conduire les réformes et mener les politiques pour retrouver une croissance suffisamment riche en emplois, faire baisser le chômage et inscrire cette nouvelle croissance dans la nécessaire transition énergétique. Redresser la France dans la justice et le progrès, c’est réduire les inégalités, lesquelles sont d’autant plus insupportables en période de crise qu’elles s’étaient aggravées sous les deux précédents quinquennats. Redresser la France dans la justice et le progrès, c’est redresser nos comptes publics minés par les déficits et la dette pour préserver notre souveraineté, et donc faire les efforts nécessaires pour y arriver.
Le projet de loi de finances pour 2016, comme le projet de loi de financement de la Sécurité sociale dont nous engagerons la discussion tout à l’heure, poursuivent l’oeuvre de redressement engagée en 2012 et les amendements que nous avons adoptés sur la première partie du projet de loi de finances l’ont enrichie et renforcée. La première partie du projet de loi de finances soumis aujourd’hui à votre vote, mes chers collègues, est bien celui des engagements pris et des engagements tenus pour redresser la France dans la justice.
Engagement tenu, d’abord, sur la réduction des déficits, puisque le déficit de l’État s’établit à 72 milliards d’euros. Certes, il n’est inférieur que de 2 milliards d’euros à celui de 2015, mais cela tient tout simplement à la baisse en 2016 des prélèvements obligatoires pesant sur les ménages et les entreprises, à hauteur de 11 milliards d’euros. Engagement tenu, ensuite, sur la mise en oeuvre du Pacte de responsabilité et de solidarité, avec la baisse des prélèvements fiscaux et sociaux sur les entreprises, dont nous voterons la compensation intégrale par l’État à la Sécurité sociale. En 2016, nous aurons ainsi effacé non seulement les augmentations que nous avons dû voter en 2012 et 2013 en raison de l’état des finances publiques laissé par la droite, mais aussi les augmentations d’impôts votées par celle-ci en 2011 et 2012.
Engagement tenu également sur la baisse des impôts pour les ménages, avec comme priorité la baisse des impôts des ménages populaires et des classes moyennes, qui ont vu leur impôt augmenter continûment depuis 2009. C’est bien la mesure phare de ce texte. C’est surtout la troisième année consécutive de baisse des impôts pour les ménages, après la réduction d’impôt votée en juillet 2014 et la suppression de la première tranche du barème en 2015. Cette baisse d’impôts, nous la devons à nos concitoyens, qui ont fait des efforts considérables pour le redressement du pays et doivent bénéficier aujourd’hui des premiers retours de cet effort. Engagement tenu, enfin, sur la maîtrise de la dépense publique, qui se poursuivra, non pas par des coupes de crédits et des suppressions de postes aveugles mais par une approche rigoureuse de l’efficacité de la dépense publique, dans le respect des priorités politiques de notre majorité : la sécurité, la justice, l’éducation, l’emploi, la culture.
Tenir nos engagements et tenir le cap est certes difficile et nous pourrions, comme d’autres, nous exercer à la démagogie, à l’instar de la droite,
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains
dont la totalité des amendements que nous avons rejetés s’élevait à 53 milliards d’euros, montant à convertir, au choix, en augmentation du prix du paquet de cigarettes de 6,50 euros à 27,82 euros, ou en augmentation à due concurrence du déficit public. Voilà votre irresponsabilité en chiffres, chers collègues de l’opposition !
Mais tenir nos engagements et notre cap est indispensable au moment où les efforts demandés aux Françaises et aux Français commencent à porter leurs fruits. C’est essentiel pour retrouver la confiance dans notre pays, une confiance minée par des années de crise et par les dégâts du précédent quinquennat, dont nous subissons encore les effets.
Nos débats ont encore permis d’enrichir ce texte et je tiens à revenir sur quelques mesures adoptées à l’initiative des députés socialistes. Tout d’abord, par un amendement portant revalorisation du revenu fiscal de référence, nous revenons, certes partiellement, sur les effets de mesures décidées par la droite. Il permettra d’exonérer en 2016 les ménages modestes, les retraités et les veuves des impôts locaux qu’ils ne payaient pas jusqu’à présent et qu’ils doivent payer en 2015. Cet amendement sera financé par le différentiel positif résultant du rapprochement entre la fiscalité sur le diesel et celle sur l’essence, le reste des questions relatives à la fiscalité écologique étant renvoyé au prochain PLFR. Ensuite, le dispositif de soutien aux collectivités locales sera complété par une extension du FCTVA aux dépenses d’entretien des voiries.
Enfin, je me félicite de l’adoption de trois autres amendements : le premier permettra aux anciens combattants de bénéficier de la demi-part supplémentaire à 74 ans au lieu de 75 ans – je salue à cet égard la ténacité de Dominique Baert ; les deux autres portent respectivement sur l’élargissement de l’assiette de la taxe sur les transactions financières et sur l’affectation de ressources supplémentaires à l’aide au développement. Sur ce point, pour être parfaitement clair, le groupe socialiste a souhaité apporter son plein et entier soutien au Gouvernement et à Michel Sapin en particulier dans la négociation engagée dans le cadre de la coopération renforcée à onze. Cette négociation doit déboucher au plus vite pour que cette taxe sur les transactions financières trouve sa pleine efficacité, en termes de rendement comme pour la régulation du système financier, parce que nous ne l’appliquerons pas seuls. C’est là le seul objectif qui vaille ! Nous comptons sur vous, monsieur le ministre, et vous pouvez compter sur l’appui des parlementaires.
En définitive, après seize heures de débats, l’examen de 644 amendements et l’adoption de 99 d’entre eux, cette première partie du projet de loi de finances respecte pleinement nos engagements. C’est pourquoi le groupe socialiste, républicain et citoyen votera ce texte.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, notre groupe votera contre ce budget de résignation et de déclin.
En effet, votre projet de budget manque totalement de pédagogie et on y trouve bien des marques coupables de démagogie. Vous ne choisissez pas, comme le prouve la création de plus de 8 000 emplois publics. Vous n’économisez pas, comme l’a démontré le Haut Conseil des finances publiques. Le montant des économies présentées, sans toujours être étayées, dans le rapport de la rapporteure générale, est assez inquiétant : en 2015, vous avez prétendu réaliser 7,7 milliards d’économies réelles. Si elles étaient difficiles à justifier, il y avait au moins une politique d’affichage ! En 2016, cet affichage n’existe même plus : l’objectif n’est que de 2,5 milliards, c’est-à-dire trois moins qu’en 2015. Vous n’agissez pas : l’État manque tragiquement de force et de volonté dans la gestion des actifs publics. Vous serez coincés lorsqu’il s’agira de faire des choix stratégiques indispensables, par exemple sur la recapitalisation d’Areva.
Vous ne tranchez pas. Dominique Lefebvre aurait dû rappeler que les débats budgétaires ont été marqués par des polémiques incessantes à l’intérieur de la majorité, une défense bien fragile d’un certain nombre de vos choix, comme le crédit impôt pour la compétitivité et l’emploi et une défense particulièrement discrète du crédit impôt recherche. Il est évident que l’exécutif croit à peine, et la majorité pas vraiment, en une quelconque politique de compétitivité.
Vous n’assumez pas. Je pense ainsi à votre choix de faire des économies au détriment des finances locales. Oui, il est nécessaire d’économiser les deniers publics, et les budgets locaux ne font pas exception. Mais vous confondez cette nécessité avec une réforme incompréhensible, injuste de la dotation globale de fonctionnement.
Trop souvent, messieurs les ministres, votre propos est démagogique. Les propositions de taxation des transactions financières faites par votre majorité ont donné lieu à des scènes qui seraient grotesques, si elles n’étaient tragiques. On a vu ainsi le président du groupe socialiste présenter un amendement dont il s’était assuré qu’il serait le moins opérationnel possible.
Démagogie aussi de parler de retenue à la source. Que nos concitoyens se réveillent, qu’ils mesurent combien la retenue à la source serait périlleuse, combien elle encouragerait des majorités comme la vôtre à augmenter les impôts.
Il est vrai que plus vous en parlez moins vous la mettez en oeuvre. On nous dit qu’elle fera l’objet d’un débat, dans quelques semaines mais contrairement à ce que vous prétendiez, rien de tel ne figure dans le projet de loi de finances.
Vous invoquez l’écologie, mais l’écologie a bon dos quand il s’agit de faire tout autre chose. Il faut alerter nos concitoyens : depuis 2012, c’est plus de dix milliards d’impôts supplémentaires que, sous le pavillon de l’écologie, on aura imposés aux contribuables français : quatre milliards au titre de la TICPE et six milliards au titre de la taxe sur l’électricité.
Et que faites-vous de cette somme ? Ces augmentations d’impôts compensent largement les quelques réductions que vous nous proposez et la poursuite de la réduction de la base fiscale : de moins en moins de Français paient l’impôt sur le revenu. Il y a aura aussi de moins en moins de Français qui paieront les impôts locaux.
Certes le budget est une matière difficile, et personne ici, même sur nos bancs, ne peut prétendre à la perfection en cette matière. Mais le projet de loi de finances pour 2016 est une véritable menace pour la France et les Français.
Ce n’est pas là simple affaire d’appréciation, ce sont vos chiffres qui le prouvent. Les prélèvements obligatoires ne baissent pas. Vous avez dit le contraire tout à l’heure, monsieur le secrétaire d’État, mais la réalité est que les quelques baisses, bien mal réparties, que vous choisissez de mettre en avant sont plus que compensées par la main très lourde qui est la vôtre, en particulier en matière de fiscalité écologique, une écologie si mal servie par vos politiques.
Non seulement les prélèvements obligatoires ne baissent pas, non seulement les déficits ne baissent pas, mais il y a quelque chose qui augmente dans ce projet de loi de finances : c’est la dette.
Oui, cette situation est une menace, c’est un péril. Ce budget est un budget de résignation et de déclin, que le groupe Les Républicains récuse et refuse.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, pour sa quatrième loi de finances initiale, le Gouvernement nous présente un budget qui fleure bon l’ambiance préélectorale !
En effet cette loi de finances a pour ambition de faire oublier les hausses massives de prélèvements obligatoires intervenues depuis 2012 ainsi que l’extrême modestie de la réduction des déficits publics depuis cette date, celui-ci n’ayant baissé que d’un point de en trois ans. Il s’agit de faire croire à une double rupture avec les errements des trois premières années du quinquennat…
… avec un slogan tout simple : « en 2016 les impôts baisseront et les déficits reculeront fortement. »
Mes chers collègues, cette affirmation est fausse et c’est pourquoi le groupe UDI votera contre ce projet de budget.
Approbations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Elle est fausse d’abord parce que les impôts et les cotisations sociales ne baisseront pas en 2016, pas plus qu’ils n’ont baissé de 2012 à 2015.
Le Gouvernement a communiqué sur le thème de la pause fiscale afin de tenter de calmer le « ras-le-bol fiscal » de nos concitoyens, accablés d’impôts et de cotisations sociales depuis le début du quinquennat.
En 2016, la principale mesure du Gouvernement consistera à baisser de deux milliards l’impôt sur le revenu. Or même en prenant en compte cette diminution de deux milliards, le produit de l’impôt sur le revenu passera, selon vos prévisions, de 69,6 milliards en 2015 à 72,3 milliards en 2016, soit une hausse de 4 %. Autrement dit sans cette mesure de baisse, l’augmentation aurait été de 6,7 %, sans parler de la hausse des impôts locaux, que vous estimez à 3,2 % !
Quant aux prélèvements obligatoires dans leur ensemble, savez-vous, mes chers collègues de combien ils vont augmenter en 2016 ? De 22 milliards, selon les prévisions : 992,5 milliards en 2016 contre 970,5 en 2015, soit une hausse de 2,3 %.
Or entre 2012 et 2015, le montant des prélèvements obligatoires avait déjà augmenté de 57,2 milliards, soit une augmentation moyenne de 19,1 milliards par an. Comme vous le voyez, on fera encore mieux en 2016 puisqu’on passe de 19 à 22. Il y a donc une accélération.
Le Gouvernement ne procède donc pas à une baisse des prélèvements obligatoires mais à une très légère baisse de leur hausse. C’est ce qu’indique dans son rapport notre rapporteure générale, qui estime à 2,5 % l’évolution spontanée des prélèvements obligatoires en 2016 et a 2,3 % leur croissance effective. Le freinage est donc de 0,2 %. Vous apprécierez la performance ! Elle est d’importance, et je voudrais, messieurs les ministres, vous rendre hommage pour avoir réduit de 8 % la hausse !
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
D’ailleurs le taux des prélèvements obligatoires, selon vos propres prévisions, ne baissera pratiquement pas puisqu’il doit passer de 44,6 % en 2015 à 44,5 % en 2016, soit 0,1 point.
Mais, mes chers collègues, il suffit que le taux d’inflation en 2016 tombe de 1 %, hypothèse retenue par le Gouvernement, à 0,7 %, pour effacer cette prétendue baisse. Où est donc la baisse ?
« Il n’y en a pas ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.
Avec les dépenses fiscales, on atteint un sommet : celles-ci ont explosé depuis l’arrivée au pouvoir de l’actuel Président de la République, passant de 70,9 milliards en 2012 à 84,4 en 2015 et 83,4 en 2016, soit une augmentation de treize milliards en trois ans.
On est loin du programme du parti socialiste qui avait pour ambition d’annuler cinquante milliards d’euros de niches fiscales jugées « sans efficacité économique et injustes ». On est loin du programme de changement du candidat François Hollande, qui promettait une réduction des niches fiscales de 29 milliards d’euros. Le décalage entre les promesses du candidat François Hollande et la réalité s’élèvera donc en 2016 à 42,5 milliards.
« Non ! Pitié, pas ça ! »sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants et du groupe Les Républicains.
Quel cinéma ! Affligeant.
La deuxième raison de notre vote, c’est que la réduction du déficit du budget de l’État en 2016 ne sera que symbolique et celle de l’ensemble des déficits public plus faible qu’annoncée.
Pour ce qui concerne le déficit du budget de l’État, je veux saluer votre performance : celui-ci passe de 73 milliards en 2015, à 71,8 milliards en 2016, et une semaine de débats parlementaires l’a encore creusé de 200 millions. On progresse !
Les seize milliards d’économies annoncées par le Gouvernement sur l’ensemble du secteur public ne sont en fait, d’après les travaux de notre rapporteure générale, que six milliards, dont 3,5 sur les collectivités locales,…
…qui ne constitueront d’ailleurs une économie que si les collectivités locales réduisent leurs dépenses de fonctionnement sans augmenter leurs impôts locaux, hypothèse totalement irréaliste puisqu’un tiers des collectivités territoriales ont augmenté dès cette année les taux de leurs impôts, cette proportion risquant fort de dépasser la moitié l’année prochaine.
Le Gouvernement a eu tendance à substituer aux dépenses des crédits d’impôt, qui ne sont pas comptabilisés comme telles dans les documents budgétaires mais le sont dans la comptabilité nationale française : il s’agit bien de dépenses.
Mes chers collègues, ce dernier budget de plein exercice de la législature reflète le seul choix effectué par François Hollande : celui d’un immobilisme coupable…
… en attendant que son successeur prenne à sa place les mesures nécessaires au redressement de notre pays.
Le groupe UDI vous demandait de faire le choix du courage en revenant sur les erreurs commises depuis le début de ce quinquennat et en engageant sans tarder les réformes structurelles indispensables au redressement de notre pays.
Dans la mesure où le Gouvernement, comme il le fait depuis le début de ce quinquennat, est resté sourd à toutes les propositions constructives du groupe UDI, ce dernier votera contre la première partie du projet de loi de finances pour 2016.
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants et du groupe Les Républicains.
Je mets aux voix la première partie du projet de loi de finances pour 2016.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants: 556 Nombre de suffrages exprimés: 524 Majorité absolue: 263 Pour l’adoption: 277 contre: 247 (Le projet de loi est adopté.)
La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq, est reprise à dix-sept heures dix, sous la présidence de Mme Laurence Dumont.
La parole est à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mesdames et messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, une loi de financement de la Sécurité sociale représente toujours un moment important de la vie parlementaire. C’est un rendez-vous incontournable de l’automne budgétaire qui doit être l’occasion de nous écarter de l’actualité brûlante, de nous extraire de l’urgence du quotidien pour réfléchir, ensemble, à la manière de faire progresser ce qui est au coeur du Pacte républicain : notre modèle social.
« Doit être », j’emploie cette expression à dessein, parce que force est de constater que cela ne va pas de soi. À entendre certains discours, notre Sécurité sociale se résumerait à une somme d’équations financières, grevées par les abus, les excès, les dépenses toujours démesurées. Elle serait devenue un fardeau insoutenable, voué à une remise en cause, voire la liquidation, faute de pouvoir être réformé.
Ce déclinisme de façade masque en réalité le projet funeste, insidieux, porté par certains, de sacrifier la Sécurité sociale des Français sur l’autel d’une crise dont elle participe pourtant à les protéger. Celui de plonger des pans entiers de la solidarité dans la sphère marchande, où la retraite et la santé cesseraient d’être des droits pour devenir des biens.
À ces discours dangereux, passéistes, à rebours des attentes de nos concitoyens, nous répondons depuis trois ans par des actes. Notre conviction ? Les Français ne seront pas plus compétitifs en étant moins bien protégés. Au contraire, depuis soixante-dix ans, c’est la Sécurité sociale qui permet à la France d’aller de l’avant C’est la protection qui permet de se projeter dans l’avenir, d’entreprendre, de prendre des risques, de fonder une famille et de contribuer au fonctionnement de la société. Notre objectif ? Adapter la protection des Français à une société qui change, qui s’ouvre, qui entend le monde battre à sa porte. Notre méthode ? La modernisation et l’innovation sociale. Ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016 marque une étape supplémentaire dans cette action.
Tout d’abord, ce texte consolide la démarche, engagée dès 2012, pour faire progresser durablement les droits sociaux des Français. Il suffit de rappeler les progrès considérables accomplis depuis trois ans pour mesurer l’étendue du chemin parcouru. Remboursement à 100 % de l’interruption volontaire de grossesse, revalorisation de 10 % de l’aide à la complémentaire santé – ACS – pour les personnes âgées, suppression des franchises médicales pour l’ensemble des bénéficiaires de l’ACS, modernisation de notre politique familiale pour soutenir davantage les familles modestes, prise en compte de la pénibilité pour la retraite.
Avec ces mesures fortes, cohérentes, une dynamique a été engagée. Et les résultats sont là. En 2013, pour la première fois depuis 2008, le niveau de vie des personnes les plus modestes a augmenté. La commission des comptes de la santé le confirme désormais chaque année : depuis 2012, ce qui reste à la charge des Français en matière de santé diminue régulièrement. Nos concitoyens payaient en moyenne 9,1 % de leurs dépenses de santé de leur poche en 2011, cette part a été ramenée à 8,5 % en 2014. C’est 1 milliard d’euros de dépense en moins pour les Français.
Ce qui compte, bien sûr, c’est ce que chaque Français pris individuellement a déboursé ou déboursera en moins. Mais, pour la collectivité tout entière, c’est un milliard d’euros de dépenses en moins, un milliard que l’on a pu consacrer à autre chose. Derrière les chiffres, il y a un mouvement de fond : en trois années seulement, nous avons effacé cinq ans de hausse continue du reste à charge.
Cette nouvelle donne nous invite à poursuivre : poursuivre en créant de nouveaux droits, poursuivre en modernisant notre protection sociale. C’est ce que prévoit ce projet de loi.
D’abord en créant la protection universelle maladie. Nous avons tous rencontré des hommes et des femmes en situation de rupture de droits. Un changement de situation professionnelle, une évolution familiale, un déménagement : bien souvent, ces étapes de la vie pourtant naturelles entraînent une pluie de formalités administratives, avec une succession d’interlocuteurs qui se renvoient la balle. Bien souvent, les Français qui y sont confrontés – ils sont des millions chaque année – ne peuvent, au moins un temps, faire valoir leur droit à l’assurance maladie et doivent soit avancer des frais qui restent des mois à leur charge, soit renoncer aux soins.
Cette situation est d’autant plus incompréhensible et inacceptable que l’assurance maladie est universelle depuis plus de quinze ans. Elle est d’autant plus incompréhensible qu’en 2015, les nouvelles technologies permettent de simplifier considérablement la vie des assurés.
La protection universelle maladie est une réforme majeure qui donne à chacun la capacité de faire valoir ses droits en simplifiant radicalement les conditions requises pour ouvrir le droit à remboursement. Mais c’est infiniment plus qu’une réforme de simplification : c’est une réforme d’autonomie et de liberté, qui permettra à chaque individu de ne plus être enfermé dans la case qu’il doit aujourd’hui cocher pour être assuré. Les changements de caisse primaire d’assurance maladie se feront rapidement, en quelques clics. Le statut d’ayant droit sera supprimé pour les majeurs. La carte Vitale pourra être obtenue dès douze ans pour les enfants dont les parents le souhaitent. La spécificité des différents régimes sera évidemment maintenue, mais, dans les faits, les statuts d’étudiant, d’épouse ou d’époux, d’indépendant, de salarié ou de chômeur s’effaceront au profit d’une seule et unique citoyenneté sociale.
Oui, la protection universelle maladie fait de la sécurité sociale un espace de libre circulation au sein duquel la carte Vitale, désormais valable toute une vie – pour autant qu’on n’aura pas besoin de la changer pour des raisons strictement matérielles – aura valeur de passeport.
Garantir l’accès aux droits, c’est aussi répondre aux nouvelles réalités, aux nouveaux risques, fussent-ils extrêmes. C’est la raison pour laquelle ce texte prévoit une mesure forte dont la nécessité est malheureusement apparue ces derniers mois : la simplification des procédures de prise en charge des victimes du terrorisme. Concrètement, ces personnes doivent aujourd’hui s’adresser à la caisse nationale militaire de sécurité sociale et ne peuvent bénéficier de la gratuité des soins qu’après ouverture du droit à une pension d’invalidité. Désormais, elles bénéficieront de l’exonération totale de toute participation et de l’attribution des indemnités journalières en s’adressant à leur caisse primaire d’assurance maladie selon une procédure simplifiée. Évidemment, nous souhaitons tous que cette procédure n’ait pas à être utilisée. Mais les événements que nous avons connus nous conduisent à anticiper, et à garantir que toute victime puisse être prise en charge et accompagnée immédiatement, sans avoir à subir en plus des lourdeurs administratives.
Renforcer les droits sociaux des Français, ce projet de loi le fait aussi en étendant le droit à bénéficier d’une complémentaire santé de qualité. C’est l’une des priorités fixées par le Président de la République. Dès le 1er janvier 2016, les salariés pourront bénéficier de la généralisation de la complémentaire santé en entreprise. Mais en l’état actuel des textes, une partie des salariés les plus précaires, ceux qui sont en contrat à durée déterminée très court ou qui travaillent simultanément chez plusieurs employeurs, ne pourraient y prétendre, pour la simple raison que la procédure serait compliquée pour l’employeur. Avec ce PLFSS, il vous est proposé de les faire accéder à ce droit,…
…en faisant en sorte que l’employeur leur verse une somme forfaitaire leur permettant de souscrire une complémentaire santé.
« Qui paye ? » demande-t-on. Je rappelle qu’aux termes de l’ANI – accord national interprofessionnel – et de sa transposition législative, il reviendra à l’employeur, à partir du 1erjanvier prochain, de prendre en charge 50 % de la complémentaire santé de ses salariés. Ce qui est inacceptable, c’est qu’une partie de ces salariés – et pas les mieux protégés, mais au contraire les plus précaires d’entre eux – ne puissent accéder au droit commun précisément parce qu’ils sont précaires. La disposition que nous proposons prévoit donc que les employeurs apportent également une contribution financière au bénéfice de ces salariés, comme ils le feront pour l’ensemble des salariés à partir du 1erjanvier prochain.
Le droit à bénéficier d’une complémentaire santé de qualité, ce texte l’étend aussi aux personnes âgées. Qu’elles soient retraitées ou non, celles-ci sont confrontées à une hausse du coût de leur complémentaire avec l’âge. Il vous est proposé de mettre en place une sélection de contrats par mise en concurrence pour permettre aux plus de soixante-cinq ans de bénéficier d’une complémentaire moins chère ou apportant de meilleures garanties. Nous ne fixons pas a priori le nombre de contrats sélectionnés.
Coût moins élevé, garanties de meilleure qualité : j’insiste sur ces deux points car ces deux objectifs sont indissociables. Le premier ne saurait écraser l’autre : il n’est pas question de faire du « low cost ». La démarche est claire : permettre à des personnes âgées qui, aujourd’hui, ne sont couvertes par aucune complémentaire de souscrire à une assurance complémentaire dont le coût serait maîtrisé, et permettre aux personnes qui ont déjà une complémentaire de bénéficier de contrats de meilleure qualité ou mieux adaptés. Nos débats permettront, s’il est besoin, de confirmer à nouveau cette double exigence et de faire évoluer la rédaction du texte de manière à dissiper toute ambiguïté sur ce point.
Enfin, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale instaure le droit à une garantie des impayés de pension alimentaire. Les familles monoparentales sont davantage confrontées à la pauvreté que les autres. Parfois, le parent isolé – il s’agit le plus souvent de la mère – ne perçoit pas la pension alimentaire à laquelle il a droit, ou la perçoit de façon irrégulière. Nous avons donc expérimenté dans plusieurs départements une proposition nouvelle une garantie de pension alimentaire minimale de 100 euros par enfant, versée par la caisse d’allocations familiales au parent qui reste seul avec l’enfant, la caisse se retournant ensuite vers le parent défaillant pour récupérer les sommes qu’il aurait dû verser. Il vous est proposé de généraliser ce dispositif, dont 30 000 familles pourront bénéficier à terme.
Parce que les inégalités de santé persistent dans nos territoires, ce PLFSS vient par ailleurs renforcer la prévention et l’accès des Français aux soins.
Depuis 2012, j’agis pour faire de la prévention le coeur de notre système de santé. Nous avons déjà franchi des étapes considérables, comme la gratuité de la contraception pour les mineures. Le projet de loi de modernisation de notre système de santé, que vous examinerez en nouvelle lecture dans les prochaines semaines, traduit une stratégie forte, cohérente, qui tourne la page du « tout curatif » et investit dans la prévention, en particulier en direction des jeunes.
Avec ce PLFSS, il vous est proposé d’adopter des mesures nouvelles, innovantes, qui s’inscrivent dans cette démarche. Je pense à l’expérimentation fondée sur le repérage, par le médecin traitant, d’un risque d’obésité chez les enfants de trois et huit ans et la prise en charge financière de bilans d’activité physique et de l’intervention de diététiciens et de psychologues. Je pense aussi au renforcement de l’accès des mineures à la contraception. Si celle-ci, comme je l’indiquais, est désormais prise en charge à 100 % par la sécurité sociale, je vous propose par ce texte que la consultation de la prescription et les analyses biologiques qui y sont liées deviennent également gratuites et confidentielles.
Cette mesure était attendue par nombre d’associations et souhaitée par beaucoup d’entre vous, notamment par la présidente de la commission des affaires sociales. Je me réjouis de pouvoir vous la présenter aujourd’hui.
Enfin, toujours en matière de prévention, je vous proposerai un amendement visant à étendre la prise en charge intégrale du dépistage du cancer du sein aux examens supplémentaires que doivent faire les femmes présentant un risque élevé ou très élevé.
Au moment où nous parlons de prévention, je veux revenir sur la question du tabac, qui fait l’objet de plusieurs amendements. J’ai présenté il y a un an, à la demande du Président de la République, un programme national de lutte contre le tabagisme. Sa priorité : les jeunes. Parce qu’un tiers des jeunes de dix-sept ans sont aujourd’hui fumeurs réguliers et que cette réalité doit nous interpeller en tant qu’élus et en tant que citoyens. La cohérence de ce programme réside dans un ensemble de mesures, dont certaines commencent à être déployées. Il s’agit, pour beaucoup d’entre elles, de mesures choc. Une campagne de
communication entièrement nouvelle a été diffusée, le montant de la prise en charge des substituts nicotiniques a été triplé pour des populations spécifiques, la cigarette est désormais interdite dans les aires de jeu. D’autres mesures importantes vont suivre. Je pense évidemment au paquet neutre, dont le principe a été adopté en première lecture du projet de loi de santé à l’Assemblée nationale.
La cohérence que je défends devant vous, c’est donc celle de ce plan, dont je rappelle qu’il a été salué par l’ensemble des associations anti-tabac et qu’il ne prévoit pas de hausse de la fiscalité. On aurait pu envisager ce dernier point, mais un arbitrage a été rendu à l’occasion de la présentation du plan. Avec le Président de la République, nous avons fait le choix d’innover, de marquer les esprits, avec le paquet neutre et les autres mesures que je viens d’évoquer. C’est dans cette même démarche que s’inscrit le Gouvernement à l’occasion du PLFSS.
Ce texte permet également de renforcer l’accès des Français aux soins. En soutenant l’hôpital public, d’abord. Ce soutien est d’abord financier. Pour la première fois depuis plusieurs années, l’évolution de l’ONDAM – objectif national de dépenses d’assurance maladie – hospitalier sera en ligne avec l’évolution de l’ONDAM général. Derrière cela, il y a des engagements forts. Les ressources dédiées à la prise en charge à l’hôpital des personnes précaires sont sensiblement renforcées : 10 millions d’euros supplémentaires en 2016 à destination des établissements les plus engagés. Cet engagement, je le prends aussi s’agissant des soins palliatifs. Je présenterai prochainement le plan triennal voulu par le Président de la République. D’ores et déjà, ce texte prévoit une enveloppe de 40 millions d’euros supplémentaires pour réduire les inégalités d’accès en la matière, dont nous avons eu l’occasion de débattre lors de l’examen de la proposition de loi créant de nouveaux droits pour les personnes malades en fin de vie.
Soutenir l’hôpital public, c’est aussi réformer son financement. J’ai engagé cette réforme dès 2012, avec des dispositifs de soutien aux activités isolées ou la mise en oeuvre d’un financement à la qualité. Avec ce PLFSS, il vous est proposé de mettre en place un modèle de financement innovant pour les soins de suite et de réadaptation : la dotation modulée à l’activité. Concrètement, il s’agit de mettre un terme au « tout T2A » – tarification à l’activité – dans ces établissements en instaurant davantage de dotation dans les financements pour plus de stabilité. Réforme du financement toujours, s’agissant des stages des internes et des étudiants en médecine, puisque le texte permettra de valoriser davantage le temps de formation.
Renforcer l’accès aux soins, c’est aussi engager le virage ambulatoire, comme le prévoit le projet de loi de santé.
Avec ce PLFSS, nous confortons le modèle retenu dans certaines régions pour financer la PDSA, la permanence des soins ambulatoires, comme l’a souligné un rapport parlementaire présenté notamment par Mme la présidente de la commission des affaires sociales et M. Door…
Je cite M. Door car il a participé à l’élaboration d’un rapport parlementaire sur la PDSA. Cette mesure devrait donc faire l’objet d’un vote unanime…
Avec ce PLFSS, nous renforçons le développement de l’offre de soins visuels sans dépassements d’honoraires pour réduire les délais d’attente chez l’ophtalmologiste. Toutes ces mesures concrètes ont vocation à transformer le quotidien des Français.
Enfin, ce projet de loi marque une nouvelle étape du redressement des comptes sociaux.
Réduire le déficit de la sécurité sociale, nous le faisons depuis 2012. En trois ans, tout en apportant les progrès majeurs que j’ai évoqués, nous avons réduit le déficit de 40 %. Cette dynamique, nous la poursuivrons en 2016. Le déficit du régime général et du fonds de solidarité vieillesse, le FSV, devrait être ramené sous la barre des 10 milliards d’euros. La branche vieillesse devrait revenir à l’équilibre, pour la première fois depuis 2005. Nous devrions être collectivement fiers de ces résultats !
Et permettez-moi de dire qu’à mesure que les déficits se réduisent, les contradictions de l’opposition, elles, augmentent, comme en témoigne ce que j’entends sur les bancs situés à droite de cet hémicycle. D’un côté, vous ne cessez de vouloir faire croire aux Français que nous sommes de très mauvais gestionnaires…
…et, ce qui est contraire à la vérité, que les déficits augmentent, mais lorsque nous annonçons de bons résultats, vous dites qu’ils ne sont pas aussi bons que cela ou qu’ils ont été obtenus grâce à vous !
Non ! Ce n’est pas nécessairement grâce à vous mais à un ensemble de mesures qui ont été prises. Si les déficits diminuent, c’est parce que nous réformons et que nous remettons la France en mouvement.
Maîtriser les dépenses est une nécessité, mais ce n’est pas une fin en soi. C’est la promesse faite aux Français, et notamment aux plus jeunes d’entre eux, qu’ils pourront compter sur notre modèle social tout au long de leur vie. C’est aussi une promesse d’égalité, parce qu’en matière de santé les économies permettent de financer des traitements nouveaux – je pense aux traitements innovants de l’hépatite C qui, aujourd’hui, bénéficient aux Français qui en ont besoin. Et demain nous aurons le même débat concernant de nouveaux traitements anti-cancéreux qui sont sur le point d’arriver sur le marché.
En 2016, le déficit de l’assurance maladie sera d’environ 6 milliards d’euros, soit 2,6 milliards de moins qu’en 2011, même si ce chiffre est toujours trop élevé.
Nous poursuivons la maîtrise des dépenses tout en garantissant l’accès aux soins et en permettant à l’ensemble des Français, quels que soient leurs moyens, de bénéficier de l’innovation médicale.
Pour 2016, nous avons défini une progression de l’ONDAM de 1,75 %, contre une augmentation effective en 2015 de 2,05 %. Cela représentera un effort de 3,4 milliards d’euros, contre 3,2 milliards en 2015. Cet objectif sera tenu, parce que nous avons un cadre et parce que nous respectons une double exigence.
L’exigence, d’abord, d’engager des réformes structurelles : lutte contre le gaspillage, baisse des prix des médicaments et développement des génériques, économies d’échelle dans la gestion hospitalière. Tels sont les axes que nous poursuivons avec succès depuis trois ans.
L’exigence, ensuite, de refuser que les économies se fassent en amenuisant la protection des Français. C’est une rupture radicale par rapport à la politique menée par la majorité précédente, et je l’assume : depuis 2012, je le rappelle, pas une seule franchise supplémentaire, pas un seul déremboursement. Au contraire, l’année dernière, nous avons permis la suppression des franchises pour les plus modestes de nos concitoyens.
Mesdames et messieurs les députés, les Français sont attachés à leur protection sociale, ils le rappellent régulièrement dans les enquêtes d’opinion. La France de 2015, ce n’est pas l’individualisme, le chacun pour soi, la régression. Nous ne devons pas tendre aux Français ce miroir et leur faire croire que c’est de cette manière que notre pays ira de l’avant.
Ce PLFSS marque donc une nouvelle étape dans le renforcement de notre système de protection sociale. Il est une nouvelle occasion d’affirmer notre engagement en faveur d’un système qui s’adresse à chacun et facilite la vie de tous. Je vous remercie.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et sur quelques bancs du groupe écologiste.
Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mesdames et messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 porte sur près de 496 milliards d’euros de dépenses, soit quasiment l’équivalent des dépenses de l’État et des collectivités territoriales réunies. C’est dire si les déterminants de ces dépenses et de ces recettes présentent un intérêt particulier pour la trajectoire de nos finances publiques. Votre assemblée vient d’achever l’examen de la première partie du projet de loi de finances et je crois utile d’insister sur la cohérence de ces deux textes qui forment un ensemble.
Je m’attacherai, tout au long des débats, à vous apporter des réponses aussi précises que possible. Chaque sujet doit être traité au fond car nous n’avons rien à cacher, ni sur nos résultats en matière de réduction des déficits, ni sur l’importance et la nature des économies – que nous assumons parfaitement.
Afin d’apporter dès à présent un certain nombre de réponses à des questions qui ont déjà été posées lors de l’examen en commission, ou plus largement dans le débat public, je souhaite développer trois points : premièrement, nous obtenons des résultats – comme le redressement de la situation financière de la sécurité sociale ; deuxièmement, nous les obtenons grâce à des économies sur les dépenses ; troisièmement, ils nous permettent de financer nos priorités politiques.
Premier point, nous obtenons, chaque année, des résultats sur le terrain de la réduction des déficits. Comme je l’ai indiqué lors de l’examen du projet de loi de finances, nous pourrons tous tomber d’accord sur un point : ce gouvernement et cette majorité ont la responsabilité historique d’apurer des décennies de déséquilibre des finances publiques et de la sécurité sociale en particulier. Depuis 2001, dernière année au cours de laquelle le régime général et le fonds de solidarité vieillesse ont été excédentaires, les gouvernements successifs n’ont pas su profiter des années de croissance pour mettre la sécurité sociale à l’abri du déficit. La crise qui pèse sur les recettes depuis 2008 rend le redressement des comptes d’autant plus difficile.
Ce Gouvernement et cette majorité ont rompu avec une telle façon de faire et ce changement porte ses fruits chaque année.
Pour ce qui concerne les finances publiques dans leur ensemble, les premiers résultats sont là : notre déficit est au plus bas depuis sept ans et la dette globale est sur le point de se stabiliser par rapport au PIB, après huit années de hausse. Enfin, la dépense progresse, certes, mais à un niveau historiquement bas, grâce à une maîtrise des dépenses sans précédent.
S’agissant de la sécurité sociale, c’est plus clair encore. On ne le dira jamais assez ni assez fort : le déficit de la sécurité sociale recule chaque année depuis le début de la législature, passant de 21 milliards d’euros en 2011 à 12,8 milliards d’euros prévus en 2015. Ce résultat sera équivalent à celui obtenu avant la crise.
L’année prochaine, deux des quatre branches de prestations que compte le régime général seront en excédent : la branche accidents du travail et la branche vieillesse. La branche famille, elle, s’en rapprochera nettement puisque son déficit ne sera plus que de 800 millions d’euros et que l’équilibre sera atteint en 2017. Ce sont les réformes des retraites et les mesures d’économie prises sur la branche famille ces deux dernières années qui ont permis ces résultats.
Un chiffre permet de mesurer à quel point les résultats sont probants, c’est celui de l’évolution de la dette sociale. En 2015, pour la première fois depuis douze ans, la dette sociale va baisser en valeur, et ce mouvement va s’amplifier en 2016.
L’horizon de remboursement intégral de cette dette est fixé à 2024, et cet horizon ne s’est pas éloigné depuis le début du quinquennat. C’est dans ce contexte favorable que s’inscrit la mesure que nous proposons et qui consiste à anticiper le transfert de dettes sociales de l’ACOSS à la CADES, dans la limite prévue de 62 milliards, ce qui ne modifie en rien le niveau de la dette totale mais donne davantage de marges de manoeuvre quant à son apurement.
Vos rapporteurs ont d’ailleurs souligné longuement, et en détaillant ses effets, tout l’intérêt de ce transfert qui ne coûte rien mais sécurise l’avenir.
Deuxième point : ces résultats, nous les obtenons principalement par des économies sur la dépense.
Je voudrais prendre un peu de temps pour expliquer pourquoi ces économies, concernant la sécurité sociale comme l’ensemble des administrations publiques, sont indispensables.
En 2016, nous réaliserons au total 16 milliards d’euros d’économies au titre du plan de 50 milliards d’euros sur trois ans. Dans ce total, la contribution des administrations de sécurité sociale atteindra 7,4 milliards d’euros, pour l’essentiel dans le champ de la sécurité sociale proprement dit, le reste sur les régimes gérés par les partenaires sociaux.
Le champ de la sécurité sociale contribue donc fortement à l’amélioration globale du déficit public. C’est le fruit d’une politique résolue d’économies, sans sacrifier les droits des assurés et en maintenant notre priorité en faveur des Français les plus modestes.
Le rythme d’évolution des dépenses sociales prévu pour 2016 sera le plus faible enregistré depuis au moins vingt ans : 0,5 % seulement d’augmentation pour le régime général l’année prochaine, contre 0,8 % en 2015.
Faire des économies, c’est d’abord assurer aux Français que les dépenses sont efficaces et que leur argent est bien utilisé.
Ces économies sont, par exemple, réalisées sur les niches sociales. Dès lors que nous avons mis en place des allégements massifs de droit commun, nous sommes fondés à revoir certaines exonérations critiquées dans leurs caractéristiques ou inefficaces dans leurs effets.
II s’agit par exemple des exonérations applicables en outre-mer, qui seront réduites pour certaines entreprises – les grandes et celles peu exposées à la concurrence – et augmentées pour d’autres, là où il y a des enjeux en termes d’emploi et de croissance. II s’agit aussi de certaines exonérations « zonées » qui seront fermées pour l’avenir.
Ce choix est-il fondé sur un constat objectif et réfléchi ? Oui, puisque plusieurs rapports, de la Cour des comptes ou d’origine parlementaire, mettent en évidence la complexité et le coût de ces dispositifs.
Cette suppression a-t-elle un effet nocif pour l’emploi ? Non, puisque, comme le précisent ces mêmes rapports, les salaires les plus faibles bénéficieront des allégements généraux de cotisations.
Le volet fiscal de ces dispositifs est-il en cause ? Non, car seul le volet social a fait l’objet des critiques que j’évoque.
Cette suppression pose-t-elle un problème de sécurité juridique ? Non, puisque la fermeture du dispositif est sans effet sur les contrats en cours.
Sur ce sujet, plus encore que sur d’autres, j’incite chacun à faire preuve de cohérence. On ne peut pas sans cesse se poser la question de l’efficacité des exonérations et ne pas tirer les conséquences qui s’imposent lorsqu’on nous démontre de manière évidente que certaines sont moins efficaces que d’autres. Nous irons au bout de cette démarche.
Sur les dépenses d’assurance maladie, se fixer un objectif de progression inférieur à la tendance naturelle des dépenses, c’est également faire des économies. Il s’agit de s’assurer que les dépenses sont faites à bon escient, par exemple que les médicaments ne sont pas payés trop cher, ou qu’il n’y a pas d’actes et de prestations réalisés inutilement. Il s’agit aussi de rechercher la meilleure organisation des professionnels de santé, au sens médico-économique. Bref, il s’agit d’aller vers une meilleure qualité des soins au meilleur coût. C’est tout le sens du virage ambulatoire conforté par la loi de santé et dont les conséquences économiques sont intégrées au plan ONDAM 2015-2017.
Faire des économies, c’est revoir régulièrement nos modes d’intervention pour choisir les plus efficaces et les plus économes. Ces économies se fondent sur des diagnostics sérieux, établis notamment à partir des revues de dépenses lancées par la loi de programmation des finances publiques, adoptée l’année dernière.
C’est aussi réformer en profondeur. Ainsi, le projet de loi de finances, dont la première partie a été adoptée aujourd’hui même, prévoit une réforme des modalités de revalorisation de l’ensemble des prestations sociales. Cette réforme est également inscrite dans ce PLFSS pour les prestations qui en relèvent.
Le 1er avril, le Gouvernement aurait dû diminuer les prestations familiales de 0,7 point s’il avait appliqué strictement les dispositions en vigueur, qui prévoient une correction en cas d’inflation inférieure aux prévisions. Nous avons choisi de ne pas l’appliquer, mais il faut modifier cette règle pour l’avenir. Par ailleurs, les dates de revalorisation sont différentes selon les prestations – il y en a cinq au total –, de même que les indices pris en compte pour le calcul.
C’est pourquoi nous formulons deux propositions.
La première consiste à retenir seulement deux dates de revalorisation en les regroupant au 1er octobre pour les retraites, sans changement, et au 1er avril, qui est d’ores et déjà la date de revalorisation de la quasi-totalité des prestations de sécurité sociale, pour toutes les autres prestations.
La seconde proposition vise à supprimer tout risque de régularisation négative, puisque, dans le nouveau système, la revalorisation se fera uniquement en fonction d’évolutions connues, et non plus prévisionnelles. Cette réforme est neutre à long terme, l’inflation constatée et l’inflation prévisionnelle convergeant sur longue période. Elle conduit, du fait de la très faible inflation que nous connaissons actuellement, à un impact sur les finances publiques de l’ordre de 500 millions.
Enfin, je tiens à revenir sur les 7,4 milliards d’économie réalisés dans la sphère sociale en 2016. En effet, des interrogations se sont élevées sur ce point et je ne veux pas qu’il n’y ait pas d’ambiguïté sur la réalité de ces économies.
Le rapporteur pour avis de la commission des finances, dans son excellent rapport sur le PLFSS, se félicite, au-delà du détail des mesures, du réel ralentissement de la dépense sociale sur les dernières années.
Ces mesures se décomposent de la manière suivante : 3,4 milliards d’économies sur l’ONDAM, 1 milliard qui correspond à l’impact en 2016 de mesures déjà décidées – notamment en matière de politique familiale, du fait de la modulation des allocations familiales votée l’an dernier, qui produit des effets croissants en 2016, et de la montée en charge des mesures de la loi retraite, notamment de l’impact de la réforme du cumul emploi retraite et du décalage de la date de revalorisation des pensions du 1er avril au 1er octobre –, et 3 milliards correspondant à d’autres mesures.
En voici le détail : 500 millions sur les dépenses de gestion des organismes de protection sociale, 500 millions au titre de la réforme des modalités de revalorisation des pensions, déjà évoquée, 300 millions liés aux mesures de lutte contre la fraude et au ralentissement des dépenses d’action sanitaire et sociale des organismes, 1 milliard d’économies attendues à la suite de la négociation entre les partenaires sociaux au titre de la réforme des retraites complémentaires. À cet égard, et sous réserve des conclusions à venir, les grandes lignes de l’accord qui s’est esquissé en fin de semaine dernière devraient conduire à un résultat très proche de notre prévision. S’y ajoutent enfin 800 millions de nouvelles économies dans le champ de l’assurance chômage. C’est ce qui reste à confirmer en fonction de l’évolution de la négociation.
En troisième lieu, il me faut rappeler que, si nous faisons ces économies, c’est d’abord pour nous donner les capacités de financer notre politique et de nouveaux droits. Faire des économies, c’est aussi recréer des marges de manoeuvre pour financer nos priorités. C’est vrai pour l’État, que j’ai eu l’occasion d’évoquer devant votre assemblée, et pour la Sécurité sociale.
Il s’agit d’abord de financer notre politique de santé et de protection sociale. Notre démarche ne sacrifie pas les droits des assurés ; bien au contraire, elle les renforce.
Plusieurs mesures, que Marisol Touraine a présentées, améliorent les prestations aux assurés. Je pense notamment aux mesures de prévention de l’obésité ou du cancer du sein, à la création d’une garantie de pension alimentaire pour les familles monoparentales et aux mesures en faveur de l’accès des retraités et des salariés précaires à une complémentaire santé.
En matière de santé, par exemple, l’ONDAM est fixé pour 2016 à 185,2 milliards, soit 3,3 milliards de plus qu’en 2015. Je ne suis pas sûr que tout le monde en ait conscience, mais nous dépenserons en 2016 3,3 milliards de plus pour la santé des Français. Je l’explique souvent : les économies consistent à ralentir l’augmentation spontanée des dépenses et non à en réduire la valeur – alors même que, dans un autre champ, les dépenses de l’État baissent en valeur.
D’aucuns considèrent parfois que ce ne sont pas là de vraies économies. Il est pourtant évident que lorsqu’on dépense moins que le niveau auquel nous amènerait la tendance « sans rien faire », alors que la population augmente, que les soins et les produits de santé coûtent plus cher et que les Français vivent plus longtemps, c’est que, indubitablement, on a fait un effort d’économie.
S’agissant de l’assurance-maladie, je souligne que depuis 2012, l’objectif de dépense a été respecté chaque année et que nous avons pris toutes les dispositions afin de respecter l’objectif pour 2015. Publié le 7 octobre, l’avis du comité d’alerte – qui mériterait peut-être un autre nom – confirme cette maîtrise et valide en outre la construction de l’ONDAM pour 2016.
Un objectif d’augmentation de 1,75 % est exigeant. C’est d’ailleurs le taux le plus bas depuis la création de l’ONDAM, en 1997, mais il a été fixé en garantissant le respect de la qualité des soins aux assurés.
Par ailleurs, nous mettons en oeuvre des mesures en faveur de nos concitoyens.
Je pense d’abord à la suppression des cotisations minimales d’assurance maladie pour les exploitants agricoles et pour les travailleurs indépendants. Il s’agit d’une proposition du rapport des députés Sylviane Bulteau et Fabrice Verdier remis au Premier ministre. Elle s’inscrit dans une refonte plus globale des cotisations sociales payées en cas de revenu très faible. Nous proposons ainsi d’améliorer les droits à la retraite des travailleurs indépendants qui se trouvent dans cette situation.
Je pense aussi à la réduction du délai de carence pour le bénéfice des indemnités journalières. Les cotisations minimales du RSI seront plus faibles, plus justes et plus lisibles.
Ces économies nous permettent de financer notre politique économique en poursuivant la baisse des prélèvements sur les entreprises et les ménages. Le PLFSS met en oeuvre les mesures du pacte de responsabilité prévues pour 2016.
Je sais que, comme l’année dernière, nous reviendrons dans nos débats sur l’opportunité des baisses de cotisations sociales ou encore de la suppression progressive de la C3S. Comme j’ai eu l’occasion de le dire lors de la discussion générale du projet de loi de finances, nous attachons un prix élevé à la stabilité des orientations données en matière de prélèvements obligatoires.
S’agissant de l’existant, notre politique est simple et consiste à maintenir les dispositifs qui fonctionnent, tout en veillant à ce qu’ils restent utilisés pour satisfaire leurs objectifs initiaux. Je pense notamment au crédit impôt recherche, mais aussi au CICE, dont la transformation en allégement de cotisation est une perspective à terme. Ce dispositif ne doit pas être remis en cause alors même que les entreprises sont en train de se l’approprier pour de bon, comme le montrent les chiffres relatifs aux créances de 2015.
Nous mettons en place depuis deux ans une politique économique qui suit un cap clair et nous nous y tenons. Dès le mois d’avril 2014, le Premier ministre a annoncé dans sa déclaration de politique générale ses orientations et celles de son Gouvernement. J’invite chacun de ceux qui participent à nos débats à y revenir, pour constater que ces engagements ont été tenus.
Le texte soumis à votre examen met en oeuvre ces orientations. En 2016, nous prévoyons de réaliser pour les entreprises pas moins de 9 milliards d’allégements supplémentaires, auxquels contribueront deux mesures.
La première, la baisse de 1,8 point de cotisations sociales pour les salaires inférieurs à 3,5 SMIC, sera réalisée à compter du 1er avril. Pour une enveloppe constante, ce décalage permet de tenir compte des mesures décidées cette année en faveur des entreprises et dont certaines bénéficient dès 2015, comme le sur-amortissement, pour un coût de 500 millions par an.
La seconde est la baisse de la C3S, qui se poursuit. Comme l’année dernière, nous avons fait le choix d’un abattement en portant celui créé en 2014 de 3,5 millions à 19. Le choix de ce paramètre a deux mérites. Il favorise les TPE et les PME, en exonérant totalement 80 % des entreprises qui restaient redevables. Il fait profiter les entreprises industrielles d’une proportion importante de l’exonération, plus précisément de 250 millions sur un total d’un milliard. Celles-ci reçoivent ainsi plus que leur part dans la valeur ajoutée.
Enfin, nous menons cette politique pour financer notre modèle social et assurer sa pérennité. Vous ne manquerez pas de relever que, comme l’an dernier, c’est l’État, et non la Sécurité sociale, qui supporte intégralement le coût des baisses de recettes liées au pacte.
Je me souviens des questions qui avaient été soulevées en juin 2014 sur la réalité et l’ampleur de cette compensation. Aussi je tiens à souligner que, là encore, les engagements qui avaint été pris ont effectivement été tenus.
Cette compensation sera à nouveau réalisée à l’euro près en 2016, et elle sera pérenne. Comme l’année dernière, elle sera réalisée par le transfert vers le budget de l’État de certaines dépenses aujourd’hui retracées dans les comptes de la Sécurité sociale, et ce dans une logique de rationalisation.
Cela concerne le financement de l’aide au logement familial, l’ALF, et des mesures de protection des majeurs vulnérables. Cet effort significatif, qui représente plus de 5 milliards supplémentaires en 2016, explique que l’on ne constate en 2016, qu’une faible réduction, de l’ordre de 1 milliard d’euros, du déficit budgétaire de l’État.
Dans le cadre de cette compensation, je souhaite en dernier lieu revenir sur les suites de l’arrêt « de Ruyter ». La Cour de justice de l’Union européenne a en effet conclu que les prélèvements sur les revenus du capital ne pouvaient pas être affectés aux assurances sociales parce que, pour faire respecter le principe de libre circulation des travailleurs au sein de l’Union, les ressortissants européens ne peuvent être soumis qu’à une seule législation sociale. Par conséquent, les personnes déjà affiliées à la Sécurité sociale dans un autre État membre ne peuvent être assujetties à ces prélèvements dans les conditions actuelles.
Il nous faut tirer les conséquences de ce contentieux dont, je tiens à le souligner, nous avons hérité, puisqu’il a été engagé non pas contre la loi de 2012, mais contre la logique originelle de la CSG, à savoir l’absence de lien entre cette contribution et le bénéfice des prestations ; ce contentieux a d’ailleurs été introduit en 2001.
Bien entendu, toutes les dispositions ont été prises pour que les personnes qui entrent dans le champ de cet arrêt puissent, pour le passé, bénéficier d’un remboursement des prélèvements effectués à tort. D’ailleurs, dès le mois de février, les conséquences financières ont été tirées et des provisions ont été constituées dans les comptes au titre des remboursements à venir.
Sur la base de la décision du Conseil d’État intervenue en juillet, les services de la direction générale des finances publiques ont établi les modalités de remboursement, et j’ai donné la semaine dernière les consignes pour les mettre en application. J’ai voulu que ces modalités soient les plus simples possibles pour les contribuables. Notamment, nous avons limité les justificatifs à produire à ce qui est strictement nécessaire pour un remboursement dans des conditions sécurisées.
Pour l’avenir, il nous a fallu tenir compte du fait que les prélèvements sociaux, notamment la CSG, sont des impôts affectés à la protection sociale, mais ne peuvent plus financer des prestations d’assurance. Aussi, pour respecter la décision de la Cour de justice de l’Union européenne sans dénaturer la CSG et dans un souci d’équité entre l’ensemble des contribuables, le projet de loi prévoit d’affecter ces prélèvements à des prestations non contributives identiques à celles financées par les autres impôts. Cette affectation se fera principalement au Fonds de solidarité vieillesse – FSV – et, accessoirement, à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie – CNSA –, pour financer la dépendance. Les modalités précises sont détaillées dans l’excellent rapport du rapporteur pour la partie « recettes » ; je vous invite à vous y référer.
Enfin, et j’insiste sur ce point, rien ne nous interdit juridiquement de soumettre les non-résidents aux prélèvements sociaux sur le capital. Je sais que certains souhaitent tirer prétexte de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne pour revenir sur la loi de finances rectificative d’août 2012, qui a assujetti les non-résidents à ces prélèvements sur leurs revenus fonciers et plus-values d’origine française. Nous ne donnerons évidemment pas suite à cette demande, non seulement parce que ce serait recréer une injustice, une inégalité à l’égard des autres contribuables, mais aussi parce que cette mesure ne nous serait d’aucune utilité pour résoudre le problème communautaire. Comme je l’ai déjà dit, la Cour de justice de l’Union européenne ne nous reproche pas d’assujettir les non-résidents, mais conteste le fait qu’on puisse taxer des personnes déjà affiliées dans un autre État de l’Union pour financer nos régimes d’assurance.
Mesdames, messieurs les députés, notre modèle de protection sociale, nous le voulons généreux, juste et pérenne. Alors que la Sécurité sociale fête cette année ses soixante-dix ans, c’est une responsabilité lourde, et qui incombe à notre génération, d’en rétablir l’équilibre financier pour qu’elle puisse continuer à assurer aux générations suivantes les mêmes garanties que celles dont nous bénéficions aujourd’hui. Ce texte y contribuera fortement, par la sécurisation de notre trajectoire de réduction du déficit, par des mesures en faveur de l’activité et de la croissance, mais aussi par la confiance même qu’il permet de rétablir puisque les résultats constatés depuis plusieurs années confortent plus que jamais notre prévision pour les années à venir.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour les recettes et l’équilibre général.
Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les rapporteurs, monsieur le rapporteur pour avis, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016 a été adopté par le Conseil des ministres au lendemain même de la célébration du soixante-dixième anniversaire de la création de la Sécurité sociale dans notre pays. Cette création est sans nul doute l’une des plus belles réussites collectives et sociales de l’après-guerre. Il faut bien évidemment rendre hommage, à cet égard, aux pères fondateurs de la Sécurité sociale, héritée du programme du Conseil national de la Résistance. Nous avons tous sur ces bancs, au-delà de nos appartenances politiques, de quoi être fiers de cette richesse qu’est la Sécurité sociale. Nous pouvons être fiers d’avoir su mettre en place et, plus encore, de faire durer un système qui protège nos concitoyens des risques de la vie : la maladie, les accidents du travail restent bien sûr des épreuves individuelles souvent douloureuses, mais une partie au moins de leur poids est supportée collectivement, grâce à la Sécurité sociale.
Pour adopter une perspective positive, trop souvent délaissée dans le pessimisme ambiant, c’est aussi la Sécurité sociale qui nous permet d’apprécier plus sereinement les moments que l’on espère heureux de nos vies : la maternité, mais aussi la retraite, en particulier dans un contexte d’allongement de la durée de vie.
La Sécurité sociale est l’une de nos principales richesses collectives, qu’il nous appartient de préserver afin que nos lointains successeurs dans cet hémicycle puissent encore en célébrer les mérites dans soixante-dix ans. Préserver notre Sécurité sociale nous oblige à faire preuve de responsabilité : il faut que les générations futures bénéficient au moins du même niveau de protection que leurs parents et leurs grands-parents, mais sans supporter le poids de lourdes dettes que nous leur aurions laissées en héritage. La responsabilité, c’est le fil rouge de ce PLFSS, tel qu’il vient d’être présenté par Mme la ministre et M. le secrétaire d’État.
En effet, ce PLFSS s’inscrit pleinement dans la trajectoire de redressement des comptes sociaux, courageusement décidée par le Président de la République et le Gouvernement depuis 2012, et pleinement assumée par la majorité parlementaire. De fait, dans un contexte économique pourtant dégradé, le déficit cumulé du régime général de Sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse n’a cessé de décroître depuis 2012, comme l’attestent les chiffres rappelés par M. le secrétaire d’État au budget : il est passé de 17,5 milliards d’euros en 2012 à 15,4 milliards en 2013 et 13,2 milliards en 2014. En 2015, selon les prévisions réactualisées, le déficit devrait s’élever à 12,8 milliards. En 2016, la situation devrait significativement s’améliorer, avec un déficit cumulé du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse ramené à 9,7 milliards d’euros. Madame la ministre, vous auriez pu vous targuer du fait que, par rapport à son niveau de 2011, le déficit devait être en baisse de 40 % en 2015 et de 50 % en 2016.
La situation du Fonds de solidarité vieillesse est en revanche quasi stable ; son déficit devrait atteindre 3,7 milliards en 2016. Les charges du Fonds tendent en effet à s’accroître mécaniquement en période de crise économique, puisque celui-ci a, en substance, vocation à se substituer aux régimes « assurantiels » de retraite pour le financement des prestations correspondant aux périodes sans cotisations, et notamment les périodes de chômage.
Ces perspectives reposent sur l’hypothèse d’une croissance du produit intérieur brut en hausse, qui passerait de 1 % en 2015 à 1,5 % en 2016. Parallèlement, la masse salariale du secteur privé, qui constitue l’assiette principale des recettes des organismes de Sécurité sociale, croîtrait davantage en 2016 – de 2,8 % – qu’en 2015, où elle devrait s’élever à 1,7 %. La reprise attendue de la croissance repose elle-même sur des hypothèses d’inflation faible à modérée – 0,1 % en 2015, 1 % en 2016. Cette faible inflation, associée à la réduction de l’impôt sur le revenu des plus modestes prévue par le projet de loi de finances, concourt à l’augmentation du pouvoir d’achat des ménages.
Le retour à l’équilibre des comptes de la Sécurité sociale, initialement envisagé dès 2017, a dû être repoussé du fait de la mauvaise conjoncture économique des dernières années ; selon les estimations du dernier rapport de la Commission des comptes de la Sécurité sociale, cet équilibre pourrait être atteint en 2020 ou 2021, vingt ans après la dernière année d’équilibre, qui n’était autre que 2001. Néanmoins, les régimes obligatoires de base devraient être excédentaires dès 2019 ; seul le déficit persistant du Fonds de solidarité vieillesse, estimé à 2,8 milliards d’euros, empêcherait le retour à l’équilibre de l’ensemble des comptes dès cette date.
S’agissant de 2016, et conformément à l’engagement présidentiel de stabilisation du taux de prélèvements obligatoires, l’essentiel de l’effort portera sur les dépenses. C’est principalement l’assurance maladie qui sera mise à contribution : l’ONDAM est en effet fixé à 1,75 %, alors que les dépenses progresseraient mécaniquement de 3,6 % si les efforts nécessaires n’étaient pas engagés.
Mais responsabilité ne rime pas avec austérité. Ce projet de loi marque au contraire la mise en oeuvre de la deuxième phase du pacte de responsabilité et de solidarité, après les premières mesures adoptées dans la loi de financement rectificative de la Sécurité sociale, dès août 2014. Nous en sommes à la deuxième phase, qui doit redonner des perspectives de croissance à nos entreprises, et donc des perspectives d’emploi à nos concitoyens.
D’une part, l’article 7 de ce projet de loi élargit l’assiette de la réduction de 1,8 point des cotisations familiales aux salaires compris entre 1,6 et 3,5 fois le SMIC. Il s’agit de dynamiser la compétitivité de celles de nos entreprises qui sont les plus exposées à la concurrence internationale.
D’autre part, l’article 8 poursuit la suppression progressive de la contribution sociale de solidarité des sociétés, la C3S, en portant l’abattement sur le chiffre d’affaires de 3,25 à 19 millions d’euros : sont concernées non seulement les PME, qui n’étaient pas encore totalement exonérées, mais aussi les entreprises de taille intermédiaire, dont il faut faciliter la croissance.
Ces mesures ne recueillent pas l’assentiment de tous, y compris au sein de la majorité. Nous aurons donc une nouvelle fois l’occasion d’en débattre, lors de l’examen des amendements.
Ces dispositions engendrent des pertes de recettes pour les organismes de Sécurité sociale. Je rappelle, après M. le secrétaire d’État, que ces pertes sont intégralement compensées par le projet de loi de finances pour 2016 : le budget de l’État financera à l’avenir des dépenses aujourd’hui assumées par la branche famille, essentiellement l’allocation de logement familiale. Cette compensation appelle des réaffectations de recettes au sein de la Sécurité sociale, pour éviter que la branche famille ne soit – j’emploie des guillemets – « gagnante » au détriment des autres branches et organismes qui, eux, seraient « perdants ». L’article 15 procède à ces transferts, dont la complexité est manifeste : dans le rapport de la commission, un schéma essaie d’en rendre compte.
La responsabilité, c’est aussi, bien évidemment, le respect du droit. À cet égard, ce même article 15 tire les conséquences de la décision de la Cour de justice de l’Union européenne – l’arrêt « de Ruyter » –, en application de laquelle des prélèvements sociaux acquittés par des personnes affiliées à un régime de Sécurité sociale dans un autre État membre ne sauraient être affectés au financement de prestations contributives, qui relèvent d’une logique d’assurance. J’aurai l’occasion de le répéter plusieurs fois en réponse à des amendements déposés sur ce sujet : contrairement à ce que certains semblent croire, cette décision ne nous oblige pas à revenir sur la décision que nous avons prise en début de mandat, consistant à assujettir les non-résidents aux prélèvements sociaux sur les revenus du capital. C’est là une mesure de justice.
Ce PLFSS contribue aussi au « choc de simplification » annoncé par le Président de la République en mars 2013 : l’article 57 opère une refonte des dates et méthodes de revalorisation de certaines prestations sociales, en cohérence avec l’article 33 du projet de loi de finances, de façon à les rendre plus lisibles pour les assurés. Ceux-ci seront mieux à même de comprendre l’évolution du montant de leurs prestations par rapport à celle de l’inflation constatée – et non plus prévisionnelle.
La responsabilité appelle également la proportionnalité des sanctions aux infractions, qui consolide la confiance que les cotisants placent dans le système de protection sociale. À cet égard, l’article 11 met fin à une situation injuste, dans laquelle une simple erreur administrative aboutissait à assujettir aux cotisations sociales l’ensemble du financement par l’employeur d’un régime de protection sociale complémentaire, financement en principe exonéré. Cet article s’inspire du rapport que nos collègues Marc Goua et Bernard Gérard ont remis au Gouvernement en qualité de parlementaires en mission sur l’amélioration des relations entre les URSSAF et les cotisants. Nos deux collègues ont déposé une série d’amendements sur la base de ce rapport. La commission en a accepté deux, pour prévoir notamment que les avertissements et mises en demeure adressés aux employeurs et aux travailleurs indépendants dans le cadre des procédures de recouvrement doivent être précis et motivés.
Agir en responsabilité, c’est aussi savoir saisir les opportunités, comme nous le faisons ici en matière de désendettement. La Caisse d’amortissement de la dette sociale – CADES – doit reprendre à l’Agence centrale des organismes de Sécurité sociale, l’ACOSS, 62 milliards d’euros de déficits cumulés des années 2011 à 2017. Cette reprise devant se faire dans la limite de 10 milliards d’euros par an, ce sont 23,6 milliards qui restent à reprendre.
Compte tenu du niveau historiquement faible des taux d’intérêt, l’article 17 de ce PLFSS propose de faire reprendre la totalité de ces 23,6 milliards en 2016, ce qui permettra à la CADES, qui emprunte sur les marchés pour reprendre les déficits à l’ACOSS, de le faire dans de très bonnes conditions, qu’il serait hasardeux de considérer comme pérennes. Sur mon initiative, la commission a adopté un amendement mettant en cohérence avec les dispositions de cet article le calendrier de reprise de dette par la CADES.
Être responsable, c’est enfin être lucide : l’anticipation de reprise de dette par la CADES, qui est une très bonne idée dans le contexte actuel, n’a pas vocation à solutionner la question de la reprise des déficits postérieurs à 2015, qui devra bien trouver une réponse dans un prochain texte.
L’examen en séance publique sera l’occasion de discuter de nombreux sujets.
Ces sujets étant nombreux, madame la présidente, j’en viens directement à ma conclusion. Nos débats seront riches et je ne doute pas qu’ils se dérouleront dans un climat apaisé, comme le début de cette discussion semble le présager. Comme il est de coutume, et sans surprise, j’appelle l’Assemblée à adopter le volet « recettes et équilibre général » du PLFSS, dont j’ai l’honneur d’être le rapporteur, et bien évidemment l’ensemble du texte.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à Mme Michèle Delaunay, rapporteure de la commission des affaires sociales, pour l’assurance maladie.
Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, mes chers collègues, le Président de la République nous l’a rappelé, la Sécurité sociale constitue, avec l’école, le deuxième pilier de notre république. Elle est notre trésor national et nous ne la sauverons pas sans les Français, ni sans engagement de notre part et sens de la responsabilité.
Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016 est un texte d’effort et d’efficience ; il propose de fixer l’ONDAM à 185,2 milliards d’euros, ce qui correspond à une progression de 1,75 % par rapport à la prévision d’exécution de l’ONDAM de 2015. Il s’agit d’un objectif très ambitieux dans la mesure où la croissance tendancielle des dépenses de l’ONDAM pour 2016 est estimée à 3,6 %. Pour l’atteindre, diverses mesures d’économies sont envisagées qui n’altéreront ni l’accès aux soins, fil rouge de cette législature, ni leur qualité. Je ne les détaillerai pas ici : nous les avons tous largement analysées et travaillées.
Il importe de souligner que l’effort légitime de redressement des comptes ne fait pas obstacle à la réalisation des engagements de notre majorité. À l’occasion des 70 ans de la Sécurité sociale, il n’est plus acceptable de constater que certains perdent momentanément leurs droits à la protection en raison de la complexité des changements de régime. C’est ce à quoi entend remédier l’article 39 en instaurant la protection maladie universelle, c’est-à-dire en donnant des droits individuels aux personnes tout en garantissant la confidentialité de leurs soins.
Cet article 39 prévoit également de repenser les modalités des délégations de gestion d’assurance maladie obligatoire à certaines mutuelles. Par voie d’amendement, la commission entend sécuriser le dispositif, d’une part, en maintenant dans la loi le principe de remises de gestion, et, d’autre part, en précisant les conditions dans lesquelles il peut être mis fin aux délégations en cas de défaillance ou de volonté d’un organisme délégataire.
Ce projet vise également à résorber les disparités d’accès aux soins qui existent entre les générations, voire au sein même d’une génération. L’instauration, à l’article 21, d’une procédure de sélection d’offres de qualité à un prix soutenable à destination des personnes de plus de 65 ans supportant un reste à charge très élevé est paradigmatique de ce souci de ne laisser aucune frange de la population à l’écart de notre système de protection sociale.
Dans le même ordre d’idées, la création à l’article 22 d’un chèque santé ayant vocation, pour les salariés en contrat précaire, à se substituer à l’aide de l’employeur pour le financement d’une complémentaire santé, répond à la nécessité de trouver les bons outils pour que l’accès de tous aux soins ne soit pas une vaine formule.
La démarche d’accès effectif aux soins se caractérise également par la maîtrise du reste à charge. Tel est l’objet de l’article 52, qui réforme le régime des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés – PAMC. Il prévoit ainsi l’alignement progressif du taux de cotisation des adhérents au régime des PAMC sur celui du régime social des indépendants, de 9,8 % à 6,5 %. Cette charge n’en est pas moins équilibrée par la constitution d’une contribution portant sur les revenus ne relevant pas du champ conventionnel. Cette mesure complète utilement la palette des outils de « désincitation » aux dépassements d’honoraires.
L’organisation de l’offre de soins est aujourd’hui complétée par la pérennisation d’une expérimentation actuellement menée par l’agence régionale de santé des Pays de la Loire. Je m’en félicite d’autant plus que cette disposition fait suite à une recommandation du rapport de la mission d’information de la présidente de notre commission, Mme Lemorton, et de M. Door portant sur la permanence des soins ambulatoires. La commission a entendu renforcer ces dispositions en faisant droit à une autre recommandation de ce rapport que vous avez confirmée par voie d’amendement, à savoir la prise en charge des certificats de décès.
Concernant les établissements de santé, ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale se caractérise par une constance des engagements de la majorité envers les établissements de santé, qu’il s’agisse du désormais fameux virage ambulatoire, du modèle de financement ou de la nécessaire modernisation.
Les précédentes lois de financement ont quelque peu infléchi les effets pervers de la tarification à l’activité ; financement des activités isolées, dégressivité tarifaire. Le projet de loi s’inscrit dans ce mouvement en instaurant un mode de financement novateur pour les activités de soins de suite et de réadaptation, dites SSR. L’article 49 prévoit ainsi une dotation modulée à l’activité qui constituera la principale source des revenus pour ces activités de SSR. Cette réforme, longtemps attendue, entrera en vigueur en 2017 et s’achèvera en 2022. L’année 2016 sera préparatoire et permettra de sécuriser la montée en charge du dispositif.
Le système hospitalier, vous le savez, se distingue également par sa capacité à se moderniser. Toute la palette de l’organisation de l’offre hospitalière est aujourd’hui sollicitée. Cette évolution implique de repenser les outils de travail. La simplification du paysage contractuel entre agences régionales de santé et établissements de santé procède de cette intention. Contrat de bon usage du médicament, amélioration de la qualité et de l’organisation des soins, contrat de pertinence et autres outils cèdent désormais le pas à un contrat unique dont l’effet sera d’alléger le suivi.
Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016 maintient aussi les efforts en vue d’une baisse du prix des médicaments et je salue la participation de tous les secteurs à ces efforts. Il poursuit le processus de rénovation du mécanisme de la clause de sauvegarde et de renforcement de son caractère incitatif.
Enfin, l’initiative parlementaire prend largement sa place dans ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour combler ce qu’on appelle les trous dans la raquette des couvertures complémentaires ou faire accéder au remboursement des processus réparateurs après chirurgie du cancer. Une mesure a été adoptée sur mon initiative par la commission. Il s’agit de la pertinence de la prise en charge des transports sanitaires, dont nous savons que le coût augmente de façon excessive. À cet effet, il peut être utile de s’appuyer sur le Répertoire partagé des professionnels de santé.
J’ajoute pour conclure que nous envisagerons des mesures visant à une augmentation des prix du tabac. J’invite tous ceux qui, fumeurs, ont choisi d’arrêter de fumer ou compris que c’était nécessaire, j’invite ceux qui s’inquiètent pour leurs enfants, susceptibles de tomber dans l’addiction dès la centième cigarette, j’invite ceux qui ont perdu, du fait du tabac, un de leurs proches, ami ou membre de leur famille, ou une personne qu’ils admiraient à soutenir ces amendements.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à Mme Joëlle Huillier, rapporteure de la commission des affaires sociales, pour le secteur médico-social.
Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui un texte une fois de plus favorable au secteur médico-social. Le sous-ONDAM médico-social progresse en effet de 1,9 %, ce qui est une nouvelle fois supérieur à la progression de l’ONDAM général et traduit la forte croissance des besoins médico-sociaux de la population française.
Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale cette année ne contient pas d’article spécifique au secteur relatif aux personnes âgées en raison de la mise en oeuvre des dispositions du projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement. En effet, le produit de la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie – CASA – sera intégralement affecté à l’accompagnement des personnes âgées, notamment en vue de favoriser leur maintien à domicile.
Pour cette année, ces ressources ont été mises en réserve et réaffectées. Conformément aux demandes de nombre d’entre nous, elles permettront de financer un plan d’aide à l’investissement, sur trois ans, pour un montant de 300 millions d’euros. Nous nous en réjouissons. Le solde alimentera les réserves de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie. Il me semble important que ces réserves, issues des crédits non consommés, soient utilisées pour financer de l’investissement dans la durée. Nous demeurerons donc vigilants sur leur destination à l’avenir.
Ce PLFSS comporte deux articles qui concernent le secteur médico-social, en particulier les établissements pour personnes handicapées. L’article 46 prévoit le transfert, en 2017, de la prise en charge par l’État des crédits de fonctionnement des établissements et services d’aide par le travail – ESAT – vers le budget de l’assurance maladie, transfert qui s’accompagnera de compensations. Cet article permettra aux agences régionales de santé de piloter au mieux l’adaptation de l’offre.
Je souhaite toutefois évoquer la situation particulière des travailleurs handicapés des ESAT. En effet, ceux-ci n’ont pas accès à la couverture complémentaire santé collective obligatoire prévue par la loi de sécurisation de l’emploi, car ils ne sont pas considérés comme salariés au sens du code du travail. Pourtant, ce sont des travailleurs en entreprise comme les autres, qui reçoivent une fiche de paie, perçoivent une rémunération et versent des cotisations sociales.
Il faudrait prévoir un dispositif ou une incitation en direction des gestionnaires, afin qu’ils bénéficient de ce droit, comme n’importe quel autre travailleur.
L’article 47 prévoit la généralisation des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens – CPOM – pour les établissements et services accueillant des personnes handicapées, adultes ou enfants. Cette mesure permettra le renforcement qualitatif de l’offre et la meilleure prise en compte des parcours de vie des personnes.
La commission a adopté les trois amendements que je lui proposais et que nous examinerons au cours de la discussion. Ils prévoient de réintroduire les ESAT dans le champ des CPOM, de les faire bénéficier du cadre modernisé de présentation budgétaire, qui est l’état prévisionnel des recettes et des dépenses, et de permettre aux départements, s’ils le souhaitent, de s’associer au processus de contractualisation.
L’article 47 prévoit aussi de ramener à un an le délai de facturation des prestations à l’assurance maladie par les établissements, en cohérence avec les mesures prises les années précédentes dans le champ sanitaire et en vue de favoriser un meilleur pilotage de l’ONDAM. Mais cette mesure ne tient pas compte des délais de prise en charge de certaines maisons départementales pour personnes handicapées – MDPH –, qui notifient les orientations individuelles avec parfois plus d’un an de retard. En l’absence de notification, les caisses primaires refusent en effet les factures.
Cela risque de causer des difficultés aux établissements qui avancent la prise en charge des jeunes adultes de plus de vingt ans, maintenus en institut médico-éducatif au titre de l’amendement Creton, et des enfants de moins de trois ans accueillis dans le cadre du Plan autisme. J’ai donc demandé au Gouvernement de proposer une solution plus souple afin de ne pas mettre ces structures en difficulté et de ne pas risquer de rupture dans les prises en charge individuelles.
Cette question renvoie au problème plus général du fonctionnement des MDPH, qui rendent un service incomparable aux personnes handicapées et à leurs aidants, mais qui peinent quelquefois à faire face à l’accroissement des demandes. Le Gouvernement s’est engagé à prendre des mesures de simplification, pour alléger leur charge de travail, et à déployer un système d’information indispensable, pour mieux connaître et évaluer les besoins au niveau national. Je souhaite que ces engagements se traduisent concrètement dès 2016.
J’ai aussi déposé des amendements – et la commission a adopté à l’unanimité ma demande de rapport – sur la continuité des soins entre le domicile et les établissements médico-sociaux pour personnes âgées. Certaines situations injustes et absurdes persistent, notamment pour les personnes âgées atteintes de la maladie de Parkinson, dont les pompes à morphine sont prises en charge par l’assurance maladie lorsqu’elles sont à domicile ou à l’hôpital, mais qui ne le sont plus dès lors qu’elles entrent dans des EHPAD à forfait de soins global.
Nombre de ces personnes sont contraintes, pour continuer à bénéficier de leur traitement antidouleur, de retourner à leur domicile ou en séjour hospitalier, ce qui revient plus cher pour l’assurance maladie que d’assurer ce financement dans les EHPAD concernés. J’attends des engagements précis du Gouvernement sur ce problème qui concerne environ 200 patients en France.
In fine, les mesures contenues dans ces deux articles traduisent très concrètement les conclusions du rapport de Denis Piveteau, « Zéro sans solution ». Elles permettront d’améliorer les parcours et de décloisonner les sphères d’intervention, y compris dans les carrières professionnelles.
Au-delà de ces dispositions, je salue les mesures nouvelles prévues dans ce PLFSS, pour 405 millions d’euros : de la revalorisation des crédits dévolus à l’existant aux créations de nouvelles places pour personnes handicapées, en passant par la réalisation du plan de lutte contre les maladies neurodégénératives et par le soutien à la médicalisation en EHPAD. Deux de ces mesures ont particulièrement retenu mon attention.
Je note d’abord avec satisfaction le renforcement des moyens consacrés au Plan autisme l’année prochaine. Le Gouvernement porte une attention particulière au développement du dépistage précoce, qui permet de mieux identifier les besoins, et je l’en remercie. Nous rencontrons tous des parents d’enfants souffrant de troubles autistiques nous décrire le parcours du combattant auquel ils sont confrontés. Le Gouvernement et le Parlement doivent mettre les moyens pour financer des solutions d’accompagnement et améliorer l’organisation de l’offre et l’information.
Mais il revient à l’ensemble de la société de se mobiliser et, disons-le, d’évoluer. Je le rappelle : la Haute autorité de santé a déclaré que l’autisme était non pas une pathologie psychiatrique, mais un trouble neurocomportemental. Nous ne devons plus accepter les pratiques culpabilisant les parents ou maltraitant les enfants – je pense au packing. Nous devons également veiller à l’intégration de ces enfants, notamment en milieu scolaire.
Je salue ensuite l’annonce, par le Gouvernement, du déblocage dès 2016 d’une enveloppe de 15 millions d’euros…
…pour offrir des solutions de proximité adaptées aux enfants ou aux adultes aujourd’hui contraints de s’exiler – le mot n’est pas trop fort pour celles et ceux dont ce n’était pas le choix initial – dans des établissements belges, faute de solution en France.
J’ai reçu en audition des représentants associatifs, notamment des parents d’enfants accueillis en Belgique. Ils ne comprennent pas que l’assurance maladie finance ces établissements pour plus de 200 millions d’euros par an, ce qui représente tout de même près de 4 000 emplois, alors qu’ils n’obtiennent pas de solution en France. J’ai pu constater la situation difficile des aidants, qui se donnent sans compter et se sentent souvent insuffisamment soutenus ou écoutés.
Nous regrettons tous cette situation, liée en partie à l’insuffisance et à l’inadaptation de l’offre en France. L’annonce de cette enveloppe, ainsi que la généralisation des CPOM, constituent une première réponse dont je me réjouis.
J’aimerais conclure en remerciant l’ensemble des personnes m’ayant accompagnée sur ce texte : madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, les collaborateurs et les services du ministère, les représentants associatifs et professionnels qui ont participé aux auditions, ainsi que l’administrateur de notre commission. Je veux aussi saluer le climat consensuel et constructif dans lequel les députés de la commission ont examiné les dispositions relatives au secteur médico-social et je formule le souhait que nous les adoptions à nouveau en séance, avec les amendements que je vous ai décrits.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à M. Michel Issindou, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour l’assurance vieillesse.
Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les rapporteurs, chers collègues, il y a quelques jours, nous célébrions le soixante-dixième anniversaire de la Sécurité sociale. Cela fut l’occasion de fêter ce formidable mécanisme de solidarité entre générations, qui prend en charge chaque Français, « de la naissance à la tombe », comme le disait Beveridge, instigateur du système social britannique. Notre vieille sécu n’a pas pris une ride ! Elle a su s’adapter aux évolutions sociétales et montre tous les jours son efficacité.
À titre d’illustration, la mortalité infantile a reculé ; notre espérance de vie s’est fortement améliorée ; nos retraites n’ont jamais atteint ce niveau. Il est toujours utile de rappeler quelques chiffres qui valent mieux que de longs discours : 60 % des habitants de la planète n’ont aucun système de retraite, quand le niveau de vie des retraités français a progressé de plus de 30 % en trente ans – il est aujourd’hui égal, voire légèrement supérieur à celui des actifs.
Une récente étude du Crédoc révèle que les retraites sont le premier sujet d’inquiétude des Français. La pérennité du système et le montant des pensions versées cristallisent leurs inquiétudes. Il est de notre devoir de les rassurer, de leur dire et, au-delà des mots, de leur démontrer que notre bon vieux modèle de retraite par répartition est solide, robuste et que, moyennant les ajustements nécessaires opérés par les réformes successives, particulièrement par celle de 2014, il doit redonner confiance aux retraités actuels et surtout futurs.
Oui, sauf crise économique majeure, les jeunes actifs d’aujourd’hui percevront une retraite correcte dans trente ou quarante ans. J’entends certains, surtout sur ma droite, tenir des discours pessimistes, en appeler à la capitalisation pour compléter, voire remplacer des retraites de base qui disparaîtraient.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Ce discours est irresponsable, car notre réforme de 2014 a posé les fondements d’un système pérenne, en augmentant progressivement la durée de cotisation à 43 annuités en 2035, mécanisme plus juste que le report brutal à l’âge de 65 ans que prônent certains.
Ce PLFSS 2016 est un excellent moment pour le rapporteur de la branche vieillesse que je suis. C’est la première fois depuis quatre ans que je vous présente des prévisions excédentaires de 500 millions d’euros pour le régime général. Il faut remonter à 2005 pour trouver d’aussi bons résultats. Les déficits ne sont ni inéluctables ni insurmontables ! Pour parvenir à ce résultat, il a fallu ajouter des cotisations patronales et salariales modestes sur quatre années, sans ponctionner davantage le Fonds de réserve des retraites, seule mesure, hélas insuffisante, qu’avait instaurée la réforme de 2010.
Pour autant, quelques inquiétudes demeurent. Le Fonds de solidarité vieillesse restera déficitaire à hauteur de 3,7 milliards d’euros en 2016. Il est directement tributaire pour ses dépenses du niveau de chômage. La diminution attendue du nombre de chômeurs fera mécaniquement revenir ce fonds vers l’équilibre. L’autre inquiétude concernait la longue négociation des partenaires sociaux autour des régimes complémentaires que sont l’AGIRC et l’ARRCO. Si les réserves de ces caisses permettaient de tenir quelques années, seuls des ajustements courageux et responsables pouvaient stabiliser et pérenniser le système. C’est la bonne nouvelle de ces derniers jours : un bon accord a été trouvé vendredi dernier, accord qui, en instaurant une contribution de solidarité,…
…permet de ne pas remettre en cause l’âge légal. C’est en quelque sorte un pas fait vers la retraite à la carte, qui me semble plus respectueuse des choix de chacun. Cet accord est la preuve que le paritarisme et, au-delà, le dialogue social sont dynamiques, et je salue la responsabilité de la majorité des partenaires sociaux.
Ce PLFSS 2016 comprend peu de mesures nouvelles. Toutefois, l’article 34 permettra aux marins de valider dans le calcul de leur retraite les périodes effectuées sous contrat de sécurisation professionnelle ou sous contrat de transition professionnelle. S’il y a peu de nouvelles mesures, nous poursuivons la réforme de 2014 : 92 % des décrets d’application ont été pris ; les 8 % restants nécessitent un passage en Conseil d’État et des accords interministériels, mais ils ne sauraient tarder.
Je veux à nouveau saluer l’un des aspects majeurs de cette réforme : le mécanisme relatif à la pénibilité de certains postes de travail, pénibilité hélas reconnue et mesurable, qui raccourcit sensiblement la vie de ceux qui les ont occupés. C’est une vraie mesure de justice, car elle touche essentiellement ceux qui ont commencé à travailler très jeunes. Comment imaginer un recul de l’âge légal à 65 ans, pour ces personnes qui aligneraient 45, 46 ou 47 annuités de travail pénible ? Si le concept de pénibilité était peu contesté par les partenaires sociaux, sa mise en oeuvre pouvait poser quelques difficultés.
Je salue la mission conduite par Christophe Sirugue qui a su trouver les bons ajustements pour rendre la mesure facilement applicable dans les entreprises.
Au-delà de cette mesure phare de la réforme de 2014, ce sont une multitude de mesures qui permettront aux bénéficiaires d’améliorer leur pension de retraite, lorsqu’ils la liquideront. Je pense tout particulièrement aux femmes qui verront leurs périodes de chômage, de maternité et de travail à temps partiel mieux prises en compte au moment de la liquidation, car leurs retraites demeurent trop souvent inférieures à celles des hommes.
Je pense aussi aux agriculteurs, aux étudiants, aux jeunes, aux handicapés, aux aidants familiaux ou aux apprentis qui bénéficieront immédiatement ou plus tard de ces mesures très positives.
Enfin, il ne faut pas oublier tout le travail de lisibilité et de simplification voulu par la réforme. Je veux là aussi saluer les caisses qui, sous le contrôle de la CNAV, ont la lourde charge de mettre en place le compte unique retraite, tant attendu par les polypensionnés. Au 1er janvier 2017, la CNAV connaîtra le parcours professionnel de tous les salariés du privé, qui n’auront qu’un dossier à remplir pour percevoir leur retraite, même s’ils ont été affiliés à plusieurs régimes. Le GIP, chargé de cette lourde mission, est en train de réussir grâce à la bonne volonté de toutes les caisses de retraite.
La réforme a aussi mis en place un comité de suivi des retraites. Celui-ci est maintenant bien installé. S’appuyant notamment sur le rapport annuel du COR – le conseil d’orientation des retraites –, dont le périmètre d’observation a été fixé par la loi, il a rendu en juillet dernier son deuxième avis, confirmant la bonne trajectoire du système. Cette observation rigoureuse et annuelle de l’ensemble du modèle permet, si nécessaire, au Gouvernement de prendre les mesures correctrices qui s’imposent.
Même si le PLFSS pour 2016 est mince en ce qui concerne l’assurance vieillesse, je note que le 19 août dernier, un décret a instauré un droit opposable à la retraite : tout futur retraité qui déposera son dossier complet quatre mois avant la fin de son activité professionnelle aura la certitude de percevoir sa pension ou un acompte le plus en rapport possible avec la pension attendue dès le premier mois de sa retraite. Il n’y aura ainsi pas de rupture.
L’ensemble de ces mesures, l’attention portée par le Gouvernement aux retraités, est un gage de solidité du système de retraite par répartition. Issu du programme du Conseil national de la Résistance en 1943, mis en oeuvre par Pierre Laroque et Ambroise Croizat en 1945, le système de retraite par répartition est une conquête majeure, un modèle de fraternité et de solidarité. Qui peut imaginer aujourd’hui notre vie, notre quotidien, sans la Sécu ? Si les Français se disent inquiets pour leur retraite future, 84 % des retraités se disent aujourd’hui heureux. Chaque Français a droit à une retraite digne. Les fondements sont bons. Sachons conserver les grands principes tout en les adaptant au rythme des évolutions sociétales.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour les accidents du travail et les maladies professionnelles.
Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les rapporteurs, si cette année, la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi et le projet de loi de modernisation de notre système de santé ont exceptionnellement permis d’aborder la question des accidents du travail et des maladies professionnelles en dehors du cadre de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, je trouve regrettable que le Parlement se saisisse trop rarement des enjeux de santé et de sécurité au travail. Preuve en est que ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016 ne comporte aucune mesure nouvelle concernant la couverture du risque AT-MP.
Néanmoins, les auditions que j’ai menées en septembre dernier ont permis de prendre le pouls de la branche AT-MP et d’identifier les sujets de préoccupation des partenaires sociaux, des associations représentant les accidentés du travail et les victimes de l’amiante ainsi que des représentants d’organismes institutionnels ou juridiques.
Je n’ai pas manqué d’alerter le Gouvernement sur leurs sujets de préoccupation. À cet égard, je tiens à remercier les ministres et leurs services qui répondu aux questions que j’ai adressées au Gouvernement : le taux de réponse à mon questionnaire du mois de juillet dernier s’est élevé à 95 %, et le taux de réponse à mon questionnaire complémentaire du mois de septembre dernier à 100 %.
Cependant, les questions que j’ai posées à Mme la ministre et à M. le secrétaire d’État lors de leur audition par la commission des affaires sociales le 7 octobre dernier sont, elles, restées sans réponse, ou à tout le moins sans réponse satisfaisante.
Tout d’abord, lorsque je vous ai interrogée, madame la ministre, sur l’horizon temporel et le véhicule législatif possibles pour la mise en oeuvre des préconisations du groupe de travail sur l’aptitude et la médecine du travail qui n’avaient pu être concrétisées dans le cadre de la loi du 17 août 2015, notamment en matière de suivi de l’état de santé des salariés, vous n’avez pas fourni de calendrier précis.
Par ailleurs, je vous ai interrogée sur les dispositions du projet de loi portant application des mesures relatives à la justice du XXIéme siècle prochainement examiné par le Sénat, dispositions qui ont pour ambition de simplifier l’organisation judiciaire en matière de Sécurité sociale en regroupant au sein des pôles sociaux des tribunaux de grande instance les contentieux actuellement traités par les tribunaux des affaires de Sécurité sociale – TASS – et par les tribunaux du contentieux de l’incapacité – TCI –, ainsi que les litiges relatifs à l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé – l’ACS – et à la couverture maladie universelle complémentaire – CMU-C –, aujourd’hui traités par les commissions départementales d’aide sociale. J’ai alors souhaité obtenir du Gouvernement la garantie que la future réforme ne remettrait en cause ni le caractère écheviné et paritaire des juridictions amenées à connaître des litiges aujourd’hui tranchés par les TASS et et par les TCI, ni le principe de gratuité du recours au tribunal dans ces matières. Mais, là encore, aucune réponse n’a été fournie lors de l’audition du 7 octobre dernier. Pour ma part, je forme le voeu que la commission des affaires sociales se saisisse, au moins pour avis, de la réforme des TASS et des TCI lorsque ce projet de loi sera soumis à l’examen de notre assemblée.
Enfin, j’ai demandé les éléments de justification précisément chiffrés qui vous ont amenée à fixer à nouveau, dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016, à 1 milliard d’euros le montant du versement dû par la branche AT-MP à la branche maladie du régime général au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles – comme vous l’aviez fait dans la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2015, sans plus d’explications du reste. J’ai tout de même noté que les 1 000 millions étaient devenus un milliard… Vous m’avez indiqué, ce que je savais déjà, que d’après le rapport de la commission présidée par M. Jean-Pierre Bonin – rapport dont les personnes que j’ai entendues regrettent unanimement qu’il n’ait pas été publié –, l’évaluation globale de l’effectif des asthmatiques sur la base d’études plus approfondies aboutirait à un quintuplement, l’accroissement des cancers résulterait d’une détection plus précoce des maladies et de l’allongement de l’espérance de survie et que les affections du rachis lombaire ont pu, cette fois, être évaluées, ce qui n’avait pas été possible précédemment. Mais au-delà de ces motifs relativement généraux, j’aurais souhaité connaître, comme bon nombre des personnes que j’ai auditionnées, notamment les partenaires sociaux, les données objectives et chiffrées qui vous conduisent à fixer à 1 milliard d’euros un montant dont je rappelle qu’il a été multiplié par dix depuis 1997.
Cette hausse continue du versement de la branche AT-MP à la branche maladie est un sujet d’inquiétude majeure pour les partenaires sociaux : les uns regrettent que les données servant de fondement à l’évaluation du montant dû par la branche AT-MP à la branche maladie ne soient pas définies de manière suffisamment précise et transparente ; les autres regrettent que la méthode utilisée pour déterminer le montant dû empêche un réel débat sur les causes de la sous-déclaration et l’engagement de plans d’action pour mieux traiter ces causes.
La branche AT-MP a été excédentaire en 2014 – avec un solde de 691 millions d’euros – et devrait le rester en 2015, même si l’excédent devrait se réduire à 603 millions d’euros, avant de diminuer encore en 2016, pour atteindre 525 millions d’euros en raison du transfert de cotisations de 0,05 point entre la branche AT-MP et la branche maladie du régime général qui est organisé par le PLFSS. Mais cette situation excédentaire – dont on ne peut que se réjouir – est le fruit d’efforts de restructuration de la branche ainsi que de réformes de la tarification et des processus d’instruction des dossiers.
Il ne faudrait pas que le versement de la branche AT-MP à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles siphonne la branche AT-MP au point de menacer la logique assurantielle sur laquelle elle repose. Nombre des organisations que j’ai entendues ont fait part de leur crainte que la branche AT-MP ne devienne une variable d’ajustement pour combler les déficits de la branche maladie. Leurs représentants ont exprimé le souhait que les excédents de la branche AT-MP soient mobilisés à des fins autres que le versement de sommes à la branche maladie au titre de la sous-déclaration ou que le remboursement des dettes de la branche. Ils réclament notamment, et à juste titre, que les excédents soient conservés au sein de la branche pour qu’y soient engagées des actions de prévention ou d’amélioration de la réparation des accidents du travail. Je partage leur point de vue : il faut poursuivre les actions de lutte contre la sous-déclaration afin qu’une proportion croissante d’accidents du travail et de maladies professionnelles soit effectivement imputée sur le compte de la branche AT-MP et ne pèse plus à l’avenir sur les comptes de l’assurance maladie.
Par ailleurs, les excédents de la branche AT-MP devraient être davantage mobilisés au service du monde de la santé au travail. Certaines organisations syndicales que j’ai entendues militent notamment pour que ces excédents servent à améliorer la prise en charge du syndrome d’épuisement professionnel – plus connu sous le nom de burn out. Nos débats sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016 permettront peut-être de revenir sur ce sujet déjà abordé lors de l’examen de la loi du 17 août dernier relative au dialogue social et à l’emploi.
Certaines des personnes que j’ai auditionnées ont salué l’avancée résultant de l’article 27 de cette loi qui énonce expressément que « les pathologies psychiques peuvent être reconnues comme maladies d’origine professionnelle ». D’aucuns voudraient aller plus loin dans la reconnaissance de l’origine professionnelle des pathologies psychiques et militent pour que le burn out soit mentionné dans un tableau de maladies professionnelles annexé au code de la Sécurité sociale, ou à tout le moins pour que soit abaissé ou supprimé le taux de 25 % d’incapacité permanente aujourd’hui requis pour la reconnaissance de l’origine professionnelle de maladies non mentionnées dans les tableaux annexés audit code. Mais d’autres se montrent plus prudents dans la mesure où il est impossible d’établir une liste exhaustive et détaillée des symptômes et des facteurs d’exposition pour les pathologies psychiques. Les risques psycho-sociaux sont souvent la résultante de difficultés d’ordre autant personnel que professionnel, et les problèmes de management relèvent davantage des conseils de prud’hommes que de la branche AT-MP. Pour ma part, en raison des difficultés d’ordre médical qu’il peut y avoir à imputer un burn out aux seules conditions de travail et de l’absence d’indicateurs précis permettant de déterminer le degré d’incapacité provoqué par telle ou telle pathologie psychique, j’estime préférable que les pouvoirs publics attendent les conclusions du rapport sur l’intégration des affections psychiques dans le tableau des maladies professionnelles ou l’abaissement du seuil d’incapacité permanente partielle pour ces mêmes affections – rapport que le Gouvernement est tenu de remettre au Parlement avant le 1er juin 2016, en application de l’article 33 de la loi du 17 août 2015.
En matière de rapports, je m’étonne que le Gouvernement ne tire pas suffisamment les conséquences de celui que mon collègue Michel Issindou vous a remis en mai dernier, madame la ministre. Ce rapport fait notamment apparaître la nécessité de modifier un certain nombre de textes relatifs à la médecine du travail dont l’application apparaît aujourd’hui soit impossible, soit difficile, soit peu utile. C’est notamment le cas des textes qui conduisent à privilégier des examens cliniques systématiques plutôt que des actions ciblées que les médecins du travail sont pourtant les mieux à même de définir au regard de l’état de santé des travailleurs et de leur environnement. Il est aujourd’hui impossible de pratiquer systématiquement une visite médicale d’embauche à l’issue des périodes d’essai car plus d’une vingtaine de millions d’embauches ont lieu chaque année. En octobre 2014, le Conseil de la simplification pour les entreprises constatait que la visite médicale, pourtant obligatoire, n’était réalisée que dans 15 % des cas, qu’elle pouvait relever de la formalité impossible, notamment en raison de la faiblesse des effectifs de la médecine du travail et de la brièveté de certains contrats, que les visites périodiques – annuelles ou biennales – étaient chronophages et peu ciblées, au détriment de la prévention.
En septembre dernier, l’Association nationale des internes en médecine du travail, s’interrogeant sur l’avenir de celle-ci, a exprimé le souhait de recentrer l’activité du médecin sur ses compétences médicales qui lui permettent de résoudre avec une logique spécifique à sa formation des problématiques préventives de santé au travail et de maintien dans l’emploi, et non pas sur le fait de remplir des quotas de visites. Selon les membres de cette association, « c’est à cette condition que le médecin du travail pourra être reconnu comme un spécialiste du lien santé-travail ». Cette reconnaissance se gagnera, selon eux, par la concentration des efforts des médecins du travail sur les situations où leur formation de médecin est la plus pertinente. Je partage le point de vue de cette association de jeunes internes en médecine du travail : si cette spécialité attire aujourd’hui si peu, c’est notamment parce que rien n’est fait pour rendre cette médecine plus efficiente et donc plus attractive.
J’attends par conséquent avec impatience, madame la ministre, de connaître les initiatives que le Gouvernement compte prendre pour que les excellentes propositions de Michel Issindou ne restent pas lettre morte.
Afin de conclure mon propos sur une note positive, je tiens à souligner que les personnes que j’ai auditionnées ont globalement salué la qualité du dialogue social au sein de la branche AT-MP, branche où les débats et les négociations sont menés dans le respect et de façon constructive.
L’efficience dont le paritarisme a fait preuve au sein de la branche accidents du travail et maladies professionnelles n’est sans doute pas pour rien dans son succès : en 2014, elle a, une nouvelle fois, enregistré une baisse de la sinistralité pour atteindre un niveau historiquement faible. Cette diminution est sans doute aussi à mettre au crédit de la démarche – votre rapporteur ne peut que la louer – qui a conduit les gouvernements successifs à ériger la prévention du travail et des maladies professionnelles en priorité.
La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires sociales pour la famille.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, mes chers collègues, le plan de financement de la sécurité sociale pour 2016 comporte des mesures importantes pour la branche famille, qui va tout d’abord connaître des évolutions de périmètre.
La poursuite du Pacte de responsabilité l’année prochaine se traduira en effet par un allégement des cotisations familiales pour les employeurs, portant sur les salaires inférieurs à 3,5 fois le SMIC. Comme il s’y était engagé devant nous, le Gouvernement prévoit la compensation intégrale de cette moindre recette pour la Caisse nationale d’allocations familiales – CNAF. L’article 21 du projet de loi de finances prévoit ainsi que le budget de l’État prendra à sa charge le coût de l’allocation de logement familiale – ALF. S’y ajoute la prise en charge du financement de la protection juridique des adultes. Au total, les dépenses reprises par le budget de l’État s’élèvent à un montant global de 5,1 milliards d’euros. Ces mesures seront neutres pour les allocataires, dont les droits ne changeront pas. Elles permettront d’unifier le financement des allocations logement.
On ne peut donc analyser l’objectif de dépenses de la branche famille qu’au regard de ce nouveau périmètre. Cet objectif s’élève à 49,6 milliards d’euros pour 2016, soit un montant stable par rapport à 2015 et 2014.
Les effets de la modulation du montant des allocations familiales en fonction du revenu permettront néanmoins de financer des mesures nouvelles. Outre les traditionnelles revalorisations de prestations, je tiens à saluer, à l’article 31, la mise en place du dispositif de garantie contre les impayés de pensions alimentaires sur l’ensemble du territoire, qui généralise l’expérimentation que nous avions décidée dans le cadre de la loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes. Voilà une nouvelle mesure de progrès, dont nous pourrons nous réjouir. L’expérimentation prouve déjà dans vingt départements combien cet accompagnement est précieux pour les familles, et notamment les femmes fragilisées par une séparation et des situations d’impayés.
Le PLFSS comporte d’autres mesures, qui concernent l’outre-mer. Il prévoit d’abord que les prestations familiales des fonctionnaires seront désormais servies par les CAF des départements où ils sont en poste. Selon cette mesure de simplification, dont le Gouvernement nous a précisé qu’elle s’opérerait à droits constants, les intéressés bénéficieront des mêmes prestations que celles servies dans l’Hexagone, à partir du deuxième enfant et avec des barèmes identiques.
Une autre mesure attendue est prévue à l’article 33 : elle étend aux habitants de Saint-Pierre-et-Miquelon le bénéfice de l’allocation de soutien familial et du complément de libre choix du mode de garde. Il s’agit d’un engagement de justice sociale et territoriale pris par le Président de la République. Il sera tenu.
Ces trois mesures représentent des progrès attendus. Chacun s’y ralliera sans difficulté.
Je souhaiterais conclure mon intervention par plusieurs remarques. Je salue tout d’abord l’engagement du Gouvernement en faveur de l’accueil de la petite enfance, dont les moyens ont considérablement augmenté depuis 2012 : son enveloppe est ainsi passée de 2,2 milliards d’euros en 2011 à 2,9 milliards d’euros en 2015. De plus, constatant l’insuffisante progression des créations de places en crèche, le Gouvernement a décidé de proposer une aide supplémentaire de 2 000 euros par place dont la construction est décidée en 2015. Je salue cet engagement : il portera ses fruits.
Ensuite, je me félicite du chemin de retour à l’équilibre des comptes de la branche famille. En 2011, le déficit de cette branche s’élevait à 2,6 milliards d’euros – une situation regrettable pour qui tient réellement à l’avenir de la politique familiale. Nous le ramènerons à 800 millions d’euros en 2016, et nous visons l’équilibre en 2018. Voilà une preuve éloquente de la priorité que nous accordons à la branche famille : mesures de justice sociale et rétablissement des comptes sont la meilleure garantie de pérennité de la branche.
Enfin, à l’occasion du quatrième projet de loi de financement de la sécurité sociale depuis notre arrivée aux responsabilités, je consacre une partie de mon rapport à l’analyse des effets de notre politique familiale. Je relève avec une grande satisfaction que la politique familiale n’a jamais été aussi juste et aussi redistributive. Les foyers aux revenus modestes et les classes moyennes ont bénéficié prioritairement des mesures que nous avons adoptées.
En déplacement dans l’Aisne auprès de la CAF de Saint-Quentin, j’ai moi-même constaté à quel point les soutiens apportés par les prestations familiales étaient précieux pour les plus fragiles. Mais je dois également faire part du plaisir que j’ai eu à constater la qualité de l’engagement des personnels de la CAF et de l’organisation de cette caisse. Ils prouvent que, sur un territoire qui souffre de la crise économique, une CAF dynamique peut jouer un rôle irremplaçable de proximité et d’accompagnement. Je tiens à les en féliciter chaleureusement.
Mes chers collègues, vous le voyez, plus que jamais, la politique familiale reste au coeur de notre pacte social.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à M. Dominique Lefebvre, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État chargé du budget, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mes chers collègues rapporteurs, mes chers collègues, la commission des finances de l’Assemblée nationale a examiné ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 dans sa séance du 14 octobre. Elle l’a, monsieur le secrétaire d’État, adopté sans modification, ce qui est le meilleur moyen de lui conserver toute sa cohérence.
Quatre raisons essentielles expliquent la position de la commission. La première d’entre elles ne vous étonnera pas, eu égard à notre fonction dans cette assemblée : ce projet de loi confirme le redressement des comptes pour l’année 2014, l’anticipe pour l’année 2015 et le projette d’ici 2019. C’est un bon point du point de vue de la commission des finances. Ce projet de loi marque aussi la contribution de la sécurité sociale à l’effort de redressement des finances publiques.
Deuxième raison, parce que les commissaires aux finances ne sont pas uniquement des comptables sans coeur – vous le direz à Mme Touraine, monsieur le secrétaire d’État : nous l’avons constaté, ce redressement des comptes s’opère dans la justice, avec de nouvelles avancées sociales et l’attribution de nouveaux droits.
La troisième raison est essentielle : les engagements pris sont tenus. Je pense en particulièrement à ceux qui concernent la mise en oeuvre du Pacte de responsabilité et de solidarité, à laquelle nous sommes attentifs.
La quatrième raison finit de balayer, comme l’ont fait mes collègues, l’ensemble des mesures contenues dans ces 62 articles : elles vont toutes dans le même sens et sont des mesures de bon sens.
Pour la commission des finances, le Gouvernement a adressé un message fort de confiance à nos concitoyens, qui doutent et s’inquiètent de l’avenir de leur protection sociale, en raison de l’accumulation des déficits. Avec ce projet de loi, mes chers collègues, nous affirmons que nous pouvons sauvegarder notre système de protection sociale, que nous pouvons équilibrer ses comptes et conforter le pacte social.
Cela représente certes un démenti au discours souvent catastrophiste de la droite. Comme lors de la discussion sur le projet de loi de finances, une série d’intervenants transformeront peut-être notre hémicycle en tribune pour les primaires de la droite : on a vu en effet les différents candidats surenchérir sur le thème du pacte social. Le problème est qu’ils font toujours de la surenchère dans le même sens, celui de la remise en cause des droits et du pacte social né à la Libération.
Il faut que vous n’ayez pas grand-chose à dire pour que vous parliez si peu du sujet !
Revenons à l’équilibre progressif des comptes, que je voudrais remettre en perspective comme vous avez commencé à le faire, monsieur le secrétaire d’État. Nous parlons, en 2015, d’un déficit de 9 milliards d’euros pour le régime général, quasiment le plus faible depuis 2003. Ce déficit est à rapporter à la totalité des dépenses des administrations de sécurité sociale, qui, je le rappelle, s’élevaient en 2015 à 580 milliards d’euros, soit 47 % de la dépense publique et 27 points de PIB. Les dépenses sociales représentent dans notre pays plus des deux tiers de l’augmentation de la dépense publique depuis 1978 : les branches maladie et retraite en totalisent respectivement près de 12 points et près de 14 points de PIB. Les régimes obligatoires, je le rappelle, représentent 472 milliards d’euros ; le régime général, dont j’ai parlé essentiellement, 348 milliards d’euros, dont 174 milliards d’euros pour l’assurance maladie, 120 milliards d’euros pour la branche vieillesse et 54 milliards d’euros pour la branche famille.
Ce régime général, vous l’avez rappelé, monsieur le secrétaire d’État, est en déficit quasi structurel depuis 1990. Il n’a été excédentaire que trois ans, sous le gouvernement de Lionel Jospin, alors que Martine Aubry était ministre de l’emploi et de la solidarité. Depuis 2003, le déficit a toujours été supérieur à 5 milliards d’euros et, en général, à 10 milliards d’euros. Je le dis pour nos collègues qui siègent à la droite de l’hémicycle, qui prétendent que nous ne réduisons pas suffisamment et suffisamment vite le déficit.
Toujours est-il, monsieur Accoyer, que le déficit 2015 est plus bas que l’ensemble des déficits, année après année, depuis 2002.
« Absolument ! » sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La conséquence de ce déficit est une dette sociale astronomique, de 170 milliards d’euros, soit 13 points de PIB, que les Français amortissent chaque mois, avec 0,5 point de contribution pour le remboursement de la dette sociale – CRDS – et 0,2 point de contribution sociale généralisée – CGS. Nous en avons amorti 100 milliards d’euros, ce qui – ne l’oublions pas – nous a coûté dans le même temps 45 milliards d’euros d’intérêts. Voilà qui justifie l’effort qui doit être fait à la fois pour redresser au plus vite les comptes et pour amortir cette dette.
Cette dette, vous l’avez dit, monsieur le secrétaire d’État, doit pouvoir être amortie en 2024. Je rappelle qu’à la création de la Caisse d’amortissement de la dette sociale – CADES –, la dette sociale devait être amortie en 2009. Cet objectif serait donc atteint quinze ans plus tard. Sur ce point, nous devons faire preuve de responsabilité collective, afin de poursuivre dans le même sens.
Ce sens, nous y allons. Je rappelle, là aussi, les chiffres car, dans ce débat, le sujet pourtant essentiel de la réduction des déficits est contesté. Le déficit du régime général s’élevait à 17 milliards d’euros en 2011 ; il atteint 9 milliards d’euros cette année et sera de 6 milliards d’euros en 2016. Le régime général sera à l’équilibre en 2019, avec une branche vieillesse à l’équilibre dès 2016, une branche famille à l’équilibre en 2018 et une branche maladie au quasi-équilibre en 2019.
C’est bien là une rupture avec les politiques du passé, celle des vingt-cinq ans dont j’ai parlé, celle des deux derniers quinquennats. On a laissé filer les déficits avec, probablement, des projets de lois de finances bâtis sur des hypothèses économiques un peu hasardeuses, en tout cas qui ne se sont jamais vérifiées et qui ont effectivement permis de déporter des mesures d’ajustement. En outre, cette rupture avec les politiques du passé s’est soldée par des reculs plus que par des avancées.
Les résultats que j’évoque ne sont pas tombés du ciel : ils sont le résultat de choix politiques forts et courageux. Vous les avez rappelés, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, comme mes chers collègues rapporteurs pour chacune des branches. La politique familiale a été réaffirmée : c’est, je le rappelle, parce que nous avons recentré certaines prestations qu’elle reviendra à l’équilibre. Nous avons aussi plafonné le quotient familial. Toutefois, contrairement à ce qu’affirme parfois la droite de cet hémicycle, nous l’avons plafonné pour transférer 1 milliard d’euros à la Caisse nationale d’allocations familiales et lui permettre de retrouver l’équilibre. Nous avons donc mené une politique de solidarité entre les familles en préservant la politique familiale.
Cela est également vrai des régimes de retraite, qui ont été confortés et sauvegardés. Depuis le Livre blanc sur les retraites de Michel Rocard, auquel j’avais eu l’honneur de contribuer largement, certaines mesures ont été prises, s’agissant notamment des recettes. Sans elles, l’équilibre que vous prétendiez obtenir n’aurait pas été atteint. Nous avons aussi pris des mesures de régulation, qui ont été évoquées par Michel Issindou. Ainsi, nous nous sommes inscrits dans une trajectoire d’équilibre. C’est un message important : nul n’a intérêt à laisser croire aux Françaises et aux Français que cet équilibre ne pourra pas être durablement atteint.
Quant à l’évolution des dépenses de santé – sans doute l’un des dossiers les plus difficiles –, elle est contenue. On connaît la dynamique de cette évolution, une dynamique de demande liée au vieillissement, mais aussi à l’augmentation de la population française : on oublie parfois que les Français sont chaque jour plus nombreux et coûtent donc de plus en plus cher à soigner. Du côté de l’offre, des problèmes redoutables doivent être réglés, tels ceux liés à l’innovation ou à la démographie médicale.
En tout état de cause, la commission des finances constate que les objectifs nationaux des dépenses d’assurance maladie – ONDAM – n’ont jamais été aussi bas ni aussi bien respectés. Contenir la progression des dépenses de santé à 2 ou 3 % représente un effort important, qui doit être poursuivi dans la durée. Nous avons fait ces choix qui, nous le verrons, sont contestés.
Les résultats obtenus depuis 2012 nous permettent d’envisager l’avenir avec optimisme, tout en nous imposant une vigilance de tous les instants sur trois points.
S’agissant des régimes de retraite, les instruments de pilotage sont en place. Le mouvement d’augmentation progressif de l’âge effectif de départ à la retraite, en relation avec l’accroissement de l’espérance de vie, l’est aussi, mais, contrairement à vous, chers collègues de l’opposition, nous n’en faisons pas une obligation : comme le Président de la République le rappelait hier encore, nous renvoyons au libre choix – et je crois que c’est une bonne chose. Sur ces questions, la pédagogie commence à porter ses fruits, l’accord de principe des partenaires sociaux sur les régimes complémentaires le montre.
Une seule question reste en suspens, monsieur le secrétaire d’État : celle du déficit structurel du Fonds de solidarité vieillesse – FSV. On en connaît le principal motif : le chômage élevé ; mais il y en a un autre, c’est que le FSV manque de recettes annuelles. Il nous faudra régler cela, en sus de la question de l’équilibre des régimes de retraite.
En ce qui concerne l’assurance maladie, j’en connais comme vous les tendances lourdes et, comme vous, je pense que c’est une impasse que de penser que le règlement du problème passerait par un déremboursement, qui provoquerait tout au plus un transfert vers des complémentaires, mais n’améliorerait en rien la maîtrise des dépenses de santé et aboutirait probablement à de fortes inégalités devant les soins. La situation est tendue dans le monde hospitalier, monsieur le secrétaire d’État, et il faut s’y montrer attentif. C’est pourquoi nous devons poursuivre, en concertation avec les professions de santé, le travail sur les soins de ville, avec une conviction simple : il ne peut y avoir de liberté pour la médecine de ville sans responsabilité des professionnels, qui doivent apprendre à maîtriser ces tendances.
Troisième sujet de préoccupation : la gestion de la dette sociale. Très justement, on prévoit cette année une anticipation de la reprise de la dette par la CADES ; il restera, le moment venu – mais ce sera bien plus tard –, à gérer le résiduel de dette jusqu’au moment où l’on retournera à l’équilibre, en 2019.
Trois observations de la commission des finances pour conclure.
Premièrement, la clarification des flux financiers entre l’État et les différentes branches de la sécurité sociale se poursuit. La compensation à l’euro près par l’État de la diminution des ressources de la sécurité sociale y contribue. En outre, comme l’a souligné le secrétaire d’État, une mise en conformité avec l’arrêt de Ruyter a été engagée. Autant de choses qui vont dans le bon sens.
Deuxièmement, nous ferons en sorte que le Pacte de responsabilité et de solidarité soit mis en oeuvre et appliqué.
Enfin, les mécanismes de revalorisation des prestations doivent être adaptés. Bien qu’elle suscite des débats, cette réforme m’apparaît de cohérence, de simplification, de clarification. Mieux vaut revaloriser en fonction de l’inflation constatée plutôt qu’en fonction de l’inflation prévisionnelle. Le seul défaut de cette mesure est d’être, pour 2015, une mesure de trésorerie, mais, sur le long terme, on sait bien qu’elle ne répond pas à un simple souci d’économie ; nous devons profiter d’une période où l’inflation est faible pour l’engager.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mesdames et messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je veux tout d’abord dire un grand merci à l’administration, qui, entre le présent texte et ceux à venir, vit à un rythme fou. Nous voilà une nouvelle fois réunis autour du projet de loi de financement de la sécurité sociale, cette fois pour 2016. Depuis le début de cette législature, l’action du Gouvernement et de la majorité peut se résumer simplement : rétablir des comptes, que nous avons trouvés largement dégradés en 2012,…
Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains
Ça fait mal, hein ?
…tout en respectant les impératifs de justice sociale et de solidarité – ce qui est encore plus nécessaire dans la conjoncture économique morose que nous connaissons.
Je ne m’étendrai pas plus longuement sur le mouvement progressif, mais continu de rétablissement des comptes depuis 2012, le Gouvernement et les rapporteurs ayant largement traité du sujet. Au vu de cette réalité, il est quelque peu pénible, voire incompréhensible, d’entendre certains critiquer, année après année, la mauvaise gestion des finances sociales par la majorité.
À ceux et celles qui seraient tentés de donner des leçons, alors qu’ils n’ont pas brillé ni particulièrement réussi lorsqu’ils étaient aux affaires, je répondrai en citant Gandhi :…
« Oh oh… ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.
…« L’erreur ne devient pas vérité parce qu’elle se propage et se multiplie ; la vérité ne devient pas erreur parce que personne ne la voit ».
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Oui, le rétablissement des comptes est une réalité dont le Gouvernement et la majorité parlementaire peuvent se prévaloir. Nous avons, madame la ministre l’a dit et répété, garanti un haut niveau de protection pour nos concitoyens. N’en déplaise à certains et certaines, il n’y a eu ni franchises supplémentaires, ni déremboursements, ni augmentation de reste à charge, bien au contraire.
Et puisque l’on nous cite régulièrement l’Allemagne en exemple, je tiens à souligner qu’il y a plus de pauvres en Allemagne qu’en France – 16 % contre 13 % –, que parmi les plus de 65 ans, on compte 14,1 % de pauvres en Allemagne contre 10 % en France et qu’enfin, si 33 % des chômeurs sont en situation de pauvreté en France, 70 % d’entre eux le sont en Allemagne. Il me semble nécessaire de le rappeler.
Loin de moi bien sûr l’idée que tout va bien en France.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Les chiffres relatifs à la pauvreté sont évidemment encore élevés, mais, ne vous en déplaise, chers collègues de l’opposition, la politique que nous menons joue bien son rôle d’amortisseur social.
Plusieurs mesures contenues dans ce PLFSS ont retenu mon attention.
L’article 39, d’abord, qui instaure une protection universelle maladie, parachevant ainsi la démarche d’accès effectif aux soins engagée depuis le début de la législature et, plus largement, depuis 1999. Contrairement à ce que l’on a pu entendre en commission, à savoir qu’il y aurait un appel d’air – d’où viendrait-il d’ailleurs, je ne le sais –, il s’agit simplement de permettre à nos concitoyens d’accéder aux droits plus facilement.
Je vais vous en donner un exemple précis et récent. Une jeune fille de 21 ans arrête ses études. Elle est couverte pendant un an par la caisse primaire d’assurance maladie du département dont dépendent ses parents ; la caisse règle ses frais de soins par délégation pour la mutuelle étudiante. Mais le 30 septembre de l’année qui suit l’arrêt des études, il n’y a plus de délégation de paiement pour la mutuelle étudiante.
La personne concernée se retrouve donc sans droits le 1er octobre. Si ses parents sont un peu au courant, ils vont aller à la sécurité sociale demander que leur fille redevienne ayant droit sous le régime du père ou de la mère. Mais s’il s’avère que la jeune fille trouve du travail dans les quinze jours, il faudra qu’elle retourne à la sécurité sociale déclarer qu’elle a travaillé plus de soixante heures par mois ou plus de cent vingt heures au cours du dernier trimestre, qu’elle ne peut donc plus être ayant droit de ses parents, mais qu’elle doit être assurée en son nom propre. Eh bien, si la famille n’a pas compris le système, on se retrouve avec des jeunes « franco-français » – juste des gens vivant sur notre territoire – sans couverture : rien à voir donc avec votre prétendu appel d’air venant de l’étranger !
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Cela a été dit en commission, monsieur Barbier !
Voilà un exemple précis dont j’ai eu connaissance ces dernières semaines. S’il n’a pas des parents au fait, le jeune se retrouve sans couverture alors que ses droits sont ouverts : c’est quand même un monde !
Ensuite, l’article 40 garantit la prise en charge financière intégrale des soins dispensés aux victimes présentes sur les lieux d’un acte de terrorisme pendant un an, tout en simplifiant le dispositif afin de le rendre plus accessible. Dans le même temps est instaurée une prise en charge partielle pour les proches de victimes décédées ou blessées, à savoir le conjoint, le concubin ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité, les ascendants et descendants jusqu’au troisième degré et les frères et soeurs de la victime.
Dans un autre domaine, l’article 31 généralise le dispositif de garantie contre les impayés de pension alimentaire, en étendant à l’ensemble du territoire la garantie mise en place le 1er octobre 2014. Il s’agit d’une mesure importante pour des personnes précaires ou très modestes, notamment des familles monoparentales qui attendent de pouvoir donner à manger à leurs enfants.
Par ailleurs, poursuivant un mouvement engagé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, qui a posé le principe de la gratuité de la contraception remboursable pour les mineures, ainsi que le secret de sa délivrance, le projet de loi étend ce principe en prévoyant la gratuité et l’anonymat pendant tout le parcours des jeunes femmes âgées de 15 à 18 ans. Je suis très heureuse de voir cette mesure parachever une réforme qui me tenait particulièrement à coeur – comme beaucoup de mes collègues, d’ailleurs.
Et quand j’entends certains, dans l’opposition, dire : « Il était temps ! », je rappelle que jusqu’en 2012, rien n’avait été fait !
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Je citerai également l’article 43, qui met en place une expérimentation relative à l’obésité chez les jeunes enfants de 3 à 8 ans, et qui valorise, à côté des équipes médicales, le rôle des psychologues et des diététiciens. Il s’agit d’une excellente mesure, qui permettra de mieux lutter contre un phénomène dangereux pour la santé de nos concitoyens et de mieux reconnaître deux professions de santé non cotées et qui se sentent trop souvent oubliées.
Enfin, je n’oublierai pas l’amendement portant article additionnel après l’article 44 tendant à l’extension, à titre expérimental, d’un dispositif de prise en charge des certificats de décès par les agences régionales de santé dans le cadre de la permanence des soins ambulatoires mis en oeuvre en Poitou-Charentes. Cet amendement reprend l’une des propositions du rapport que j’ai remis le 3 juin dernier à l’issue des travaux de la mission d’information sur l’organisation de la permanence des soins présidée par Jean-Pierre Door. Il avait été question de ce problème au cours de presque toutes les auditions.
Notre amendement – puisque Jean-Pierre Door l’a cosigné avec moi – se limitait au maximum de ce que pouvaient proposer des parlementaires, à savoir une expérimentation. Je suis très satisfaite que le Gouvernement ait rapidement répondu à notre appel en déposant un amendement beaucoup plus complet, dont nous allons discuter un peu plus tard. Merci, madame la ministre, d’avoir accepté cette mesure attendue par tous les acteurs, notamment les médecins de ville.
Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mesdames et messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, j’arrêterai là mon intervention sur le PLFSS pour 2016. J’espère que tous les arguments avancés à cette tribune auront convaincu notre collègue Accoyer de ne pas présenter sa motion de rejet préalable – mais je ne suis pas sûr que nous y soyons parvenus !
Rires. – Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
J’ai reçu de M. Christian Jacob et des membres du groupe Les Républicains une motion de rejet préalable déposée en application de l’article 91, alinéa 5, du règlement.
La parole est à M. Bernard Accoyer.
Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, mesdames et messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, avec un déficit annoncé de 10 milliards d’euros, déficit qui vient aggraver une dette sociale atteignant déjà le chiffre record de 158 milliards, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 s’inscrit dans la continuité d’une politique gouvernementale de renoncement à réformer pour assurer la pérennité de la sécurité sociale.
Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Au contraire, les mesures contenues dans ce PLFSS aggraveront la situation financière à terme ; de plus, elles menacent directement l’avenir du système de soins.
« Rien que ça ! » sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Le déficit de la branche maladie s’est aggravé depuis 2012, passant de 5,9 milliards à 7,5 milliards d’euros prévus en 2015. Avec un déficit cumulé pour ces quatre exercices s’élevant à 26,4 milliards d’euros, le retour à l’équilibre de la branche est repoussé aux calendes grecques.
Refuser de réformer la sécurité sociale est l’attitude constante de la gauche depuis 1981.
Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Pire, cette dernière a multiplié les mesures non financées par pure facilité et démagogie politique.
De la retraite à 60 ans en 1983, sans la moindre étude d’impact alors que les calculs actuariels établissaient déjà clairement que la branche vieillesse serait en difficulté moins de quinze ans plus tard et qu’il aurait fallu constituer un fonds de réserve, jusqu’aux dernières mesures contenues dans le présent PLFSS, les coups portés à la pérennité du pacte social ont été nombreux. Aucune de ces mesures n’a été financée par les gouvernements de gauche qui les ont prises, qu’il s’agisse des 35 heures, des 35 heures à l’hôpital,…
…de l’aide médicale de l’État – AME, de la couverture maladie universelle, de la pérennisation des missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation – MIGAC, de l’abrogation de la convergence tarifaire, de l’affaiblissement de la filière du médicament, de l’abrogation de la journée de carence dans la fonction publique,…
…du transfert à la branche famille de charges incombant à l’État, de la mise sous condition de ressources des allocations familiales, des 4,5 milliards supplémentaires prélevés aux familles avec enfants depuis 2012, du kafkaïen compte pénibilité ou du tiers payant généralisé – et la liste est loin d’être close.
Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il est tellement plus facile d’ouvrir des dépenses nouvelles que de se préoccuper de la pérennité de la sécurité sociale ! Mais, aujourd’hui, les Français ne sont plus dupes, et dans leurs préoccupations et leurs doutes sur l’avenir, il y a aussi, et peut-être surtout, l’ampleur de la dette, de la dette sociale en l’occurrence, que vous avez largement contribué à creuser !
Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Ce PLFSS est le dernier du quinquennat que vous exécuterez en totalité, avant l’élection présidentielle de 2017. Il n’engage pas les réformes qui sont pourtant indispensables ; il s’agit surtout d’un texte électoraliste, à quelques semaines des échéances régionales. Il est marqué avant tout par l’immobilisme, la démagogie et le dogmatisme qui caractérisent si souvent la politique conduite depuis trois ans et demi. La conduite de réformes exigeant du courage, et ce courage vous manquant, vous choisissez la fuite en avant, afin de léguer à vos successeurs la question primordiale de l’avenir de la protection sociale.
L’immobilisme et le défaut de courage politique caractérisent, en effet, ce PLFSS. C’est d’ailleurs le verdict que porte la Cour des comptes sur l’action gouvernementale. Depuis 2012, plus de 19 milliards d’euros de recettes nouvelles, d’impôts et de cotisations supplémentaires ont été mobilisés pour réduire les déficits. Malgré cette augmentation record, le déficit de la branche maladie en 2016 restera plus élevé qu’en 2012, à hauteur de 6,2 milliards d’euros.
Ce PLFSS témoigne du manque de courage du Gouvernement et de son refus de réformer en particulier l’hôpital public, qui est le principal poste de dépenses de l’assurance maladie. Vous ne cessez de combler les trous par des manoeuvres toujours plus complexes, toujours plus opaques, et ce faisant mettez en danger tout le secteur de l’hospitalisation et des pans entiers de notre système de soins. Alors que la France reste un des derniers pays à ne pas équilibrer ses comptes sociaux, vous persistez dans un parti pris qui ne peut déboucher que sur une impasse.
La France est en surcapacité de lits hospitaliers publics, ce qui a des conséquences à la fois sur la qualité et la sécurité des soins, et sur les finances de l’assurance maladie. Madame la ministre, vous savez que dans l’offre de soins, l’important n’est pas la proximité, mais la sécurité et la qualité ; or à ce jour, la qualité de prise en charge d’un patient à l’hôpital est inégale d’un établissement à l’autre.
En 2014, vous avez supprimé la journée de carence dans la fonction publique, alors même que depuis sa mise en place en 2012, ses résultats à l’hôpital étaient probants : diminution de 40 % du nombre d’arrêts maladie d’une journée dans la fonction publique hospitalière entre 2011 et 2012, pour une économie de 75 millions d’euros.
L’extension des 35 heures à l’hôpital n’était, de l’aveu même de Lionel Jospin, pas prévue. Elle a eu un effet catastrophique sur le fonctionnement de l’hôpital public et un effet inflationniste sur les dépenses de personnel. Aujourd’hui, l’hôpital public est pris au piège : la suppression du jour de carence et les 35 heures ont des conséquences graves sur l’organisation des équipes et sur les conditions de travail des agents. Le taux d’absentéisme oscille entre 9 % et 14 %.
J’en viens à la branche vieillesse. La réforme Woerth de 2010 était une réforme courageuse ; vous l’avez pourtant combattue dans cet hémicycle par tous les moyens.
C’est d’abord grâce à cette réforme que le déficit de la branche vieillesse tend à se réduire, comme le souligne la Commission des comptes de la Sécurité sociale. C’est cependant l’ensemble composé de la branche vieillesse et du Fonds de solidarité vieillesse qui doit être apprécié ; or le déficit du FSV ne cesse de se creuser. Il sera cette année de 3,8 milliards d’euros.
Depuis 2012, vous n’avez cessé d’empiler des mesures apparemment généreuses, mais en réalité dangereuses. Vous n’avez mené que des pseudo-réformes, telle celle de 2013. Vos mesures ne sont en réalité que des bombes à retardement financières pour la branche vieillesse. Le compte pénibilité l’illustre bien : c’est une charge ingérable réservée aux seules entreprises localisées en France.
Au moment où les partenaires sociaux ont su trouver un accord responsable pour sauver les retraites complémentaires, le Gouvernement, quant à lui, ne fait preuve d’aucun courage, ni dans ses paroles ni dans ses actes. Malgré les dénégations du Président de la République, c’est bien sur un report de l’âge légal de la retraite à 63 ans que se sont accordés les partenaires sociaux. Ce report interviendra de fait pour une partie des Français salariés du secteur privé, sauf s’ils acceptent de voir leur retraite réduite.
Pouvez-vous nous dire, madame la ministre, si l’État employeur prendra des mesures pour assurer l’équité entre le secteur public et le secteur privé en la matière ? Garantirez-vous l’équité entre les salariés du privé et les agents des trois fonctions publiques qui liquident leurs retraites, en moyenne, à 60 ans et 2 mois ? Garantirez-vous l’équité entre les salariés du privé et les agents relevant des régimes spéciaux, qui partent en retraite entre 55 et 57 ans selon les entreprises concernées ? Madame la ministre, après les réformes conduites par vos prédécesseurs – la réforme Fillon de 2003, la réforme Bertrand de 2007 et la réforme Woerth de 2010 –, il est temps de faire preuve de courage politique.
La démagogie et les tuyauteries financières infernales marquent aussi ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. Le retour à l’équilibre de nos comptes sociaux est une nouvelle fois repoussé : encore une promesse du candidat Hollande bafouée ! Alors que le système de soins est menacé par la désertification et le manque de médecins généralistes, le Gouvernement persiste par dogmatisme dans sa volonté d’imposer le tiers payant généralisé, facteur de déresponsabilisation et d’inflation. Les médecins libéraux le refusent pourtant quasi unanimement : les résultats des élections professionnelles la semaine dernière l’ont clairement montré.
Dans la veine des mesures prétendument généreuses, plusieurs dispositions nouvelles contenues dans ce PLFSS ne sont pas financées. Certains choix sont injustifiables, car vous ne prévoyez d’aucune manière de faire cesser l’exil douloureux de milliers de handicapés qui sont dans des établissements spécialisés en Belgique.
L’instauration de la protection universelle maladie à l’article 39 – qui ne compte pas moins de 16 pages et 204 paragraphes – rompt avec les principes fondamentaux de la sécurité sociale. C’est pour cela qu’il est aussi long et complexe. La protection universelle serait accessible sous condition de résidence sur le territoire, sans obligation de cotisation. Si cet article venait à être adopté, nous assisterions à un changement de paradigme de la sécurité sociale, un abandon, un séisme ! C’est la fin du principe selon lequel chacun contribue au système de sécurité sociale à hauteur de ses moyens et bénéficie des prestations en fonction de ses besoins.
Autre mesure non documentée, l’accès à la couverture complémentaire santé des retraités, qui suscite de grands mouvements d’inquiétude et de protestation dans les milieux mutualistes et les régimes complémentaires. De même, combien coûtera en définitive – au-delà des chiffres de l’étude d’impact – l’aide individuelle de l’employeur destinée à l’acquisition d’une complémentaire santé pour les salariés précaires ? Toutes ces mesures sont d’apparence généreuse, mais chacun sait que leur financement pèsera sur le travail, la production et les salaires, et donc sur le pouvoir d’achat et l’emploi. Il s’agit pourtant là de priorités partagées !
Vous essayez de financer en partie ces mesures nouvelles par des opérations comptables, telles que le report au 1er avril 2016 de l’application de la baisse des cotisations sociales prévue par le Pacte de responsabilité, ou par des artifices de tuyauterie, qui renouent avec les stratégies troubles du temps de Martine Aubry. L’article 17 prévoit ainsi de transférer dès 2016 à la CADES 23,6 milliards d’euros de dettes correspondant aux déficits accumulés par l’ACOSS.
Cette reprise se fait sans l’affectation de recettes supérieures…
…malgré les recommandations de la Cour des comptes. Son Premier président, Didier Migaud, l’a rappelé devant la commission des affaires sociales le 16 septembre dernier. Je le cite : « Cette mesure n’aurait véritablement qu’un effet transitoire. En anticipant la reprise des déficits maladie et famille par saturation de l’enveloppe de 62 milliards d’euros dès la fin de l’année 2015, il restera de l’ordre de 26 milliards d’euros de dette à l’ACOSS à la fin de l’année 2018. » Ce n’est pas rien, n’est-ce pas, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des finances ? La vérité est que vous vous livrez à un tour de passe-passe financier, qui vous permettra, comme toujours, de laisser l’ardoise à vos successeurs.
Et vous, quelle ardoise avez-vous laissée ?
Vous voulez qu’on vous rappelle les chiffres ?
Et que dire de l’article 15, consacré pour partie au financement des exonérations de cotisations prévues par le Pacte de responsabilité et aux recettes de la CADES, qui ne compte pas moins de huit pages ?
Vous comptez le nombre de pages, à présent ? C’est une obsession !
M. le rapporteur nous a expliqué en commission qu’il avait lui-même du mal à cerner les tenants et les aboutissants des tuyauteries sociales ainsi mises en place. Ce qui est certain, c’est que cet article contient des dispositions cherchant à contourner plusieurs décisions prises par la Cour de justice de l’Union européenne et par le Conseil d’État au sujet de l’imposition des non-résidents ayant des biens immobiliers en France. La solution proposée par le Gouvernement tombera à nouveau – c’est une question de temps – sous le coup de la justice communautaire, tandis que ces dispositions constituent une véritable incitation à désinvestir en France.
La transformation de la CSG en impôt que prévoit cet article est surtout prémonitoire de sa fusion avec l’impôt sur le revenu à laquelle le Gouvernement rêve, et dont les familles moyennes seraient, une nouvelle fois, les premières victimes. Nul doute que le Conseil constitutionnel devra se prononcer sur les articles 15 et 17, mais aussi 20 et 39, au regard du principe de clarté et lisibilité de la loi.
Le dogmatisme et l’idéologie marquent ce PLFSS. Plutôt que de réformer notre système de soins, vous préférez, une fois de plus, faire de l’industrie du médicament un bouc émissaire : c’est pourquoi vous choisissez de stigmatiser l’hospitalisation privée ou d’alourdir toujours plus, année après année, les charges pesant sur les entreprises. Le Gouvernement prétend faire de l’industrie bio-pharmaceutique « un des axes majeurs de la nouvelle France industrielle ». Vos actes contredisent en permanence ces belles promesses : ce PLFSS le prouve une nouvelle fois. Cette année encore, le médicament supporte 50 % des efforts d’économies, à hauteur de 1,75 milliard d’euros, alors qu’il ne représente que 15 % des dépenses de l’assurance maladie.
Vous avez affirmé tout à l’heure, madame la ministre, n’avoir procédé à aucun déremboursement. C’est faux : le 16 janvier 2015, par arrêté, vous avez décidé vous-même du déremboursement des médicaments anti-arthrosiques d’action lente, laissant 10 millions de patients atteints d’arthrose sans alternative thérapeutique. Les Français méritent un discours de vérité ! De plus, ce faisant, vous aggraverez les dépenses de prise en charge de l’arthrose soit par des médicaments substitutifs plus chers, ou dont les effets secondaires sont dangereux, notamment pour les personnes âgées qui sont les plus concernées, soit par le recours à la chirurgie par prothèse dont vous connaissez vous aussi les coûts et les conséquences.
Pour la deuxième année consécutive, vous fixez un objectif de croissance négatif pour le chiffre d’affaires de l’industrie pharmaceutique. La clause de sauvegarde, appelée « taux L », est ainsi fixée à - 1 %. Vous reniez ainsi l’engagement pris l’année passée de revenir à un taux de 0 % en 2016. Pire, en appliquant un mécanisme de calcul pernicieux à cette clause, vous avez créé un système pervers dans lequel, en cas de dépassement, l’industrie paierait une taxe toujours plus chère d’année en année. Depuis 2012, le montant des prélèvements spécifiques sur le médicament a augmenté de près de 50 %, pour un montant cumulé de 5,5 milliards d’euros, alors que son chiffre d’affaires n’a cessé de diminuer.
Résultat de ce matraquage irresponsable : l’un des fleurons de l’industrie française est en grand danger. En trois ans, les investissements sur site de production en France ont chuté de 120 millions d’euros. La balance commerciale du médicament a chuté de 30 % sur une année. Pour la première fois depuis dix ans, l’emploi dans le secteur est repassé sous la barre des 100 000 salariés. Enfin, entre 2012 et 2014, sur cent trente molécules enregistrées à l’Agence médicale européenne, huit seront produites en France, contre vingt-huit au Royaume-Uni et trente-deux en Allemagne. Ce quinquennat aura été ainsi marqué par le sacrifice de l’une des fiertés nationales, l’industrie du médicament, pourtant porteuse d’avenir, d’innovation et de nombreux emplois.
L’industrie de la santé n’est pas la seule victime de votre acharnement, de votre logique arbitraire. Le maillage officinal de notre pays est en danger. Les officines sont frappées par les baisses de prix successives et des honoraires contreproductifs. Une officine ferme tous les deux jours, et de plus en plus de pharmaciens sont au chômage – 8 % aujourd’hui. Ces deux dernières années, le chiffre d’affaires des officines est en nette décroissance. Les grossistes répartiteurs, chers à Mme la présidente de la commission des affaires sociales, qui sont des acteurs indispensables dans la distribution des médicaments, sont également victimes des politiques des réductions tarifaires du Gouvernement. Ils sont menacés.
Pourtant vous n’avez pas voté l’article 12 bis du PLFSS il y a deux ans, alors qu’il visait à les défendre !
Cet acharnement financier ne peut se justifier puisque le prix industriel de 95 % des médicaments est inférieur à la moyenne des prix européens. Vous cédez à la facilité, mais les conséquences seront catastrophiques !
Tout autant que l’industrie du médicament, vous persistez à stigmatiser l’hospitalisation privée. Vous maintenez une politique tarifaire opaque et inégalitaire entre les secteurs privé et public, pour dissimuler le manque de réformes structurelles dans le public. L’abandon de la convergence tarifaire l’illustre bien ! La réforme du calcul du ticket modérateur à l’hôpital, qui pourrait faire économiser 1 milliard d’euros par an, et qui aurait dû être menée cette année, a été reportée à 2020. C’est un surcoût injustifié qui persiste au profit du secteur public. Mécanisme totalement arbitraire, les agences régionales de santé renflouent les caisses de certains hôpitaux publics avec des tarifs journaliers de prestation sans justification aucune de qualité et de productivité.
L’hôpital peut continuer à calculer un ticket modérateur sur la base du tarif journalier de prestations, alors que le secteur privé le calcule sur la base des groupes homogènes de soins, les GHS. Ce ticket modérateur, de l’ordre de 20 %, constitue une dépense supplémentaire à la charge des complémentaires.
À l’article 49, la réforme du financement des soins de suite et de réadaptation – SSR – n’aboutit pas, elle non plus, à une convergence tarifaire entre les établissements de santé publics et privés, alors qu’ils remplissent les mêmes missions et prennent en charge les mêmes patients. Entraînant ainsi un risque inflationniste sur les dépenses de l’ONDAM hospitalier, cette réforme injuste reproduit les différences tarifaires entre les établissements hospitaliers et met en danger, une nouvelle fois, le secteur privé ; elle inquiète au plus haut point les professionnels des SSR, dans la mesure où elle a été menée sans aucune étude d’impact ni simulation financière.
La distorsion tarifaire entre le public et le privé sur les SSR s’élève à 40 %, soit 2,4 milliards d’euros. Une réelle convergence tarifaire intersectorielle en psychiatrie, en SSR et en médecine chirurgie et obstétrique permettrait de réaliser 10 milliards d’euros d’économies. Qu’attendez-vous, madame la ministre ?
Il est temps de mettre les tarifs des prestations en phase avec les coûts réels des actes. Ainsi, dans le domaine de la radiothérapie, on constate un accroissement de plus de 43 % des dépenses ces cinq dernières années, avec une plus-value entre le coût réel et le remboursement par acte pouvant aller jusqu’à 156 %. Quelles en sont les justifications ?
Depuis 2012, la distorsion dans l’attribution des dotations accordées aux établissements de santé s’est aggravée de 16 % entre le public et le privé. L’hôpital public est sous perfusion de financements opaques, comme les MIGAC qui, depuis 2012, ne font plus l’objet de rapport quant à leur utilisation, bien qu’ils représentent une enveloppe de plus de 6,3 milliards d’euros en 2015. L’attribution des fonds d’intervention régionaux mériterait également plus de transparence.
Pourtant l’hospitalisation privée sait se montrer exemplaire. Quand l’hôpital public ne réalise que 45 % de ses actes en chirurgie ambulatoire, l’hôpital privé en réalise 60 %.
Les entreprises constituent une autre cible de ce PLFSS, afin de complaire à une partie de votre majorité qui reste sensible aux sirènes collectivistes d’un autre temps.
Le Premier ministre prétend aimer les entreprises, comme il l’a déclaré devant le MEDEF : pouvez-vous en dire autant, madame la ministre, au vu de ce PLFSS ? Une nouvelle fois, malheureusement, les entreprises semblent constituer la variable d’ajustement arbitraire de la rue de Solférino sous la pression de son aile gauche.
La parole de l’État n’est pas respectée, et le Gouvernement rompt avec les engagements pris avec les partenaires sociaux. Ce PLFSS repousse en effet de trois mois la baisse, prévue par le pacte de responsabilité, des cotisations sociales dues par les entreprises. Cette décision, prise sans aucune concertation, est loin d’être neutre financièrement pour des centaines de milliers de petites et moyennes entreprises, confrontées à des difficultés quotidiennes de trésorerie dans un contexte économique difficile. Elle nuira à l’activité et à l’emploi, alors même que, malgré tant de promesses depuis trois ans, la courbe du chômage n’a malheureusement toujours pas commencé à s’inverser.
Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, parce que le PLFSS pour 2016 fragilise l’avenir de la sécurité sociale, parce qu’il persiste à organiser l’étatisation de la médecine, parce qu’il remet en cause la solidarité nationale, j’invite à voter la présente motion de rejet préalable.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Cette motion, bien qu’elle soit un exercice attendu, n’impose pas de multiplier les contrevérités. Comme l’observait Mme la présidente de la commission des affaires sociales, ce n’est pas en répétant des contrevérités qu’on les transforme en vérités.
On a surtout l’impression en vous écoutant, monsieur Accoyer, que vous avez beaucoup de mal avec les chiffres, les faits et les données, qui pourtant sont têtus. Rappelons une chose simple : lorsque l’actuelle opposition était aux responsabilités, les déficits se sont systématiquement creusés cependant que, de façon tout aussi systématique, les droits de nos concitoyens diminuaient. Or, depuis trois ans, nous réduisons les déficits tout en améliorant la prise en charge de nos concitoyens. C’est cette réalité toute simple que vous tentez de balayer d’un revers de main en assénant des contrevérités d’un ton péremptoire.
Il n’est pas juste, monsieur Accoyer, de dire que nous faisons exploser les déficits sans nous préoccuper de la dette sociale,…
…dont on peut se réjouir qu’elle baisse, cette année, pour la première fois.
Entre 2002 et 2012, faut-il le rappeler, cette dette avait augmenté de 150 milliards d’euros, qui furent ainsi transférés à l’ACOSS.
Vous aviez fait exploser les compteurs du déficit, lequel atteignait 30 milliards d’euros au moment le plus difficile et près de 22 milliards lors de notre arrivée aux responsabilités. Aujourd’hui, nous parlons d’un déficit inférieur à 10 milliards en 2016.
Comme l’a appelé le rapporteur pour les recettes et l’équilibre général, nous avons donc réduit le déficit de moitié. Je veux bien entendre qu’il faut aller plus loin mais, pour ce faire, la seule solution, que d’ailleurs vous proposez, est de réduire purement et simplement les droits de nos concitoyens et de mettre à mal l’hôpital public, qui semble être votre obsession.
Vous demandez, et je m’en tiendrai à ce point pour conclure, de nouveaux efforts à l’hôpital public, qui pourtant en fournit plus que jamais par le passé : je salue à cet égard l’engagement et l’implication des personnels hospitaliers, qui travaillent parfois dans des conditions difficiles et sensibles : on l’a encore constaté cet après-midi au centre hospitalier sud-francilien, où des personnels de santé ont été agressés et, pour certains d’entre eux, blessés de façon traumatisante par un forcené. Ces professionnels travaillent dans des conditions difficiles.
L’ONDAM va atteindre, avec 1,75 %, un niveau historiquement bas. Votre propos, monsieur le député, est-il de dire qu’il doit être plus bas encore ?
Dès lors que la régulation est définie dans cette enveloppe financière, il vous appartiendra de préciser devant la représentation nationale et devant les professionnels hospitaliers le niveau de dépenses que vous souhaitez.
La caricature ne fait pas bon ménage avec la question des droits sociaux. La protection universelle maladie n’implique en rien de changer les règles de notre système de protection sociale.
Et je vous rappelle, puisque vous semblez l’avoir oublié, que l’on a droit, dans notre pays, à une protection sociale même lorsque l’on ne travaille pas : c’est le principe même de la CMU, de la couverture pour les enfants et les personnes au chômage, bref, de la solidarité.
Avec la protection universelle maladie, nous n’entendons pas, disais-je, changer les règles mais garantir qu’elles s’appliqueront en toute circonstance : ce n’est pas le cas aujourd’hui pour un ancien étudiant, qui doit « galérer » pour faire valoir ses droits auprès d’une caisse primaire d’assurance maladie ; ce n’est pas le cas pour une femme divorcée qui bénéficiait des droits de son mari avant la séparation ; ce n’est pas le cas pour un ancien détenu qui retrouve la liberté ; ce n’est pas le cas pour une personne qui déménage ou change de régime en changeant d’activité. La mesure est donc une simplification et une reconnaissance des droits individuels.
Bref, monsieur le député, il ne sert à rien d’agiter les peurs sur un texte de justice, de progrès des droits et de rétablissement des comptes. Aussi j’appelle votre assemblée à rejeter cette motion de rejet préalable.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Nous en venons aux explications de vote.
La parole est à M. Michel Issindou, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Fidèle à ses habitudes, M. Accoyer a fait une intervention tout en nuances... Hélas pour lui, la constance dans la mauvaise foi ne peut tenir lieu de politique.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Quel culot d’imputer à cette majorité tous les maux de la Création, alors même qu’elle rétablit enfin les comptes sans altérer la qualité des services ! À vous entendre ce soir, vous détenez toutes les solutions :…
…qu’avez-vous donc fait pendant dix ans pour que nous trouvions une situation aussi dégradée à notre arrivée aux affaires ?
Les Français ne sont pas dupes : de telles caricatures desservent celui qui les profère.
Inutile de revenir sur toutes les contrevérités que nous avons entendues
Protestations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains
je préfère insister sur les points positifs de ce PLFSS. Je pense, bien entendu, au rétablissement des comptes, à la création d’une complémentaire santé de qualité pour les travailleurs précaires en entreprise, à la complémentaire santé pour les plus de soixante-cinq ans, aux garanties de paiement des pensions alimentaires, à la prévention et à l’amélioration de l’accès aux soins pour les enfants en matière d’obésité, à l’accès des mineurs à la contraception et à la lutte contre le tabac à travers le paquet neutre, et au soutien à l’hôpital public, avec le renforcement des soins ambulatoires et les économies d’échelle qui n’altéreront en rien la qualité des soins.
Vous avez soit la mémoire courte, soit la mauvaise habitude de tout contester. Mais les Français n’apprécient plus ces discours caricaturaux. Il va donc de soi que j’appelle, au nom de mon groupe, au rejet de votre motion.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Le président Accoyer a rappelé avec force, et en développant des arguments convaincants, que jamais, depuis 2011, le Gouvernement ne s’était fixé un objectif aussi peu ambitieux s’agissant de la réduction des déficits de l’assurance maladie : nous ne parlons que de quelques centaines de millions d’euros de moins que l’an passé.
Le Gouvernement a d’ailleurs été obligé de différer à 2020 au plus tôt le retour à l’équilibre, initialement promis pour 2017 : c’est en tout cas la conclusion de la Cour des comptes, qui vous a « taclés » il y a quelques semaines.
Il y a loin de la parole aux actes, et vous ne tenez pas vos engagements alors que ce gouvernement, il faut le rappeler, n’a pas eu à subir l’effroyable choc de la crise de 2008-2009 – vous semblez l’avoir un peu oublié.
« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
Ce PLFSS ressemble finalement aux trois précédents, qu’il s’agisse de tuyauterie, de coups de rabot ou de taxes ciblées, par exemple sur le médicament ; il ne comporte aucune réforme de structure, réforme pourtant demandée maintes et maintes fois par le Premier président de la Cour des comptes.
Bernard Accoyer a rappelé vos hypothèses économiques tronquées en termes de croissance et de chômage, entre autres chiffres. La vérité des uns ne peut être confisquée par les autres : chacun sa vérité.
Le courage vous fait défaut pour mener à bien les réformes qui s’imposent et vous avez décidé, une fois de plus, de taxer des boucs émissaires : Bernard Accoyer a justement rappelé les attaques en règle contre l’industrie pharmaceutique et contre les cliniques privées,…
…compte tenu de la non-convergence avec le secteur public.
Au fond, il s’agit d’un PLFSS très électoraliste et sans ambition au regard des problèmes des Français. Bernard Accoyer a développé avec justesse de nombreux arguments, sans aucune caricature. Aussi le groupe Les Républicains votera-t-il cette motion de rejet préalable.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Pour éviter le suspense, j’annonce dès à présent que le groupe de l’Union des démocrates et indépendants votera cette motion de rejet préalable.
Sourires.
Elle a été soutenue par un réquisitoire assez sévère – je le reconnais –, sans concession et assez juste, de Bernard Accoyer à l’encontre de la politique du Gouvernement en matière de protection sociale et de santé dans notre pays depuis 1981 – puisqu’il est remonté jusque là.
Cette politique se caractérise par des réformes non financées ainsi que par le refus de procéder aux réformes structurelles que l’UDI réclame depuis des années.
Je n’en cite que deux, en commençant par la réforme du financement. Depuis des années, nous insistons sur le fait que le travail ne peut pas financer seul la protection sociale et qu’il faut trouver d’autres moyens de financement.
Au début de la législature précédente, le Gouvernement d’alors avait modifié ce financement en s’appuyant sur la TVA compétitivité. Or la première chose que ce Gouvernement a fait a été de supprimer cette mesure, pour constater qu’en définitive cela avait été une erreur.
Au lieu de revenir sur cette erreur à l’occasion de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, le Gouvernement ne fait que reporter l’échéance à l’année prochaine, voire à l’année suivante. Bref, le financement de la sécurité sociale repose toujours sur le travail, sur la compétitivité des entreprises ainsi que sur l’emploi.
Deuxième remarque, relative aux régimes spéciaux : depuis des années, le groupe UDI demande à ce qu’ils soient réformés, de façon à ce qu’il n’y ait pas deux catégories de Français.
Malheureusement, le Gouvernement persiste à refuser une telle réforme.
Alors comment réalisez-vous des économies ? Vous n’en faites d’abord pas beaucoup : la Cour des comptes a rappelé que la réduction des dépenses était, pour l’essentiel, due à l’augmentation très forte des prélèvements.
Et quand vous en faites, c’est, encore et toujours, sur le médicament. S’il ne représente que 15 % des dépenses d’assurance-maladie, on lui doit quasiment la moitié de la réduction des dépenses.
Et comme le disait Bernard Accoyer, une pharmacie ferme tous les deux jours.
Aux déserts médicaux, qui s’étendent chaque année, vous allez ajouter les déserts pharmaceutiques : cela revient à matraquer la ruralité, et ce d’autant plus que supprimez les zones de revitalisation rurale, les ZRR. De cette façon, vous dites aux ruraux : on ne veut plus de vous.
Protestations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Les résultats de cette politique ? Le premier recours aux hôpitaux augmente de 6 % par an : or ils sont bien plus chers que les soins de ville.
Vous manquez de courage et vous ne suivez pas de cap : le groupe UDI votera donc cette motion.
Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants et du groupe Les Républicains.
Sourires.
J’aurai l’occasion de développer l’analyse que nous faisons du budget de la sécurité sociale pour 2016 proposé par le Gouvernement. Vous verrez que nous sommes loin de faire partie de ses soutiens inconditionnels.
Mais lorsque j’entends les propos de M. Accoyer, qui traduisent sa vision, je dois dire que je suis totalement effrayé.
En réaction, cela donne envie de trouver des vertus – qui sont peut-être imaginaires – au projet de budget présenté par le Gouvernement. Monsieur Accoyer, qu’ai-je entendu de votre bouche ? Une pure logique comptable.
Vous ne dites rien de l’accès aux soins : comment garantissez-vous aujourd’hui cet accès à tous ? Or il constituait la promesse de la sécurité sociale, dont nous célébrons le soixante-dixième anniversaire. Vous évacuez complètement cette question.
Votre logique uniquement comptable vous pousse à vous concentrer sur les moyens de faire des économies. Vous ne vous posez pas la question de savoir comment vont faire tous ces gens qui n’ont plus accès aux soins parce qu’ils ne peuvent plus faire l’avance des frais ou parce qu’ils habitent dans des déserts médicaux. Tout cela, vous vous en fichez !
Au contraire, vous développez un discours qui est celui des lobbies : vous venez ici prendre la défense des entreprises, qui bénéficient pourtant déjà, grâce à la politique du Gouvernement, d’exonérations de charges.
Cela ne vous suffit pas : vous venez nous parler de compétitivité et défendre l’industrie pharmaceutique – la pauvre industrie pharmaceutique, qui distribue des milliards de dividendes à ses actionnaires ! Les propos que vous avez tenus, monsieur Accoyer, font de vous le porte-parole de cette industrie.
À aucun moment vous ne vous posez vraiment la question des patients, ni des besoins en matière de santé. De quelle nature est la crise sanitaire ? Que faut-il faire pour répondre à cette promesse de soins pour tous qui date de 1946 ? Nous ne pouvons vraiment pas vous suivre dans cette vision dénuée de toute considération humanitaire.
Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Sur la motion de rejet préalable, je suis saisie à l’instant par le groupe Les Républicains d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
S’il n’y a pas de remarques, nous allons maintenant procéder au scrutin. Je mets donc aux voix la motion de rejet préalable et vous remercie de bien vouloir regagner vos places.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants: 87 Nombre de suffrages exprimés: 87 Majorité absolue: 44 Pour l’adoption: 37 contre: 50 (La motion de rejet préalable n’est pas adoptée.)
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures dix.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly