Intervention de Hervé Mariton

Séance en hémicycle du 19 décembre 2012 à 21h30
Projet de loi de finances rectificative pour 2012 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Mariton :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, au fil des heures et des jours de débats, on aurait pu espérer une amélioration du collectif budgétaire ; tel n'a pas été le cas.

Il faut chercher à donner du sens à ces lectures et débats successifs. Le texte a-t-il été amélioré sur le fond ? La réponse est non. Au fil des débats, il s'est même plutôt aggravé, en ce qui concerne, par exemple, l'accumulation des conditions et des critères pour le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi.

En réalité, ces lectures successives n'avaient pas pour fonction d'améliorer le texte ; elles sont le résultat de la pure contrainte, du désaveu infligé par le Sénat au projet de loi de finances rectificative dans ces différentes lectures, donc au Gouvernement.

À dire vrai, parce qu'il faut s'habituer à ce que les choses fonctionnent ainsi pendant quelques années, je pense que nous aurions intérêt à donner un peu plus de sens à ces lectures successives.

Peut-on espérer que le Gouvernement, au fil de ces lectures, donne réellement des renseignements et des réponses supplémentaires ? Peut-on imaginer que ce qui n'était peut-être pas parfait dans les rédactions initiales soit amélioré ? Il nous appartiendrait aussi, dans l'opposition d'ailleurs, de préciser, de pointer les enjeux principaux qu'il nous paraît nécessaire d'évoquer.

On a eu parfois le sentiment hier – et on l'aura sans doute encore aujourd'hui – que pour beaucoup ici, cette nouvelle lecture, puis cette lecture définitive seraient des rites insupportables qu'il faudrait passer le plus vite possible et en y pensant le moins possible.

Mais attendez, monsieur le ministre, chers collègues de la majorité, il se trouve simplement que ces lectures sont la marque du désaveu qui vous a été infligé au Sénat. Elles sont le résultat du fonctionnement prévu de nos institutions. Le Gouvernement, la majorité, et même l'opposition, pour laquelle je viens aussi d'exprimer quelques éléments d'autocritique, gagneraient à mieux comprendre et à mieux vivre des étapes qui sont appelées à se reproduire et à se renouveler.

Soit nous considérons que le débat parlementaire est un rite qui n'a pas plus d'intérêt que cela et nous subissons, en essayant de ne pas trop y penser, la lecture définitive. Soit nous considérons que ce sont des moments substantiels de la procédure parlementaire, de la démocratie, singulièrement s'agissant d'actes budgétaires.

Aussi, monsieur le ministre, chers collègues de la majorité, un peu d'efforts dans le débat ! Le rapporteur général l'a dit tout à l'heure avec l'humour qui le caractérise : parfois, en effet, le ministre et le rapporteur général ont répondu aux questions qui leur étaient posées. Il est arrivé que ces réponses arrivent avec un temps de décalage pas vraiment idéal par rapport aux questions. Il est arrivé aussi qu'il n'y ait pas de réponse.

Bien évidemment nous ne pouvons pas obliger un collègue, ni le Gouvernement, à s'exprimer, mais si la discussion budgétaire a un sens, il est important de répondre le plus complètement et le plus souvent possible à nos questions.

Prenons un exemple. Du strict point de vue de la procédure du projet de loi de finances rectificative, sans doute monsieur le ministre aviez-vous raison en répondant à ma question, hier, sur le lien entre le financement du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi et celui des contrats de génération. Mais il se trouve, et vous le savez, qu'une loi budgétaire est un acte politique. Ce sont vos collègues du Gouvernement qui, par leurs déclarations, auxquelles nous ne pouvons rester sourds, ont fait ce lien entre le financement du plan de compétitivité, décrit dans une épure budgétaire que le Gouvernement a globalement présentée, et le financement du contrat de génération.

À certains égards, sans doute, votre réponse est techniquement exacte, mais dans la dynamique politique que vous soutenez, que vous présentez, que vous partagez, vous devriez pouvoir nous en dire un peu plus. D'ailleurs, est-il normal que nous n'en sachions pas davantage aujourd'hui sur le financement du contrat de génération ? Que ce soit dans le collectif ou la loi de finances pour 2013, peut-être serait-il temps que maintenant, à la fin de décembre 2012, nous en sachions plus sur ce sujet. Cela ne serait pas scandaleux dans une démocratie.

M. Charles de Courson vous a également demandé, monsieur le ministre, si, au regard d'un certain nombre de dépenses et d'ajustements budgétaires réalisés dans le collectif, ceux-ci n'auraient pas pu être établis dès le collectif de l'été. Comme un peu de temps s'est écoulé depuis hier, chacun d'entre nous a fait son travail et je me suis permis de me renseigner auprès d'autorités compétentes sur l'évolution des dépenses militaires : il m'a été répondu que les ajustements du collectif étaient prévisibles dès le collectif de l'été.

Sur ce point, vous pourriez nous adresser quelques reproches, à nous, l'ancienne majorité, mais de notre côté, nous pouvons vous accuser de ne pas avoir, cet été, proposé un collectif budgétaire qui tienne compte de l'ensemble des éléments dont vous disposiez et d'avoir plutôt choisi de tronçonner un certain nombre d'ajustements budgétaires entre le collectif de l'été et celui de l'automne.

Je ne reviendrai pas sur l'ensemble des critiques qui portent sur le collectif : incertitudes, contraintes, facilités. Vos allers et retours en matière de fiscalité des entreprises rendent votre politique économique, celle que vous infligez à notre pays, au mieux incompréhensible, au pire lourde et pénalisante pour les entreprises – donc finalement trop compréhensible… Aux allers et retours que vous savez et qui provoquent quelques remous dans votre majorité sur la TVA s'ajoutent un certain nombre de dispositions que, sous couvert de lutter contre les abus, vous avez prises pour durcir et alourdir la fiscalité et que nous pouvons soutenir pour une part, que nous aurions pu soutenir si elles avaient été mieux calibrées.

Les quelques pétitions et déclarations de bonne volonté du Gouvernement sont toujours bonnes à prendre quand il s'agit de prétendre s'intéresser davantage à la compétitivité. On ne doit pas mépriser ces propos mais c'est la réalisation qui pose ensuite problème. Le rapporteur général l'a rappelé, avec cette commodité particulière qui consiste à espérer pour demain et à faire payer après-demain.

Tout n'est pas absolument mauvais dans chacun des articles ou des alinéas du collectif. Nous pourrions soutenir un certain nombre de dispositions techniques destinées à lutter contre la fraude et l'abus. Nous aurions voulu soutenir davantage les mesures relatives au crédit d'impôt pour la compétitivité car, je l'ai dit et je le répète, il y a là une forme d'union nationale sur cet enjeu de compétitivité que vous avez choisi d'abîmer. Probablement avez-vous pensé que cela eût été trop dur à porter pour une part de votre majorité. Plus simplement, sur un objectif auquel on peut s'unir, l'amélioration de la compétitivité des entreprises et le rétablissement de l'emploi, votre idéologie, vos propres contraintes ne vous ont pas permis d'aboutir à des conclusions et à des modalités que nous aurions pu partager. C'est un gâchis, monsieur le ministre, et c'est dommage. Toute l'énergie que nous avons mise ensemble dans l'examen et l'analyse de ce collectif budgétaire auraient permis d'espérer mieux, en particulier un vrai plan de compétitivité pour notre pays.

Puissiez-vous entendre ce message. Si nous partageons l'objectif, nous sommes loin d'être d'accord sur les modalités. En logique, le groupe UMP votera contre, dans cette ultime lecture, le projet de loi de finances rectificative pour 2012. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP.)

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