Intervention de Pascal Terrasse

Réunion du 26 octobre 2015 à 17h00
Commission élargie : finances - affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascal Terrasse, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire :

Pour l'année 2016, le budget de la mission « Action extérieure de l'État » s'élève à 3,2 milliards d'euros en crédits de paiement, soit une hausse apparente d'environ 8 %. En réalité, à périmètre constant, les moyens alloués restent stables. Ce sont notamment les contributions internationales obligatoires, d'un montant de plus de 940 millions d'euros, qui ont été très affectées par les effets de change.

Conformément à la ligne fixée en 2012, ce budget participe au redressement des finances publiques, tout en adaptant notre outil diplomatique et consulaire à l'évolution des besoins. L'effort d'économies ne contrevient pas à la modernisation de notre diplomatie. En effet, si des dépenses nouvelles peuvent être nécessaires, cette modernisation implique aussi de dégager des économies et de trouver des leviers de réforme.

Vous nous avez d'ailleurs présenté, lors d'une récente rencontre, la feuille de route « MAEDI 21 », exemplaire à deux égards. D'abord par la méthode, car c'est un véritable projet de ministère, établi au terme d'une vaste consultation des agents, des organisations syndicales et des partenaires du ministère. Ensuite par son ambition, puisqu'il s'agit de veiller à ce que la France continue de disposer d'une diplomatie efficace en prise avec la réalité. Notre réseau diplomatique est aujourd'hui constitué de 163 ambassades et de 225 postes consulaires. La réduction au minimum de certains formats et la diminution des effectifs de certains postes encore sur-dotés permettront d'augmenter les effectifs du réseau dans les pays du G20 et, dans le même temps, dans les métropoles caractérisées comme « émergentes ».

En venant aux crédits proprement dits, je commencerai par ceux consacrés aux bourses de mobilité. Celles-ci évoluent de façon erratique au fil des exercices. Or l'attribution de bourses aux meilleurs étudiants étrangers est évidemment un outil majeur de notre diplomatie culturelle et scientifique, au service du rayonnement de notre pays. Vous le savez, nos premiers ambassadeurs sont les étudiants qui viennent de l'étranger et repartent ensuite dans leur pays. Je vous interrogerai donc tout d'abord sur la sanctuarisation de ces postes.

Dans un ministère constamment confronté aux crises, la sécurisation des postes devra également s'accélérer. Sont prévus, en 2016, 55,8 millions d'euros pour des audits de sécurité, notamment dans les réseaux culturels et éducatifs, soit une hausse de 31 %.

L'adaptation du réseau nécessitera, par ailleurs, de poursuivre la gestion dynamique de l'immobilier. À ce titre, le ministère bénéficie d'un droit de retour du produit des ventes immobilières domaniales à l'étranger afin de financer des restructurations ou encore des acquisitions. Il contribue néanmoins, forfaitairement, au désendettement de l'État. Cette contribution, qui devait être stabilisée à 25 millions d'euros par an pendant trois ans, est finalement portée à 100 millions d'euros pour l'année 2016. Ce manque à gagner ne va-t-il pas retarder des projets pourtant utiles au redéploiement de notre réseau ? Ne faut-il pas définir une règle stable de contribution au désendettement afin de prévoir, sur une période de plusieurs années, les projets de redéploiement ?

Je souhaite aussi vous interroger, monsieur le ministre, sur le périmètre d'intervention de nos services consulaires. Le financement des postes est sous tension alors que le nombre de Français résidant ou séjournant à l'étranger augmente sensiblement et que la palette de services proposée par nos consulats est bien plus large que celle proposée par les consulats des autres pays européens. Il me semble que nous pouvons difficilement nous inscrire pleinement dans le multilatéralisme tout en maintenant cette singularité propre à notre pays. Certains de ces services pourraient être assurés par des tiers. Ce serait moins coûteux et cela nous éviterait de devoir supprimer nos nombreux petits postes consulaires.

À la demande de la commission des finances, la Cour des comptes a rendu un rapport sur ce sujet il y a maintenant deux ans. Elle y propose, par exemple, de mettre fin à l'exercice des compétences notariales, de facturer les transcriptions d'actes d'état civil ou encore de limiter la délivrance de cartes nationales d'identité à l'étranger. Envisagez-vous, monsieur le ministre, de vous engager dans cette voie ? En particulier, pourrait-on reconsidérer le périmètre d'intervention dans des pays dont les conditions économiques ou de sécurité sont comparables à celles de la France ? Je pense notamment aux pays frontaliers.

En matière de service public pour les Français de l'étranger, le ministère a déjà apporté, avec l'attribution de bourses scolaires dans le réseau de l'enseignement du français, la preuve de sa capacité à réformer. Les ressources des familles sont mieux évaluées et la répartition des quotités de bourse correspond plus étroitement à leurs revenus. Le dispositif a terminé sa montée en charge et les montants effectivement consommés sont inférieurs aux montants budgétés ces dernières années, ce qui permet une régularisation dans le cadre du budget 2016. Soucieux de renforcer ces bourses, nous avons rencontré le conseil consulaire des bourses, qui nous a fait savoir que les conseillers consulaires pourraient jouer un plus grand rôle afin d'améliorer la transparence. Je souhaiterais connaître votre avis sur la question.

Je veux également vous interroger, comme l'an dernier, sur l'exposition d'une part substantielle des crédits de la mission aux risques de change. La dépréciation de l'euro par rapport au dollar depuis 2014 met nos crédits sous tension sur l'ensemble du réseau. L'an dernier, les crédits consacrés à l'effet de change avaient dû être relevés d'environ 40 millions d'euros. Cette année, ils seraient de plus de 150 millions d'euros. Au regard de la norme de dépense assignée au ministère, il ne me paraît pas soutenable d'attendre l'issue incertaine de négociations avec la direction du budget du ministère des finances ou un redéploiement pour que la perte de change soit financée. J'ai donc déposé un amendement en ce sens.

À votre demande, monsieur le ministre, et à celle de mes collègues, j'ai procédé à un contrôle sur place et sur pièces de l'organisation de la COP21 pour vérifier comment l'argent public était utilisé. Je ne rentrerai pas dans les détails mais le dispositif spécifiquement mis en place fonctionne parfaitement bien, nonobstant quelques soucis en matière de sécurité, auxquels il faudra évidemment être attentif durant la COP21. Si je devais décerner une note, ce serait vingt sur vingt !

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