Intervention de Stéphane le Foll

Séance en hémicycle du 2 novembre 2015 à 16h00
Projet de loi de finances pour 2016 — Agriculture alimentation forêt et affaires rurales

Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement :

Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, je voudrais introduire ce débat en vous présentant les enjeux et les orientations du budget du ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt pour 2016.

Ce budget représente un total de 4,5 milliards d’euros en crédit de paiement, soit une baisse de 2,8 %, je le reconnais. Cette baisse s’explique par des éléments techniques, en particulier les engagements de dépense liés aux fameuses mesures agroenvironnementales qui, après avoir mobilisé 400 millions d’euros la première année, en coûteront 72 millions ensuite, chaque année.

Par ailleurs, nous avons tout fait, en bons gestionnaires, pour mobiliser la totalité des fonds du deuxième pilier de la politique agricole commune – PAC – d’ici la fin de l’année 2015. C’est vrai, il y aura moins pour 2016, mais c’est simplement un acte de bonne gestion.

Cette baisse de 2,8 % traduit surtout l’effort réalisé sur les coûts de fonctionnement. J’y reviendrai, mais tout l’enjeu est là. Le ministère de l’agriculture participe, comme tous les autres, à la réduction de la dépense publique et réalise ainsi une économie de près de 3,8 % sur les fonctions support et les opérateurs. Le Gouvernement a fait ce choix constant, depuis son arrivée, de réduire le déficit budgétaire de notre pays et chaque ministère consent aux efforts nécessaires. Mais cela ne remet pas en cause les engagements que nous avons pris pour soutenir l’agriculture et les agriculteurs.

La France continuera à recevoir en 2016, au titre de la PAC, la somme de 9,7 milliards d’euros, conformément aux négociations menées par le Président de la République, dans le cadre d’une réforme dont les enjeux sont très importants et la mise en oeuvre compliquée par des difficultés techniques.

Saluons par ailleurs la montée en puissance du pacte de responsabilité qui intègre ainsi le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – CICE. En 2013, les allégements de charges s’élevaient à 1 milliard d’euros contre 1,7 milliard en 2016 et 1,8 milliard en 2017. Cette progression du pacte de responsabilité vaut pour l’agriculture mais aussi pour l’industrie agroalimentaire, dans les mêmes proportions. Le débat relatif à la compétitivité et à l’engagement budgétaire doit prendre en compte la mise en oeuvre du pacte de responsabilité, qui profite à ce secteur, comme aux entreprises forestières d’ailleurs. Nous n’avons pas exactement les chiffres s’agissant de ces dernières, mais toute entreprise bénéficie de ce crédit d’impôt dès lors qu’elle emploie des salariés.

Ce budget est cohérent avec l’engagement pris en faveur de l’élevage car, en 2016, l’ICHN, l’enveloppe nationale pour l’indemnité compensatrice de handicap naturel s’élèvera à 256 millions d’euros. Au total, grâce aux crédits communautaires, l’enveloppe consacrée à cette indemnité s’élèvera en 2016 à 1,024 milliard, soit près de 100 millions de plus qu’en 2015 et 400 millions de plus qu’en 2014. C’est un effort sans précédent depuis la mise en place de cette politique de compensation du handicap.

Ce budget traduit également le soutien que nous apportons à la modernisation des exploitations, au travers du fameux plan pour la compétitivité et l’adaptation des exploitations agricoles, le PCAE, engagé avec les régions et qui montera en puissance. L’effort de l’État, dans ce domaine, augmentera de 30 millions d’euros en passant de 56 millions à 86 millions d’euros.

Les crédits du programme d’investissements d’avenir, le PIA, mobilisés en 2016 seront de 70 millions d’euros : 40 millions ont été prévus dans le triennal 2015-2017, et 30 millions d’euros supplémentaires sont prévus pour soutenir, là encore, l’élevage.

Ce plan prévoit aussi des allégements de charges, des allégements fiscaux, des allégements au niveau de la Mutualité sociale agricole, pour plus de 180 millions d’euros dès cette année. Au total, 600 millions seront mobilisés sur trois ans, ce qui est absolument nécessaire en raison de la crise que nous traversons, comme j’ai pu en prendre conscience en me déplaçant en Bourgogne et à Dijon, dans le cadre d’une cellule d’urgence régionale. Quand on voit la situation dans laquelle se retrouvent aujourd’hui nos exploitations d’élevage, il était urgent d’agir. C’est ce que nous sommes en train de faire. Près de 25 000 dossiers ont été déposés, 13 000 sont d’ores et déjà traités et les premiers versements sont en cours. Nous le devions aux éleveurs qui avaient manifesté, et plus largement à tous les éleveurs car leurs difficultés sont sérieuses.

Ce budget accompagne et soutient la ligne votée dans le cadre de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt et du projet pour l’agro-écologie, en particulier grâce aux MAEC, les mesures agro-environnementales climatiques « territorialisées » et « systèmes ». En 2016 l’État engagera de nouveaux contrats à hauteur de 72 millions. L’enjeu est d’accompagner cet objectif dans le cadre de l’agro-écologie, ce qui se traduit par le maintien des dotations pour l’agriculture biologique – 4 millions à destination du fonds « avenir bio » – et la consolidation des crédits d’intervention en faveur de la politique forestière. Le fonds stratégique pour la forêt et le bois est abondé à près de 25 millions d’euros. On le sait, des efforts restent encore à faire mais grâce à ce fonds, nous pourrons atteindre l’objectif que nous nous étions fixé dans le débat. En tenant compte des cofinancements du fonds européen agricole pour le développement rural – FEADER –, nous pouvons atteindre un total de 40 à 50 millions d’euros qui servira à financer de nouvelles plantations dans la forêt, qui en a besoin.

L’État poursuit par ailleurs l’application du plan mis en oeuvre après la tempête Klaus en lui attribuant un financement de 41 millions d’euros en 2016.

Le soutien se traduit enfin dans le cadre d’un contrat d’objectifs avec l’ONF, qui a fait comme d’autres des efforts, mais on doit trouver une solution équilibrée qui lui permette de poursuivre son activité et surtout de maintenir le régime forestier.

Par ailleurs, ce budget conforte la priorité du Gouvernement en faveur de la jeunesse et du renouvellement des générations Les crédits alloués à l’enseignement et la recherche agricoles s’élèvent à 1,7 milliard, ce qui représente une hausse de 1 % pour l’enseignement technique et supérieur agricole par rapport à 2015.

Cette dotation permet de poursuivre l’objectif fixé dès le départ d’une création de 1 000 postes pour l’enseignement agricole et la recherche. Pas moins de 185 postes sont ainsi créés en 2016 : 140 pour l’enseignement technique, 20 pour l’enseignement supérieur et 25 postes d’assistants de vie scolaire et d’insertion. Conformément à l’engagement que j’avais pris, l’objectif des 1 000 postes sera atteint à la fin du quinquennat.

Il faut également assurer le renouvellement des générations avec le maintien de l’objectif ambitieux et prioritaire de 6 000 installations aidées par an. Il y va de l’avenir de l’agriculture.

Ce budget conforte également la capacité à prévenir et réagir face aux risques sanitaires et climatiques. L’effort exceptionnel réalisé en 2015 avec la création de soixante postes dédiés à la sécurité sanitaire est renouvelé en 2016. Ce sont donc 120 emplois supplémentaires sur deux ans. Nous poursuivrons cet effort en 2017 pour renforcer encore les moyens des services vétérinaires, essentiels pour apporter les garanties sanitaires, indispensables à l’exportation dans le domaine de l’élevage.

Le financement des dispositifs de gestion des risques a été consolidé. Le soutien à l’assurance récolte et aux fonds de mutualisation est financé totalement par les crédits européens du second pilier de la PAC en 2016 pour un total de 120 millions d’euros. Le contrat socle est lancé cet automne pour la récolte 2016. Il permettra aux agriculteurs de mieux surmonter les aléas climatiques et sanitaires, souvent causes de graves difficultés économiques.

Les aides et les interventions en faveur des agriculteurs sont donc maintenus. Ils s’accompagnent d’efforts en matière de gestion et de fonctionnement, avec des réductions de postes – plus de 220 postes sont supprimés encore cette année. Enfin, nous voulons améliorer la qualité du travail de toutes les fonctions support du ministère de l’agriculture, afin d’agir plus efficacement au service des agriculteurs. Dans la crise que nous traversons, ce budget répond à l’urgence et fixe les grands enjeux et les perspectives pour l’avenir de l’agriculture française.

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