À l'heure où des efforts de maîtrise de la dépense publique sont plus que jamais nécessaires, cette mission devrait constituer le principal levier en matière d'économies budgétaires. Ce n'est malheureusement pas le cas.
Certes, un certain nombre de sujets font consensus car ils s'inscrivent dans la continuité des actions engagées par la précédente majorité : je pense à la lutte contre les fraudes, à la dématérialisation des procédures, à la rationalisation du patrimoine de l'État, à la mutualisation des achats. Le gel du point d'indice des fonctionnaires, censé être appliqué pendant toute la législature, ou encore la réduction des primes catégorielles vont aussi dans le bon sens.
En ce qui concerne les économies à réaliser sur la masse salariale, nous regrettons, en revanche, que le Gouvernement n'ait pas maintenu la révision générale des politiques publiques (RGPP) qui avait le mérite de donner à notre administration lisibilité et efficacité, en diminuant de manière drastique cette masse salariale. Je me souviens d'une formule de Didier Migaud alors qu'il n'était pas encore premier président de la Cour des Comptes : il faut dépenser mieux pour dépenser moins.
Rappelons ici que la mesure phare de la RGPP a été le non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux dans les ministères. Elle a dégagé une économie brute moyenne de 840 millions d'euros par an sur la période 2008-2012, soit un total cumulé de 4,2 milliards d'euros, équivalent à 5 % de la masse salariale de l'État. Cette politique a ainsi permis une baisse des effectifs de 144 000 équivalents temps plein (ETP) sur la période 2008-2012, soit 6,6 % des effectifs des ministères. Elle permettait en outre de redéployer – notamment dans l'éducation nationale – la moitié des économies immédiates pour augmenter les traitements d'agents moins nombreux, donc, et mieux formés.
Toutefois, depuis 2012, la masse salariale publique est repartie à la hausse. Selon un récent rapport de la Cour des comptes, la France est ainsi le seul pays de l'Union européenne à l'avoir augmentée en volume depuis 2010. Les autres pays, quelle que soit leur sensibilité politique, ont à l'inverse réduit la leur, et certains considérablement, comme les Pays-Bas, l'Italie, le Royaume-Uni, sans parler de l'Espagne, en jouant sur le non-remplacement des départs ou le réajustement des rémunérations.
D'abord, le Gouvernement a renoncé à réduire le nombre de postes de fonctionnaires. Le projet de loi de finances pour 2016 prévoit même une forte hausse des effectifs, 8 300 postes étant ainsi créés. François Hollande renonce encore une fois à un de ses engagements de campagne. N'avait-il pas affirmé, dans son discours à Orléans en février 2012 : « J'ai pris, là-dessus, tout engagement nécessaire : stabiliser les effectifs de la fonction publique d'État » ?
Madame la ministre, la hausse des effectifs dans l'éducation nationale se poursuit, bien que vous sachiez, au-delà des raisonnements clientélistes, que le nombre d'enseignants n'a jamais été corrélé avec la qualité de l'éducation offerte. Il n'est de surcroît pas tenu compte de l'évolution démographique des élèves.
Votre majorité a également supprimé le jour de carence sans prévoir de dispositif alternatif – ce que nous regrettons profondément. Il en est résulté une remontée immédiate de l'absentéisme de courte durée. Cette abrogation a été un très mauvais signal mettant à bas l'idée selon laquelle l'effort n'est juste que s'il est partagé.
La Cour des comptes rappelle que le Gouvernement a maintenu des dispositifs qui n'ont plus lieu d'être dans leur forme actuelle : le supplément familial de traitement, l'indemnité géographique de résidence, les surrémunérations outre-mer ou encore la surrémunération de certains temps partiels.
Madame la ministre, nous attendons des actes forts sur ces préconisations de bon sens. Je serais heureux de savoir ce que vous en pensez précisément. Au-delà, nous défendons une gestion beaucoup plus dynamique d'une fonction publique rémunérant davantage la performance, avec des effectifs adaptés aux missions de l'État, et dont le périmètre serait redéfini. Avoir des fonctionnaires moins nombreux mais mieux payés et travaillant sans doute plus longtemps, doit être un chantier à mener dans les prochaines années.