Intervention de Jean-Louis Gagnaire

Réunion du 29 octobre 2015 à 15h00
Commission élargie : finances - affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Gagnaire, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour le développement des entreprises et pour les prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés :

Les crédits du programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme » sont quasiment stables cette année, passant de 852 millions d'euros en loi de finances initiale (LFI) pour 2015 à 838 millions en crédits de paiement dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2016. Ce programme a néanmoins la spécificité de concerner diverses actions de politique économique qui couvrent un champ financier beaucoup plus vaste – je pense notamment à l'action de Bpifrance et aux dépenses fiscales rattachées au programme, telles que le CICE.

C'est pourquoi je voudrais fonder mon intervention autour d'une problématique stratégique et générale, puis de deux questions plus particulières concernant les pôles de compétitivité et la réforme des centres techniques industriels (CTI).

Sur le plan stratégique, je voudrais vous interroger, monsieur le ministre, sur la manière dont l'État entend repenser son action économique dans le cadre de la réforme territoriale. En effet, nous constatons depuis plusieurs années que les moyens d'intervention directe de la direction générale des entreprises et des services déconcentrés se réduisent fortement dans le domaine économique, au profit d'actions mises en oeuvre dans le cadre des programmes d'investissements d'avenir ou portées par les plans industriels, dont nous saluons le recentrage autour de neuf plans en 2015, dans le cadre de la structuration des filières. Parallèlement, on constate une montée en puissance des régions sur le plan économique, qui gèrent désormais les aides du Fonds européen de développement régional (FEDER) et compensent, pour partie, la raréfaction des fonds de l'État.

Quelle est votre perception de cette évolution du schéma d'ensemble ? En particulier, de quelle manière pourrait-on faire en sorte que les moyens d'action des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) soient cohérents avec leurs missions, telles que redéfinies ? Il me semble que la priorité doit être clairement donnée aux interventions en faveur de l'investissement, de l'innovation, de l'industrie et de l'international, notamment en appuyant les démarches des entreprises, et en particulier des PME, pour obtenir des financements européens, particulièrement dans le cadre de la stratégie « Horizon 2020 ». Le lien entre les délégations régionales à la recherche et à la technologie (DRRT) et les DIRECCTE pourrait ainsi être renforcé et leurs missions revalorisées dans cette perspective.

Cette montée en puissance des régions impose également une concertation plus étroite de ces dernières avec les dispositifs nationaux, au premier rang desquels Bpifrance, comme le recommande le récent rapport de mes collègues Laurent Grandguillaume et Véronique Louwagie sur le rôle de Bpifrance. En particulier, nous saluons votre engagement pour mettre en place une capacité de retournement qui associerait les régions, Bpifrance et des acteurs privés, selon un équilibre majoritairement privé, afin de combler cette lacune dans le paysage économique français. Je soutiens pleinement cette démarche et je vous serais reconnaissant de bien vouloir nous expliquer les étapes actuellement envisagées pour le déploiement de ce dispositif, en dehors de l'expérimentation en cours dans deux régions.

Enfin, la réforme territoriale pose également la question du maintien de certains dispositifs au niveau national, tels que le Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC). Celui-ci ne bénéficie plus en 2016 que de 10 millions d'euros en crédits de paiement et de 15 millions d'euros en autorisations d'engagement, contre 17 et 19 millions d'euros respectivement dans la LFI pour 2015. Dans ces conditions, faut-il vraiment maintenir ce dispositif au niveau national ? Ne pourrait-on le territorialiser ? Les coûts de gestion ne sont-ils pas prohibitifs au regard de la faiblesse du dispositif ?

Toujours s'agissant du FISAC, je souhaiterais obtenir des précisions concernant le règlement spécifique relatif aux stations-service, qui a été doté de 2,5 millions d'euros pour l'année 2015. Il y a actuellement 2 200 dossiers en attente. Le 14 septembre 2015, le Comité interministériel aux ruralités annonçait pourtant une enveloppe exceptionnelle de 12,5 millions d'euros pour 2016 pour traiter ces dossiers, mais cette dotation n'apparaît pas dans le PLF pour 2016. Ma collègue Valérie Rabault, en sa qualité de rapporteure générale, a ainsi déposé un amendement visant à majorer de 3 millions d'euros les crédits en faveur des stations-service au sein du FISAC. Le Gouvernement serait-il prêt à faire un effort en ce sens ?

J'en viens maintenant à deux questions plus spécifiques.

Concernant les pôles de compétitivité, vous vous étiez engagé, monsieur le ministre – et je vous en remercie –, à maintenir la dotation d'appui à la gouvernance des pôles de compétitivité à hauteur de 14 millions d'euros. Cette dotation se retrouve à l'identique dans le PLF pour 2016. En revanche, nous constatons que la dotation versée au titre du Fonds unique interministériel (FUI) ne représente plus que 80 millions d'euros dans le PLF pour 2016. Bien que cette dotation ne fasse pas partie du programme 134, il existe un lien entre les deux. Un rapport récent de l'Inspection générale des finances recommande le recentrage de l'action de l'État sur les pôles les plus dynamiques. Quelle est la position du Gouvernement à ce sujet ?

Ma seconde question porte sur la réforme de la gouvernance et de la collecte des taxes affectées aux CTI, inscrite à l'article 53 du PLF pour 2016. En premier lieu, la création de trois nouvelles taxes affectées est conforme aux orientations du rapport de Mme Clotilde Valter et à la volonté de diminuer le financement budgétaire de ces centres. Nous craignons cependant que la possibilité offerte au CTI « Plasturgie » d'instaurer une taxe dégressive ait un effet boule de neige qui menacerait les ressources des autres CTI. Pourriez-vous nous confirmer, monsieur le ministre, que cette forme spécifique de taxation n'a pas vocation à être généralisée et qu'elle pourrait même, le cas échéant, être abandonnée après évaluation de son efficacité ?

Par ailleurs, ne pensez-vous pas qu'il conviendrait de maintenir le droit de regard dont disposent les CTI sur la collecte de la taxe, et notamment leur capacité à notifier une régularisation, supprimée par l'article 53 ? Le risque existe en effet que l'administration fiscale soit moins réactive que les CTI sur le redressement de taxes de faible montant, aspect que sa nature très technique rend particulièrement complexe à appréhender, ce qui ferait peser in fine une incertitude sur le montant des ressources destinées aux CTI.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion