commission élargie
Commission des affaires étrangères
(Application de l'article 120 du Règlement)
Jeudi 29 octobre 2015
Présidence de M. Dominique Lefebvre, vice-président de la Commission des finances, de Mme Frédérique Massat, présidente de la Commission des affaires économiques, et de Mme Valérie Fourneyron, secrétaire de la Commission des affaires étrangères
La réunion de la commission élargie commence à quinze heures.
Projet de loi de finances pour 2016
Économie
Monsieur le ministre, madame et monsieur les secrétaires d'État, je suis heureux de vous accueillir, en compagnie de Frédérique Massat, présidente de la commission des affaires économiques, et de Valérie Fourneyron, secrétaire de la commission des affaires étrangères.
Nous sommes réunis en commission élargie afin de vous entendre sur les crédits du projet de loi de finances pour 2016 consacrés à la mission « Économie » et aux comptes spéciaux qui y sont rattachés. Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'Etat chargée du numérique, est actuellement retenue au Sénat, et nous rejoindra dès que les sénateurs l'auront libérée…
Je rappelle les règles de nos commissions élargies. Nous donnerons d'abord la parole aux rapporteurs des trois commissions, qui interviendront chacun pour une durée de cinq minutes sous forme de questions aux ministres. S'exprimeront ensuite les porte-parole des groupes, pour cinq minutes également. Enfin, tous les députés qui le souhaitent pourront interroger les membres du Gouvernement, leur temps de parole étant limité à deux minutes.
Comme l'an passé, la commission des affaires économiques s'est saisie pour avis de cinq budgets relevant de la mission « Économie ». Cette mission contribue à l'effort de redressement des comptes publics, puisqu'elle enregistre une baisse de 5,6 % à périmètre constant.
Malgré ces moyens contraints, le Gouvernement est parvenu à proposer des mesures ambitieuses qu'il convient de saluer. Je prendrai pour exemple la poursuite de l'engagement de l'État auprès des collectivités territoriales pour le déploiement du très haut débit, ainsi que l'augmentation des crédits dévolus au nouvel opérateur Business France.
Comme de coutume, la commission a retenu pour la plupart de ses avis une présentation en deux parties : la première est consacrée aux crédits, la seconde à un ou plusieurs thèmes. Les avis présentés comprennent ainsi un bilan de la mise en oeuvre du principe « le silence de l'administration vaut accord », qui sera présenté par M. Lionel Tardy ; un point sur la libération de la bande des 700 mégahertz, effectué par Mme Corinne Erhel ; une étude de l'implication de La Poste dans la mise en place des maisons de service au public qui sera menée par Mme Michèle Bonneton ; une évaluation des trente-quatre plans de la Nouvelle France industrielle – devenus les Neuf solutions industrielles – qui sera faite par M. Jean-Luc Laurent ; enfin un état des lieux des négociations sur le traité transatlantique, qui sera établi par Mme Jeanine Dubié.
Je souhaite que ces analyses contribuent à nourrir nos débats.
La commission des affaires étrangères est saisie pour avis des crédits du commerce extérieur.
Dans ce cadre, je voudrais saluer la poursuite du redressement de notre commerce extérieur, puisque le déficit continue à se réduire. Nous sommes passés de près de 75 milliards d'euros de déficit en 2011 à 54 milliards en 2014, et nous serons très probablement entre 40 et 50 milliards à la fin de l'année en cours.
Ce résultat tient certes à des facteurs exogènes, comme la baisse du pétrole et de l'euro, mais aussi à la politique de compétitivité efficace menée par le Gouvernement. L'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) a récemment salué l'effet du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) sur le coût du travail, qui a augmenté deux fois moins vite que celui de l'Allemagne depuis 2012.
Je voudrais saluer plusieurs grandes réformes qui permettent de rendre nos outils pour développer le commerce extérieur à la fois plus complets et plus lisibles pour nos petites et moyennes entreprises (PME), donc plus efficaces. C'est le cas de la création de la Banque publique d'investissement (Bpifrance) ; des mesures d'amélioration et d'élargissement du système des garanties aux exportateurs gérées par Coface ; de la création de Business France ; de la mobilisation de nos ambassadeurs pour nos entreprises grâce à la priorité donnée à la diplomatie économique ; ainsi que de l'essor du programme de volontariat international en entreprise (VIE).
Les crédits du programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme » sont quasiment stables cette année, passant de 852 millions d'euros en loi de finances initiale (LFI) pour 2015 à 838 millions en crédits de paiement dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2016. Ce programme a néanmoins la spécificité de concerner diverses actions de politique économique qui couvrent un champ financier beaucoup plus vaste – je pense notamment à l'action de Bpifrance et aux dépenses fiscales rattachées au programme, telles que le CICE.
C'est pourquoi je voudrais fonder mon intervention autour d'une problématique stratégique et générale, puis de deux questions plus particulières concernant les pôles de compétitivité et la réforme des centres techniques industriels (CTI).
Sur le plan stratégique, je voudrais vous interroger, monsieur le ministre, sur la manière dont l'État entend repenser son action économique dans le cadre de la réforme territoriale. En effet, nous constatons depuis plusieurs années que les moyens d'intervention directe de la direction générale des entreprises et des services déconcentrés se réduisent fortement dans le domaine économique, au profit d'actions mises en oeuvre dans le cadre des programmes d'investissements d'avenir ou portées par les plans industriels, dont nous saluons le recentrage autour de neuf plans en 2015, dans le cadre de la structuration des filières. Parallèlement, on constate une montée en puissance des régions sur le plan économique, qui gèrent désormais les aides du Fonds européen de développement régional (FEDER) et compensent, pour partie, la raréfaction des fonds de l'État.
Quelle est votre perception de cette évolution du schéma d'ensemble ? En particulier, de quelle manière pourrait-on faire en sorte que les moyens d'action des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) soient cohérents avec leurs missions, telles que redéfinies ? Il me semble que la priorité doit être clairement donnée aux interventions en faveur de l'investissement, de l'innovation, de l'industrie et de l'international, notamment en appuyant les démarches des entreprises, et en particulier des PME, pour obtenir des financements européens, particulièrement dans le cadre de la stratégie « Horizon 2020 ». Le lien entre les délégations régionales à la recherche et à la technologie (DRRT) et les DIRECCTE pourrait ainsi être renforcé et leurs missions revalorisées dans cette perspective.
Cette montée en puissance des régions impose également une concertation plus étroite de ces dernières avec les dispositifs nationaux, au premier rang desquels Bpifrance, comme le recommande le récent rapport de mes collègues Laurent Grandguillaume et Véronique Louwagie sur le rôle de Bpifrance. En particulier, nous saluons votre engagement pour mettre en place une capacité de retournement qui associerait les régions, Bpifrance et des acteurs privés, selon un équilibre majoritairement privé, afin de combler cette lacune dans le paysage économique français. Je soutiens pleinement cette démarche et je vous serais reconnaissant de bien vouloir nous expliquer les étapes actuellement envisagées pour le déploiement de ce dispositif, en dehors de l'expérimentation en cours dans deux régions.
Enfin, la réforme territoriale pose également la question du maintien de certains dispositifs au niveau national, tels que le Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC). Celui-ci ne bénéficie plus en 2016 que de 10 millions d'euros en crédits de paiement et de 15 millions d'euros en autorisations d'engagement, contre 17 et 19 millions d'euros respectivement dans la LFI pour 2015. Dans ces conditions, faut-il vraiment maintenir ce dispositif au niveau national ? Ne pourrait-on le territorialiser ? Les coûts de gestion ne sont-ils pas prohibitifs au regard de la faiblesse du dispositif ?
Toujours s'agissant du FISAC, je souhaiterais obtenir des précisions concernant le règlement spécifique relatif aux stations-service, qui a été doté de 2,5 millions d'euros pour l'année 2015. Il y a actuellement 2 200 dossiers en attente. Le 14 septembre 2015, le Comité interministériel aux ruralités annonçait pourtant une enveloppe exceptionnelle de 12,5 millions d'euros pour 2016 pour traiter ces dossiers, mais cette dotation n'apparaît pas dans le PLF pour 2016. Ma collègue Valérie Rabault, en sa qualité de rapporteure générale, a ainsi déposé un amendement visant à majorer de 3 millions d'euros les crédits en faveur des stations-service au sein du FISAC. Le Gouvernement serait-il prêt à faire un effort en ce sens ?
J'en viens maintenant à deux questions plus spécifiques.
Concernant les pôles de compétitivité, vous vous étiez engagé, monsieur le ministre – et je vous en remercie –, à maintenir la dotation d'appui à la gouvernance des pôles de compétitivité à hauteur de 14 millions d'euros. Cette dotation se retrouve à l'identique dans le PLF pour 2016. En revanche, nous constatons que la dotation versée au titre du Fonds unique interministériel (FUI) ne représente plus que 80 millions d'euros dans le PLF pour 2016. Bien que cette dotation ne fasse pas partie du programme 134, il existe un lien entre les deux. Un rapport récent de l'Inspection générale des finances recommande le recentrage de l'action de l'État sur les pôles les plus dynamiques. Quelle est la position du Gouvernement à ce sujet ?
Ma seconde question porte sur la réforme de la gouvernance et de la collecte des taxes affectées aux CTI, inscrite à l'article 53 du PLF pour 2016. En premier lieu, la création de trois nouvelles taxes affectées est conforme aux orientations du rapport de Mme Clotilde Valter et à la volonté de diminuer le financement budgétaire de ces centres. Nous craignons cependant que la possibilité offerte au CTI « Plasturgie » d'instaurer une taxe dégressive ait un effet boule de neige qui menacerait les ressources des autres CTI. Pourriez-vous nous confirmer, monsieur le ministre, que cette forme spécifique de taxation n'a pas vocation à être généralisée et qu'elle pourrait même, le cas échéant, être abandonnée après évaluation de son efficacité ?
Par ailleurs, ne pensez-vous pas qu'il conviendrait de maintenir le droit de regard dont disposent les CTI sur la collecte de la taxe, et notamment leur capacité à notifier une régularisation, supprimée par l'article 53 ? Le risque existe en effet que l'administration fiscale soit moins réactive que les CTI sur le redressement de taxes de faible montant, aspect que sa nature très technique rend particulièrement complexe à appréhender, ce qui ferait peser in fine une incertitude sur le montant des ressources destinées aux CTI.
Rapporteure spéciale pour le commerce extérieur, mon propos se limite normalement au commentaire des moyens attribués à Business France, opérateur de l'État.
Considérant cependant que le commerce extérieur est une véritable cause nationale – ce que je dis chaque année – je déplore à nouveau l'éclatement de la thématique du commerce extérieur dans l'architecture budgétaire de l'État. Il ne constitue ni une mission au sens de la loi organique relative aux lois de finances, ni même un programme. Je commente les seuls crédits d'une action intitulée « Développement international des entreprises et attractivité du territoire », alors même que l'objectif de redressement du solde du commerce extérieur se trouve dans une autre mission, celle de l'action extérieure de l'État. Eu égard à l'importance donnée par le Gouvernement à ce sujet, il serait utile de rendre plus visible l'ensemble de l'action publique en faveur de l'export et de l'attractivité de la France.
Je complète ce préambule en me félicitant de la présence conjointe du ministre de l'économie et du secrétaire d'État au commerce extérieur, signe que, par-delà l'architecture budgétaire, la répartition de la tâche entre vos ministères se fait désormais en parfaite entente.
Au premier semestre de cette année, le solde des échanges de biens s'est considérablement réduit : il n'est plus négatif que de 21,7 milliards d'euros, soit une amélioration de 20 % par rapport au semestre précédent et de 28 % par rapport au premier semestre 2014. Le déficit commercial continue donc de se résorber, passant de 73,7 milliards d'euros en 2011 à 57,6 milliards en 2014. Bien entendu, nul n'ignore la part de la chute des prix de l'énergie et de la dépréciation marquée de l'euro en 2014, mais les effets des mesures prises sur la structuration du commerce extérieur et l'implication à la fois forte et plus lisible du Gouvernement pour le redresser y sont aussi naturellement pour quelque chose.
Je tiens à saluer tout d'abord une vraie innovation politique, la diplomatie économique, qui consiste à faire de notre réseau diplomatique, le deuxième au monde en importance, un puissant soutien à l'internationalisation des entreprises et aux investissements étrangers en France.
Depuis un an, de nombreux chantiers ont été ouverts.
Focalisons-nous un instant sur la création de Business France, issue de la fusion de l'Agence française pour les investissements internationaux (AFII) et d'Ubifrance. Celle-ci semble réussie, même si des questions se posent sur la vitesse de réalisation de la fusion, sur le caractère opérationnel de certains outils comme le site internet – indispensable aux entreprises françaises et étrangères –, mais aussi sur la gouvernance.
S'agissant des ressources humaines, la clarté devra être faite sur le niveau des rémunérations et sur le plafond d'emplois. Celui-ci s'élève, pour l'exercice 2016, à 1 532 équivalents temps plein (ETP).
Lors de l'audition de Mme Grelier, nouvelle présidente du conseil d'administration de Business France, ce plafond est apparu comme un facteur de rigidité pour l'agence, qui l'empêche de répondre avec réactivité aux priorités du Gouvernement. Je pense par exemple à la nécessité d'ouvrir un bureau en Iran, qui serait opérationnel dès la levée des sanctions internationales. Mme Agnès Romatet-Espagne, directrice générale de la mondialisation, du développement et du partenariat au Quai d'Orsay, estime que ce plafond est une absurdité, car il peut avoir pour effet de restreindre le développement de Business France à son activité VIE. Ne faudrait-il pas privilégier les emplois porteurs d'activités rémunératrices pour l'agence ?
Par ailleurs, l'organisation de salons professionnels est l'un des moyens historiques de l'action de l'agence en faveur de l'export, et toutes les auditions et visites d'entreprises que j'ai faites montrent que les salons de Business France sont largement reconnus pour leur qualité et leur efficacité. Or le projet annoncé de l'agence est de réduire cette activité en diminuant le nombre de participations et, apparemment, les moyens qu'elle y consacre. De plus, le prix au mètre carré facturé aux entreprises atteint un niveau tel qu'il en devient dissuasif pour certaines. Ne pensez-vous pas que, parmi les choix de gestion à opérer, il faille certes rationaliser les salons, mais en maintenant un niveau d'exigence indispensable à la création de courants d'affaires ?
S'agissant des conventions signées à l'étranger, je regrette que l'enchevêtrement des périmètres à l'étranger entre Business France et les chambres de commerce soit toujours aussi problématique. Que faire pour que ces conventions permettent une meilleure lisibilité du dispositif pour les entreprises et une meilleure utilisation des deniers publics ?
Si, sur le territoire national, la volonté de l'État de resserrer le dispositif est extrêmement claire, des progrès sont à engager à l'étranger. Pourquoi ne pas travailler à une cartographie claire des réseaux ? Entre les labels French Tech Hub, French Tech City et Maisons de l'international, par exemple, il me semble que les contours sont assez flous. Pouvez-vous nous expliquer ce que chacun d'eux recouvre ?
Je saluerai, en conclusion, le volontarisme du Gouvernement. La structuration actuelle du commerce extérieur par le chef de la diplomatie française et la cotutelle avec le ministre de l'économie sont très positives. La lisibilité a été accrue grâce à certains événements dont vous pourriez nous entretenir, monsieur le secrétaire d'Etat, comme la semaine des ambassadeurs et la semaine export. La représentation nationale apprécierait aussi que vous lui exposiez votre stratégie pour l'export, dont je souhaite vraiment qu'il devienne pour tous mes collègues, comme il l'est pour moi, une cause nationale.
Les programmes 220 « Statistiques et études économiques » et 305 « Stratégie économique et fiscale » comportent d'une part les crédits de l'INSEE, et d'autre part un ensemble qui comprend la direction générale du Trésor et son réseau international, la direction de la législation fiscale, mais aussi les montants importants remboursés à la Banque de France pour les prestations qu'elle réalise pour le compte de l'État. Ces programmes présentent des budgets en baisse : ils contribuent donc au redressement des finances publiques.
Sur le programme 220, les crédits de paiement de l'INSEE s'élèveront à 437 millions d'euros, en baisse de 13 millions, soit - 2,9 %, après une baisse de 10 millions d'euros en 2015.
Les crédits du programme 305 s'établiront à 426,6 millions d'euros, en baisse de 35,7 millions, ce qui représente une diminution, considérable, de 7,7 %.
Cette diminution est imputable pour 80 % à celle des montants remboursés à la Banque de France, qui passent de 279 à 251 millions. Ces montants couvrent plusieurs prestations, dont les deux principales sont la tenue du compte du Trésor public, pour 82 millions en 2016, et le secrétariat des commissions de surendettement, pour 157 millions. La loi prévoit le remboursement de ces prestations au coût complet. En tendance, les coûts diminuent de façon importante, en raison des gains de productivité réalisés par la Banque de France, mais aussi en raison des évolutions législatives qui ont permis de simplifier et d'accélérer l'examen des dossiers de surendettement.
Les données que m'a communiquées la Banque de France, et dont je fais état dans mon rapport, montrent toutefois que la baisse des crédits versés par l'État depuis 2012 a été progressivement déconnectée de ces coûts. En 2015, les six prestations coûtent environ 300 millions d'euros à la Banque de France, et le budget lui en rembourse 279,5 millions.
En 2016, les coûts de la Banque de France sont ramenés à 294 millions, mais la dotation inscrite au budget s'effondre à 251 millions. L'écart entre ce qui est dû et ce qui est versé passe de 20 à 42 millions. L'addition des écarts constatés chaque année depuis 2012, y compris l'écart anticipé pour 2016, représente un montant de 85 millions d'euros.
Cette situation est contraire au cadre contractuel défini avec la Banque de France, qui de fait est devenu caduc. Elle est en outre contraire à la loi qui, depuis le Traité de Maastricht, interdit à la Banque de France « d'autoriser des découverts ou d'accorder tout autre type de crédit au Trésor public ». Monsieur le ministre, comment envisagez-vous de clarifier la situation ?
Concernant le programme 305, pourriez-vous également présenter vos intentions concernant le réseau international du Trésor ? Ce réseau se redéploie pour mieux toucher les nouvelles zones de croissance, mais qu'en est-il de sa complémentarité avec les différents réseaux économiques à l'étranger ? Et quels liens envisagez-vous avec la feuille de route « MAEDI 21 », présentée en août 2015 par le ministre des affaires étrangères et du développement international, qui vise à adapter l'ensemble du réseau diplomatique à ces mêmes enjeux ?
J'en viens au budget de l'INSEE. L'Institut a fait des efforts, depuis plus de dix ans, pour diminuer ses effectifs, tout en intégrant depuis 2012, de façon exemplaire, les vacataires anciennement payés à la tâche et qui bénéficient désormais de contrats à durée indéterminée. Néanmoins, les dépenses de personnel représentent toujours l'essentiel des crédits, le fonctionnement et l'investissement atteignant à peine 10 %. La seule marge de manoeuvre provient des ressources propres et principalement des recettes marchandes : 10 millions d'euros sont procurés par la vente à des revendeurs privés du système informatique pour le répertoire des entreprises et des établissements (SIRENE).
Or cette recette est menacée par une définition inutilement extensive des principes de 1'open data. Le projet de loi relatif à la gratuité et à la réutilisation des informations du secteur public, en cours d'examen par le Parlement, fixe un principe de gratuité de la réutilisation des informations publiques, mais autorise des dérogations. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous confirmer qu'il est bien dans votre intention de maintenir la dérogation pour l'INSEE ? Je souligne que la recette équivaut à la totalité des crédits d'investissement inscrits au budget 2016 !
Enfin, j'évoquerai l'installation d'une partie des effectifs de l'INSEE à Metz. Il a été décidé fin 2008 d'y transférer 575 salariés de l'INSEE et cinquante statisticiens des ministères sociaux : la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES) et la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES). Mais il devrait y avoir dans les faits, en 2016, un peu moins de 350 personnes transférées, toutes de l'INSEE.
En annexe de mon rapport figure d'ailleurs la contribution de la Cour des comptes, réalisée à la demande de la commission des finances. La Cour relève que le centre statistique de Metz forme un ensemble cohérent et susceptible de dégager des économies à terme. Elle relève cependant des surcoûts liés au choix tardif du site d'implantation finale et surtout à un allégement transitoire du schéma d'emploi pour recruter des personnels directement à Metz.
Ma question concerne donc surtout les défaillances du pilotage. La révision du nombre d'emplois transféré n'a fait l'objet d'aucune approbation interministérielle, alors même que le schéma initial avait été approuvé par le Premier ministre. Je relève également l'absence de toute intervention de l'ancienne Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale (DATAR), devenue Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET), pour coordonner les efforts des différents services dans le projet de reconversion.
En particulier, les services statistiques des ministères sociaux ont refusé de se déplacer et ont fait reposer tout l'effort sur l'INSEE, alors que le centre statistique de Metz comprend désormais un service de statistiques sociales. Cela risque d'être l'occasion manquée d'engager plus largement un rapprochement de l'INSEE et des services statistiques ministériels. Monsieur le ministre, identifiez-vous des leviers pour tirer, aujourd'hui, le meilleur parti de l'aboutissement du projet du centre statistique de Metz ?
Le projet de loi de finances pour 2016 représente le dernier budget complet de cette législature. Il est donc l'ultime occasion, pour l'actuelle majorité, de mener les réformes contenues dans son programme économique.
Le constat qui se dégage de l'examen des crédits prévus par ce PLF est pourtant décevant. La mission « Économie » voit à nouveau son enveloppe réduite, de 5,6 %. Les crédits demandés au titre du programme 134 diminuent cette année de 1,8 % en autorisations d'engagement. Toutefois, cette baisse légère masque une augmentation des dépenses de personnel et de fonctionnement et une forte réduction des dépenses d'intervention, à hauteur de 13,9 %. Ce sont pourtant ces dernières qui constituent des dépenses réellement productives.
J'ai relevé dans ce budget certaines baisses de crédits qui me paraissent particulièrement dommageables. S'agissant du FISAC, le PLF prévoit un financement de 10 millions d'euros en crédits de paiement, soit une baisse de près de 50 %. Je rappelle que le FISAC était doté, en 2010, de 65 millions d'euros…
Ensuite, les moyens octroyés à Bpifrance pour financer ses interventions en garantie et en cofinancement affichent une baisse de 12,2 %, pour s'établir à 26 millions d'euros.
Ces raisons me conduisent à émettre un avis défavorable à l'adoption des crédits du programme 134 en faveur des entreprises.
La politique menée par le Gouvernement envers les entreprises comprend aussi un ambitieux volet visant à simplifier leurs relations avec l'administration.
Je me suis intéressé cette année à la mise en oeuvre du principe « le silence de l'administration pendant deux mois vaut accord », que le Gouvernement présente comme une pièce maîtresse de son programme de simplification.
Instauré par la loi du 12 novembre 2013, ce principe nous a été annoncé comme une véritable « révolution administrative ». Cette réforme était réclamée depuis longtemps par les PME, qui disposent de moyens réduits pour instruire des demandes auprès de l'administration. Mais au-delà des effets d'annonce, sa mise en oeuvre se révèle contre-productive : elle est à l'origine d'une complexité accrue pour les entreprises.
Tout d'abord, ce principe comporte un très grand nombre d'exceptions. Sur les 3 600 procédures potentiellement concernées par la réforme, seules 1 200 – donc un tiers – se sont vues appliquer le principe de l'acceptation tacite. De plus, parmi ces 1 200 procédures, le délai est supérieur à deux mois pour 470 d'entre elles. On trouve ainsi des délais de trois, quatre, cinq, six ou neuf mois. Enfin, le fondement de certaines exceptions est difficilement compréhensible.
Au lieu de disposer d'une règle simple et générale, les entreprises doivent désormais, pour chaque demande adressée à l'administration, rechercher si celle-ci fait l'objet d'une décision implicite de rejet ou d'acceptation, déterminer si le délai de deux mois lui est applicable et, à défaut, quel délai doit s'appliquer.
L'information proposée aux entreprises à ce sujet est particulièrement peu lisible. Elles doivent soit se référer à une liste de 113 pages, écrite en petits caractères et sur deux colonnes, publiée sur le site Légifrance, soit à la quarantaine de décrets publiés par les ministères. C'est une tâche impossible pour la plupart des PME. Aucune concertation n'a été menée avec les entreprises pour identifier les procédures pour lesquelles l'application du « silence vaut accord » était le plus nécessaire.
Enfin, cette réforme ne fournit pas les garanties nécessaires aux entreprises en termes de sécurité juridique. Ainsi, il n'est pas prévu que l'administration transmette un document attestant de son accord, pourtant dans le cas du financement d'un projet industriel, par exemple, les investisseurs et les banques ne s'appuieront certainement pas sur une autorisation sans trace écrite.
J'en viens à mes deux questions.
La première porte sur la réduction des crédits du FISAC. Il semble, monsieur le ministre, que vous organisiez l'assèchement de ce fonds. Comment justifiez-vous la baisse continue de ses moyens, alors que sa contribution au maintien du commerce de proximité est reconnue, notamment dans les territoires ruraux, et que l'aide au départ des commerçants a été supprimée dans le budget de l'an dernier ?
Par ailleurs, l'enveloppe exceptionnelle de 12,5 millions d'euros pour les demandes d'aide des stations-service, annoncée lors du Comité interministériel aux ruralités du 14 septembre afin d'écluser les 2 200 dossiers en souffrance, ne figure pas dans le PLF. Qu'en est-il ? Allez-vous déposer un amendement en ce sens ?
Ma deuxième question porte sur la réduction des crédits affectés aux opérations de garantie et de cofinancement de Bpifrance. Comment justifiez-vous la baisse de 12,2 % de ces crédits ?
Dans une économie internationalisée où les entreprises, surtout les plus petites, subissent une pression concurrentielle importante, l'État doit stimuler les exportations et préserver les parts de marché françaises dans le marché mondial. Dans ce contexte, les crédits relatifs au commerce extérieur doivent faire l'objet d'une attention particulière.
L'ensemble des crédits de l'action n° 7 du programme 134, « Développement international des entreprises et attractivité du territoire », est dévolu à l'action de Business France, soit 103,9 millions d'euros, sous forme de subventions pour charges de service public. Je rappelle que cet opérateur est issu de la fusion entre Ubifrance et l'AFII au 1er janvier 2015.
En apparence, par rapport à la loi de finances pour 2015, les crédits de l'action n° 7 dévolus au soutien du commerce extérieur affichent une diminution de 5 %. Toutefois, Business France hérite également d'une subvention de 6,3 millions d'euros de crédits issus du programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire ». Cette subvention était auparavant destinée à l'AFII.
Pris dans leur globalité, les crédits dévolus à Business France augmentent donc de 1,3 % entre 2015 et 2016, et de 5,5 % depuis 2014. Ce soutien affiché au commerce extérieur en période de rigueur budgétaire est une bonne nouvelle : les crédits du commerce extérieur ont un important effet de levier sur les résultats économiques des entreprises, et le retour attendu en matière de croissance et d'emplois supplémentaires justifie cet effort.
En outre, le redressement de la balance commerciale de la France joue un rôle dans le redressement plus général des comptes publics. À ce titre, il ne faut pas perdre de vue que la réduction des déficits publics n'est pas qu'une question de réduction des dépenses, mais aussi de performance des entreprises.
Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, si cette fusion a optimisé le dispositif français de soutien à l'export pour les entreprises françaises et si les premiers résultats sont à la hauteur de l'objectif initial ?
Dans le cadre de cet avis, j'ai également souhaité engager une réflexion sur l'état et les perspectives des négociations du partenariat transatlantique de commerce et d'investissement – Transatlantic Trade and Investment Partnership (TTIP) en anglais – entre l'Union européenne et les États-Unis. Le TTIP, initialement présenté par la France et la Commission européenne comme une chance à saisir pour les économies européennes, fait en effet l'objet d'une contestation grandissante dans la société civile, tandis que le Gouvernement, par votre voix, monsieur le ministre, a récemment dû durcir le ton sur les conditions de la négociation.
Sur le fond, plusieurs sujets d'interrogation subsistent. La proposition européenne de réforme du mécanisme de règlement des litiges entre investisseurs et États est-elle en bonne voie ? La question des indications géographiques protégées trouvera-t-elle une issue favorable, comme dans le Comprehensive Economic and Trade Agreement (CETA) signé avec le Canada ? Les États-Unis ont-ils fait des propositions concrètes et acceptables lors du 11e round de négociations, qui s'est tenu la semaine dernière à Miami ?
Sur la forme, la transparence du processus de négociation est le principal point d'inquiétude. L'information des parlementaires, par exemple, est encore balbutiante, tandis que des acteurs de la société civile font état de leurs craintes, accentuées par le manque de communication officielle sur le contenu du futur traité. Qu'est-ce que la France propose concrètement pour améliorer la situation ?
En second lieu, j'ai souhaité aborder la question des déterminants internationaux de la crise de l'élevage qui touche les agriculteurs français depuis plusieurs mois.
Cette crise, qui a connu un pic de tension à l'été 2015, a plongé de nombreux agriculteurs dans une détresse insoutenable. S'il ne faut évidemment pas voir dans la mondialisation la raison de tous leurs maux, force est de reconnaître que la pression concurrentielle internationale, la volatilité des cours mondiaux, l'exposition aux variations de la demande des marchés émergents ou encore la nécessité d'une compétitivité-prix toujours plus grande peuvent poser des difficultés. Ce sont autant de facteurs qui soumettent les producteurs à une obligation de performance parfois incompatible avec la préservation du modèle français de production agricole, familial, tourné vers l'authenticité et la qualité des produits, le respect du bien-être animal et la proximité avec le consommateur.
Mais si l'ouverture à l'international est l'une des causes de la crise, elle peut également représenter une porte de sortie. Par exemple, l'agriculture française dispose d'atouts hors prix qu'il faut valoriser à l'international, avec l'appui de Business France qui récupérera d'ici 2017 les missions de Sopexa pour valoriser l'offre agroalimentaire française à l'étranger. Encore faut-il que les agriculteurs puissent être suffisamment présents à l'international. Trop petits, insuffisamment organisés, ils peinent à s'attaquer aux marchés dans lesquels des débouchés naturels existent.
Dans cette perspective, la plateforme « France Viande Export » vient d'être mise en place pour la filière bovine : des groupements de producteurs sont prévus pour « chasser en meute » à l'étranger, avec des prix de vente communs, une mutualisation des coûts d'exportation et des volumes importants pour répondre aux appels d'offres internationaux. Mais le développement des exportations d'animaux vivants et de viandes bovines suppose la levée des embargos décrétés par la Chine, la Corée du Sud, Taïwan, ou encore l'Arabie Saoudite. Pouvez-vous nous dire quelles actions sont engagées pour lever ces obstacles ?
Le numérique et les télécommunications sont des domaines en mouvement, où l'innovation est permanente, appelant les acteurs publics à adapter leur accompagnement et à diversifier sans cesse leurs missions.
Les crédits consacrés aux communications électroniques et au numérique sont répartis entre deux programmes : le programme 134, avec les financements alloués à l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), à l'Agence nationale des fréquences (ANFR) et à certaines associations accompagnant le développement de l'économie numérique ; et le programme 343, dédié au financement du très haut débit (THD).
Le budget alloué à l'ARCEP connaît cette année encore une baisse, l'agence devant naturellement participer à l'effort budgétaire de l'État. Je me réjouis cependant, s'agissant des effectifs, que la baisse drastique envisagée ces dernières années soit endiguée à la faveur de l'engagement pris par l'autorité de redéployer ses agents en interne. En effet, après une baisse du plafond d'emplois de 174 à 171 équivalents temps plein (ETP) en 2014, puis à 166 ETP en 2015, le PLF pour 2016 le rétablit à 171 ETP.
Nous devrons néanmoins rester vigilants quant au maintien des moyens nécessaires à l'ARCEP pour conduire ses missions dans les années à venir, l'Autorité ayant déjà consenti d'importants efforts dans un contexte d'accroissement du nombre de ses missions. Je pense notamment à la libération de la bande des 700 mégahertz, à la montée en charge du plan THD, aux nouvelles mesures introduites par la loi pour la croissance, et à la préservation de ses capacités en matière de prospective.
L'ANFR doit, quant à elle, faire face depuis quelques années à un élargissement constant de son champ de compétence, sans augmentation parallèle de ses moyens financiers et humains. Elle jouera ainsi un rôle central dans le dispositif de libération de la bande des 700 mégahertz, défi de taille tant d'un point de vue technique qu'en termes de calendrier, ainsi que dans le dispositif mis en place par la loi du 9 février 2015 relative à la sobriété, à la transparence, à l'information et à la concertation en matière d'exposition aux ondes électromagnétiques.
Aussi, malgré un financement spécifique dédié à l'accompagnement de la libération de la bande 700 mégahertz sur la période 2016-2019, il faudra s'assurer de sa capacité humaine et budgétaire à faire face à cet accroissement considérable de ses missions.
Enfin, le programme 343 « Plan France très haut débit » avait permis, dans le cadre du PLF pour 2015, d'adresser un signal fort aux acteurs du déploiement du THD sur la permanence de l'engagement de l'État à leurs côtés. Bien que le montant ouvert aux autorisations d'engagement cette année ne soit que de 188 millions d'euros, conformément aux prévisions triennales, je tiens à rappeler l'extrême nécessité du volontarisme de l'État en faveur d'un déploiement ambitieux sur tout le territoire et de la technologie de la fibre optique, afin de ne pas hypothéquer notre avenir économique.
De manière générale, ce budget est satisfaisant au regard des enjeux de maîtrise de la dépense publique auxquels notre pays est confronté. J'émets donc un avis favorable à son adoption.
En complément, monsieur le ministre, je souhaiterais vous interroger plus spécifiquement sur ce secteur clé pour l'économie française et sa stratégie industrielle en matière d'investissement et d'emplois.
En ce qui concerne les opérateurs, des interrogations entourent la situation d'un acteur, SFR-Numericable, qui a perdu un million de clients en une année. Quel regard portez-vous sur sa capacité à continuer à investir et à maintenir l'emploi, au regard des engagements pris à l'égard du Gouvernement lors de la fusion ?
Quel regard portez-vous, d'autre part, sur le marché des opérateurs de réseau mobile virtuel – Mobile Virtual Network Operator (MVNO) – ,qui peuvent rencontrer des difficultés d'adaptation au marché ?
S'agissant des équipementiers, et en particulier du rapprochement Alcatel-Nokia, que vous avez suivi de près, monsieur le ministre, quelle lecture faites-vous de la nouvelle gouvernance au regard des engagements pris sur l'emploi en France, du renforcement de la recherche et développement et de l'impact sur les fonctions supports potentiellement redondantes ?
J'ai fait le choix de consacrer la partie thématique de mon avis aux mesures relatives au numérique et aux télécoms dans la loi croissance. Dix-sept articles y sont consacrés, et nous avions ce matin une réunion de suivi de l'application. Pourriez-vous faire un point sur le dispositif de résorption des zones blanches lancé il y a quelques mois et les objectifs de couverture en 2G et en 3G ? Ce dispositif appelle d'importants investissements des opérateurs, de la volonté et de la méthode. Alors que la hausse de la taxe sur les services fournis par les opérateurs de communications électroniques – a créé quelques remous, sur la forme comme sur le fond, chez les opérateurs, ne risque-t-elle pas de les freiner dans leurs intentions, alors même qu'il existe une attente extrêmement forte en matière de couverture et d'investissement sur les territoires ?
J'ai reçu la mission de rapporter les crédits budgétaires relatifs à l'industrie, dans un contexte où la politique industrielle française fait l'objet d'une modernisation de grande ampleur, au service de la compétitivité de la France.
L'industrie française suscite de grandes inquiétudes, alimentant des visions et des discours déclinistes qui annoncent sa fin depuis plusieurs années. J'ai précisément souhaité apporter un éclairage lucide sur la situation de l'industrie française, sur la politique industrielle qui est conduite et sur les perspectives d'avenir.
Sans optimisme excessif, je suis parvenu à la conclusion que l'industrie a encore de l'avenir en France si l'intervention de l'État l'accompagne dans son redressement et dans son virage vers l'innovation.
Depuis 2012, de nombreuses initiatives publiques ont eu pour objet de stimuler les entreprises françaises pour enclencher une nécessaire sortie de crise. En 2015, force est de constater que l'industrie française a bien résisté, et qu'elle est présente dans les domaines de rupture technologique. Les filières industrielles, qu'elles soient d'aujourd'hui ou de demain, connaissent un second souffle dans le cadre de la nouvelle France industrielle ou des comités stratégiques de filière.
Toutefois, il faut convenir que l'industrie telle que nous la connaissions a changé de visage : davantage tournée vers les services, resserrée sur son coeur de métier, il est aujourd'hui plus difficile d'en cerner les contours. Les Allemands parlent d'ailleurs d'« industrie 4.0 » ; nous pouvons parler plus modestement d'une industrie qui doit s'adapter aux besoins des consommateurs et qui doit opérer sa transition numérique.
L'avis que je présente fournit un examen de la rupture dans la conception de la politique industrielle que constitua le rapport Gallois en 2012. Ce fut l'occasion de faire la synthèse des mesures mises en oeuvre par le Gouvernement et plébiscitée par les entreprises, comme le crédit d'impôt recherche (CIR) ou le suramortissement fiscal, et de rechercher les gisements de compétitivité qui peuvent encore être exploités. Plus généralement, c'est l'organisation d'une politique industrielle plus structurante, plus visible et plus lisible qui a été interrogée.
J'ai justement souhaité me focaliser sur un enjeu crucial pour la politique industrielle française, celui de son organisation administrative. Une politique industrielle sans pilotage clair et sans coordination entre ses acteurs n'est pas une politique efficace, à même de redynamiser notre industrie et de permettre l'innovation. Le constat de la fragmentation administrative en matière de politique industrielle n'est pas nouveau.
La loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), qui tente de réduire l'enchevêtrement des compétences des collectivités territoriales, ne contribue pas, dans les faits, à définir une stratégie industrielle efficace et claire dans les territoires. Outre les nombreux doublons existants, le risque de stratégies concurrentielles est grand, notamment entre la région et les métropoles qui bénéficient, dans la loi NOTRe, d'un régime dérogatoire. Ce manque de lisibilité de la politique industrielle dans les territoires est source de complexité pour les entreprises, notamment pour les plus petites d'entre elles qui ne savent pas vers quel interlocuteur se tourner. Si la coordination entre acteurs au niveau du territoire n'est pas assez développée, l'articulation avec l'intervention de l'État ne fait pas non plus l'objet d'une stratégie claire. L'État doit renouer avec un pilotage stratégique qui intègre la création des nouvelles grandes régions.
Il s'agit aujourd'hui de parvenir à mieux territorialiser la politique industrielle en clarifiant les missions des régions, qui doivent être avant tout des missions de relais et d'appui des politiques nationales.
Que l'État soit pilote ne signifie pas pour autant qu'il soit voué à être un État- stratège « hors sol ». Les services déconcentrés doivent continuer à assumer une politique industrielle de proximité. Ils le peuvent, même si les crédits de l'État en régions ont fortement diminué, à condition de renforcer la cohérence et la visibilité des outils existants. Les préfets de région ont un triple rôle à jouer dans ce cadre : un rôle de pilotage sur le territoire de la politique industrielle définie au niveau national, un rôle dans l'établissement de partenariats avec les acteurs locaux et un rôle d'évaluation des missions mises en oeuvre. Les outils d'une politique industrielle opérante et cohérente existent, il s'agit aujourd'hui surtout d'en améliorer et d'en clarifier le pilotage.
J'en arrive à trois questions, monsieur le ministre.
Tout d'abord, pouvez-vous nous dire quelles mesures relatives à la politique industrielle sont prévues dans la future loi « Macron 2 » ? Qu'en est-il de l'élaboration d'un troisième programme d'investissements d'avenir (PIA 3) ? Sera-t-il bien orienté vers les dépenses d'industrialisation ?
Ensuite, les centres techniques industriels (CTI) et les comités professionnels de développement économique ont fait la preuve de leur utilité et de leur efficacité. L'article 53 du présent PLF mérite d'être modifié pour maintenir le lien entre comité et assujettis, et préserver leur mission au service des 45 000 entreprises concernées.
J'ai enfin une question sur les conséquences de la création des nouvelles régions, puisqu'il me semble que le moment est idéal pour clarifier l'articulation entre l'État et ces dernières. Comment faire en sorte que cette réorganisation territoriale permette un meilleur pilotage de la politique industrielle, et avec quels nouveaux outils contractuels ?
J'ai l'honneur et le plaisir de présenter devant vous, comme chaque année depuis 2012, une appréciation des crédits alloués à La Poste.
Comme j'ai déjà eu l'occasion de le souligner, l'effort financier de l'État en faveur des postes ne reflète pas l'importance économique du secteur, qui représente 1 % du PIB et de la population active française.
Pour l'essentiel, l'État compense, de manière partielle, les missions de service public confiées à La Poste par le législateur. Or ces compensations ne sont pas toutes reportées au sein la mission « Économie », qui retrace aussi des crédits liés à la régulation ainsi que quelques dépenses annexes. Par ailleurs, La Poste bénéficie amplement du CICE, à hauteur de 325 millions d'euros en 2015 selon les premières estimations.
Au sein de la mission « Économie », les crédits relatifs au secteur postal figurent dans deux actions du programme 134.
Outre la dotation budgétaire de l'ARCEP, qui s'intéresse principalement aux télécommunications, ces crédits correspondent essentiellement à la compensation par l'État des surcoûts de la mission de transport de la presse, qui permet aux éditeurs de presse de bénéficier de tarifs préférentiels.
Cette dotation, qui s'élève à 119 millions d'euros dans le PLF pour 2016, mérite quelques commentaires.
En 2015, la compensation de l'État s'élevait à 130 millions d'euros, elle était de 217 millions d'euros en 2013, et plus élevée encore précédemment. L'année dernière, le Gouvernement justifiait la baisse de la compensation de l'État par le bénéfice que La Poste tirait du CICE. Cet argument pouvait se comprendre. Cette année, la justification est tout autre, et me paraît contestable. Les accords Schwartz – qui concernent la distribution de la presse – expirant à la fin de l'année, une réforme des modalités d'exercice de la mission de transport et d'acheminement de la presse par La Poste est en train d'être dessinée. Deux missions ont été constituées, l'une confiée à l'ARCEP et l'autre à M. Emmanuel Giannesini, conseiller maître à la Cour des comptes. Monsieur le ministre, j'ai cru comprendre que des discussions avaient toujours lieu au niveau interministériel, et qu'il faudrait ensuite entamer les négociations avec La Poste et les éditeurs. Comment comprendre que les modalités de financement d'une mission de service public soient revues – à la baisse – avant même que la réforme correspondante ne soit arrêtée ?
Si les grandes lignes sont connues – distinction entre presse de la connaissance et du savoir et presse de loisir et de divertissement –, la mise en place de la réforme prendra du temps. Il est probable qu'elle ne pourra prendre effet qu'en 2017, pour ce que j'en sais aujourd'hui. Dans ce contexte, l'année 2016 constituera nécessairement une année de transition et il ne me paraît pas opportun de réduire dès à présent le montant de la compensation de l'État. Une telle évolution continuerait de perturber l'équilibre économique, tant de La Poste que de la presse, qui en la matière sont confrontés à des défis communs : des baisses de ressources conséquentes.
C'est pourquoi je proposerai un amendement revalorisant à 130 millions d'euros le montant de la compensation de l'État, afin de garantir une certaine stabilité en se calquant sur le montant alloué l'an dernier, déjà en baisse.
Au-delà de cette question, j'ai décidé de consacrer cette année une grande partie de mon avis budgétaire à trois thématiques.
Premièrement, les conditions de travail des postiers et l'évolution des métiers. Je l'ai déjà souligné, les fermetures des centres de tri, insufflées par une logique de rentabilité à tout prix, ont conduit à déshumaniser les bureaux de poste, voire la tournée du facteur. Si La Poste met en avant la signature de trois accords sociaux en février dernier, force est de constater que ces accords n'ont pas recueilli l'assentiment de l'ensemble des organisations syndicales.
Les facteurs passent aujourd'hui plus de temps dehors, cinq heures vingt par jour contre trois heures trente auparavant. Des pénibilités disparaissent, c'est vrai, mais d'autres apparaissent. Les tournées se prolongent parfois jusque dans l'après-midi, et les facteurs se voient imposer une pause méridienne de quarante-cinq minutes non rémunérées, contre quinze minutes rémunérées jusque-là. Comment le Gouvernement juge-t-il le climat social à La Poste ?
Plus largement, il est indispensable de travailler à la revalorisation du métier de postier. La Poste tente beaucoup de nouvelles expériences. Elle tâtonne, expérimente, au risque de brouiller quelque peu son image. Cette stratégie de tâtonnement déstabilise les postiers, d'autant plus qu'ils ont encore trop souvent le sentiment d'être dépossédés de leur avenir et de ne pas être suffisamment écoutés. Comment le Gouvernement perçoit-il la multiplication des initiatives de La Poste ?
Deuxièmement, s'agissant de l'implication de La Poste dans les maisons de services au public, que je salue pleinement, il semblerait que dans certains territoires, les préfectures ne jouent pas pleinement le rôle d'impulsion qui doit être le leur. Quelles directives le Gouvernement a-t-il donné à ses représentants afin de favoriser la constitution des maisons de service au public dans un délai rapide ?
Troisièmement, j'en ai déjà parlé, comment le Gouvernement justifie-t-il la baisse de 11 millions d'euros de la compensation de l'État pour l'exercice de la mission de transport et d'acheminement de la presse ?
À mon tour, je voudrais saluer la poursuite du redressement de notre commerce extérieur, constant depuis 2012 après la dégradation de la décennie 2000, et qui s'explique notamment par le retour de notre compétitivité due à l'action du Gouvernement. Les entreprises que je rencontre à l'étranger soulignent l'implication de plus en plus grande et positive de nos ambassadeurs à leurs côtés, et les rencontres minutes organisées par ceux-ci et les PME ont été très appréciées, même si certains chefs d'entreprise s'interrogent sur le suivi, notamment dans les pays où Business France n'est pas présent.
La nouvelle politique des visas, notamment vis-à-vis de la Chine, est une réussite : 55 % de demandes en plus entre 2013 et 2014, voilà qui est à saluer.
Il reste pourtant quelques points sur lesquels je voudrais vous interroger, monsieur le secrétaire d'Etat.
La dimension régionale, tout d'abord. Je sais que ce n'était pas facile, mais j'ai le sentiment que les conséquences de la loi NOTRe sur notre politique d'internationalisation des entreprises n'ont pas été suffisamment anticipées. Cela devra être une priorité pour 2016. Quelle stratégie envisagez-vous ?
Business France est désormais opérationnel. La formalisation du contrat d'objectifs et de performance (COP) ainsi que la prochaine reprise des activités de service public de la Sopexa sont de bonnes nouvelles, mais la baisse des financements publics ne va-t-elle pas fragiliser cette structure ? Elle s'accompagne, en outre, d'une baisse du plafond d'emplois, ce qui, par voie de conséquence, affectera la capacité à engendrer des recettes commerciales. Par ailleurs, quel regard portez-vous sur le climat social ? J'ai également noté que le contrat d'objectifs et de performance de Business France ne traite pas de la cartographie du réseau. Ubifrance avait certes fait l'effort d'ouvrir de nombreux bureaux dans des pays en pré-émergence, notamment en Afrique et en Amérique latine. Mais, faute de moyens, plusieurs antennes ont été ouvertes avec une seule personne. Or, je ne suis pas sûre que l'on puisse être très productif seul, a fortiori lorsque la personne en question est un volontaire international en administration, même excellent.
Dans le contexte budgétaire présent, je suis convaincue de deux choses : la réflexion sur la cartographie du réseau est prioritaire, et cette réflexion doit être menée globalement en prenant en compte Business France, les services économiques régionaux et les chambres de commerce françaises à l'étranger. À cet égard, je pense notamment que la convention nationale du 11 mars 2015 entre les chambres de commerce et d'industrie (CCI) et Business France doit être déclinée localement avec détermination, mais aussi avec beaucoup de souplesse. Partagez-vous cette conviction ?
Monsieur le ministre de l'économie, le déploiement de Bpifrance est également très apprécié. L'année 2015 sera celle du transfert à son profit de la gestion des garanties publiques à l'exportation, jusque-là assurée par la Compagnie française d'assurance pour le commerce extérieur (COFACE) pour le compte de l'État. Cette opération est aussi l'occasion de s'interroger sur le régime des garanties publiques. Ce régime, pris dans sa globalité, est devenu fortement et structurellement bénéficiaire. Certes, le budget apprécie certainement une recette non fiscale annuelle de 700 ou 800 millions d'euros. Mais l'objectif d'un régime public de cette nature est-il d'être bénéficiaire ? Ne faudrait-il pas réviser les règles pour prendre plus de risques ?
Je voudrais aussi vous interroger sur la « Marque France ». C'est un sujet auquel je m'étais particulièrement intéressée les années précédentes. On ne peut pas dire que notre stratégie brille par sa clarté et sa lisibilité depuis la mission confiée à M. Philippe Lentschener. Atout France a repris le domaine internet France.fr. Le portail France International n'est en revanche pas à jour, car on y voit toujours apparaître Ubifrance. Business France, chargée de la communication d'attractivité, est à l'initiative de la campagne « créative France » plutôt réussie à mes yeux, mais n'a que très peu avancé sur le site internet. Il existe de nombreuses marques comme Vivapolis et French Tech. Ne faudrait-il pas clarifier tout cela rapidement, en particulier vis-à-vis de l'international ?
Autre domaine où il faut progresser, la diversification des profils des volontaires internationaux en entreprise. Le projet « VIE pro » qui a été lancé reste confidentiel. Je ne sais pas où sont les responsabilités, mais je pense que cette question doit être expertisée. Qu'en pensez-vous ?
S'agissant toujours des VIE, je constate que de nombreux pays refusent de reconnaître ce statut et les traitent comme des salariés, ce qui a notamment des conséquences en termes de charges sociales. Je me félicite des récents accords signés entre notre pays et l'Inde ou l'Algérie, mais beaucoup reste à faire. Le règlement de ces questions statutaires fait-il partie des priorités du ministère ?
Par ailleurs, quels sont vos projets pour que nos PME soient plus présentes sur Internet ? Elles sont en effet en retard sur leurs concurrentes allemandes ou anglaises. Or il s'agit d'un support très important pour exporter.
M'étant rendue il y a quelques jours en Turquie, qui est un pays à fort potentiel pour nos entreprises, notamment compte tenu de son voisinage avec l'Iran et de ses ambitions en Afrique, je conclurai sur deux points.
D'abord, on m'y a signalé un problème technique : la convention fiscale franco-turque nous est actuellement défavorable, car elle autorise un prélèvement à la source sur les remontées de dividendes très supérieur à ce qu'ont obtenu d'autres partenaires européens. Êtes-vous d'accord pour donner la priorité au règlement de ce problème ?
Par ailleurs, pouvez-vous nous donner des informations sur l'état des discussions entre l'Union européenne et ce pays pour faire évoluer l'union douanière ?
Ma dernière question concerne l'Iran. J'ai eu la confirmation en Turquie que nos banques sont totalement tétanisées par la crainte de sanctions extraterritoriales de la part des États-Unis. Monsieur le ministre, allons-nous obtenir des Américains des règles claires qui permettent aux entreprises françaises et européennes de profiter équitablement de la reprise des relations économiques avec l'Iran ? Quelles sont les perspectives ?
Pour revenir, en préambule, sur l'évolution globale de la mission « Economie », elle est caractérisée dans le PLF pour 2016 par deux éléments. Tout d'abord, un effort d'économie réel, qui se traduit par une baisse de 4,7 % par rapport à la loi de finances pour 2015. C'est un effort pleinement assumé, monsieur Tardy, et, dans ce cadre raisonnable, des priorités sont définies et les budgets correspondants sont sanctuarisés. Pour le reste, il est normal que l'ensemble des missions contribue et participe à cet effort.
J'avoue que, sur le plan de la crédibilité même de la politique économique, je ne comprends pas la logique consistant à reprocher au Gouvernement de faire cet effort sur la mission « Economie », alors que le discours que vous tenez par ailleurs sur le plan budgétaire nous invite à faire davantage d'efforts encore. Il faut que vous m'expliquiez comment vous arriveriez à « faire entrer l'édredon dans la valise », pour utiliser une expression imagée.
Cette baisse de 4,7 % est donc conforme aux arbitrages du Premier ministre, cohérente avec un cadrage d'ensemble, et je pense qu'elle peut être exécutée. Elle traduit également la continuité dans nos priorités : l'innovation, les missions de contrôle et de régulation, l'ordre public économique.
L'activité du ministère porte sur trois programmes : deux concernent la mission « Économie », le programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme » et le programme 343 « Plan France très haut débit » ; un, le programme 192, fait partie de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».
Permettez-moi de revenir en quelques mots sur ces priorités. S'agissant de l'innovation, tout d'abord, les crédits sont maintenus. Je reviendrai tout à l'heure sur les pôles de compétitivité ou les jeunes entreprises innovantes, point sur lequel je souhaite particulièrement insister, car le dispositif est préservé.
Je souligne également, pour être complet en matière d'innovation et, plus largement, d'industrie et de numérique, l'importance des moyens du PIA, dont le second volet, mis en place à partir de 2014, rassemble 2,3 milliards d'euros au service des priorités de notre ministère. À la fin du 1er semestre 2015, un tiers des fonds était déjà engagé en faveur de projets innovants.
J'évoquais le respect de l'ordre public économique, qui est aussi un élément important des missions du ministère. C'est la mission fondamentale de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), dont les effectifs, comme en 2015, seront stabilisés l'an prochain, ce qui traduit une priorité forte. Après des réductions d'effectifs importantes les années précédentes, le fait de les sanctuariser me paraît constituer un élément important de la crédibilité de cette politique. C'est la même logique qui nous a conduits, concernant l'ARCEP et l'Autorité de la concurrence, à revoir la trajectoire de réduction des effectifs qui avait été envisagée.
Deux points enfin, pour préciser les choses sur des actions budgétaires importantes du ministère. Les aides au transport de presse versées à La Poste sont revues à la baisse de manière raisonnable, j'y reviendrai en répondant à la question de Mme Bonneton.
Sur la subvention à Business France, je laisserai Matthias Fekl répondre dans le détail, et soulignerai simplement que la subvention diminue légèrement, passant de 109 à 104 millions d'euros, dans le respect du contrat d'objectifs et de performance (COP) 2015-2017 et compte tenu de la situation financière encore favorable de l'opérateur, qui a disposé d'un excédent de 7 millions fin 2014 et a reçu une aide de 5 millions, dont nous avions discuté l'année dernière dans ce cadre. Nous avons également allégé l'effort demandé dans le cadre du schéma d'emplois de Business France en 2016 : le nombre d'équivalents temps plein (ETP) sera réduit de neuf au lieu de douze.
Je vais maintenant répondre point par point aux questions plus spécifiques soulevées par M. Jean-Louis Gagnaire, qui m'a, tout comme M. Jean-Luc Laurent, interrogé sur la manière dont l'État entend repenser son action économique dans le cadre de la réforme territoriale, et sur la cohérence à assurer entre la politique économique du Gouvernement et l'application de la loi NOTRe. Quelles que soient les compétences dévolues aux régions par la loi NOTRe en matière de développement économique, ma conviction est que le rôle de l'État reste pleinement justifié pour trois raisons.
Tout d'abord, la présence de l'État reste indispensable sur le territoire : il n'y a pas de politique économique efficace sans des services déconcentrés de haut niveau, tels que ceux offerts par les DIRECCTE qui expliquent les politiques conduites et accompagnent les entreprises.
Ensuite, les services déconcentrés sont voués à adopter une approche transversale. C'est pourquoi les DIRECCTE sont un bon outil, qui doit être préservé quelles que soient les évolutions : les entreprises ont un interlocuteur qui peut leur parler de développement et de dispositifs économiques, et aussi du travail sous tous ses aspects. Cette acculturation réciproque est fondamentale pour nos acteurs économiques qui, jusqu'à présent, voyaient l'État les aider d'une main puis venir les contrôler de l'autre. Ils étaient face à des administrations aux calendriers parfois concurrents et appliquant des politiques dont ils percevaient mal la cohérence.
Enfin, l'État va être recentré sur des missions stratégiques, en particulier les quatre suivantes : veille, coordination, relais, tâches régaliennes. La veille et l'information du niveau central sont nécessaires pour éclairer l'action nationale car on ne peut pas conduire treize politiques industrielles, même si des politiques de développement peuvent se justifier par l'existence de certains tropismes et volontarismes. La coordination s'impose quand un sujet concerne plusieurs territoires ou diverses administrations : dans le cas des entreprises en difficultés, les commissaires au redressement productif assument, avec les DIRECCTE et les préfets de régions, ce rôle de liaison entre tous les services de l'État, toutes les compétences n'étant pas forcément détenues au niveau régional. Le relais des politiques nationales et européennes correspond au travail d'explication, d'accompagnement et de conseil que j'ai précédemment évoqué. Enfin, dans sa fonction régalienne, l'État effectue des contrôles puisqu'il est le garant de l'ordre public, notamment économique, dans le cadre des missions exercées par la DGCCRF. Il est important de garder cette force de projection nationale.
Vous m'avez ensuite interrogé sur les fonds de retournement. Lorsque j'ai été auditionné par vos collègues en charge de la mission parlementaire sur Bpifrance, j'ai eu l'occasion de m'exprimer sur ce point. Je pense que ces fonds de retournement sont utiles, à condition que l'on se mette d'accord sur leur rôle et leur fonctionnement. Ce ne sont pas des oeuvres philanthropiques, contrairement à l'idée que l'on s'en fait parfois ; leur intervention peut aller de pair avec des décisions difficiles sur le plan managérial et social. Ils sont utiles dans des phases de transition économique sur certains territoires. Porté par Bpifrance, un tel fonds aurait vocation à être investisseur minoritaire dans des fonds de rebond privés, des « fonds de fonds », ou à investir aux côtés des régions dans des fonds régionaux.
Deux régions ont déjà créé des fonds de retournement qui marchent bien et j'invite à généraliser ce dispositif. Nous travaillons avec plusieurs régions, avec Bpifrance et la Caisse des dépôts et consignations (CDC), pour aboutir à créer un tel dispositif au début de l'année prochaine. Des discussions sont en cours avec deux fonds de retournement qui opèrent sur la place et qui se sont illustrés dans certaines situations. Il s'agit d'importer de l'expertise, voire de travailler avec eux dans le cadre d'investissements réalisés à leurs côtés.
Vous m'avez aussi interrogé sur les pôles de compétitivité, suite aux discussions que nous avions eues l'année dernière en séance à votre initiative. La dotation de l'État se décompose en deux enveloppes : l'une, intitulée « animation et gouvernance », est vouée au fonctionnement et elle est de 14 millions d'euros en 2015 ; l'autre, le Fonds unique interministériel (FUI), est dédiée au financement des projets et représente 100 millions d'euros en autorisations d'engagement en 2015. Dans le PLF pour 2016, nous avons choisi de maintenir intégralement l'enveloppe de fonctionnement à 14 millions d'euros et, dans un souci de stabilité, de conserver la même répartition des crédits de fonctionnement entre pôles qu'en 2015. Les autorisations d'engagement du FUI seront ramenées à 85 millions, mais l'impact sera limité en 2016, car les décaissements seront étalés sur trois ans. Par ailleurs, le deuxième programme d'investissements d'avenir (PIA 2) apporte une enveloppe totale de 300 millions au financement des projets des pôles. Cette visibilité budgétaire permet de mieux articuler les pôles et les Neuf solutions industrielles. Une évaluation des pôles de la troisième phase aura lieu avant la fin de l'année et je viendrai la présenter, en toute transparence, à toutes les commissions qui souhaitent en débattre, en particulier à la commission des affaires économiques, au début de l'année prochaine.
Venons-en aux réformes prévues dans le projet de loi de finances pour 2016 sur les centres techniques industriels (CTI). En 2014, lorsqu'elle était députée, Mme Clotilde Valter avait remis un rapport sur la refonte de leur système de financement. Elle proposait de passer d'un système dual – dotations et taxes affectées – à un financement entièrement assuré par des taxes affectées, sauf objection des centres, ce qui conduit à créer trois taxes dans le PLF pour 2016. Vous avez évoqué le CTI de la plasturgie, et la demande des professionnels concernant le financement par taxe affectée et la révision du mécanisme de dégressivité proposé. Je suis tout à fait ouvert aux propositions contenues dans les amendements que vous avez déposés, ainsi que vos collègues Christophe Caresche et Estelle Grelier, en particulier à l'article 53. En effet, cette mesure apportera de la clarté et de la visibilité. Je suis aussi favorable à l'idée de mettre en place des contrats de performance qui permettent, sur la base d'un modèle harmonisé et d'indicateurs de performances, de mieux piloter la qualité et l'efficacité des CTI comme celles des comités professionnels de développement économique (CPDE). Le Gouvernement soutiendra les amendements que vous proposerez car elles vont dans la bonne direction tout en préservant les équilibres.
Monsieur Giraud, vous m'avez interrogé sur la Banque de France, évoquant notamment les dotations, qui étaient de l'ordre de 280 millions d'euros dans la LFI pour 2015, c'est-à-dire plus de la moitié des dépenses du programme 305. La maîtrise de cette dépense est évidemment importante. Le coût des missions de la Banque de France diminue sous l'effet des efforts de modernisation engagés par son gouverneur : recours à des procédures dématérialisées pour le traitement du surendettement ; mesures de simplification introduites par la loi de séparation et de régulation des activités bancaires du 26 juillet 2013.
L'objectif de couverture des coûts par l'État, fixé par la loi, est légitime car ce n'est pas à la Banque de France d'en assurer in fine la charge, mais il faut en même temps veiller à maintenir une incitation à la maîtrise des coûts. C'est dans cet esprit que s'inscrivent les efforts demandés à la Banque de France en 2016 ; nous estimons qu'elle est en mesure de continuer à réaliser des gains de productivité – nul n'en disconvient – et une baisse des coûts plus importante que celle qu'elle anticipe. Nous exerçons donc une saine pression sur cet opérateur un peu particulier. Nous respectons parfaitement l'interdiction faite aux États de contracter un emprunt auprès de leur banque centrale, prévue dans les traités communautaires. Nous ne contrevenons pas à ces traités puisque nous parlons ici de la compensation des missions d'intérêt général qui sont, si je puis dire, annexes à l'activité de banque centrale.
Vous m'avez ensuite interrogé sur la redéfinition du réseau du Trésor à laquelle mes équipes travaillent de concert avec celles de Laurent Fabius et de Matthias Fekl depuis un an et demi, en essayant d'établir une cartographie à dix ans. La double tutelle et le rapprochement des réseaux apportent beaucoup en termes d'efficacité, de crédibilité et de cohérence des politiques menées en interne et à l'international.
Venons-en aux conséquences de l'open data sur les recettes de l'INSEE. La politique d'open data – qui représente un enjeu fort sur le plan démocratique et qui permet de stimuler l'innovation – apparaît dans plusieurs textes : la loi pour la croissance et l'activité, le projet de loi relatif aux données publiques de Clotilde Valter, et le projet de loi pour une République numérique élaboré par Axelle Lemaire. L'INSEE la pratique déjà depuis plus de dix ans, avec la mise en ligne gratuite de ses statistiques sur son site. Il propose aussi des services payants qui répondent à des besoins d'information non standard ; il perçoit ainsi une dizaine de millions d'euros par an sous forme de redevances, qui couvrent ses coûts de production mais ne lui apportent aucun bénéfice financier.
Faut-il faire payer au budget de l'État, donc au contribuable, des services de pointe qui sont destinés à un nombre restreint de bénéficiaires ? C'est difficilement justifiable. C'est pourquoi votre assemblée s'est prononcée, au début du mois d'octobre, dans le cadre du projet de loi sur les données publiques défendu par Clotilde Valter, en faveur du maintien de certaines redevances. Ces redevances s'appliquent à des données et des services particuliers, légitimement payants, mais ne concernent pas la mise à disposition de données brutes. Peut-être faut-il améliorer les règles actuelles afin de ne pas brider des sources potentielles de développement économique ? Nous débattrons des données publiques dans le cadre du projet de loi pour la République numérique, et des données d'intérêt général, secteur par secteur, lors de l'examen du projet de loi sur les nouvelles opportunités économiques.
L'installation de certains services de l'INSEE à Metz avait été décidée par le Gouvernement précédent, dans le cadre d'un plan global de relocalisation d'emplois publics sur le territoire, destiné à compenser les conséquences de certaines restructurations et de la révision de la carte militaire. Le Gouvernement a confirmé cette démarche légitime. Après un bilan effectué en 2012, il est apparu possible de réduire les effectifs du centre statistique, compte tenu des perspectives plus favorables dans d'autres ministères, tout en maintenant l'objectif global. Cette réduction permettait de retenir une cible plus réaliste pour l'organisation et le bon fonctionnement de l'INSEE, qui réponde aux préoccupations des personnels comme aux attentes des élus locaux.
En avril 2013, le ministère de l'économie et des finances avait confirmé que le centre statistique compterait 400 emplois trois ans plus tard, dont 350 en provenance de l'INSEE. Cette décision avait été précédée d'une concertation interministérielle. Le projet se met en place conformément au calendrier prévu, puisque les effectifs de l'INSEE devraient être proches de 300 à la fin de l'année. Les travaux de rénovation de l'ancienne gare de Metz, où le centre statistique sera définitivement implanté en plein coeur de la ville, devraient s'achever en 2016, avec quelques mois de retard dus à des raisons techniques, et leur financement est sécurisé. L'INSEE joue un rôle dans la bonne coordination des services de statistiques ministériels. Vous avez évoqué les autres services statistiques de l'État, mais Michel Sapin et moi-même sommes très attentifs à l'autonomie de l'Institut, qui est d'ailleurs imposée par les textes communautaires. Le rapprochement fonctionnel et les mutualisations n'empêchent pas l'INSEE de conserver son autonomie.
Monsieur Tardy, je vais vous répondre sur Bpifrance, dont vous avez évoqué les rôles de garantie et de financement. Ce groupe peut être un fournisseur de fonds propres, de crédits ou de garanties. Il intervient en priorité dans la création ou la transmission d'entreprises, dans les prêts de développement et le renforcement de la trésorerie. La trajectoire budgétaire s'inscrit dans le cadre du plan stratégique qui a été validé pour la période 2014-2017. Les investissements réalisés par Bpifrance, en direct et à travers ses fonds de fonds, représentent entre 1,1 et 1,5 milliard d'euros par an, comme prévu dans le plan stratégique. Pour soutenir cet objectif, une dotation budgétaire de 26 millions d'euros est inscrite, au titre de l'activité de garantie, dans le programme 134. Pour autant que je lise correctement les documents budgétaires qui me sont donnés, elle est identique à celle qui était inscrite dans la LFI pour 2015. Il n'y a donc pas de réduction de la dotation budgétaire accordée à Bpifrance pour son activité de garantie.
Dans le programme 192, nous avons maintenu à un niveau satisfaisant les dotations pour les aides à l'innovation : elles passent de 175 à 170 millions d'euros. Il faut les lire comme un complément des 300 millions mis à la disposition de Bpifrance par le programme d'investissements d'avenir. Le groupe garde donc les mêmes ambitions et les mêmes capacités d'action, notamment en ce qui conserve son activité de garantie.
Votre présentation de l'application du principe « le silence de l'administration pendant deux mois vaut accord » pour les entreprises me paraît un peu biaisée, même si vous avez raison de souligner que plusieurs exceptions ont été identifiées, à chaque fois pour de bonnes raisons. N'hésitez pas à me faire part de toutes celles que vous avez relevées ou qui vous ont été signalées par les acteurs économiques, et qui vous paraissent injustifiées. Connaissant votre pragmatisme, je pense que nous pourrions ainsi améliorer le dispositif. Néanmoins, je pense que ce principe a rendu la situation beaucoup plus claire pour les entreprises. Que signifie-t-il ? En premier lieu, que les refus doivent être motivés. Nous vivions jusqu'alors dans un environnement juridique où les refus de fait, par le truchement du silence, n'étaient pas motivés par l'administration. Pour les acteurs économiques auxquels vous êtes très attachés, le dispositif actuel représente un changement appréciable.
En outre, il existe une vraie lisibilité des exceptions, dès lors que celles-ci relèvent de listes spéciales, et elles sont à chaque fois justifiées par des raisons de fond. Nous pouvons débattre des motivations de ces exceptions, en toute bonne foi, si vous jugez que certaines sont contestables. Dans Légifrance, le Gouvernement a ouvert un espace dédié à la mise en lumière des exceptions, auquel les acteurs économiques peuvent accéder directement sur le site. Plus solide sur le plan juridique et plus explicite, le système encadre davantage les conditions de rejet. Tout comme Clotilde Valter, je suis prêt à débattre d'éventuels cas litigieux.
Madame Erhel, j'ai évoqué à l'instant les moyens de l'ARCEP, qui ont été revus et plus sanctuarisés qu'il ne l'a été dit. Alors que ses missions s'accroissent – attribution de la bande des 700 mégahertz, suivi de l'engagement des opérateurs en matière de couverture mobile –, nous avons veillé à préserver ses moyens : il y a une stabilité des crédits et aussi des emplois à 171 équivalents temps plein (ETP). En parallèle, nous avons revu la copie élaborée à l'été 2014. Le président de l'ARCEP a engagé un examen de ses missions afin de concentrer les moyens de l'autorité là où ils sont le plus utiles, sachant qu'une partie de ces fonctions est héritée du cadre de 1996. Le budget est construit en bonne intelligence avec l'ARCEP. Axelle Lemaire et moi-même, nous associons son président à l'ensemble de nos démarches, dans un souci de pleine transparence. Nous veillons à ce que l'Autorité ait les moyens de fonctionner correctement.
Comme plusieurs de vos collègues, vous m'avez aussi interrogé sur le programme 343, « Plan France très haut débit » qui fait l'objet d'un suivi depuis le début du quinquennat. Nous en avons renforcé les contraintes à travers la loi sur la croissance et l'activité : l'ARCEP peut désormais sanctionner les opérateurs qui ne se conforment pas au plan ; un dispositif de résorption des zones blanches a été créé et nous tiendrons demain une nouvelle réunion avec les opérateurs à ce sujet. La mobilisation des collectivités locales s'est d'ailleurs confirmée en 2015 : 178 projets ont fait l'objet d'une demande de financement au titre de ce plan ; ils concernent 89 départements, pour un volume cumulé de 10,5 milliards d'euros d'investissements.
Nous sommes en train de recenser les zones blanches de très haut débit ou de téléphonie mobile, qu'elles se situent dans les centres-bourgs ou à l'extérieur de ceux-ci, et ce travail sera achevé d'ici à la fin du mois de novembre. Le plan prévoit que tous les centres bourgs identifiés seront couverts en services mobiles 2G à la fin 2016, et qu'ils le seront en 3G à la mi-2017. Pour les zones blanches hors centres-bourgs – nombre d'entre vous s'en préoccupent à juste raison – nous avons mis en place un dispositif de guichet qui ciblera 800 zones prioritaires. Géré par le ministère avec l'aide des réseaux, le dispositif a été mis en place à l'initiative des collectivités. Une fois ces 800 zones prioritaires identifiées, un déploiement d'antennes relais y sera effectué entre 2016 et 2020, aux frais des opérateurs, comme le prévoit la convention signée avec eux l'été dernier. La taxe sur les services fournis par les opérateurs de communications électroniques, qui a été annoncée il y a quelques semaines et qui s'inscrit dans le cadre du projet de loi de finances, ne remet pas en cause leurs engagements précédents ni les discussions que nous avons avec eux. Nous devons examiner avec eux, en toute transparence, les autres voies et moyens qui leur permettent de retrouver de la compétitivité.
En matière de télécommunications, notre stratégie industrielle est orientée vers l'investissement et l'emploi. Nous avons un défi à relever : assurer une bonne couverture du pays en mobile grâce au déploiement de services en 3G et 4G et à l'attribution – en novembre – de la bande des 700 mégahertz, et en fixe grâce au plan « Très haut débit ». Toutes les discussions collectives ou bilatérales que nous avons avec les opérateurs conduisent à les ramener à cet objectif concernant l'emploi et l'investissement.
S'agissant de la fusion de Numericable avec SFR, nous continuons à être vigilants comme vous l'êtes avec tous les opérateurs. Nous veillons à ce que Numericable respecte tous les engagements pris au moment du rachat de SFR, qu'ils concernent les emplois, les investissements ou les contrats.
Il y en avait ! Nous avons notamment demandé au nouveau groupe de respecter ceux que SFR avait passés en 2011 sur les zones d'appel à manifestation d'intention d'investir (AMII), ce qu'il ne faisait pas. Nous avons procédé à des ajustements, pour lui donner le temps de s'organiser, mais il est nécessaire qu'il y ait une continuité. Nous discutons avec les dirigeants de Numericable-SFR, afin que le groupe respecte ses engagements et conduise une politique d'investissements qu'il est tout à fait capable de soutenir.
Vous m'interrogez aussi sur la gouvernance de Nokia, après son rachat d'Alcatel-Lucent. Grâce au décret sur les investissements étrangers en France, nous avons pu obtenir que Nokia s'engage en matière de gouvernance, d'organisation et de maintien de l'activité de recherche et développement en France. Alcatel Submarine Networks (ASN) sera aussi maintenu dans le groupe et des éléments de souveraineté seront sauvegardés. Il y aura des restructurations dans le domaine des fonctions support, mais Nokia a pris des engagements forts en ce qui concerne la recherche et développement. Les sites de Villarceaux et de Lannion, qui sont critiques pour des technologies extrêmement avancées comme le smart grid ou la 5G, continueront à faire l'objet d'investissements. Nous continuons à veiller au respect des engagements pris dans le cadre d'un suivi régulier qui associe les syndicats de l'entreprise.
S'agissant de la politique industrielle, monsieur Laurent, je ne reviens pas sur l'articulation entre les compétences de l'État et celles des régions. Convenons tout d'abord que, dans le monde ouvert dans lequel nous vivons, la compétitivité est le préalable à tout. Il s'agit donc de conduire une politique macroéconomique qui traite le problème du coût salarial, comme nous l'avons fait en créant le CICE et en élaborant le pacte national pour la croissance. Nous avons déjà obtenu des résultats tangibles comme le montrent les dernières publications de l'INSEE : le coût unitaire du travail dans l'industrie est désormais moins élevé en France qu'en Allemagne. Les marges se redressent, c'était un préalable. Comme nous l'avons vu dans l'affaire LafargeHolcim, une stratégie industrielle doit aussi prendre en compte les préoccupations des dirigeants d'entreprise, pour maintenir des centres de décision en France et pour y attirer des sièges sociaux. D'où la création de bons de souscription de parts de créateur d'entreprise (BSPCE) et les actions de performance.
Outre la politique macroéconomique de compétitivité, il s'agit d'avoir une politique industrielle volontaire et pilotée qui, selon moi, s'organise autour de trois éléments : des filières organisées ; une priorité donnée aux investissements de rupture ; une stratégie d'innovation et de création d'entreprise.
Le Conseil national de l'industrie permet d'articuler le dialogue entre les branches et toutes les parties prenantes, et d'avoir une vision par filières. Celles-ci structurent le territoire et permettent d'assurer la cohérence entre donneurs d'ordres et sous-traitants dans tous les domaines : l'investissement, la formation, la projection stratégique.
Quant à la priorité donnée aux investissements de rupture, elle s'incarne dans la Nouvelle France industrielle et les Neuf solutions. Cet outil simplifié permet de répartir 3,5 milliards d'euros d'investissements publics sur la totalité du territoire. Sa matrice est l'industrie du futur – le pendant de l'« industrie 4.0 » allemande – et son coeur de stratégie est la montée en gamme des entreprises et du tissu productif français. Il ne peut pas y avoir de renaissance industrielle sans un investissement productif, domaine dans lequel nous avons pris du retard. Outre l'octroi de crédits publics, une véritable organisation se met en place avec l'Alliance pour l'industrie du futur : un comité de pilotage, dirigé par deux chefs d'entreprise, regroupe les partenaires sociaux, les services de l'État et des régions. Il s'agit d'accompagner la modernisation de quelque 2 000 PME d'ici à la fin 2016. L'Alliance pour l'industrie du futur accompagne d'ores et déjà 740 PME et entreprises de taille intermédiaire (ETI) qui bénéficient, d'une part, du dispositif de suramortissement fiscal et, d'autre part, des prêts de développement de Bpifrance.
La stratégie d'innovation et de création d'entreprises participe de la rénovation de notre stratégie industrielle par le biais de la French Tech et des crédits accordés par Bpifrance qui joue un rôle capital dans le financement de l'innovation, la création et la modernisation d'entreprises. Bpifrance est investie dans plus de 500 start-up.
La politique industrielle passe aussi par la stratégie de l'État actionnaire, qui se matérialise dans l'Agence des participations de l'État (APE) et Bpifrance. En concentrant nos détentions capitalistiques, nous pouvons défendre une vision de long terme, avoir la capacité d'être mobiles et de réinvestir dans des secteurs en crise, comme nous l'avons fait dans le cas de PSA Peugeot Citroën, et donc permettre le redressement industriel. Le projet de loi sur les nouvelles opportunités économiques proposera des dispositions sur le financement des innovations. En période de tension budgétaire, c'est un défi, mais nous devons faire preuve d'ambition face aux grands espaces avec lesquels nous sommes en compétition.
Vous avez demandé de la visibilité sur le PIA 3, annoncé le 12 mars dernier par le Président de la République. Puisqu'il doit prendre le relais du PIA 2 après 2017, il devra donc être adopté en 2016. Ses orientations seront définies au printemps prochain. D'ici là nous aurons obtenu les résultats de l'évaluation en cours du PIA 1 et du PIA 2, ce qui nous permettra d'avoir un éclairage économique et technique dont nous pourrons débattre. Le PIA 3, dont l'enveloppe sera comprise entre 10 et 15 milliards d'euros, devra conserver les grandes priorités du PIA 2 : l'innovation, le numérique, la recherche et la formation, la transition énergétique.
Madame Bonneton, je crois avoir répondu à vos questions sur l'ARCEP, mais vous m'avez également interrogé sur La Poste. Nous avons en effet prévu de réduire la dotation de l'État pour la compensation du transport de presse : cette dotation va passer de 130 à 119 millions d'euros. Comme vous l'avez parfaitement rappelé, la réforme du transport de la presse a été préparée par les missions Schwartz et Giannesini. Cette réforme, en cours de discussion au niveau interministériel, vise à réduire le nombre de titres de presse bénéficiant de tarifs postaux préférentiels, donc à appliquer une hausse tarifaire qui viendrait compenser la baisse de dotation. Nous travaillons d'ailleurs en parfaite transparence avec le PDG de La Poste. Si nous n'arrivions pas à trouver une issue satisfaisante à l'issue de la mission Giannesini, je m'engage à revoir la dotation budgétaire de l'opérateur. Je préfère avoir à la réviser à la hausse plutôt qu'à la baisse.
S'agissant des maisons de services au public, j'ai eu la chance d'inaugurer la première dans le Lot, aux côtés de votre collègue Jean Launay, il y a quelques semaines. Les préfets ont reçu des instructions sur le choix définitif des sites. Une centaine de bureaux de poste ont été identifiés comme pouvant accueillir ces maisons de services au public et ils font l'objet d'un accord local. Sur ce plan, il ne faut pas hésiter à nous alerter en cas de difficultés. L'opération est un vrai succès. D'une part, elle démontre la capacité de La Poste à repenser son modèle et son ancrage territorial. D'autre part, elle prouve qu'il est possible de développer des synergies, de maintenir des services au public sur les territoires en tirant profit à la fois du réseau unique de La Poste et de tous les outils numériques.
Je tiens d'ailleurs à saluer le travail remarquable de réorientation stratégique effectué par le PDG de La Poste, avec qui nous avons beaucoup d'échanges. Cette entreprise publique est confrontée à la baisse continuelle de son activité principale : le volume du courrier diminue de quelque 8 % par an. Face à cela, que faire ? On aurait pu refuser le réel et tout faire pour éviter la diminution de ces volumes. Ce n'est pas possible : le phénomène est, pour ainsi dire, gravitaire. On aurait aussi pu tout miser sur la restructuration sociale. Au lieu de cela, il a été décidé de diversifier les activités, et il faut accompagner ce choix stratégique, le seul qui soit positif : augmentation des activités financières, diversification à l'international et dans le numérique. La Poste sera un acteur structurant du numérique, d'une part, et de la silver economy, d'autre part. Pour transformer La Poste, on utilise pleinement la relation de confiance que nos concitoyens entretiennent avec elle, et son réseau unique de logistique fine.
Dans ce contexte, le climat social est considéré comme plutôt bon. Les postiers sont pleinement investis dans la transformation de leur entreprise comme le montre d'ailleurs l'adoption des dernières technologies telles que le programme Facteo. En 2014, huit accords sociaux et avenants ont été signés au plan national. Le 5 février 2015, dans le cadre du plan stratégique « La Poste 2020 : conquérir l'avenir », trois accords majoritaires ont été signés. Il y a eu des crispations, mais elles ont été surmontées avec succès grâce à un travail de pédagogie et d'accompagnement du changement.
Pour terminer, je vais répondre à Mme Dagoma sur les garanties export. Depuis 2012, un mouvement continu de réformes a été engagé pour renforcer la compétitivité des financements export et plusieurs dispositifs ont été créés, notamment le label et les prêts de développement export de Bpifrance. En 2014, Bpifrance a octroyé plus de 400 millions d'euros de prêts à 672 entreprises, et son objectif est d'atteindre un montant de 500 millions d'euros par an. En 2014-2015, de nouveaux dispositifs ont été mis en place, en particulier le refinancement par la Société de financement local (SFIL) des crédits export et les nouvelles offres complémentaires que j'évoquais. L'année 2015 sera marquée par les travaux engagés sur le transfert des garanties publiques de la COFACE à Bpifrance. Le Gouvernement a choisi de sortir la partie garantie publique de la COFACE – qui a été introduite en bourse par le groupe Banque populaire Caisses d'épargne (BPCE) en 2014 – pour en faire un instrument de l'offre de Bpifrance, en parfaite complémentarité avec Business France. La loi de finances rectificative comportera les dispositions législatives nécessaires à ce transfert.
Mesdames et messieurs, je vais apporter des réponses à vos questions sur le commerce extérieur. Le ministre des affaires étrangères et du développement international, Laurent Fabius, s'est exprimé devant vous en début de semaine à propos du tourisme. Je vous propose de ne pas y revenir si ce n'est pour reprendre à mon compte ses propos et insister sur l'importance capitale de ce secteur qui est rattaché au quai d'Orsay pour une raison simple : le tourisme s'exerce dans un contexte de concurrence internationale. Selon l'Organisation mondiale du tourisme (OMT), institution spécialisée des Nations unies, le nombre de touristes devrait passer d'un milliard à 1,8 milliard entre 2015 et 2030. Première destination touristique au monde, la France accueillera quelque 85 millions de touristes étrangers cette année – un nouveau record. Nous avons la volonté de conforter cette position de leader et de faire en sorte que notre pays accueille 100 millions de touristes en 2020.
Le commerce extérieur est une grande cause nationale, dites-vous, madame Rabin. Je ne peux qu'abonder dans votre sens. Nous sommes dans une économie ouverte et un chiffre en donne la mesure : un tiers de nos exportations sont le fait de grands groupes étrangers installés en France. De manière symétrique, les entreprises françaises sont implantées dans le monde entier, où elles développent des activités qui, par rebond, créent de l'emploi dans notre pays. Cet enchevêtrement entre importations et exportations pousse à adopter une nouvelle approche du commerce extérieur. L'analyse de cette réalité des chaînes de valeurs mondiales nous a notamment conduits à fusionner Ubifrance et l'Agence française des investissements internationaux (AFII) pour créer Business France, qui a fait l'objet de nombreuses questions.
Cette fusion avait été demandée en février 2014 par le Président de la République, dans le cadre du Conseil stratégique de l'attractivité qu'il préside et qui réunit les membres du Gouvernement compétents pour ces secteurs ainsi que des responsables de l'économie français et internationaux. Le 1er janvier 2015, soit moins d'un an plus tard, ce nouvel établissement public était opérationnel. Avant la fusion, UbiFrance était en charge de l'aspect export, et l'AFII était compétente en matière d'attractivité. En raison du caractère ouvert et mondialisé de l'économie, ces deux aspects ne peuvent être dissociés. Le contrat d'objectifs et de performance (COP) a été signé en présence de Laurent Fabius et d'Emmanuel Macron au début du mois d'octobre. Le conseil d'administration a élu une nouvelle présidente : votre collègue Estelle Grelier.
Parlons du climat social. Lors d'une fusion, il est normal que subsistent des interrogations et parfois des tensions, le temps que chacun comprenne bien ses missions et que soit élaboré un projet d'établissement précis. Nous avons demandé à la directrice générale de Business France, que je rencontrerai très prochainement, de préparer un tel projet d'établissement avant la fin de l'année. Après le contrat d'objectifs et de performance (COP), il constituera une feuille de route où seront traités notamment tous les points concernant le réseau, le déploiement international et la carte géographique. Business France compte plus de 80 bureaux répartis dans 70 États du monde entier. Il peut y avoir des redéploiements et des réorganisations, en partant du constat que vous avez fait : la force de frappe, qui est parfois insuffisante, doit être ajustée et renforcée. Nous avons aussi demandé avec beaucoup d'insistance à la directrice générale que le site internet soit opérationnel plus rapidement que ce qui était initialement prévu. Quand Atout France a récupéré France.fr, à l'initiative de Laurent Fabius, le site a été opérationnel très rapidement, même s'il reste perfectible. Je ne doute pas que des améliorations seront rapidement apportées au site de Business France où il reste des scories qui nuisent à l'image et la crédibilité de l'établissement.
Le budget de Business France s'élèvera à un peu moins de 104 millions d'euros cette année, contre 108 millions d'euros l'an dernier, c'est-à-dire qu'il diminue de 4,5 %. Comme le ministre de l'économie, je considère néanmoins que le contexte est non seulement viable mais favorable, compte tenu de l'excédent de 7 millions d'euros et de l'abondement de 5 millions d'euros effectué à la demande du Gouvernement dans le cadre de la fusion. Une fusion crée toujours des surcoûts dans un premier temps, avant de générer des économies d'échelle sur un certain nombre de fonctions support. Business France procédera à des regroupements de bureaux à l'étranger et aussi à des redéploiements sur certains métiers ou sur certaines zones géographiques jugées prioritaires, c'est-à-dire où les courants d'affaires avec la France sont en augmentation ou ont vocation à l'être. Pour la complète information de la représentation nationale, je précise que certaines données sur les plafonds d'emplois et la gestion pourront évoluer à la marge, en raison du rapprochement avec Sopexa. Nous travaillons au rapprochement des missions, notamment dans le domaine des salons et de certaines activités internationales, dans l'esprit de la « marque France ». L'un de mes prédécesseurs, François Loos, expliquait qu'il fallait « arriver en meute et chasser en meute ». Le diagnostic reste valable. Il ne peut y avoir d'éclatement de l'offre française dans les différents salons, dans les différentes activités.
Business France prévoit de réduire le nombre de salons à l'international et d'en supprimer onze dans le courant de l'année prochaine. Cela me semble pertinent. Dans le cadre du COP, le Gouvernement a souhaité privilégier un accompagnement qualitatif et plus individualisé, générant un courant d'affaires plus important pour les entreprises concernées. Ces objectifs se traduisent dans des indicateurs extrêmement précis. Les salons sont des forums tout à fait intéressants mais certaines entreprises peuvent aussi avoir intérêt à arriver dans les différents pays d'une autre manière, en ayant des rendez-vous d'affaires précisément préparés et anticipés. Cette stratégie peut améliorer le taux de réalisation d'une entreprise, c'est-à-dire volume d'affaires engrangé grâce à son déplacement dans le pays en question.
Quelle est notre stratégie à l'égard des PME ? Le Gouvernement définit l'accompagnement des PME à l'international comme une priorité absolue. Le 11 mars dernier, plus de 400 PME et ETI ont participé au premier forum des PME à l'international organisé au Quai d'Orsay avec l'aide de Bercy. Ce forum a donné lieu à un plan d'action qui prévoit notamment la création d'un guichet unique douanier visant à simplifier les formalités pour les PME, qui sera opérationnel à la fin de l'année. C'est une première : un parcours cohérent d'accompagnement des PME à l'export est mis en place. Les différents intervenants, qu'ils soient publics ou privés, se sont mis d'accord sur la façon dont ils vont se répartir les rôles. Ils ont élaboré un document et une vidéo qui les engagent. Cela peut paraître anecdotique, mais c'est la première fois qu'une telle démarche – assortie de la signature de conventions – a lieu.
Ce plan d'action inclut le volontariat international en entreprises (VIE). Actuellement, il y a 8 600 volontaires en exercice de par le monde, contre 8 400 avant l'été. J'ai souhaité qu'il y en ait 10 000 à la fin de l'année 2017 et que 40 % d'entre eux soient mis à la disposition des PME, soit par des formules de mutualisation entre elles, soit par un portage des grands groupes. C'est un succès pour les entreprises qui y ont recours mais aussi pour les jeunes volontaires car les taux d'embauche à l'issue de l'expérience sont extrêmement élevés.
Quelque 3 000 PME supplémentaires bénéficieront d'un accompagnement personnalisé par ce continuum de l'aide à l'export, et le forum des PME à l'international se décline maintenant dans les futures grandes régions, c'est ce que j'ai appelé le tour de France des PME exportatrices. Madame Rabin, avec Jean-François Gendron, président de la chambre de commerce et d'industrie de Nantes-Saint-Nazaire, et M. Christophe Clergeau, vice-président du conseil régional des Pays de la Loire, vous avez accueilli l'un de ces forums à Nantes dans le cadre d'un événement qui existe déjà et qui rencontre un grand succès depuis de nombreuses années : International Connecting Day. Quand des initiatives existent, nous pouvons faire cause commune. Après Nantes, Bordeaux et Strasbourg, le forum s'invitera dans toutes les grandes régions car les PME sont l'une des clefs pour le rebond du pays.
Il y a 121 000 entreprises exportatrices dans notre pays, soit deux fois moins qu'en Italie et trois fois moins qu'en Allemagne. Pourtant, il y a des opportunités extraordinaires et des pépites dans tous vos territoires. Je suis évidemment à votre disposition pour accompagner ces PME à l'export. Toutes mes délégations sont ouvertes aux PME par un système d'inscription très simple sur internet. Lorsque c'est utile pour vous, n'hésitez pas à le relayer. Pour qu'un déplacement soit utile, il doit être bien préparé.
Qu'en est-il des conventions ? Celles qui ont été signées au niveau national doivent maintenant se décliner à l'international. Quinze conventions sont signées et vingt-quatre autres devraient l'être dans les prochaines semaines ou les prochains mois. Treize cas posent des difficultés, soit par mauvaise volonté caractérisée et problème de personnes – ce sont des situations vraiment minoritaires dont nous allons nous occuper –, soit pour des raisons structurelles. Il faut de la souplesse, disiez-vous, madame Dagoma. Certes, et je l'ai indiqué dès le mois de mars au forum. Il ne s'agit pas de réinventer des choses qui fonctionnent, il s'agit de s'adapter aux situations locales. En revanche, il n'est pas acceptable que des opérateurs, chargés d'accompagner nos entreprises à l'export, ne réussissent pas à se répartir les rôles. La situation est trop dure et nos PME peinent trop à se repérer dans ce monde de l'export pour que l'on puisse en rester au statu quo. Sous cette réserve, le Gouvernement est parfaitement prêt à ajuster les dispositifs aux réalités locales, et j'ai demandé aux ambassadeurs de travailler dans cet état d'esprit.
Il y a quelques semaines, avec le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, nous avons inauguré un bureau de Business France en Iran. Plus de 130 entreprises françaises étaient représentées dans la délégation. Les ministres en charge de ces secteurs économiques n'étaient pas allés en Iran depuis douze ans. Le ministre des affaires étrangères s'était, quant à lui, rendu à Téhéran en juillet, pour aborder des thèmes plus politiques et le calendrier de la levée des sanctions. Le bureau iranien de Business France emploie une personne envoyée de Paris et quatre salariés locaux. Par ailleurs, le service économique de l'ambassade de France en Iran s'est étoffé d'un nouvel agent. La diplomatie économique en Iran atteint donc une vitesse de croisière ; elle est adaptée à la réalité au moment où s'ouvre une nouvelle page dans notre relation avec ce grand pays, dans le cadre de la mise en oeuvre et du plein respect de l'accord de Vienne sur le nucléaire.
S'agissant du VIE, je vous ai indiqué les objectifs chiffrés, extrêmement volontaristes, qui ont été fixés. La formule « VIE Pro » a du mal à démarrer : seulement une quarantaine d'étudiants sont partis en mission dans ce cadre. Un travail est en cours pour mieux cibler les publics concernés et la communication. Dans certains pays, comme le Brésil ou l'Inde, le nombre de VIE est plafonné. Nous menons des négociations bilatérales pour que ces plafonds soient relevés et que nous puissions atteindre le nombre de 10 000 volontaires à la fin de l'année 2017. Au Brésil, le dossier avance depuis mon récent déplacement dans le pays. Quand des autorités nationales acceptent d'accroître le nombre de nos volontaires, c'est souvent un geste extrêmement fort envers nos milieux d'affaires et nos entreprises.
Les maisons de France à l'international, souhaitées par le Président de la République, visent à créer des dispositifs cohérents, dans l'esprit de la « marque France » : même si nous sommes un pays où il y a plusieurs centaines de fromages – au sens propre (Sourires) –, nous pouvons être efficaces et présenter un visage uni à l'étranger. Une première maison de France à l'international a été inaugurée en Chine, lors du déplacement que j'ai effectué là-bas en septembre. Elle regroupe une trentaine d'intervenants, publics et privés, c'est-à-dire les grands pilotes et les grands opérateurs publics de la France à l'international, et aussi des entreprises, des experts, des spécialistes. S'il est un peu tôt pour dresser un bilan, il est sûr que ces maisons doivent se multiplier. Elles ne sont d'ailleurs pas exclusives des French Tech Hubs – je parle sous le contrôle d'Emmanuel Macron et d'Axelle Lemaire qui suivent ces dispositifs très appréciés par les entreprises. Des French Tech Hubs ont vu le jour dans divers pays récemment : celui d'Israël a été inauguré par le ministre de l'économie, celui de Tokyo par le Premier ministre, et celui de New York, au mois de juin, par le ministre de l'économie et la secrétaire d'État chargée du numérique.
Venons-en à la feuille de route de la grande cause – la stratégie de la France à l'international – que je m'étais engagé à vous présenter. Il s'agit de mettre en commun tous les travaux afin de lutter contre la dispersion. Cette feuille de route a été préparée dans le cadre du Conseil stratégique de l'export, qui réunit les différents intervenants, ainsi que du Comité stratégique de suivi de la politique commerciale, dans lequel plusieurs d'entre vous siègent. Je la présenterai le 9 décembre prochain aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale. Je suis à la disposition du Sénat pour faire la même présentation. Ce document sera amendé en fonction de vos réactions, vos propositions et vos critiques : c'est ce qu'on appelle un document martyr qui doit engager tout le monde quand il sortira du Parlement.
Madame Dubié et madame Bonneton, vous m'avez aussi interrogé sur les négociations transatlantiques. Nous n'avons pas encore le « débriefing » officiel du 11e round de négociations qui s'est tenu à Miami très récemment, mais j'ai eu une conversation téléphonique avec la commissaire européenne au commerce, Mme Cecilia Malmström, sur le sujet. La commissaire m'a donné les grandes lignes et son sentiment sur cette négociation. Je vous rendrai des comptes plus précis lorsque j'aurai les différents éléments par écrit.
À ce stade, nous n'avons pas le sentiment que les choses avancent de manière positive. Les négociations se poursuivent. J'en profite pour le dire à certaines personnalités publiques, comme M. Florian Philippot, qui ont jugé utile d'accuser le ministre de l'économie de mensonge au motif que celui-ci aurait nié l'existence de ce traité : il n'y a pas de traité, mais des négociations que la France suit, tour après tour mais aussi entre les tours, et dans lesquelles elle fait valoir des intérêts, des principes et des valeurs.
Sur la question de l'arbitrage, la France a présenté une proposition très ambitieuse pour un nouveau système de régulation publique. Les propositions de la commissaire européenne reprennent beaucoup des points que nous soulevons. Je constate un changement de ton complet, une prise de conscience des problèmes démocratiques fondamentaux que pose l'arbitrage. Ces propositions seront-elles reprises par les États-Unis ? Je ne peux pas préjuger de leur attitude ; je sais que ce sujet n'a pas été discuté lors du 11e round.
L'Europe a multiplié les propositions, tarifaires et non tarifaires. Aujourd'hui, nous constatons l'absence de contre-offre américaine sérieuse, ce que le 11e round semble confirmer. C'est vrai pour les appellations d'origine protégée et les indications géographiques : elles ne sont pas évoquées alors que nous le souhaitons au nom de cette « diplomatie des terroirs » que nous développons avec Stéphane Le Foll.
Enfin, la transparence et l'accès des parlementaires aux documents restent insuffisants ; la situation de ce point de vue n'est absolument pas satisfaisante.
S'agissant de France Viande Export, plus de vingt entreprises se sont inscrites dans cette démarche. C'est un signe très positif, qui témoigne de la volonté de la filière de prendre les choses en main et de présenter une offre cohérente à l'exportation. Nous avons bon espoir que les choses puissent bouger.
J'ai réuni en juillet les ambassadeurs des pays dans lesquels des embargos étaient encore en vigueur. Plusieurs embargos ont été levés depuis. C'est vrai au Vietnam depuis juillet, à Singapour, en Afrique du Sud depuis septembre, en Arabie Saoudite et au Canada depuis octobre. Nous avons bon espoir d'une évolution en Chine, où je me suis rendu récemment pour obtenir la levée de l'embargo, dès lors que la viande française a obtenu le meilleur statut épidémiologique possible de la part de l'Organisation mondiale de la santé animale.
Concernant la Turquie, la convention fiscale entre nos deux pays date de 1987. D'autres conventions sont intervenues depuis avec d'autres États, qui sont plus favorables. Il en résulte que les entreprises françaises sont sur certains points moins bien traitées que les entreprises de nos partenaires mais aussi concurrents européens.
Nous engageons des travaux préparatoires en vue de l'ouverture d'une négociation avec la Turquie sur une nouvelle convention. La direction générale du Trésor et les services économiques sur place sont en train de faire le point sur les difficultés rencontrées par nos entreprises afin d'évaluer si elles justifient des rectificatifs ponctuels ou une négociation plus globale. Par ailleurs, des problèmes fiscaux se posent aussi pour les institutions éducatives et culturelles françaises.
Quant à l'union douanière, nous nous félicitons de l'accord intervenu au mois de mai entre la Turquie et l'Union européenne pour moderniser cette union. La Turquie est un partenaire très important. Il s'agit de mettre à jour l'accord, d'en améliorer le fonctionnement, de renforcer nos relations commerciales et d'inclure de nouveaux secteurs, comme les services et les marchés publics.
La question de la modernisation de l'union douanière doit être abordée de façon globale. La réduction des asymétries doit être traitée dans un esprit que je rappelle dans toutes les négociations, celui de la réciprocité. Je suis à votre disposition, madame Dagoma, si vous souhaitez vous entretenir avec moi de ces différents points après votre déplacement très utile et productif en Turquie.
Enfin, sur la question de l'extraterritorialité, l'Iran est placée sous plusieurs régimes de sanctions : de la part des Nations unies, de l'Union européenne et des États-Unis, ce dernier régime étant très difficile à qualifier en droit international.
Pour le régime des Nations unies, nous connaissons les échéances de levée des sanctions. J'ai demandé aux services de Bercy de préparer un document sous forme de tableau à destination des entreprises françaises, présentant ce calendrier qui s'inscrit dans le prolongement de l'accord de Vienne. Pour le régime de sanctions européen, les choses sont également précises.
La justice américaine a frappé de sanction une grande banque française pour certaines activités. Les autorités américaines ne considèrent pas que leur régime de sanctions soit extraterritorial, car elles jugent que, toute transaction en dollars transitant nécessairement par une banque américaine, le rattachement territorial est établi. Il s'agit d'une conception pour le moins extensive de la « territorialité » de l'activité des banques françaises en Iran… De nombreux établissements bancaires se sont retirés du pays par crainte d'être exposés à un risque aux États-Unis. Cette absence constitue une difficulté supplémentaire pour les entreprises françaises et européennes dans l'accès au marché iranien qui recèle des opportunités nombreuses et affiche une demande forte.
Que faisons-nous ? Laurent Fabius, avec ses homologues allemand et britannique, a écrit à John Kerry pour attirer son attention sur ce point et demander un travail de fond. Ce courrier a permis d'engager des discussions techniques entre les services économiques français et l'Office of Foreign Assets Control (OFAC). Nous souhaitons obtenir des autorités américaines des lignes directrices très précises sur leur interprétation de la situation et du droit, afin d'être en mesure d'indiquer aux entreprises françaises le cadre dans lequel peuvent s'inscrire leurs activités. Ces échanges entre les administrations n'ont pas encore abouti, mais sont en cours.
La question de principe, cependant, reste entière : un État peut-il ou non de manière unilatérale édicter des règles, qui, si ce n'est en droit, du moins en fait, ont des effets sur les États européens ? La réponse est dans la question.
L'un des réponses à ce problème consiste à conforter l'euro pour en faire une monnaie de référence internationale. C'est un enjeu de souveraineté, le ministre des finances y travaille. En cette matière, comme dans toutes les autres, ceux qui prônent la sortie de l'euro se trompent car posséder une monnaie de référence est aujourd'hui indispensable pour pouvoir agir et donc exister.
Mon propos sera davantage tourné vers l'économie de proximité, au travers du FISAC et du Comité professionnel de la distribution des carburants (CPDC).
Avant d'en venir à ce sujet, je souhaite rappeler que l'innovation n'est pas seulement le fait de la technologie ou de l'industrie, mais aussi celui de l'économie sociale et solidaire dont les crédits, d'un montant de 4,4 millions d'euros, sont désormais rattachés au ministère de l'économie.
MM. Gagnaire et Tardy m'ont interrogé sur le FISAC. Nous avons hérité d'un grand nombre de dossiers : 4 000 dossiers ont en effet été validés entre 2010 et 2012, et nous nous sommes employés depuis à traiter ce stock, qui devrait être complètement apuré début 2016.
Nous avons également réformé le dispositif. En application de la loi du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, son fonctionnement repose désormais sur l'appel à projets – individuels et collectifs –, appel qui a été lancé pour 2016.
Le montant des autorisations d'engagement a été fixé à 15 millions d'euros pour 2016. Il permettra de financer les priorités que nous avons retenues : les centres-bourgs, la préservation des commerces en zone rurale, les travaux d'accessibilité et les stations-service. Pour ces dernières, les aides à l'investissement peuvent désormais être financées par le FISAC ; 2,5 millions d'euros ont été réservés à cette fin dans son enveloppe annuelle. En outre, à l'occasion du Comité interministériel aux ruralités du 14 septembre dernier, un abondement de 12,5 millions d'euros a été annoncé pour financer l'ensemble des dossiers d'aide en stock. Il sera pris en charge par le fonds en faveur de l'investissement local, doté d'un milliard d'euros, créé par ce projet de loi de finances.
Nous nous réjouissons à notre tour du frémissement de la reprise et d'indicateurs économiques encourageants ; la confiance semble poindre. Ajoutés au redressement du commerce extérieur, ce sont autant d'éléments de satisfaction. Mais, puisque nous sommes des gens raisonnables, nous devons reconnaître le rôle des facteurs extérieurs dans cette amélioration. Nous ne devons pas pour autant bouder ces bonnes nouvelles.
Je souhaite saluer les efforts du Gouvernement en faveur des entreprises, qui, très certainement, portent leurs fruits. Je vous sais, mesdames et messieurs les ministres, très mobilisés, et habités par le désir de ne pas baisser la garde malgré ces informations positives et par la volonté d'amplifier les efforts. J'en veux pour preuve le montant – plus d'un milliard d'euros – consacré au plan en faveur de l'investissement des PME et des très petites entreprises (TPE). Vous conservez également le souci permanent de simplification administrative et de dématérialisation des procédures. Ces actions contribuent à soutenir l'économie nationale.
S'agissant plus précisément des programmes 134 et 343, pouvez-vous préciser les grands axes du nouveau contrat d'objectifs et de performances de Business France et nous éclairer sur les réformes envisagées à moyen terme du soutien public à l'internationalisation des entreprises ?
Quelles sont les modalités de financement du plan « France Très haut débit » qui devrait solliciter également les ressources des collectivités ? Face à l'ambition affichée par le Gouvernement, les responsables des collectivités s'inquiètent, tandis que leurs marges de manoeuvre en matière d'investissement tendent à se réduire. Quelles garanties pouvez-vous leur apporter ?
Quant au volet industriel, pouvez-vous faire un point sur la stratégie nationale par filières et nous préciser la feuille de route pour la Nouvelle France industrielle, redimensionnée cette année ? Quelles plus-values et retombées peut-on espérer de la réorganisation que vous avez opérée ?
S'agissant enfin du programme d'investissements d'avenir (PIA), le sentiment d'un manque de lisibilité domine – je vous remercie pour les éclairages que vous apportez –, nourri par quelques curiosités : ainsi, le comité stratégique de la filière nucléaire ne bénéficie pas directement de ce programme. Peut-on sur ce point espérer une évolution positive dans un avenir proche ?
Je voudrais concentrer mon intervention sur les questions relevant du programme « France Très haut débit ».
Ma première préoccupation porte sur les opérations de montée en débit.
Pour les zones les moins denses en milieu rural, ces montées en débit constituent une solution d'accès au très haut débit, difficilement remplaçable à court terme. Malheureusement, cette solution a subi cette année deux remises en question qui pourraient, si elles persistaient, empêcher l'utilisation de la montée en débit et pénaliser ainsi les zones rurales.
La première remise en cause de la montée en débit tient à l'ouverture par la Commission européenne d'une procédure d'infraction pour aides d'État aux investissements de montée en débit réalisés par les collectivités.
Cette procédure d'infraction est aussi étonnante qu'inquiétante. Étonnante, parce qu'il aurait été logique de vérifier la compatibilité avec la législation européenne des règles de financement par le Fonds national pour la société numérique (FSN) avant de les édicter : cela a-t-il été fait et avec quel résultat ?
Étonnante également, car les montées en débit réalisées en 2014 et 2015 ont, dans un département comme le mien, le Loir-et-Cher, bénéficié des crédits de l'Union européenne : où est la logique des financements publics ?
Inquiétante, parce que cette procédure d'infraction bloque les dossiers déposés au FSN. Cette procédure retarde, pour les travaux en cours de réalisation ou déjà réalisés, le versement de la subvention acquise, entraînant des problèmes de trésorerie et le risque de devoir trouver un financement de substitution.
La seconde remise en cause de la montée en débit est le fait de Bercy.
En effet, depuis le printemps dernier, la direction générale des finances publiques (DGFiP) a déclaré inéligible à la récupération de TVA les opérations de montée en débit. Pourtant, ces opérations bénéficiaient, jusqu'à la fin 2014, du remboursement via le Fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA).
Cette inéligibilité est justifiée par l'insuffisance des recettes de montée en débit pour bénéficier de la qualification d'activité commerciale. C'est pour le moins paradoxal, puisque la faiblesse des recettes commerciales est par définition le lot des projets couvrant les zones les moins denses. Si les recettes commerciales étaient bonnes, le secteur privé s'y serait intéressé. Ce sont, à nouveau, les territoires les moins denses qui vont être pénalisés par cette nouvelle règle de la DGFiP. Les futurs travaux vont coûter 20 % plus cher. Les travaux entraîneront une dépense non prévue de 20 %, dans le contexte de grande tension budgétaire que nous connaissons.
Quelles solutions le Gouvernement envisage-t-il : revenir à la récupération en vigueur jusqu'à l'an dernier ? Utiliser les recettes de TVA, que l'État continue d'empocher sur la montée en débit, pour augmenter la subvention de l'État, sous réserve, naturellement, de conformité aux règles européennes ? Laisser Orange, et les utilisateurs qu'il représente, payer une redevance plus importante pour l'utilisation du réseau de montée en débit, au risque de rendre ces zones peu denses moins attrayantes encore pour les opérateurs ?
La couverture en téléphonie mobile est un autre sujet de préoccupation.
Le plan d'achèvement de la couverture est une bonne chose. Mais le programme de 1 000 pylônes risque d'être retardé par les fortes contraintes budgétaires des collectivités territoriales chargées de construire ces pylônes, par le risque de non-remboursement de la TVA. Pour les 200 pylônes de fin du programme « zones blanches », les collectivités territoriales ne paient qu'un loyer symbolique d'un euro : on ne peut donc pas parler de recettes commerciales ! Ce programme pourrait enfin être retardé par le risque de remise en cause des engagements des opérateurs de télécommunications électroniques, après les augmentations du taux de la taxe sur les services fournis pour financer France Télévisions.
Je n'ai pas le temps d'évoquer l'incertitude qui plane sur le respect des engagements de couverture des zones d'appel à manifestation d'intentions d'investissement (AMII) – à la suite de la fusion entre Numericable et SFR. Celle-ci menace d'alourdir le volume des travaux à la charge des collectivités publiques, dans les zones où Numericable ne serait plus volontaire pour investir. Comment le plan « France Très haut débit » serait-il ajusté, à la hausse, dans l'hypothèse de cette charge supplémentaire imposée aux collectivités ?
La mission « Économie » couvre des domaines très vastes, ce dont témoignent les différents rapports présentés. Durant les cinq minutes qui me sont imparties, je n'aborderais que quelques points et je vais beaucoup me répéter, encore plus que d'habitude – je vous prie de m'en excuser –, puisque de nombreuses réponses ont déjà été apportées aux questions que je comptais poser.
L'industrie française est aujourd'hui dans une situation délicate dans certains secteurs. Les raisons en sont multiples, mais ce mal chronique est en grande partie lié au sous-investissement. La dernière étude sur l'âge moyen des machines-outils date de 1999, c'est un peu loin, preuve peut-être que notre pays ne s'est pas assez intéressé à son industrie par le passé. Le constat d'alors montrait que l'âge moyen des outils de production était de neuf ans en Allemagne, de douze en Italie, de dix-sept en France. Depuis, il semble qu'il n'y ait pas eu d'évolution significative.
Pourtant, les mesures d'incitation à l'investissement, de réduction fiscale et de diminution des cotisations sociales sont nombreuses. En outre, même dans des secteurs qui se portent bien, les cessations d'activité ou les délocalisations continuent. Ainsi, près de ma circonscription, un exemple illustre bien cette situation. C'est le cas de STMicroelectronics. Cette société, premier employeur privé de la région Rhône-Alpes, pourrait licencier quelque 1 000 salariés, même si l'annonce n'en a pas été faite officiellement à ce jour. Or, sa production porte sur des secteurs d'avenir et figure à la pointe du classement mondial. Cette entreprise a par ailleurs bénéficié des dispositifs de défiscalisation tels que le CICE ou encore le crédit d'impôt recherche (CIR), et de subventions publiques de plus d'un milliard d'euros dans le cadre du programme « Nano 2017 ». On atteint ici la limite de ces dispositifs, qui ne sont pas suffisamment soumis à conditions et à obligations en matière d'emploi. Attention, donc, aux simples effets d'aubaine ! Si le CIR permet parfois de maintenir des unités de recherche dans notre pays, les entreprises qui en bénéficient n'hésitent pas ensuite à délocaliser la production, fruit de ces recherches.
De plus, ces avantages fiscaux bénéficient plus aux grandes entreprises qu'aux PME et TPE, alors même que ces dernières sont beaucoup plus assujetties à l'impôt. Les grandes entreprises réduisent en effet leur fiscalité en faisant de l'optimisation fiscale, grâce aux nombreuses dérogations et délocalisations possibles ainsi qu'à une utilisation abusive des coûts de transfert – les prix auxquels les filiales d'un même groupe s'échangent des biens et des services. Notre pays n'encadre pas suffisamment ce genre de pratiques. D'ailleurs, notre commerce extérieur en souffre. Si le déficit cumulé des douze derniers mois a diminué par rapport à l'année dernière, c'est un résultat en trompe-l'oeil car cette amélioration est due en partie à la baisse de l'euro face au dollar, d'une part, et à la baisse de prix des énergies importées, évaluée à plus de 21 milliards d'euros sur un an, d'autre part. Fort heureusement, certains secteurs, notamment industriels, se portent bien et contribuent positivement à notre balance commerciale. Je pense tout particulièrement à l'aéronautique et au secteur spatial. Il en va de même pour l'agriculture et à l'agroalimentaire. Ces secteurs auraient néanmoins besoin de mieux valoriser la qualité de leur production à l'export.
À propos du projet de traité avec les États-Unis, appelé TAFTA ou TTIP, il y aurait beaucoup à dire. Le 11e round vient de s'achever et l'opacité règne toujours sur les négociations, M. le secrétaire d'Etat vient de nous le confirmer. Il nous dit également que le mécanisme d'arbitrage prévu n'a pas évolué ; cela nous inquiète, car il s'agit d'une véritable justice privée qui permettrait aux grandes entreprises de contester les décisions votées par l'Union européenne, ses Etats membres ou leurs collectivités locales. Qu'en est-il de l'organe de règlement ?
Enfin, les Parlements nationaux seront-ils appelés à se prononcer sur ce traité ? Pourront-ils intervenir avant la fin des négociations ?
Après ces deux heures et quarante minutes, j'ai dû réécrire mes cinq minutes d'intervention. Dans mon impatience, je voulais citer René Char : « Ce qui vient au monde pour ne rien troubler ne mérite ni égards ni patience. » Je ne le ferai pas, pour éviter une provocation qui serait pour partie inappropriée.
Parce que vous diminuez les crédits de la mission « Economie » de 80 millions d'euros, soit une baisse de près de 5 %, parce que vos coupes budgétaires se solderont par la suppression de 112 emplois après une réduction de 143 emplois en 2015, et parce que les dépenses de fonctionnement, d'intervention et d'investissement diminuent, comme l'an passé, de 9 %, je ne suis pas convaincu que vos désormais légendaires certitudes, monsieur le ministre Macron, ne présagent que du bon. Alexandre Vialatte disait d'ailleurs qu'« il ne faut pas piler le mil avec une banane trop mûre ». (Rires.)
Concernant le programme 134 relatif à la stratégie de développement des entreprises, les crédits pour 2016 s'inscrivent dans le prolongement de la loi pour la croissance et l'activité et de ses orientations d'accompagnement du libéralisme, ce libéralisme qui aurait selon vous, pour reprendre les mots de Jean Jaurès, « un privilège d'éternité ».
Vous confiez ainsi plus que jamais à la Banque publique d'investissement le soin de combler les défaillances du marché, non pas pour jouer un rôle de levier de développement économique mais pour pallier le refus des banques de faire crédit pour cause de rentabilité insuffisante. Quant au soutien prioritaire à l'investissement des entreprises innovantes et exportatrices, qui est désormais l'objectif central de Bpifrance, nous doutons qu'il porte ses fruits en l'absence de toute conditionnalité en matière d'emploi, de formation et de progrès écologique.
En outre, Bpifrance, en l'état, ne peut être à la hauteur des enjeux en matière de financement et de développement des filières industrielles. En effet, ses opérations sont conditionnées par la rentabilité financière – ce que vous appelez en termes élégants la mobilité des capitaux. Cette condition l'empêche de jouer le rôle contracyclique qui pourrait être le sien, si elle était en capacité de réaliser des prêts aux entreprises sur fonds d'épargne, à l'image de ceux dont bénéficient le logement social ou la rénovation urbaine. Bpifrance pourrait, dans le même esprit, être un véritable outil de financement de la transition énergétique, ainsi que de l'économie sociale et solidaire. Convenez-en, monsieur le ministre, ce ne sont plus là aujourd'hui que des missions marginales.
Rappelons pourtant l'objectif de la mission « Économie » : favoriser la mise en place d'un environnement propice à une croissance durable et équilibrée de l'économie.
Les orientations définies par le Gouvernement ne vont pas dans le bon sens. Cette remarque me conduit à évoquer le déséquilibre entre les politiques de subventions et les dépenses fiscales. D'un côté, le projet de loi propose pour le programme « Développement des entreprises et du tourisme » des crédits en baisse de 5 %, et, de l'autre, il consent un montant de dépenses fiscales sur ce même programme de 19,99 milliards d'euros l'an prochain, contre 12,8 milliards en 2014.
De fait, nous pouvons légitimement et collectivement nous demander s'il ne conviendrait pas d'inverser la logique actuelle : réduire le périmètre et le volume des exonérations fiscales, qui forment un « millefeuille » à la cohérence et à l'efficacité discutables, pour privilégier des politiques de subventions et d'aides ciblées aux entreprises, avec l'objectif de limiter les effets d'aubaine par un pilotage plus rigoureux de la politique économique et par l'attribution d'aides sur des critères donnant du sens à notre politique industrielle.
Concernant cette fois, les missions dévolues à la DGCCRF, gardienne de l'ordre public économique, nous continuons de nous inquiéter des sous-effectifs avec un nombre important de départements aujourd'hui sous le seuil critique de neuf agents. Nous soutenons pour notre part l'exigence de redonner des moyens, en particulier humains, à cette direction afin qu'elle soit en mesure de mieux défendre les consommateurs et de rééquilibrer les forces entre ceux-ci et les professionnels. Les effectifs ont été lourdement amputés sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, avec la révision générale des politiques publiques (RGPP). Des moyens supplémentaires seraient indispensables pour donner un véritable sens à la loi relative à la consommation, notamment en améliorant la nature et le volume des contrôles et en favorisant une plus grande réactivité ainsi qu'une lutte plus efficace contre différentes formes de criminalité économique. Nous ne pouvons donc nous satisfaire, pour la deuxième année consécutive, de la stabilité des effectifs.
La question du renforcement de certaines administrations après des années de gestion calamiteuse vaut également pour l'INSEE. De plus, quelles seront les conséquences des fusions de régions entraînant la fusion des administrations régionales de l'État, en particulier pour l'INSEE Auvergne ?
Pour conclure, j'évoquerai la nouvelle baisse de la dotation de la Banque de France, qui sera passée de 302 millions d'euros en 2014 à 252 millions en 2016. Cette nouvelle baisse nous laisse une fois de plus dubitatifs, car le nombre de personnes en situation de surendettement ne recule que faiblement. Je n'évoque pas les autres missions de la Banque de France, notamment celle d'observatoire économique, indispensable au pilotage de notre économie.
Les minutes attribuées au groupe étant plus rares que les cadeaux au veau d'or et à la France des dividendes, je dois en rester à ces quelques observations qui me conduisent à voter contre le présent budget.
Pour conclure, ayant commencé par un clin d'oeil poétique, monsieur le ministre, je voudrais vous dire que vos choix économiques me rappellent cette terrible sentence de Rimbaud au lendemain de la Commune de Paris : « Société, tout est rétabli ! »
J'avais prévu de soutenir les interventions des rapporteurs, Jean-Louis Gagnaire et Jean-Luc Laurent, sur les problèmes rencontrés par les réseaux des CTI et des CPDE. Je me réjouis de l'avis favorable que vous avez exprimé, monsieur le ministre, sur les amendements qu'ils présentent, et dont je suis cosignataire, pour rassurer ces réseaux qui s'inquiètent chaque année du plafonnement des taxes affectées. Il serait bon de les rassurer à plus long terme afin qu'ils puissent agir dans la sérénité.
Lors du dernier Conseil national de l'industrie (CNI) consacrée aux propositions en matière de formation générale et professionnelle présentées par les quatorze comités stratégiques de filières, il vous avait été demandé d'allouer des moyens supplémentaires au CNI afin qu'il puisse diffuser plus facilement ses travaux et actions. Envisagez-vous de renforcer les moyens du Centre, et, si oui, de quelle manière, pour permettre la vulgarisation des travaux très intéressants des comités stratégiques de filières et mettre l'accent sur le dialogue social exemplaire qui s'y noue ? J'en profite pour vous remercier d'avoir accepté la présence de référents parlementaires au sein de cette institution qui permettent de renforcer les liens avec le Parlement.
Je me félicite du développement des VIE. Néanmoins, je m'interroge sur la pertinence de cet indicateur de performance pour atteindre l'objectif d'internationalisation des entreprises et de conquête des marchés.
À la page 65 du document budgétaire, il est indiqué que les produits d'information et les services d'accompagnement commercial sont proposés par Business France à titre payant. Quelles sont les prestations offertes à titre gratuit aux entreprises par cet organisme qui assure une mission de service public pour laquelle il reçoit une subvention de 103 millions d'euros ? Que comprend le pack payant ? N'est-il pas plus intéressant pour les PME de se tourner vers des cabinets de conseil ?
Autre question, comment le rôle de Business France s'articule-t-il avec les actions des régions ou de la BPI en matière d'accompagnement des PME à l'international ? Doit-on parler de complémentarité ou de doublon ?
Je souhaite m'arrêter sur le surendettement même si cette question est quelque peu hors sujet. Qu'en est-il du fichier positif ? Je suis favorable à cette mesure qui a malheureusement été censurée par le Conseil constitutionnel. Comment la rétablir ?
Alors que la mission « Économie » est l'une des plus touchées par le vaste plan de baisse des crédits dans lequel s'est engagé notre gouvernement, les crédits alloués à la Guyane sont relativement préservés sur la durée de la programmation triennale, bien qu'en légère baisse de 2 % par rapport à 2014.
Les arbitrages, aux termes desquels les crédits du programme augmentent, démontrent votre volonté de mieux accompagner l'économie guyanaise, qui, en dépit de son taux de croissance de 4 %, n'est toujours pas suffisamment dynamique pour compenser les effets de la croissance démographique.
On peut espérer que ces efforts, associés à la baisse des paiements obligatoires des entreprises en application du CICE, au pacte de responsabilité et aux effets de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, qui se font déjà sentir sur le terrain, permettront à l'économie guyanaise d'envisager plus sereinement son avenir.
Toutefois, je ne puis m'interdire de vous interroger sur la baisse du programme 220 « Statistiques et études économiques ». En effet, sans remettre en cause le travail que fournit l'Institut d'émission des départements d'outre-mer (IEDOM), disposer des statistiques et agrégats économiques concernant la Guyane, et au-delà tous les outre-mer, est une réelle gageure. Cette question est d'ailleurs soulevée par le dernier rapport de la commission nationale d'évaluation des politiques de l'État outre-mer, dont je suis membre.
Aussi cette baisse des crédits alloués au programme 220 me semble-t-elle particulièrement préjudiciable à notre territoire en termes de programmation et de mise en place de politiques pérennes et efficaces en faveur du développement économique et de la lutte contre le chômage.
Monsieur le ministre, je vous remercie de bien vouloir nous renseigner sur les mesures que vous comptez prendre afin que soient rendues disponibles des données fiables sur les économies des outre-mer.
Je souhaite évoquer les chambres de commerce et d'industrie (CCI) et redire mon attachement à ce que je considère comme un véritable corps intermédiaire, à la croisée des entreprises et des pouvoirs publics.
Bon nombre de CCI opèrent aujourd'hui une mutation que la loi NOTRe va favoriser, les obligeant à rationaliser leurs actions tout en assurant la couverture du territoire. D'autres sont de véritables incubateurs du futur, identifiant les besoins et les marchés de demain, pour susciter de nouvelles activités dans les entreprises et les accompagner dans les changements à venir.
Pour leur fonctionnement collectif, elles ont besoin d'une prise en compte rapide des amendements adoptés dans le cadre de la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, et censurés par le Conseil constitutionnel pour des raisons de forme. Ce matin, vous avez évoqué une ordonnance qui reprendrait l'un de ces amendements. Je vous saurais gré d'accélérer cette intégration pour la totalité des dispositions que nous avions adoptées.
La mutation que j'évoquais exige une structuration plus claire et une répartition des compétences entre les chambres de commerce et d'industrie de région (CCIR) et CCI France. J'ai confiance dans les CCIR renouvelées. Nous devons les laisser s'organiser en fonction des spécificités économiques et territoriales. Il leur reviendra de gérer une forme de solidarité qui me paraît utile pour l'avenir et que le fonds de modernisation sous leur responsabilité permettra d'assurer.
Mais je crois indispensable de conforter, parallèlement, la tête de réseau, comme c'est le cas pour les chambres d'agriculture et les chambres des métiers. Le positionnement de CCI France pourrait passer par l'autonomie financière de cette dernière – à somme nulle pour l'État et pour le réseau des CCI.
En contrepartie, le réseau consulaire et la tutelle devront mieux collaborer, dans le respect des statuts et de l'autonomie de chacun – un reporting régulier pourrait être fait – car la relation entre l'État et les chambres ne peut se limiter à un combat budgétaire annuel mais doit reposer sur un projet économique partagé.
Le commerce extérieur est depuis 2012 au coeur de l'action internationale de notre pays. En le rattachant au ministère des affaires étrangères, le Président de la République a souhaité une mobilisation collective et coordonnée de nos actions extérieures. La France est ainsi dotée d'un outil performant. La diplomatie se conjugue avec l'économie. Les intérêts et l'influence de la France se soutiennent mutuellement.
Cette articulation bonifie nos instruments d'action extérieurs. Le commerce extérieur de la France sort gagnant de cette réorganisation. Notre influence en est valorisée. Les déplacements à l'étranger des plus hautes autorités de l'État – le Président de la République, le Premier ministre, le ministre des affaires étrangères – de m'Arabie à la Chine, de l'Algérie et du Maroc à l'Afrique du sud, du Mexique à la Colombie, de l'Inde au Vietnam, ont été l'occasion de vérifier le bien-fondé de cette politique.
Des conventions bilatérales ont été négociées afin de fluidifier le commerce et de faciliter les conditions de vie, de séjour et de travail des personnes. Le tourisme n'a pas été oublié. Des contrats ont été signés. Sans doute aurez-vous l'occasion au cours de ce débat de nous présenter la synthèse des acquis des derniers mois.
Le commerce extérieur suppose, monsieur le ministre, une égalité de traitement entre les acteurs économiques concernés. Il ne peut y avoir d'échanges sans elle, faute de quoi la confiance s'étiole et la tentation du repli devient de plus en plus forte.
La France et l'Union européenne négocient en ce moment la création d'un espace de libre-échange avec les États-Unis. En parallèle de ces négociations, des entreprises et des banques françaises et européennes ayant des relations avec Cuba et l'Iran sont condamnées par des tribunaux américains.
Comment comprendre dans un tel contexte ces condamnations ? Comment poursuivre en confiance des négociations de libre-échange dans ces conditions ?
Je laisserai Matthias Fekl répondre à la question relative au COP de Business France.
S'agissant des modalités de financement du plan « Très haut débit », celui-ci bénéficiera entre 2012 et 2022 de 20 milliards d'euros d'engagements, dont 6 milliards d'euros d'engagements publics portés à égalité par les collectivités et l'État. Les zones considérées comme denses et les zones intermédiaires dites AMII profiteront d'engagements financiers exclusivement privés, les crédits publics étant destinés aux territoires moins favorisés. Les crédits de l'État sont notamment dédiés aux zones rurales, où le déploiement du très haut débit s'avère le moins rentable et où les opérateurs risquent donc de ne pas investir. Le PIA a mis à disposition 900 millions d'euros – qui suffisent pour l'heure – et le programme 343 comporte les lignes budgétaires qui permettront d'aller plus loin. Le défi consiste aujourd'hui à accélérer la mise en oeuvre du plan, notamment l'investissement de la part privée en zones AMII, qui a pris du retard. L'été dernier, nous avons constitué un cahier des charges pour simplifier les règles des réseaux publics et clarifier les modes de financement.
Vous m'interrogez ensuite sur l'articulation entre la Nouvelle France industrielle, les filières et le PIA. Le pilotage de notre politique industrielle doit être cohérent : si l'État n'a pas à définir la stratégie des acteurs économiques, il doit avoir une vision quant aux secteurs clés, à l'organisation des filières et à la focalisation des crédits publics. C'est la tâche qui incombe à la Nouvelle France industrielle. Mon prédécesseur avait mis en place trente-quatre plans ; à l'issue d'une première année de fonctionnement, nous avons arrêté les plans non viables ou arrivés à maturité pour parvenir, grâce aux synergies entre les plans restants, aux fameuses neuf solutions industrielles. En effet, la distinction entre l'industrie et les services se brouille aujourd'hui. Pour réussir dans la compétition internationale, il s'agit non de produire un objet ou une offre industrielle matérielle tout en proposant, par ailleurs, des services, mais d'offrir une solution complexe à un client. C'est ainsi que se réconcilient l'industrie classique, le numérique et les services.
Au coeur de cette évolution se trouve la révolution des objets connectés, qui permet une formidable déconcentration des solutions industrielles. La transformation en cours du modèle productif doit nous faire repenser l'ensemble des chaînes logistiques ; source d'espoir, elle doit devenir l'un des vecteurs de notre renaissance industrielle. Demain, le défi ne sera plus de savoir qui produira des tubes en acier pour les envoyer à l'autre bout du monde – la production est d'ailleurs en train de se relocaliser –, mais qui saura apporter la solution la plus pertinente, combinant un objet industriel ou une entreprise numérisée et robotisée, et les services attachés qui contribueront à la valeur. Notre montée en gamme et notre différenciation passeront par notre capacité à produire des séries plus courtes, plus proches du marché final, en émettant moins de CO2, en recourant davantage au numérique et en proposant des services attachés – qui représentent autant d'opportunités d'emplois à faible qualification. Solution par solution, c'est tout cet ensemble que nous devons repenser, même si cela revient à casser beaucoup de repères et de façons traditionnelles d'organiser la production.
Au coeur de la matrice des Neuf solutions industrielles, l'Alliance pour l'industrie du futur vise précisément cette transformation du modèle productif, que j'ai vue à l'oeuvre dans plusieurs entreprises françaises et nombre d'entreprises allemandes. La diminution de la pollution résulte de la réduction de la chaîne logistique et du recours accru au numérique, mais surtout de la réorganisation complète de la chaîne de production et de la structure de l'offre. Ainsi, cette transformation industrielle promet une vraie réconciliation entre les impératifs productifs et environnementaux, qu'il ne faut plus opposer. J'ai souhaité que ces neuf solutions, comme les trente-quatre plans, soient pilotés par les industriels, avec le soutien des services de l'État et des collectivités, mais également des filières professionnelles et des branches. En effet, notre tissu industriel – comme, à présent, les services – se structure en filières ; pour éviter la déconnexion avec la réalité économique, nous avons choisi de reconstituer ce lien.
Le Conseil national de l'industrie (CNI) est un autre instrument qui permet, à travers les filières industrielles, d'organiser le rapport entre donneurs d'ordre et sous-traitants, ainsi que les politiques d'investissement et la politique de formation. Cette dernière apparaît fondamentale ; il y a plusieurs mois, j'ai demandé au CNI de faire un rapport sur le sujet, qui a été remis il y a quinze jours à Myriam El Khomri, à Najat Vallaud-Belkacem et à moi-même. En effet, pour réussir ce grand changement, il faut former les salariés et les accompagner dans la transformation du tissu industriel. Le PIA permet de financer les trente-quatre plans, devenus neuf solutions, à hauteur de 3,5 milliards d'euros. D'autres programmes bénéficient d'appels d'offres complémentaires ; mais les filières du CNI, au-delà de leurs frais de fonctionnement – pris en charge par la direction générale des entreprises –, ne mobilisent pas le PIA. Cette instance réunit les partenaires sociaux et les organisations professionnelles et patronales pour mener une discussion stratégique qui se décline branche par branche ; les crédits du PIA sont pour leur part focalisés sur la Nouvelle France industrielle.
Dès le début de la mise en place du plan « Très haut débit », nous avons pris contact avec la Commission européenne ; des discussions ont été engagées début 2013. Nos interactions se déroulent normalement, au rythme de la Commission : celle-ci n'a pas ouvert de procédure sur le sujet de la montée en débit, la longueur des discussions découlant de l'ampleur du plan. Actuellement, nous sommes en train de répondre aux questions qui nous sont adressées par les services de la Commission. Nous entretenons d'excellentes relations avec la commissaire Margrethe Vestager ; nos échanges sont dépassionnés et professionnels. À la mi-novembre, je me rendrai à Bruxelles pour la rencontrer car les dernières interactions nous donnent bon espoir pour que le régime-cadre qui évite à chaque collectivité de devoir notifier son projet soit autorisé très prochainement, peut-être avant la fin de l'année. S'il faut rester prudent – claironner un message rassurant risque de crisper les travaux techniques en cours –, la décision devrait nous être favorable. Toutefois, elle ne devrait pas ralentir le plan, comme le montre l'accord de principe donné cette semaine dans la région Nord-Pas-de-Calais pour 180 millions d'euros. Il nous faut continuer à simplifier les règles pour parvenir à des réponses qui s'articulent au niveau régional et se déclinent sur les bons territoires, pour avancer au plus vite.
Pour ce qui est du FCTVA, j'ai conscience de la difficulté que cette question représente pour les collectivités territoriales. Je continue à en débattre avec mes collègues chargés du budget et espère que nous arriverons à une réponse constructive sinon en loi de finances, du moins en loi de finances rectificative. Ces investissements d'avenir correspondent à l'architecture que nous avions envisagée ; je suis donc tout à fait en phase avec vous.
Hier, s'est tenu un conseil d'administration de STMicroelectronics, où Bpifrance est présente en tant qu'actionnaire de l'entreprise. Nous avons réaffirmé que la clarification du plan stratégique représentait un préalable à toute décision. Aucune annonce de plan de licenciement ou de restructuration n'a été faite lors de ce conseil. Je regrette que le dirigeant de l'entreprise, sans aucune validation du conseil d'administration ni de ses actionnaires français et italiens, ait pris la liberté d'annoncer un plan anxiogène et injustifié. Nous travaillons sur ce sujet en étroite collaboration avec nos amis italiens. Cette entreprise est compétitive et stratégique pour la filière française ; ses compétences sont internationalement reconnues. Produisant des composantes sensibles, en particulier en matière de communication, elle représente un instrument de souveraineté. En accord avec nos partenaires italiens, nous souhaitons aujourd'hui redéfinir un plan stratégique offensif qui seul permettra d'envisager des mesures opérationnelles, en parfaite transparence vis-à-vis de toutes les parties prenantes. Aucune annonce ne sera faite avant la finalisation de ce plan. Nous dépensons beaucoup d'argent pour soutenir cette filière, notamment au travers du PIA ; il est donc normal que nous formulions beaucoup d'exigences.
Monsieur le président Chassaigne, vous avez eu l'élégance d'ouvrir votre propos en citant René Char et de le conclure par les mots du poète préféré de ce dernier, Arthur Rimbaud. Mais après la Commune, Rimbaud a vieilli ; je ne sais s'il s'est assagi, mais il s'est épaissi. Dans « Adieu », un poème d'Une saison en enfer, il s'exclamait ainsi : « Je suis rendu au sol, avec un devoir à chercher, et la réalité rugueuse à étreindre ! Paysan ! » Rimbaud a montré, si besoin était, que le vrai idéaliste était un pragmatique ; or le pragmatique regarde la réalité en face. Si l'on décide que la stratégie industrielle se mesure aux crédits budgétaires, celle de nos prédécesseurs – qui ont dépensé bien plus que nous – ne peut qu'être saluée ; mais l'on ne peut pas tout juger à l'aune de ce critère. Or vous n'avez parlé que de chiffres et de plafonds d'emplois, et je le regrette car il faut également mener une discussion stratégique sur la vision et les priorités de l'État – sur lesquelles nous pouvons nous retrouver. Considérer que c'est en dépensant toujours plus, sans repenser notre organisation, que nous étreindrons cette réalité rugueuse si chère à Rimbaud, c'est prendre le risque que Vialatte avait pris avec la langue anglaise. Cet auteur, que j'affectionne comme vous, notait chaque jour dans son journal, pour s'en souvenir, qu'il convenait d'apprendre l'anglais le lendemain... L'infortuné est mort sans parler beaucoup de mots de cette langue !
Nous risquons, pour notre part, de ne pas réussir à relever le défi qui nous est lancé : à la fois nous doter d'un modèle compétitif en participant à la renaissance industrielle, et tenir nos engagements financiers afin de ne pas transmettre aux générations suivantes une dette insoutenable. Nous laisser la capacité de choisir exige d'être sérieux – mais non excessifs – en matière budgétaire, tout en suivant une stratégie et donc en définissant des priorités. C'est tout le sens de la ligne budgétaire adoptée par le Gouvernement. Je suis, comme vous, attaché aux grands opérateurs publics et à une stratégie en matière de télécommunications, de nucléaire et de filières industrielles ; les moyens offerts par ce budget, à travers le PIA et la Nouvelle France industrielle, permettent de les sécuriser. Je m'engage à faire tout ce qui est possible pour aller dans votre sens, en particulier dans le domaine des télécommunications ; mais nous devons mener un débat sur le fond et non seulement sur les moyens.
En ce sens, monsieur Grellier, le travail mené avec le CNI, que nous avons pérennisé, apparaît très structurant. Des comités de filière importants se tiendront dans les prochains mois ; le comité de filière nucléaire qui se réunira en début d'année prochaine fera notamment suite aux engagements que nous avons demandés à l'opérateur EDF en matière de clarification des investissements de court terme. En effet, au-delà des nouvelles centrales – la loi sur la transition énergétique prévoit que ce débat soit validé par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) –, une quinzaine de milliards d'euros d'investissements de ce type sont attendus de l'opérateur. Le Conseil de politique nucléaire a demandé à EDF de faire la lumière sur cette question, qui passera en conseil d'administration dans les prochains jours. Cela permettra de donner de la visibilité à la filière et de tenir le comité de filière en début d'année prochaine, après les interactions normales avec les organisations syndicales. J'attends beaucoup de ce comité : cette filière stratégique souffre, tout comme ses sous-traitants dans les territoires.
Plus généralement, je rejoins les propos de M. le président Chassaigne, de M. le rapporteur Laurent et de M. Grellier : plusieurs filières sont dans une situation difficile à cause des conditions macroéconomiques. Le nucléaire pâtit notamment de l'effondrement des marchés d'export et de nos propres difficultés ; la filière pétrolière et parapétrolière est au plus mal en raison du rétrécissement des débouchés. Or à chaque fois, ce sont des emplois industriels qui sont en danger. Dans ce domaine, la stratégie de l'État consiste à donner de la visibilité à la filière et de défendre les sous-traitants les plus fragiles, puis d'investir dans l'ensemble des acteurs menacés. En effet, la spécificité de l'État actionnaire est d'avoir une vision de long terme, donc de ne pas lâcher une entreprise lorsqu'elle traverse des difficultés conjoncturelles.
Madame Grosskost, Martine Pinville répondra à votre question sur le fichier positif. Au fond, tout le travail sur les données d'intérêt général dans le secteur financier, qui sera mené dans le cadre de la loi sur les nouvelles opportunités économiques, répond à la vocation de ce fichier. Aujourd'hui, les banques disposent de fichiers positifs captifs, mais il faudrait clarifier le statut de ces informations, en particulier lorsqu'elles sont d'intérêt général.
Monsieur Serville, je voudrais vous rassurer quant à l'engagement du Gouvernement derrière le territoire guyanais et la stratégie de croissance. Le Premier ministre a répondu hier à une question d'actualité sur le plan d'avenir. Je me félicite que le contrat de plan État-région ait pu être signé. Nous avons pu avancer sur la question du numérique grâce aux clarifications faites à la suite de mon déplacement. Je voudrais enfin vous rassurer pleinement sur le programme 120 : il n'y aura aucune remise en cause de la capacité de l'État, et en particulier de ses services statistiques, de se déployer sur le territoire guyanais.
Madame Rabin, je laisse Martine Pinville répondre à la question relative aux CCI ; Matthias Fekl répondra pour sa part aux questions finales de M. Said.
Le rapport sur le fichier positif, remis au Gouvernement au mois de juin, a permis de dégager plusieurs propositions, notamment celle de réaliser, d'ici la fin de l'année 2015, un bilan précis et complet des réformes du crédit à la consommation et du fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) intervenues au cours des cinq dernières années. Nous mettons également en place, avec Ségolène Neuville et Michel Sapin, des points conseil budget. Quatre régions ont pour le moment fait montre de leur intérêt pour le dispositif et acte de candidature : Île-de-France, Midi-Pyrénées, Alsace et Nord-Pas-de-Calais.
Madame Rabin, l'ordonnance relative aux CCI est actuellement au Conseil d'État et devrait aboutir d'ici fin novembre ; dès le début de l'année prochaine, les CCI pourraient donc s'organiser en fonction des travaux qu'elles ont, pour certaines, déjà menés. Un projet de loi sera ensuite examiné au Parlement dans les meilleurs délais.
Monsieur Prat, le COP de Business France comporte trois grandes orientations assorties de quinze indicateurs de performance. La nouvelle philosophie consiste à aller vers un travail plus qualitatif, afin que l'argent public octroyé par la représentation nationale soit davantage orienté vers les buts : moins d'obligations de moyens, plus d'obligations de résultats. Les trois grands objectifs de la nouvelle grande agence française à l'international sont : favoriser l'internationalisation des entreprises, attirer les investissements étrangers dans notre pays et promouvoir l'image de la France. Ce dernier objectif met en place un nouveau métier qui se concrétise entre autres par le lancement de Creative France. La campagne de communication cible pour le moment une dizaine de pays prioritaires, pour un coût de 8 millions d'euros, avec la volonté de présenter le meilleur visage de la France et de ses innovations – tant dans ses grands secteurs traditionnels de compétence que dans des domaines moins connus.
Du point de vue quantitatif, l'accompagnement à l'international des PME et des ETI – objectif cohérent avec la politique menée à l'intérieur du pays pour favoriser la croissance et la consolidation des PME – devrait toucher 17 000 entreprises sur la période considérée. En matière de développement du volontariat, nous voulons porter le nombre des VIE à 10 000 en 2017, dont 4 000 à la disposition des PME – directement ou via le portage par les grands groupes.
S'agissant des projets d'investissements étrangers en France, nous souhaitons, d'ici à 2017, voir aboutir 1 350 projets ; nous espérons également que le contenu de ces investissements en emplois sera plus fort. En effet, l'année dernière, les investissements dans notre pays ont très fortement augmenté, mais leur contenu en emplois a baissé. L'attractivité de la France est donc réelle, mais il faudrait qu'elle se traduise par davantage de créations d'emplois. Par ailleurs, des coopérations et des partenariats importants sont mis en place avec tous les opérateurs publics et privés du monde de l'export : les CCI, la French Tech, Bpifrance ou les régions – que Mme Grosskost a eu raison d'évoquer. Portes d'entrée de notre marché, les régions sont, avec les CCI, des interlocuteurs de premier plan qui structurent la réalité économique de nos territoires. Une convention avec Bpifrance, assortie de financements dédiés, permettra d'accompagner 1 000 ETI. Enfin, il faudra promouvoir Creative France.
Madame Bonneton, comme j'ai eu l'occasion de l'affirmer publiquement, les négociations sur le traité transatlantique se sont en effet distinguées par leur opacité ; mais je me suis mal exprimé si j'ai laissé entendre que les choses n'avaient pas évolué en matière d'arbitrage. Au contraire, depuis un an, l'évolution du côté européen est spectaculaire. Alors qu'auparavant le consensus consistait à dire « Circulez, il n'y a rien à voir », l'initiative que j'ai portée avec l'Allemagne au mois de janvier a amené la Commission européenne à présenter une proposition très différente dans sa philosophie. Cette philosophie triomphera-t-elle dans les négociations ? C'est notre but de voir l'évolution des esprits se traduire dans des faits et des dispositifs précis.
Les Parlements, m'avez-vous demandé, auront-ils leur mot à dire ? L'ensemble des États membres de l'Union européenne, dont la France, tout comme le secrétariat juridique du Conseil, considèrent qu'il s'agit d'un accord mixte où joue tant la compétence communautaire que la compétence nationale. En France, cela signifie que le Parlement aura le dernier mot. Nous attendons aussi que la Commission européenne se prononce de manière incontestable sur ce point ; il s'agit d'une exigence démocratique. Fait inédit, le président du Bundestag s'est exprimé en début de semaine dans des termes très proches de la position française. C'est la première fois qu'un haut responsable allemand évoque la possibilité – que j'avais déjà soulevée – d'interrompre les négociations si les choses n'évoluaient pas de façon substantielle.
Madame Grosskost, la lutte contre les doublons constitue le coeur du parcours unifié et cohérent à l'export que nous cherchons à instaurer. Pour ce qui est de votre seconde question, en tant qu'opérateur public, Business France mène de front plusieurs activités. Les prestations relatives à sa mission de service public – informations et analyses sur les pays et les marchés étrangers – sont gratuites. Mais l'organisme offre également des prestations payantes, subventionnées ou non. Les premières – notamment les salons professionnels, mais également des services plus individuels – sont facturées bien en deçà du prix de marché et se révèlent essentielles pour les entreprises. Les secondes se situent de plain-pied dans le secteur concurrentiel et font intervenir des opérateurs privés. Le COP fixe comme objectif qu'en 2017 Business France couvre 43 % de ses charges par des ressources propres, donc par des activités commerciales – dont les recettes émanant du dispositif VIE. Par ailleurs, Business France met en place une comptabilité analytique pour que l'ensemble des coûts soient retracés et rattachés aux différentes activités. Cela permettra de bien distinguer les services qui relèvent du champ concurrentiel et ceux qui n'en relèvent pas.
Monsieur Said, merci pour vos propos élogieux sur la diplomatie économique mise en oeuvre par le ministre des affaires étrangères, et très appréciée par les différents opérateurs. Vous avez, tout comme M. Prat, évoqué l'évolution de la balance commerciale qui, avec 73 milliards d'euros de déficit en 2011 et 53 milliards l'an dernier, dessine une tendance clairement positive. Cela s'explique par des éléments exogènes, indépendants de notre volonté – évolution de la facture énergétique et de la parité euro-dollar –, mais aussi par le redressement de la compétitivité de notre économie, qui doit beaucoup aux réformes menées par le Gouvernement. Les stratégies internationales de certains secteurs très dynamiques concourent également, pour au moins un tiers, à cette évolution positive. Depuis 2011, le déficit s'est réduit de 25 % ; certes, il reste très élevé, mais c'est une belle amélioration qui, selon toutes les prévisions, devrait se poursuivre.
J'estime comme vous que l'égalité de traitement des acteurs économiques est indispensable ; dans toutes les négociations auxquelles elle prend part, la France porte le principe de réciprocité tout comme la question de la conformité des différents régimes de sanctions au droit international public. Nous avons évoqué avec Mme Dagoma la question de l'extraterritorialité à propos de l'Iran ; mais la réflexion vaut pour d'autres pays. À la suite du courrier de Laurent Fabius et de ses homologues allemand et britannique à John Kerry, des contacts ont été établis entre administrations européennes et américaines pour préciser ce point. Par ailleurs, il faut mener un travail de fond au niveau européen pour inscrire les différentes activités dans le droit international. L'extraterritorialité pose à cet égard des problèmes de souveraineté, de démocratie et de droit. Enfin, il faut conforter l'euro comme grande monnaie de référence internationale pour que, dans toutes les parties du monde, davantage de transactions soient directement libellées dans cette devise.
La réunion de la commission élargie s'achève à dix-huit heures vingt-cinq.
Le Directeur du service des comptes rendus des commissions,
Nicolas VÉRON© Assemblée nationale