Intervention de Michèle Bonneton

Réunion du 29 octobre 2015 à 15h00
Commission élargie : finances - affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichèle Bonneton, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques, pour les postes :

J'ai l'honneur et le plaisir de présenter devant vous, comme chaque année depuis 2012, une appréciation des crédits alloués à La Poste.

Comme j'ai déjà eu l'occasion de le souligner, l'effort financier de l'État en faveur des postes ne reflète pas l'importance économique du secteur, qui représente 1 % du PIB et de la population active française.

Pour l'essentiel, l'État compense, de manière partielle, les missions de service public confiées à La Poste par le législateur. Or ces compensations ne sont pas toutes reportées au sein la mission « Économie », qui retrace aussi des crédits liés à la régulation ainsi que quelques dépenses annexes. Par ailleurs, La Poste bénéficie amplement du CICE, à hauteur de 325 millions d'euros en 2015 selon les premières estimations.

Au sein de la mission « Économie », les crédits relatifs au secteur postal figurent dans deux actions du programme 134.

Outre la dotation budgétaire de l'ARCEP, qui s'intéresse principalement aux télécommunications, ces crédits correspondent essentiellement à la compensation par l'État des surcoûts de la mission de transport de la presse, qui permet aux éditeurs de presse de bénéficier de tarifs préférentiels.

Cette dotation, qui s'élève à 119 millions d'euros dans le PLF pour 2016, mérite quelques commentaires.

En 2015, la compensation de l'État s'élevait à 130 millions d'euros, elle était de 217 millions d'euros en 2013, et plus élevée encore précédemment. L'année dernière, le Gouvernement justifiait la baisse de la compensation de l'État par le bénéfice que La Poste tirait du CICE. Cet argument pouvait se comprendre. Cette année, la justification est tout autre, et me paraît contestable. Les accords Schwartz – qui concernent la distribution de la presse – expirant à la fin de l'année, une réforme des modalités d'exercice de la mission de transport et d'acheminement de la presse par La Poste est en train d'être dessinée. Deux missions ont été constituées, l'une confiée à l'ARCEP et l'autre à M. Emmanuel Giannesini, conseiller maître à la Cour des comptes. Monsieur le ministre, j'ai cru comprendre que des discussions avaient toujours lieu au niveau interministériel, et qu'il faudrait ensuite entamer les négociations avec La Poste et les éditeurs. Comment comprendre que les modalités de financement d'une mission de service public soient revues – à la baisse – avant même que la réforme correspondante ne soit arrêtée ?

Si les grandes lignes sont connues – distinction entre presse de la connaissance et du savoir et presse de loisir et de divertissement –, la mise en place de la réforme prendra du temps. Il est probable qu'elle ne pourra prendre effet qu'en 2017, pour ce que j'en sais aujourd'hui. Dans ce contexte, l'année 2016 constituera nécessairement une année de transition et il ne me paraît pas opportun de réduire dès à présent le montant de la compensation de l'État. Une telle évolution continuerait de perturber l'équilibre économique, tant de La Poste que de la presse, qui en la matière sont confrontés à des défis communs : des baisses de ressources conséquentes.

C'est pourquoi je proposerai un amendement revalorisant à 130 millions d'euros le montant de la compensation de l'État, afin de garantir une certaine stabilité en se calquant sur le montant alloué l'an dernier, déjà en baisse.

Au-delà de cette question, j'ai décidé de consacrer cette année une grande partie de mon avis budgétaire à trois thématiques.

Premièrement, les conditions de travail des postiers et l'évolution des métiers. Je l'ai déjà souligné, les fermetures des centres de tri, insufflées par une logique de rentabilité à tout prix, ont conduit à déshumaniser les bureaux de poste, voire la tournée du facteur. Si La Poste met en avant la signature de trois accords sociaux en février dernier, force est de constater que ces accords n'ont pas recueilli l'assentiment de l'ensemble des organisations syndicales.

Les facteurs passent aujourd'hui plus de temps dehors, cinq heures vingt par jour contre trois heures trente auparavant. Des pénibilités disparaissent, c'est vrai, mais d'autres apparaissent. Les tournées se prolongent parfois jusque dans l'après-midi, et les facteurs se voient imposer une pause méridienne de quarante-cinq minutes non rémunérées, contre quinze minutes rémunérées jusque-là. Comment le Gouvernement juge-t-il le climat social à La Poste ?

Plus largement, il est indispensable de travailler à la revalorisation du métier de postier. La Poste tente beaucoup de nouvelles expériences. Elle tâtonne, expérimente, au risque de brouiller quelque peu son image. Cette stratégie de tâtonnement déstabilise les postiers, d'autant plus qu'ils ont encore trop souvent le sentiment d'être dépossédés de leur avenir et de ne pas être suffisamment écoutés. Comment le Gouvernement perçoit-il la multiplication des initiatives de La Poste ?

Deuxièmement, s'agissant de l'implication de La Poste dans les maisons de services au public, que je salue pleinement, il semblerait que dans certains territoires, les préfectures ne jouent pas pleinement le rôle d'impulsion qui doit être le leur. Quelles directives le Gouvernement a-t-il donné à ses représentants afin de favoriser la constitution des maisons de service au public dans un délai rapide ?

Troisièmement, j'en ai déjà parlé, comment le Gouvernement justifie-t-il la baisse de 11 millions d'euros de la compensation de l'État pour l'exercice de la mission de transport et d'acheminement de la presse ?

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