Je voudrais concentrer mon intervention sur les questions relevant du programme « France Très haut débit ».
Ma première préoccupation porte sur les opérations de montée en débit.
Pour les zones les moins denses en milieu rural, ces montées en débit constituent une solution d'accès au très haut débit, difficilement remplaçable à court terme. Malheureusement, cette solution a subi cette année deux remises en question qui pourraient, si elles persistaient, empêcher l'utilisation de la montée en débit et pénaliser ainsi les zones rurales.
La première remise en cause de la montée en débit tient à l'ouverture par la Commission européenne d'une procédure d'infraction pour aides d'État aux investissements de montée en débit réalisés par les collectivités.
Cette procédure d'infraction est aussi étonnante qu'inquiétante. Étonnante, parce qu'il aurait été logique de vérifier la compatibilité avec la législation européenne des règles de financement par le Fonds national pour la société numérique (FSN) avant de les édicter : cela a-t-il été fait et avec quel résultat ?
Étonnante également, car les montées en débit réalisées en 2014 et 2015 ont, dans un département comme le mien, le Loir-et-Cher, bénéficié des crédits de l'Union européenne : où est la logique des financements publics ?
Inquiétante, parce que cette procédure d'infraction bloque les dossiers déposés au FSN. Cette procédure retarde, pour les travaux en cours de réalisation ou déjà réalisés, le versement de la subvention acquise, entraînant des problèmes de trésorerie et le risque de devoir trouver un financement de substitution.
La seconde remise en cause de la montée en débit est le fait de Bercy.
En effet, depuis le printemps dernier, la direction générale des finances publiques (DGFiP) a déclaré inéligible à la récupération de TVA les opérations de montée en débit. Pourtant, ces opérations bénéficiaient, jusqu'à la fin 2014, du remboursement via le Fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA).
Cette inéligibilité est justifiée par l'insuffisance des recettes de montée en débit pour bénéficier de la qualification d'activité commerciale. C'est pour le moins paradoxal, puisque la faiblesse des recettes commerciales est par définition le lot des projets couvrant les zones les moins denses. Si les recettes commerciales étaient bonnes, le secteur privé s'y serait intéressé. Ce sont, à nouveau, les territoires les moins denses qui vont être pénalisés par cette nouvelle règle de la DGFiP. Les futurs travaux vont coûter 20 % plus cher. Les travaux entraîneront une dépense non prévue de 20 %, dans le contexte de grande tension budgétaire que nous connaissons.
Quelles solutions le Gouvernement envisage-t-il : revenir à la récupération en vigueur jusqu'à l'an dernier ? Utiliser les recettes de TVA, que l'État continue d'empocher sur la montée en débit, pour augmenter la subvention de l'État, sous réserve, naturellement, de conformité aux règles européennes ? Laisser Orange, et les utilisateurs qu'il représente, payer une redevance plus importante pour l'utilisation du réseau de montée en débit, au risque de rendre ces zones peu denses moins attrayantes encore pour les opérateurs ?
La couverture en téléphonie mobile est un autre sujet de préoccupation.
Le plan d'achèvement de la couverture est une bonne chose. Mais le programme de 1 000 pylônes risque d'être retardé par les fortes contraintes budgétaires des collectivités territoriales chargées de construire ces pylônes, par le risque de non-remboursement de la TVA. Pour les 200 pylônes de fin du programme « zones blanches », les collectivités territoriales ne paient qu'un loyer symbolique d'un euro : on ne peut donc pas parler de recettes commerciales ! Ce programme pourrait enfin être retardé par le risque de remise en cause des engagements des opérateurs de télécommunications électroniques, après les augmentations du taux de la taxe sur les services fournis pour financer France Télévisions.
Je n'ai pas le temps d'évoquer l'incertitude qui plane sur le respect des engagements de couverture des zones d'appel à manifestation d'intentions d'investissement (AMII) – à la suite de la fusion entre Numericable et SFR. Celle-ci menace d'alourdir le volume des travaux à la charge des collectivités publiques, dans les zones où Numericable ne serait plus volontaire pour investir. Comment le plan « France Très haut débit » serait-il ajusté, à la hausse, dans l'hypothèse de cette charge supplémentaire imposée aux collectivités ?