Intervention de Michèle Bonneton

Réunion du 29 octobre 2015 à 15h00
Commission élargie : finances - affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichèle Bonneton, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques, pour les postes :

La mission « Économie » couvre des domaines très vastes, ce dont témoignent les différents rapports présentés. Durant les cinq minutes qui me sont imparties, je n'aborderais que quelques points et je vais beaucoup me répéter, encore plus que d'habitude – je vous prie de m'en excuser –, puisque de nombreuses réponses ont déjà été apportées aux questions que je comptais poser.

L'industrie française est aujourd'hui dans une situation délicate dans certains secteurs. Les raisons en sont multiples, mais ce mal chronique est en grande partie lié au sous-investissement. La dernière étude sur l'âge moyen des machines-outils date de 1999, c'est un peu loin, preuve peut-être que notre pays ne s'est pas assez intéressé à son industrie par le passé. Le constat d'alors montrait que l'âge moyen des outils de production était de neuf ans en Allemagne, de douze en Italie, de dix-sept en France. Depuis, il semble qu'il n'y ait pas eu d'évolution significative.

Pourtant, les mesures d'incitation à l'investissement, de réduction fiscale et de diminution des cotisations sociales sont nombreuses. En outre, même dans des secteurs qui se portent bien, les cessations d'activité ou les délocalisations continuent. Ainsi, près de ma circonscription, un exemple illustre bien cette situation. C'est le cas de STMicroelectronics. Cette société, premier employeur privé de la région Rhône-Alpes, pourrait licencier quelque 1 000 salariés, même si l'annonce n'en a pas été faite officiellement à ce jour. Or, sa production porte sur des secteurs d'avenir et figure à la pointe du classement mondial. Cette entreprise a par ailleurs bénéficié des dispositifs de défiscalisation tels que le CICE ou encore le crédit d'impôt recherche (CIR), et de subventions publiques de plus d'un milliard d'euros dans le cadre du programme « Nano 2017 ». On atteint ici la limite de ces dispositifs, qui ne sont pas suffisamment soumis à conditions et à obligations en matière d'emploi. Attention, donc, aux simples effets d'aubaine ! Si le CIR permet parfois de maintenir des unités de recherche dans notre pays, les entreprises qui en bénéficient n'hésitent pas ensuite à délocaliser la production, fruit de ces recherches.

De plus, ces avantages fiscaux bénéficient plus aux grandes entreprises qu'aux PME et TPE, alors même que ces dernières sont beaucoup plus assujetties à l'impôt. Les grandes entreprises réduisent en effet leur fiscalité en faisant de l'optimisation fiscale, grâce aux nombreuses dérogations et délocalisations possibles ainsi qu'à une utilisation abusive des coûts de transfert – les prix auxquels les filiales d'un même groupe s'échangent des biens et des services. Notre pays n'encadre pas suffisamment ce genre de pratiques. D'ailleurs, notre commerce extérieur en souffre. Si le déficit cumulé des douze derniers mois a diminué par rapport à l'année dernière, c'est un résultat en trompe-l'oeil car cette amélioration est due en partie à la baisse de l'euro face au dollar, d'une part, et à la baisse de prix des énergies importées, évaluée à plus de 21 milliards d'euros sur un an, d'autre part. Fort heureusement, certains secteurs, notamment industriels, se portent bien et contribuent positivement à notre balance commerciale. Je pense tout particulièrement à l'aéronautique et au secteur spatial. Il en va de même pour l'agriculture et à l'agroalimentaire. Ces secteurs auraient néanmoins besoin de mieux valoriser la qualité de leur production à l'export.

À propos du projet de traité avec les États-Unis, appelé TAFTA ou TTIP, il y aurait beaucoup à dire. Le 11e round vient de s'achever et l'opacité règne toujours sur les négociations, M. le secrétaire d'Etat vient de nous le confirmer. Il nous dit également que le mécanisme d'arbitrage prévu n'a pas évolué ; cela nous inquiète, car il s'agit d'une véritable justice privée qui permettrait aux grandes entreprises de contester les décisions votées par l'Union européenne, ses Etats membres ou leurs collectivités locales. Qu'en est-il de l'organe de règlement ?

Enfin, les Parlements nationaux seront-ils appelés à se prononcer sur ce traité ? Pourront-ils intervenir avant la fin des négociations ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion