Intervention de Daniel Gibbes

Séance en hémicycle du 3 novembre 2015 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2016 — Outre-mer

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Gibbes :

Car si cette stabilité budgétaire démontre que le Gouvernement demeure conscient des urgences auxquelles restent confrontés nos territoires ultramarins, elle ne donne pas la possibilité à ces territoires, aux économies particulièrement fragiles, de se mettre sur la voie d’un juste et nécessaire rattrapage avec la métropole. Retards structurels, taux de chômage deux fois plus élevé que dans l’Hexagone pour un PIB par habitant deux fois moindre : nos territoires outre-mer mériteraient un budget en adéquation avec leurs réalités et des mesures singulières prenant en considération leurs particularismes.

Certes, votre budget, madame la ministre, présente quelques motifs de satisfaction : le maintien des crédits alloués au service militaire adapté rend encore possible la promesse d’atteindre le chiffre de 6 000 volontaires en 2017 ; je pense aussi – même si le montant engagé est toujours bien en deçà de la promesse présidentielle de 500 millions d’euros sur cinq ans – au maintien à 40 millions d’euros des crédits du fonds exceptionnel d’investissement ; je pense enfin à l’engagement de l’État à soutenir les efforts de redressement du régime de solidarité territoriale de la Polynésie française sur la période 2015-2017.

Cela dit, permettez-moi, madame la ministre, de revenir, pour les clarifier, sur les propos que j’ai tenus mardi dernier en commission élargie et dont vous m’avez fait reproche. En réalité, j’ai simplement rappelé que les collectivités dotées de l’autonomie fiscale se trouvent, de fait, privées du CICE et que cette exclusion représente un lourd préjudice pour les entreprises de ces territoires aux trésoreries vides. Réclamant, une nouvelle fois, la mise en place d’une politique contractuelle débouchant sur de véritables schémas de développement économique pour ces COM, j’ai déploré qu’une loi nationale instaure une disposition discriminante à l’égard d’autres territoires français. Vous avez pris ombrage de mon usage de l’adjectif « discriminant », pourtant, il signifie littéralement « qui permet d’établir une distinction ». Sachez également que l’expression que vous avez vous-même utilisée, à savoir « rançon de la responsabilisation », m’a profondément déplu.

Je maintiens ce que j’ai dit en commission élargie et, pour l’illustrer, je reprends l’exemple parlant de Saint-Martin : comment une collectivité déficitaire de 50 millions d’euros, avec des charges perpétuellement croissantes, territoire sur lequel l’État ne remplit pas sa mission d’élargissement de l’assiette fiscale ou de recouvrement, territoire qui reste assujetti à une dotation globale de compensation négative alors même que le chef de l’État s’était engagé à la faire disparaître dans ce PLF, comment cette collectivité exsangue pourrait-elle mettre en place son propre CICE afin que ses entreprises puissent avoir les moyens de concurrencer celles de son voisin Sint Maarten, ou de ses voisins proches, la Guadeloupe ou la Martinique, qui, elles, bénéficient d’un CICE renforcé ? Comment, madame la ministre, en répondant qu’il ne s’agit là que d’une « rançon de la responsabilisation », selon votre expression de mardi dernier, voudriez-vous ne pas susciter une certaine nervosité au sein de la population ? La question reste posée.

Permettez-moi enfin d’aborder la question sensible de la défiscalisation. Nous avons tous pris acte de votre engagement, en commission élargie la semaine dernière, de la prolongation, dès ce PLF pour 2016, de l’aide fiscale à l’investissement jusque fin 2020. Je crois que vos propos ont rassuré les parlementaires et les professionnels ultramarins. Il semble néanmoins que nous soyons nombreux à redouter que cet horizon de 2020 soit insuffisant, notamment en matière de grands projets structurants, lesquels demandent, on le sait, plusieurs années de démarches administratives intensives.

Le groupe Les Républicains espère donc que vous réserverez un accueil favorable aux amendements qu’il a déposés pour proroger les dispositifs jusqu’en 2025.

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