Madame la ministre, ma première question porte sur TV5 MONDE. La chaîne francophone a été victime, le 8 avril 2015, selon les termes de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI), du « premier acte de cybersabotage commis sur le sol français, TV5 MONDE devenant le premier groupe de médias occidental victime d'une cyberattaque de cette ampleur ». Longuement et minutieusement préparée, elle a nécessité des compétences poussées et des investissements financiers importants. Elle avait pour objectif de détruire les infrastructures informatiques de la chaîne pour l'empêcher de produire et de diffuser. L'impact financier est considérable : il était estimé en août dernier à 4,8 millions d'euros en 2015, 2,4 millions d'euros au minimum en 2016, et un peu plus de 2 millions d'euros par an, de façon pérenne.
TV5 MONDE seule ne pourra faire face à ces coûts supplémentaires imprévus et indépendants de sa volonté, sans réduire considérablement son activité, son réseau de diffusion, sa production, ses acquisitions, ce qui aura pour conséquence d'induire d'autres coûts supplémentaires – indemnités de rupture de contrats, litiges… – et de réduire ses recettes de publicité et de distribution.
L'avenir de TV5 MONDE se trouve donc désormais dans les mains de ses gouvernements bailleurs de fonds. Or, à ce stade, ces derniers n'ont annoncé aucun engagement pluriannuel. Madame la ministre, peut-on avoir l'assurance de leur engagement financier, en fin d'année, au moment où se tiendra la conférence des représentants des États bailleurs de fonds ? Par ailleurs, TV5 MONDE n'est pas la seule chaîne qui peut être visée par ce type d'attaque et les coûts de protection informatique sont considérables. Comment peut-on les mutualiser entre opérateurs de l'audiovisuel public ?
Seconde point : il me semble que notre pays sous-estime la force et le poids de l'outil audiovisuel dans la bataille d'influence qui fait rage au niveau mondial. Nos concurrents et partenaires, les États-Unis bien sûr, mais aussi, aujourd'hui, la Russie, la Chine, le Qatar, et nos partenaires européens – en tête desquels le Royaume-Uni et l'Allemagne –, investissent massivement dans leur audiovisuel extérieur car ils en mesurent les retombées économiques et politiques positives. Le COM de France médias monde est en cours de négociation ; aussi n'est-ce pas le bon moment pour lancer une réflexion stratégique ? Ne pourrait-on envisager que votre ministère et celui de Laurent Fabius mettent sur pied une commission commune sur l'avenir de notre audiovisuel extérieur qui en définisse les objectifs et les moyens non pas à court terme mais pour les dix ou vingt années à venir ?