Intervention de Fleur Pellerin

Réunion du 2 novembre 2015 à 15h00
Commission élargie : finances - affaires étrangères

Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication :

Je commencerai par les questions audiovisuelles qu'a évoquées le président Bloche et en particulier la proposition de rachat de Newen par TF1. Que des entreprises privées s'allient et concluent des partenariats, c'est leur liberté en tant que telles. Ma préoccupation de ministre de la culture et de la communication, en la matière, est de faire en sorte que le secteur audiovisuel français soit dynamique et contribue à la création française et à son rayonnement. Je suis très attachée à la diversité du tissu des entreprises de production et à leur indépendance, considérant qu'elles forment un atout indéniable du secteur. Cette diversité doit être maintenue comme l'un des piliers du renouvellement de la création et des talents.

Dans le même temps, chacun sait que nous avons besoin, dans le respect de cette diversité, de faire émerger, en France, des entreprises puissantes capables de défendre la création française à l'extérieur de nos frontières. Du reste, tous les experts qui se sont penchés sur la production audiovisuelle l'ont reconnu – je pense aux nombreux rapports parlementaires et au récent rapport de la Cour des comptes – et ont bien montré qu'il était nécessaire que le secteur se structure pour faire face à la concurrence. Aussi le maintien de la diversité et la constitution d'acteurs puissants dans la compétition internationale n'est-il pas incompatible ; mais nous devons veiller, nous pouvoirs publics, j'y insiste, à protéger cette diversité

Si nous ne mettons pas tout en oeuvre pour la faire vivre, nous risquons de voir notre création s'affaiblir durablement et même disparaître – nous devrons en effet faire face à des entreprises de taille considérable en train de se structurer en Europe et dans le monde. Je suis convaincue que nous ne défendrons pas l'exception culturelle si nous ne sommes pas capables de faire émerger nos propres champions, notamment parce que ce sont des entreprises que la France a la capacité de réguler, ce qui n'est pas le cas des entreprises multinationales dont le siège ne se trouve pas sur notre territoire et auxquelles, par conséquent, nous ne pouvons pas assigner d'obligations matière de financement de la création.

Si l'un des principaux producteurs français passait sous pavillon étranger, les préoccupations seraient légitimes et il s'agirait d'un échec de notre système de régulation. C'est ma responsabilité de ministre de la culture et de la communication de l'empêcher.

Mon autre responsabilité, bien sûr, est de veiller aux intérêts de France Télévisions et notamment à ses intérêts patrimoniaux et donc aux intérêts du service public. Je me suis battue, avec votre aide, d'ailleurs, pour les préserver – nous avons renforcé le financement de France Télévisions grâce au vote d'un amendement parlementaire repris par le Gouvernement, visant à augmenter de 25 millions d'euros la dotation du groupe. Et nous n'avons certainement pas agi dans ce sens pour que les programmes qui font la force et l'identité du service public lui échappent. France Télévisions travaille aujourd'hui avec de nombreuses entreprises privées de production d'émissions de flux ou de fiction et s'il est normal que ces entreprises vivent leur vie d'entreprises privées, il faut faire en sorte que les programmes emblématiques de France Télévisions soient protégés.

Des discussions sont en cours à ce propos dont je souhaite qu'elles rassurent le groupe France Télévisions sur l'avenir de ses programmes emblématiques. Le maintien de l'indépendance éditoriale de l'entreprise Newen est un impératif absolu. Je sais que l'on craint que la série Plus belle la vie ne quitte le service public. Eh bien, il faut tout faire pour que le projet de rapprochement entre TF1 et Newen ne le permette pas. De même, il faut tout faire pour rassurer les salariés – je serai très attentive sur les conséquences de cette alliance en matière d'emploi.

L'annonce de ce projet met en évidence une situation dont tout le monde reconnaissait depuis de nombreuses années la fragilité. Contrairement à d'autres pays, nous avons choisi de fonder notre secteur audiovisuel sur une séparation très forte entre la production et la diffusion. Je ne crois pas à un système qui ne laisserait plus aucune place à la production indépendante : ce serait mortifère pour la création et nous avons besoin de plus d'audace, de plus de prise de risques et de plus d'agilité. Il faut reconnaître que tous les diffuseurs ont besoin de diversifier leurs sources de revenus puisque vous savez bien que le marché de la publicité télévisée est très concurrencé par internet. Ils ont besoin de mieux protéger leurs investissements dans les programmes les plus emblématiques.

J'ai engagé dans cette perspective deux chantiers : celui de la transparence des devis et des recettes – sur lequel je souhaite que nous trouvions un accord d'ici à la fin de l'année, les diffuseurs devant pouvoir bénéficier plus rapidement des remontées de leurs recettes provenant des oeuvres dans lesquelles ils ont investi – ; celui ensuite de l'évolution de la réglementation et des modèles de production – un décret paru début 2015 permet d'ores et déjà aux diffuseurs de prendre des parts de coproduction dans les oeuvres qu'ils financent significativement mais il faut aller plus loin pour assurer un meilleur équilibre entre production indépendante et diffuseur, opposer les uns aux autres n'ayant plu aucun sens si l'on veut que le secteur puisse faire face aux mutations en cours partout dans le monde. Je souhaite que, de cette manière, nous ne subissions pas ces mutations mais que nous les anticipions pour mieux les accompagner.

En ce qui concerne le financement de l'audiovisuel public, monsieur Beffara, les modes d'accès à l'audiovisuel ont profondément évolué depuis une dizaine d'années et nous devons en tenir compte. Le financement de la création audiovisuelle, en effet, par exemple, reposait sur le principe de la contribution de l'ensemble des bénéficiaires de la circulation des oeuvres. Or, aujourd'hui, une partie croissante de la valeur ajoutée est perçue, captée par des acteurs qui ne sont pas régulés et qui ne contribuent pas au budget de l'État ni aux dispositifs de financement de la création. Le système par lequel l'État imposait aux diffuseurs des obligations de financement de la création, y compris en matière de pluralisme des idées et d'indépendance des rédactions, était lié au fait que ces diffuseurs occupent le domaine public, le domaine hertzien ; cependant, la consommation de plus en plus fréquente d'informations sur internet – par le biais des box, des téléphones mobiles ou des tablettes – remet en cause la logique sous-jacente de ce mode de financement. Il est donc indispensable que nous le réformions, au-delà du seul financement de la création.

L'affectation d'une partie de la taxe sur les opérateurs de communication électroniques (TOCE) participe de cette réforme, de cette modernisation puisqu'elle tient compte de ces nouveaux usages, mettant à contribution les fournisseurs d'accès à internet. Il faut donc approfondir la réflexion sur la modification de l'assiette de la contribution à l'audiovisuel public. Plusieurs pistes sont à l'étude sur cette question complexe ; les services du ministère de la culture y travaillent depuis des mois et de nombreux rapports parlementaires ont été rédigés sur le sujet. C'est le sens de l'histoire et une telle réforme s'impose pour tirer les conséquences de l'évolution des usages tout en devant respecter le principe d'équité sociale, de maîtrise de la pression fiscale sur les ménages.

M. Cresta m'a interrogée sur l'offre numérique de France Télévisions, question elle aussi des plus urgentes puisque les propositions numériques de l'ensemble des entités de l'audiovisuel public sont, vous l'avez souligné, plutôt dispersées. J'avais indiqué, dans ma réflexion sur l'avenir de France Télévisions, avant la nomination de la nouvelle présidente, que je souhaitais créer une nouvelle enceinte au sein de laquelle l'ensemble des entreprises ou des institutions de l'audiovisuel public travailleraient de manière très opérationnelle sur des sujets d'intérêt commun.

J'ai ainsi présidé, le 21 octobre dernier, le premier comité stratégique de l'audiovisuel public qui aura vocation à se réunir deux à trois fois par an. La stratégie numérique a été inscrite à l'ordre du jour pour que l'ensemble des entreprises échangent sur les mutualisations, les synergies voire les offres communes qu'elles pourraient développer. Figurent au programme du prochain comité : la mise en place des offres adaptées aux pratiques du public sur internet, la mutualisation des moyens, là où c'est possible, afin d'éviter les doublons et optimiser la capacité d'investissement des entreprises. Plusieurs projets sont d'ores et déjà en cours de discussion entre les organismes du service public de l'audiovisuel sur ces deux derniers points. Une plateforme commune permettrait de mieux utiliser les catalogues ou les actifs de ces entreprises.

Nous devons aussi réfléchir à la manière dont nous organiserons les modèles économiques à venir. Vous avez évoqué dans votre rapport, monsieur Cresta, la question du développement d'offres payantes de VAD, piste qui mérite d'être creusée pour peu qu'on trouve un juste équilibre entre services gratuits, contrepartie de la CAP, et services supplémentaires qui peuvent faire l'objet d'un paiement permettant de dégager de nouvelles ressources propres.

Vous avez également soulevé la question des droits d'exploitation numérique dont les chaînes doivent pouvoir disposer de façon sans doute plus flexible qu'aujourd'hui. Des discussions sont en cours entre France Télévisions et le secteur de la production ; elles portent notamment sur la nécessité d'une plus grande flexibilité. Je n'entends préjuger en rien du résultat de ces discussions mais je souhaite qu'elles s'inscrivent dans un nouvel équilibre global entre les diffuseurs, l'audiovisuel public et le secteur de la production indépendante. J'espère qu'elles se concluront assez rapidement, en tout cas avant la fin de l'année ou en tout début d'année prochaine, afin que nous renforcions l'offre numérique du service public.

Je reviens brièvement sur la chaîne d'information en continu. Comme je l'ai déjà indiqué devant la commission des affaires culturelles, j'y suis favorable puisque cette initiative va dans le sens des orientations stratégiques que nous avions données à France Télévisions. Le travail est en cours avec France Télévisions, Radio France, France Médias Monde, Arte… bref, avec l'ensemble des entreprises de l'audiovisuel public. Ce point a été du reste évoqué lors du comité stratégique de l'audiovisuel public que je viens d'évoquer. Il est en effet important de réfléchir sur les nouvelles façons dont les publics s'informent. Nous en sommes pour l'heure à la phase de conception et nous examinons les complémentarités éventuelles entre les entités de l'audiovisuel public pour faire en sorte que cette chaîne voie le jour.

En ce qui concerne la presse, sujet essentiellement abordé par MM. Beffara et Françaix, le transport postal est un service public essentiel pour ce secteur : il représente environ un quart des exemplaires diffusés. Mais il est également très important pour La Poste puisqu'il représente environ un objet acheminé par l'opérateur sur six. Tous les titres homologués en commission paritaire bénéficient aujourd'hui de tarifs de service public spécifiques inférieurs aux coûts. Ces tarifs ont progressé de façon substantielle depuis 2009, selon le rythme prévu par les accords Schwartz, l'État versant à l'opérateur postal une compensation partielle de 130 millions d'euros en 2015.

Le Gouvernement a préparé l'après-accord Schwartz en mandatant M. Giannesini, conseiller maître à la Cour des comptes, pour proposer des scénarios à compter de 2016. Cette réforme prend place dans un ensemble de mesures que j'avais annoncées aux éditeurs de presse le 2 juin dernier. J'en rappellerai les grandes orientations souhaitées par le Président de la République. Pour ce qui est des aides directes, les aides au pluralisme pour tous les quotidiens IPG ont été maintenues et ont été étendues aux périodiques qui n'en bénéficiaient pas du seul fait qu'ils étaient des hebdomadaires ou des mensuels, mais à condition de ne pas avoir été condamnés au cours des cinq années précédentes pour incitation à la haine raciale par exemple. Pour ce qui concerne les aides indirectes, j'ai souhaité maintenir le principe de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à un taux « super réduit » pour tous les acteurs, maintenir les aides postales pour la presse IPG et pour la presse de la connaissance et du savoir, et réorienter une partie de l'aide postale attribuée jusqu'alors à la presse de loisir et de divertissement en faveur de la création de médias, de l'émergence et de l'incubation de nouveaux acteurs mais aussi en faveur des marchands de journaux qui sont en très grande difficulté puisque près d'un millier disparaissent chaque année.

Plusieurs principes présideront à l'évolution du transport postal de presse à partir de 2016 : l'importance des titres à faibles ressources publicitaires et de la presse IPG pour le pluralisme du débat public ; la distinction nécessaire, parmi les autres familles de presse, entre la presse de la connaissance et du savoir et la presse de loisir et de divertissement ; la soutenabilité des hausses tarifaires et leur prévisibilité dans le temps ; le souci que le ciblage renforcé de l'aide au transport postal de presse permette de mieux soutenir l'émergence, je viens d'y faire allusion, l'innovation et les diffuseurs de presse.

Les arbitrages étant en cours et devant être rendus très prochainement, vous comprendrez qu'il m'est difficile, à ce stade, d'entrer davantage dans le détail des paramètres de la réforme. Je veillerai néanmoins à ce que les principes que je viens d'énoncer soient scrupuleusement respectés.

Il faudra entre six et neuf mois pour classer les titres qui relèveront de la presse de loisir et ceux qui relèveront de la presse d'accès au savoir. Une commission ad hoc sera constituée afin de classer les quelques milliers de titres de presse dans ces catégories. Au cours de cette année intermédiaire que sera 2016, je souhaite que l'ensemble de la presse magazine bénéficie d'un tarif postal dont l'évolution soit le plus proche possible du taux d'inflation. Nous mettrons tout en oeuvre pour que les acteurs connaissent ce tarif au plus vite.

En outre, le PLF pour 2016 prévoit une baisse des crédits d'aide au transport postal. Vous avez récemment auditionné Emmanuel Macron qui a indiqué que si la réforme, décidée avant la remise des conclusions de M. Giannesini, n'était pas appliquée en 2016, cette diminution pourrait être revue. Il s'agit donc d'un point de flexibilité supplémentaire.

Sur la question de M. Françaix sur la presse magazine et le tarif universel, les éditeurs réclament avec raison de la visibilité dans la durée. C'est encore plus nécessaire pour les titres relatifs aux loisirs et divertissements, qui ont vocation à bénéficier prioritairement et progressivement de l'aide postale.

Nous travaillons actuellement avec La Poste et le ministère de l'économie à trouver un point d'équilibre permettant à celle-ci de résorber le déficit de son compte presse, qui est encore de 350 millions d'euros, et d'éviter à la presse de supporter un niveau de hausse incompatible avec son modèle économique. C'est la raison pour laquelle nous proposons des scénarios d'évolution des tarifs postaux gradués pour une dizaine d'années. Nous souhaitons là encore aller vite et faire en sorte que les arbitrages puissent être rendus au plus tard avant la fin de ce mois.

S'agissant des aides aux diffuseurs de presse, ce réseau connaît effectivement une crise et d'importantes difficultés du fait de la crise de la presse imprimée dans son ensemble. Je souhaite mobiliser les pouvoirs publics à l'appui de ce qu'on appelle le niveau 3 de la vente au numéro, c'est-à-dire celui qui est essentiel au maintien du pluralisme sur tout le territoire.

Nous étudions un plan d'action d'envergure dans le cadre des réformes des aides à la presse, qui vise à traiter les difficultés concernant l'équilibre économique des points de vente, les problèmes de trésorerie et la présence de ces points partout sur le territoire. Ce plan a vocation à compléter les dispositifs de soutien existants, que sont l'aide à la modernisation des diffuseurs – de 3,7 millions d'euros, votée dans le cadre du PLF 2016 et permettant aux journaux de moderniser et d'informatiser leurs points de vente – et la revalorisation de leur rémunération, effective depuis 2015 – je serai vigilante sur la poursuite de son déploiement, qui devrait atteindre 1,7 point supplémentaire d'ici à 2017. Par ailleurs, les autorités de régulation ont réuni les volontés des messageries, des dépositaires et des diffuseurs pour développer un système d'information commun, qui sera opérationnel avant l'été 2016 et devrait faciliter la vie des diffuseurs. L'État participe très activement au financement de ce projet grâce au fonds stratégique pour le développement de la presse, à hauteur de 4,4 millions d'euros.

Enfin, la loi donne depuis 2014 la possibilité aux collectivités, aux communes et aux intercommunalités d'exonérer entièrement les marchands de journaux indépendants de contribution économique territoriale. Il faudrait que davantage d'entre elles usent de cette faculté, qui peut être un véritable ballon d'oxygène pour les diffuseurs qui en bénéficient.

Concernant l'audiovisuel extérieur, après la cyberattaque dont TV5MONDE a été victime, l'ANSSI a adressé une liste de recommandations aux organismes de l'audiovisuel public, qui se sont d'ailleurs réunis à plusieurs reprises à mon initiative au ministère de la culture pour évaluer la solidité de leurs systèmes en cas d'attaque de ce type. J'ai souhaité en outre que, dans le cadre du comité stratégique de l'audiovisuel public, ces organismes puissent partager leurs expériences et réfléchissent à des projets communs pour renforcer la cybersécurité.

Au sujet de TV5MONDE en particulier, la protection de son système d'information et le renforcement de ses systèmes de sécurité informatique ont induit des charges supplémentaires lourdes, estimées à 4,9 millions d'euros en 2015, à 2,9 millions au moins en 2016 et à un peu plus de 2,4 millions par an pour les années suivantes. La France a décidé d'accompagner l'entreprise dans cette situation difficile en mobilisant les équipes d'expert de l'ANSSI, en acceptant le redéploiement au cours de 2015 d'1,2 million d'euros de ressources destinées à l'acquisition de programmes français vers des frais communs, en confirmant l'augmentation de 0,7 million de la dotation de TV5MONDE en 2016 et en laissant à la société le bénéfice intégral de l'économie fiscale d'1,7 million d'euros liée à son financement par la contribution à l'audiovisuel public.

S'agissant de France Médias Monde et de la stratégie à long terme de l'audiovisuel extérieur, les négociations du COM 2016-2020, qui ont débuté au printemps et se sont poursuivies jusqu'à cet automne, devraient faire prochainement l'objet d'un arbitrage. La dotation retenue dans le PLF 2016 a été déterminée à la lumière de ces travaux et la signature du COM est prévue au début de 2016. Ce deuxième COM doit permettre à la société de consolider sa distribution et ses audiences en s'adaptant aux évolutions mondiales des modes de diffusion et à une concurrence internationale croissante. France Médias Monde doit en particulier s'assurer la présence de France 24 sur la TNT, en développement en Afrique, renforcer la sécurité de ses emprises et de son système d'information afin de se prémunir des risques de cyberattaque et d'attentat, développer la notoriété de ses marques et adapter ses offres à l'antenne et sur le support numérique aux usages et aux attentes de ses différents publics.

Concernant de la création d'une version hispanophone de France 24, dans le cadre des négociations du COM, France Médias Monde a en effet présenté sur ce point un projet, qui a fait l'objet d'une étude de faisabilité menée par la société, comme le prévoyait le précédent COM. Ce projet présente un réel intérêt pour le développement de l'influence de la France en Amérique latine et, plus largement, sur l'ensemble du continent américain. Mais il supposerait une charge supplémentaire importante pour la société, de l'ordre de 7 millions d'euros. À ce stade, il est donc toujours à l'étude dans le cadre plus large des réflexions en cours sur la trajectoire financière du COM.

Pour ce qui est de la diffusion de France 24 sur la TNT, les antennes de France Médias Monde sont déjà assez largement diffusées sur le territoire national, puisque France 24 est présente sur la TNT en Île-de-France et accessible gratuitement à partir d'une large part des offres du câble, du satellite et de l'ADSL – touchant ainsi 70 % des foyers français. Toute extension de la diffusion en France nécessite de tenir compte de la rareté, de la diffusion disponible et de son coût économique. En outre, la mission de France Médias Monde est d'abord de participer au rayonnement de la France à l'étranger. Cela fait partie des sujets sur lesquels Marie-Christine Saragosse a fait des propositions, qui seront examinées dans le cadre du COM.

La réflexion sur l'avenir de l'audiovisuel extérieur dans dix à vingt ans est stratégique. Je rappelle que l'action de France Médias Monde s'inscrit dans le cadre d'une stratégie pluriannuelle puisque la réflexion sur le COM a aussi une forte dimension prospective, qui associe le ministère de la culture et celui des affaires étrangères. Si les contrats portent sur une durée de cinq ans, ils donnent en effet lieu à une réflexion prospective de long terme.

S'agissant des questions sur les industries culturelles, la CIRT et le livre, je rappelle que jusqu'en 2014, la subvention budgétaire allouée à la CIRT était issue du programme 115 « Action audiovisuelle extérieure ». En loi de finances initiale pour 2015, aucune ressource publique ne lui a été attribuée en raison de recettes exceptionnelles tirées de la vente de ses parts dans Régie 3, qui ont permis de couvrir l'intégralité des coûts annuels de fonctionnement de la société. C'est la raison pour laquelle il est proposé de rétablir, dans le PLF 2016, un financement public d'1,65 million d'euros afin de financer les rémunérations des journalistes français mis à disposition de Medi 1. En raison de la suppression du programme 115, les crédits sont désormais rattachés au programme 334 « Livre et industries culturelles ».

En ce qui concerne les ressources du CNL, elles sont effectivement en baisse. Sans attendre les préconisations du rapport que j'ai demandé à l'Inspection générale des affaires culturelles (IGAC) et au Contrôle général économique et financier (CGEFi), un certain nombre de choix stratégiques ont été définis et seront opérés en fin d'année par l'établissement pour construire un budget pour 2016, qui sera présenté au conseil d'administration. À mon sens, ces choix doivent accorder une priorité au moins relative aux interventions relevant des missions statutaires du CNL, c'est-à-dire les aides aux auteurs, aux éditeurs, aux librairies et à la vie littéraire notamment, ce qui peut avoir pour corollaire une baisse plus marquée d'autres postes. Sur la base du rapport, nous pourrons ouvrir des pistes d'évolution plus structurelles dans le courant de 2016.

Quant à la HADOPI, elle verra effectivement son budget conforté en 2016 puisqu'il atteindra 8,5 millions d'euros, soit une augmentation par rapport à la loi de finances initiale pour 2015. Cela constitue un effort significatif après des années où la Haute Autorité a puisé dans son fonds de roulement pour assurer ses missions : il lui permettra de maintenir le périmètre de ses actions ou missions actuelles, ces dernières étant maintenues pour 2016 avec une pérennisation de la réponse graduée, qui a fait la preuve de son efficacité pédagogique et dont vous avez souligné, madame Duby-Muller, l'utilité. Parallèlement, les préconisations du rapport de Mireille Imbert-Quaretta, présidente de la commission de protection des droits de la HADOPI relative à la lutte contre la contrefaçon commerciale en ligne seront mises en oeuvre. Certaines ont d'ailleurs commencé à l'être, puisque j'ai annoncé un plan de lutte contre le piratage commercial en conseil des ministres le 11 mars dernier, en visant en particulier les sites illicites – de streaming, de téléchargement direct ou de référencement –, qui tirent profit des oeuvres piratées et les monétisent sans rémunérer les créateurs. Nous avons abordé le sujet par deux angles : la question de la publicité sur ces sites et celle des moyens de paiement en ligne, avec des chartes signées, d'une part, avec des annonceurs ou des régies publicitaires et, d'autre part, avec quasiment tous les acteurs du paiement en ligne.

Cette action, qui est mise en place depuis quelques mois, sera probablement très efficace, même s'il est prématuré aujourd'hui de dresser un bilan des missions de la HADOPI ou de ces chartes, qui recueillent l'adhésion des représentants des auteurs ou des ayants droit.

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