Intervention de Jean-Jacques Candelier

Séance en hémicycle du 5 novembre 2015 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2016 — Économie

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Jacques Candelier :

Monsieur le Président, mesdames les secrétaires d’État, chers collègues, avec une diminution des crédits de près de 5 %, la mission « Économie » n’échappe pas aux coupes budgétaires. Ces coupes se soldent par la suppression de 112 équivalents temps plein, après une baisse de 143 en 2015. Vous nous dites, madame la secrétaire d’État Martine Pinville, que c’est un effort pleinement assumé. Vous assumez ainsi pleinement une logique de réduction des missions de l’État et de désengagement, en phase avec la volonté de confier l’avenir de notre pays aux seuls marchés financiers. L’État se contente d’être leur instrument docile, à travers les différents pactes de compétitivité, puis de responsabilité.

Le programme 134, relatif à la stratégie de développement des entreprises, s’inscrit ainsi dans le prolongement de la loi pour la croissance et l’activité, dite loi Macron. Les objectifs fixés en traduisent les orientations très libérales, qui ne favoriseront en rien ni la croissance, ni l’activité. Vous confiez toujours davantage à la Banque publique d’investissement le rôle de supplétif des marchés financiers, sans autre mission que de combler les défaillances du marché, quand il faudrait une véritable impulsion publique pour soutenir notre développement. Nous doutons que le seul soutien à l’investissement des entreprises innovantes et exportatrices, qui est désormais l’objectif central de la BPI, puisse porter ses fruits.

En l’état, et nous le déplorons, BPI France n’est pas à la hauteur des enjeux en matière de financement et de développement des filières industrielles. Cela tient notamment au fait que toutes ses opérations sont conditionnées par la rentabilité financière. Nous continuons de penser que la Banque publique d’investissement pourrait être un formidable levier du développement économique de notre pays, si elle était en capacité de réaliser des prêts aux entreprises sur fonds d’épargne, à l’image de ceux dont bénéficient le logement social ou la rénovation urbaine. La BPI pourrait être un véritable outil de financement de la transition énergétique et de l’économie sociale et solidaire. Mais ces objectifs ne sont, pour cette banque publique, que des missions marginales. Comment, dans ce contexte, favoriser la mise en place d’un environnement propice à une croissance durable et équilibrée de l’économie, comme le prétend le Gouvernement ?

La baisse des crédits et le montant faramineux des exonérations fiscales du programme n’y aident pas non plus. La réduction régulière des crédits permet de moins en moins aux services déconcentrés d’assumer une politique industrielle de proximité. Quant aux dispositifs enchevêtrés d’exonérations fiscales, nous constatons chaque jour qu’ils n’offrent aucune garantie en termes d’efficacité. Ces exonérations sont surtout source de gaspillage d’argent public. Pour notre part, nous proposons depuis toujours de sortir de la course au dumping fiscal et de réduire le périmètre et le volume des exonérations.

Il serait, en revanche, tout à fait possible de privilégier des politiques de subventions et d’aides directes et ponctuelles aux entreprises, en fonction de critères précis et vérifiés. Cela permettrait non seulement de limiter les effets d’aubaine, mais aussi d’assurer un pilotage plus rigoureux de la politique économique nationale. C’est ainsi que nous pourrions sérieusement développer l’emploi, la formation et l’investissement productif, en lien avec le contrôle des représentants des salariés dans les entreprises.

Concernant les missions économiques d’ordre public dévolues à la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes – DGCCRF – nous continuons, là encore, à nous inquiéter des choix opérés. Certes, vous avez stoppé l’hémorragie des effectifs, mais un nombre important de départements est aujourd’hui sous le seuil critique de neuf agents. Nous soutenons, pour notre part, l’exigence de redonner des moyens, en particulier humains, à cette direction générale, afin qu’elle soit en mesure de mieux défendre les consommateurs et de rééquilibrer le rapport de force entre ceux-ci et les vendeurs. Nous savons, pour l’avoir déjà dénoncé, que ses effectifs ont été lourdement amputés, notamment sous le mandat de Nicolas Sarkozy et les cinq années de révision générale des politiques publiques.

Des moyens supplémentaires donneraient un véritable sens à la loi Consommation. Ils permettraient une multiplication des contrôles d’établissements, une plus grande réactivité et une lutte plus efficace contre les différentes formes de crises, scandales et criminalité économiques. Nous ne pouvons donc nous satisfaire de la stabilité des effectifs que vous proposez pour la deuxième année consécutive.

Enfin, la question du renforcement, après des années de gestion calamiteuse, de l’accomplissement des missions de la DGCCRF vaut également pour l’INSEE. Cet institut voit en effet ses crédits de paiement baisser de 13 millions d’euros, soit 2,9 %, après une baisse de 10 millions d’euros en 2015. On imagine aisément les conséquences sur les conditions de travail des personnels de l’INSEE, qui assurent des missions stratégiques et légales d’information et d’analyse.

Compte tenu de toutes ces remarques, nous voterons contre le présent budget.

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