Intervention de Fleur Pellerin

Séance en hémicycle du 9 novembre 2015 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2016 — Médias livre et industries culturelles

Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication :

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, le projet de loi de finances pour l’année 2016, que le Gouvernement soumet aujourd’hui à votre examen, prévoit d’orienter résolument à la hausse la contribution de la nation à la vie médiatique et culturelle de notre pays. Pour l’an prochain, il vous est proposé de porter le budget de mon ministère à 7,3 milliards d’euros, en l’augmentant de 2,7 %. La barre symbolique de 1 % du budget de l’État serait ainsi franchie.

De quoi ce geste est-il le signe ? Il est celui d’une promesse tenue. Le Premier ministre s’y était engagé devant les Français ; aujourd’hui, nous mettons en oeuvre cet engagement : tout en redressant les comptes publics, nous faisons le choix déterminé de la culture. Réaffirmons-le ici : ce n’est pas incompatible.

Ce geste est le signe que nous nous donnons les moyens de nos convictions. Nous faisons le choix de la culture, parce que nous sommes convaincus que la culture peut beaucoup et qu’elle donne beaucoup.

Elle peut beaucoup pour nous réconcilier avec nous-mêmes, nous ouvrir davantage au monde et davantage aux autres. La culture est notre réponse à ceux qui agitent à tout crin le spectre de l’identité assiégée.

Elle donne beaucoup pour élargir nos horizons, ouvrir de nouveaux champs d’expérimentation, faire rayonner notre pays pour le rendre toujours plus attractif. Elle donne beaucoup pour protéger la France comme pour la faire grandir. La culture est notre réponse à tous ceux qui croient que la réussite ne se mesure qu’à l’argent qu’on a gagné ou qu’on a fait fructifier.

Alors, mesdames et messieurs les députés, pour que la culture continue de pouvoir toujours plus – contre ceux qui la veulent impuissante –, la création et l’information ont besoin de moyens plus grands et de financements sécurisés. C’est une première priorité.

Pour que la culture continue de donner – contre ceux qui la rêvent avare et étriquée –, il faut réorienter nos moyens pour que les Français soient plus nombreux encore à y accéder, et en particulier les plus jeunes. C’est la seconde priorité.

Ces deux priorités, je les ai placées au coeur de la mission « Culture » comme de la mission « Médias, livre et industries culturelles », dont la programmation relève de mon autorité.

Pour 2016, le projet de loi de finances prévoit que la mission « Médias » sera dotée de 600 millions d’euros, auxquels il convient d’ajouter, pour le débat qui nous occupe, les 3,8 milliards que l’État consacre au compte de concours financier « Avances à l’audiovisuel public », ainsi que le fonds de soutien géré par le Centre national du cinéma et de l’image animée, le CNC, qui disposera de 672 millions d’euros.

Qu’il s’agisse de l’audiovisuel public, de la création cinématographique ou de la création musicale, l’ambition du Gouvernement est de sécuriser leurs outils de financement, pour garantir leur indépendance et leur diversité, et de renforcer leur compétitivité, essentielle à leur avenir.

Nous garantissons l’indépendance de l’audiovisuel public en asseyant ses ressources sur des recettes stables et identifiées.

La contribution à l’audiovisuel public, d’abord. En 2016, son produit évoluera mécaniquement, du fait de l’inflation et de la progression du nombre de redevables. En complément, le Gouvernement a fait le choix d’augmenter la taxe sur les opérateurs de télécommunications, ou « taxe télécom » et d’affecter une partie de son produit à France Télévisions. Ce choix, vous l’avez renforcé lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances, en permettant que cette affectation porte sur 100 millions d’euros au lieu de 75. Cela permet d’éteindre dès 2016 les crédits budgétaires affectés à l’audiovisuel public – je présenterai tout à l’heure un amendement en ce sens. Avec ce budget, nous faisons donc le choix de renforcer France Télévisions et l’ensemble de l’audiovisuel public, leur indépendance et leur financement.

Cet engagement est nécessaire. Il n’exonère pas pour autant les organismes de l’audiovisuel public de poursuivre les efforts de gestion qu’ils ont engagés depuis plusieurs années ou de renforcer leur coopération.

Nous continuerons de protéger la diversité du cinéma et d’améliorer sa compétitivité en France, en stabilisant les financements que nous lui consacrons et en élargissant les crédits d’impôt.

En 2016, les moyens du CNC seront stabilisés : il n’y aura ni ponction, ni plafonnement des taxes prélevées sur le marché de la diffusion audiovisuelle.

En 2016, le crédit d’impôt sera amélioré pour mieux soutenir les entreprises françaises du cinéma et relocaliser les tournages sur notre territoire. Cette mesure sera soumise à votre examen dans quelques jours. Le Gouvernement propose notamment de l’élargir, d’une part aux oeuvres tournées en langue étrangère pour des raisons artistiques, d’autre part aux films d’animation et aux films à fort effet visuel tournés vers le marché international. Le taux sera majoré à 30 % pour les oeuvres tournées en français, et le plafond, pour une même oeuvre, sera relevé à 30 millions d’euros, contre 4 millions auparavant. Cette amélioration représente un effort supplémentaire de 45 millions pour les finances publiques, lesquelles en bénéficieront en retour, puisque un euro de crédit d’impôt génère 11 euros d’investissement sur le territoire et 3,60 euros de recettes fiscales et sociales pour l’État.

Nous continuerons de protéger la diversité de la création musicale en France, tout en soutenant la filière dans son adaptation à la mutation numérique.

Après l’augmentation du plafond de la taxe affectée au Centre national de la chanson, des variétés et du jazz en 2015, le Gouvernement a prorogé le crédit d’impôt phonographique au titre des dépenses engagées pour l’enregistrement de nouveaux talents. Cet effort, qui bénéficie en particulier aux TPE et aux PME, représente 11 millions d’euros. Nous accompagnerons davantage les organismes de soutien à l’export, en augmentant les crédits que nous leur consacrons d’un demi-million d’euros. Nous pérenniserons enfin le Fonds de soutien à l’innovation et à la transition numérique, dans la suite des plans conduits en 2014 et en 2015.

Enfin, pour que toujours plus de Français aient accès à la culture, en particulier ceux qui en sont éloignés, le Gouvernement souhaite renforcer en 2016 l’action de l’État dans les territoires.

Le financement du Fonds de soutien aux médias de proximité sera pérennisé, car ceux-ci portent un regard différent sur l’actualité et contribuent de façon essentielle au lien social sur les territoires.

Les contrats territoire-lecture, qui ont fait leurs preuves pour améliorer l’accès de nos concitoyens au livre, seront dotés de 1 million d’euros supplémentaires.

Enfin, comme l’a annoncé le Président de la République, le Gouvernement proposera par amendement de mobiliser la dotation générale de décentralisation « Bibliothèques » – la DGD « Bibliothèques » pour soutenir des projets d’extension ou d’évolution des horaires d’ouverture des bibliothèques, afin de les adapter aux modes de vie des Français.

Soutenir la diversité et le renouvellement de la création, préserver l’indépendance de l’audiovisuel public et la pluralité de l’information, renforcer partout en France la participation de tous à la vie culturelle, en particulier à la lecture : telles sont les ambitions du Gouvernement pour 2016.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion