Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, dans un contexte de révolution numérique à l’échelle mondiale et d’évolution des pratiques des usagers, la viabilité économique de l’audiovisuel public tel que nous le connaissons aujourd’hui nous préoccupe tous. L’inquiétude est si réelle que deux rapports parlementaires particulièrement riches en propositions viennent d’être publiés.
Le débat budgétaire nous donne l’occasion de réfléchir à l’avenir de cet audiovisuel public. Mais avant d’aborder ce sujet, j’évoquerai tout d’abord le programme « Presse » et la politique de soutien de la presse qui en l’état, dans ce projet de budget pour 2016, n’évolue guère et aurait même tendance à se fossiliser, madame la ministre.
Certes, ce statu quo est induit par le fait que nous sommes dans l’attente d’une réforme des aides à la presse.On constate toutefois une baisse réelle des aides au transport postal. Des précisions, madame la ministre, sur les conditions de sortie des accords Schwartz seraient les bienvenues, tout comme une certaine lisibilité des tarifs postaux en 2016 – sujet cher à M. Françaix. Que va-t-il se passer le 1er janvier prochain ? Aurez-vous le temps d’établir une nouvelle tarification ou bien s’achemine-t-on vers un nouveau moratoire ? Les éditeurs ont besoin, pour établir leurs budgets, de connaître le coût de la distribution postale, surtout ceux de la presse spécialisée dont la diffusion est assurée à plus de 90 % par voie postale.
Les aides au pluralisme sont en hausse, ce qui ne peut que nous convenir lorsque l’on se rappelle les événements du début de l’année. Cela me permet d’évoquer le décret en attente visant l’extension de l’aide aux mensuels d’information générale à faibles ressources publicitaires, alors que les mensuels régionaux n’en bénéficieraient pas.
Je souhaite également, madame la ministre, souligner une forme d’incohérence de la politique du Gouvernement qui, à côté des aides à la presse, fait voter l’assujettissement de toute la presse à l’écotaxe sans que les éditeurs aient la possibilité de s’en acquitter en nature, par la mise à disposition d’espaces publicitaires pour sensibiliser les lecteurs aux bonnes pratiques en faveur du développement durable. Là aussi, un décret d’application est en attente : j’espère qu’il ne sera pas trop préjudiciable à la presse écrite.
Un mot sur l’ouverture à de nouveaux acteurs du Fonds stratégique pour le développement de la presse. Les crédits de ce fonds sont en baisse de 2,6 %, alors que les aides à la presse devraient mieux cibler l’innovation, en vue d’aider ce secteur à bien négocier le virage du numérique, qui aboutit à de nombreux bouleversements.
Je redis, comme chaque année, mon inquiétude quant à la situation difficile des diffuseurs : la vente au numéro subit un déclin significatif qui entraîne la disparition progressive des points de vente. Les efforts doivent perdurer, en matière de rémunération comme d’approvisionnement et de logistique.
Les crédits du livre et des industries culturelles sont en hausse, du fait notamment d’un changement de périmètre. Le livre, comme la presse, doit lui aussi relever le défi du numérique et je suis heureux d’avoir lu dans le rapport de la commission des finances que l’évolution législative de l’encadrement des ventes à distance, que nous avons voulu collectivement ici, avait peut-être permis aux librairies de proximité et aux grandes surfaces culturelles d’afficher de bons résultats au cours du premier semestre de 2015.
L’instauration du médiateur du livre, qui dispose d’un budget tout à fait modeste de 200 000 euros, traduit également une volonté de faire évoluer les pratiques des différents opérateurs du secteur du livre et des systèmes de vente, en dehors de toute action judiciaire.
La hausse, jusqu’à 8,5 millions d’euros, des crédits de la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet, ou Hadopi, est à relever, même si ce niveau de dotation, inférieur aux 9 millions d’euros demandés par l’institution, ne lui permettra pas de mettre en oeuvre l’ensemble de ses missions.
Enfin, s’agissant de l’audiovisuel public, il est à noter que le Grand Soir de son financement n’est toujours pas venu. La réforme attendue de l’assiette de la contribution, malgré vos déclarations optimistes du début de l’automne, madame la ministre, a été renvoyée une nouvelle fois aux calendes grecques. Pourtant le téléviseur n’a déjà plus le monopole de l’accès au service public de l’audiovisuel, nous le savons tous ici. La réflexion, je vous l’accorde, n’est pas simple mais des pistes doivent être explorées, faute de quoi nous prendrons ensemble le risque de ne pas faire évoluer le financement de l’audiovisuel public pour l’adapter aux nouveaux usages.
Ce qui reste essentiel c’est la sécurisation de ce financement. Certes, vous supprimez intégralement dès 2016 la dotation budgétaire en affectant une part plus importante de la taxe sur les opérateurs de télécommunications. Mais comme l’a déclaré ma collègue Virginie Duby-Muller en commission élargie, notre groupe ne peut accueillir favorablement la manière dont vous disposez de cette taxe.