Intervention de Gilda Hobert

Séance en hémicycle du 18 novembre 2015 à 15h00
Protection de l'enfant — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilda Hobert :

Je veux tout d’abord avoir une pensée pour les enfants dont un parent aura été fauché vendredi dernier.

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure, chers collègues, cette proposition de loi touche au plus profond notre responsabilité d’adultes et je ne peux évidemment que la saluer. N’est-ce pas le rôle des adultes de protéger un enfant et le rôle de la loi de s’y employer ? Qu’ils soient d’ici ou d’ailleurs, les enfants ont cette spontanéité qui nous fait sourire, cette fragilité qui nous émeut. Il leur arrive d’être victimes ou témoins de mots ou d’actes de violence, de maltraitance, et nous devons les rassurer, leur apporter protection. On dit parfois que les enfants sont cruels entre eux… Pas davantage que peuvent l’être les adultes. Certes, les dispositifs qui préviennent le harcèlement à l’école sont à saluer, il faut les mettre en oeuvre. Les enfants savent d’ailleurs cerner l’injustice, ils nous le prouvent dans leur propos.

Nous devons la proposition de loi relative à la protection de l’enfant qui nous rassemble aujourd’hui, en deuxième lecture, aux sénatrices Michelle Meunier et Muguette Dini, que je remercie. L’enjeu de ce texte est de renforcer et d’améliorer la prise en charge des enfants et des adolescents en difficulté, et ce de façon équitable sur l’ensemble de notre territoire. Il a par ailleurs vocation à améliorer la mise en oeuvre de la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance, loi qui s’inscrit dans la lignée de la Convention internationale des droits de l’enfant dont nous avons fêté, l’année dernière, les vingt-cinq ans.

Si nous, députés RRDP, reconnaissons les immenses avancées concernant la protection de l’enfant que ce texte introduit – j’y reviendrai –, nous avons toutefois déposé un amendement, similaire à celui que ma collègue Jeanine Dubié avait défendu en première lecture, et visant à écarter le recours aux tests osseux pour déterminer l’âge des mineurs étrangers isolés arrivant sur le sol français.

Un tel examen consiste à radiographier de face la main et le poignet gauche de la personne, et à examiner les points d’ossification des doigts afin d’en tirer des conclusions qui peuvent être hâtives : plus il y aurait de cartilage de croissance, plus la personne serait jeune. Lorsqu’il n’y a plus de cartilage de croissance, la maturité osseuse est atteinte, ce qui correspond plus ou moins à l’âge de 18 ans selon la personne et selon le sexe.

Cette comparaison s’effectue selon un atlas de références réalisé entre 1931 et 1942 à partir d’une cohorte d’enfants américains, selon des tranches de six mois à un an. La finalité initiale de cette technique était alors essentiellement médicale, utilisée en particulier dans le suivi des maladies endocriniennes. Mais cet atlas n’a jamais été mis à jour, si bien qu’on peut douter de la fiabilité de cette méthode, également remise aujourd’hui fortement en question par certaines instances tant judiciaires que médicales. Pourtant, ces tests restent souvent utilisés sur des jeunes gens arrivant sur le sol français sans papier d’identité ou avec des papiers sujets à caution, et ce alors même que la circulaire Taubira relative aux mineurs étrangers isolés précise que cet examen osseux ne doit intervenir qu’en dernier recours. Ainsi, allons-nous passer d’une finalité à caractère médical à une finalité judiciaire ?

Même s’il y a consensus sur le relatif manque de fiabilité des tests osseux, vous avez expliqué, madame la secrétaire d’État, lors des débats au Sénat, que les différentes autorités de santé consultées à ce sujet, qu’il s’agisse du Comité consultatif national d’éthique, de l’Académie nationale de médecine ou du Haut conseil de la santé publique, n’ont pas exclu le recours à ces tests à condition que la marge d’erreur soit prise en compte et qu’ils soient croisés avec d’autres modes d’évaluation médicale. Le texte qui nous est soumis prévoit qu’ils ne pourront être réalisés dorénavant que sur décision de l’autorité judiciaire et après recueil de l’accord de l’intéressé. Mais pour certains enfants, leur mauvaise compréhension du français peut induire en erreur et l’acquiescement obtenu dû à une mauvaise interprétation.

Cette réserve mise à part, je tiens à saluer les dispositions votées en commission à l’article 2 ter, qui prévoient que le directeur d’un établissement puisse informer les autorités concernées par la protection de l’enfance des mesures prises en matière d’absentéisme et de décrochage scolaire. Je souscris aussi pleinement à la réintroduction de la disposition portant sur l’accompagnement des jeunes et qui leur permet de terminer leur année scolaire ou universitaire. Pour notre groupe, cet article 5 EA est très important car il permet aux jeunes de renforcer les outils acquis lors de leurs études et qui, par la suite, favoriseront leur intégration dans la vie active. Pour nous, l’éducation est et reste l’un des socles de notre pacte républicain, que nous devons plus que jamais préserver.

Plus généralement, nous saluons le travail accompli par la rapporteure, Mme Le Houérou, sur cette proposition de loi. À part l’article 21 ter que j’ai évoqué, ce texte contient des avancées vertueuses pour l’amélioration de la protection de l’enfant. À ce titre, nous saluons la décision de la commission des affaires sociales d’avoir réintroduit, après sa suppression au Sénat, le Conseil national de la protection de l’enfance, chargé de proposer au Gouvernement les orientations nationales de la politique de protection de l’enfance, de formuler des avis sur toute question s’y rattachant et d’en évaluer la mise en oeuvre.

La prévention et l’aide à la parentalité n’ont pas été oubliés dans cette proposition de loi. Ce sont là des points essentiels pour garantir la protection des enfants.

À l’heure où le Gouvernement a déjà pris plusieurs mesures concernant ces enfants, en tenant toujours compte de leur intérêt supérieur – nous l’avons notamment vu lors de la discussion sur le projet de loi relatif à l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’État en 2013 –, le groupe RRDP ne doute pas, madame la ministre, que ce texte saura, une fois de plus, rassembler et faire consensus au sein de notre hémicycle.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion