En août 2015, j’interpellais le Gouvernement à propos de la situation d’un enfant autiste dont la mère recherchait désespérément une place d’hébergement. Cette situation, qui n’est pas isolée, n’est toujours pas réglée de façon définitive.
Dans son Livre noir du handicap, l’Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis – UNAPEI – déclare que 47 000 personnes frappent vainement à la porte des services et des établissements français. Sans solution d’accueil, ces personnes autistes, polyhandicapées ou souffrant de maladies rares doivent vivre au domicile de leurs parents ou dans des structures inadaptées.
Face au manque de places disponibles, 6 500 Français, dont 2 500 habitants du Nord-Pas-de-Calais sont contraints à un exil forcé en Belgique. Les conséquences pour ces personnes en situation de handicap et pour leurs proches sont souvent dramatiques. Cet exil provoque des déplacements coûteux et un éloignement familial insupportable. Il a en outre un coût pour la collectivité – 250 millions d’euros par an –, financé par l’assurance maladie et les départements. Il faut donc en finir avec l’exil contraint et trouver une réponse adaptée, de proximité.
Le Gouvernement a annoncé un déblocage de 15 millions d’euros pour répondre à cette situation. Cette décision est très éloignée des besoins réels : selon l’UNAPEI, le financement de l’ensemble des places nécessite la création d’un fonds dédié, doté de 90 millions d’euros par an, pour créer de nouvelles places.
La Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie estimait en outre fin 2015 qu’il manquerait, pour achever le plan de création de places 2008-2018, 3 600 places en établissement et service d’aide par le travail, dont je dénonçais ici même le 3 novembre le gel de création depuis 2013, 3 650 places pour adultes et 1160 places pour enfants, soit un total de 8 410 places pour 47 427 personnes sans solution, auxquelles s’ajoutent les 6 500 personnes exilées en Belgique.
Les plans d’économies sont l’alpha et l’oméga de la politique du Gouvernement dans les domaines de la santé et de la protection sociale. C’est une erreur en termes de santé publique et de développement économique. Il est temps d’appliquer une politique de développement humain et de solidarité créatrice d’emplois, qui aura des répercussions sur les services, l’industrie, le bâtiment, mais aussi sur les recettes fiscales et sociales de l’État et de la Sécurité sociale.
Cette politique doit s’articuler autour de trois priorités : construire, aménager et équiper des services et des établissements d’accueil, développer des filières de formation dans toutes les professions concernées, soutenir les investissements qui favorisent l’accueil et la mobilité des personnes en situation de handicap dans les lieux et services publics. Les sources de financement existent.
Madame la secrétaire d’État, le groupe Front de gauche n’a de cesse de vous proposer de relever les taux de cotisation sur les revenus financiers des entreprises au niveau de ceux appliqués aux revenus des salariés. Le Gouvernement pourrait aussi mobiliser les ressources affectées aux multiples exonérations fiscales et sociales, dont bénéficient principalement les grandes entreprises. L’enjeu est de taille : des Français obligés de s’exiler en Belgique se sentent aujourd’hui bannis de notre république.
Le Gouvernement envisage-t-il de s’engager dans un tel plan de développement ? À défaut, quelles sont les mesures d’urgence que vous prônez, madame la secrétaire d’État, pour répondre à cet enjeu ?