Votre rapport de grande qualité, madame la présidente, précise ce à quoi nous travaillons depuis 2012, à savoir la démocratisation de l'enseignement supérieur. Il y est notamment proposé d'élever à 50 % la part d'étudiants boursiers d'ici 2025 et de diviser par deux l'écart social de diplomation car, comme le rappelait Monsieur le président, seuls 28 % des enfants d'ouvriers sont diplômés de l'enseignement supérieur, contre 65 % d'enfants de cadres. L'ambition la plus emblématique des propositions formulées dans ce rapport vise à augmenter le niveau et le nombre de diplômés en France, en distinguant nettement entre démocratisation et massification. Permettre à une part croissante d'une classe d'âge d'obtenir un diplôme supérieur constitue un véritable défi : cette année, près de 40 000 étudiants supplémentaires se sont inscrits à l'université, qui en accueille environ 2,5 millions. Loin de n'être que démographique, ce défi est aussi culturel : les générations actuellement scolarisées du primaire à l'université ont connu la diminution du nombre d'enseignants et la disqualification de leurs formations pédagogiques. Le classement PISA de 2012 reflète cette évolution : non seulement les résultats des élèves français ont décliné, mais les écarts se sont creusés entre les plus faibles et les plus forts.
Notre projet de démocratisation de l'enseignement supérieur s'accompagne d'ores et déjà de la stabilisation des frais d'inscription à l'université. Pour que cette volonté de démocratisation des savoirs soit crédible, votre rapport exclut en effet l'option consistant à augmenter l'ensemble des droits d'inscription, car elle serait contraire à notre modèle social. Selon l'observatoire européen Eurydice, la France se distingue tout à la fois par des frais d'inscription universitaire assez faibles et un système de bourses qui concerne 35 % des étudiants. La politique menée ces derniers mois a consisté à soutenir leur pouvoir d'achat et, comme vous l'avez proposé, à créer un véritable statut étudiant en leur évitant la case de la précarité et de l'endettement. Songez qu'aux États-Unis, par exemple, la dette étudiante, d'un montant de 1 100 milliards de dollars, représente un tiers de l'endettement des ménages !
En France, le mouvement actuel de démocratisation vise à permettre à 60 % d'une classe d'âge d'obtenir un diplôme supérieur, en licence ou en master. Que préconisez-vous concernant les 40 % de jeunes qui n'en obtiendraient pas ? Faut-il réhabiliter les formations en deux ans, qu'il s'agisse des BTS ou des diplômes universitaires de technologie, les DUT ? Le rapport de M. Lerminiaux et d'autres nombreux travaux de l'inspection générale prônent unanimement l'amélioration de la qualité et de l'ouverture sociale de ces filières professionnelles sélectives.
D'autre part, les écoles privées exigeant des frais d'inscription faramineux sont en pleine expansion, notamment dans ma circonscription. Leur champ de prospection cible particulièrement les élèves dont les résultats sont insuffisants pour accéder aux classes préparatoires et aux autres filières sélectives mais que l'université, synonyme de massification, rebute. Certaines de ces écoles, qui forment souvent aux métiers de services, exigent des frais annuels allant de 5 000 à 10 000 euros ! N'étant pas reconnues par l'enseignement supérieur, elles ne sont pas habilitées à octroyer le statut d'étudiant et, de ce fait, leurs élèves n'ont pas accès aux services universitaires. Comment ces établissements peuvent-ils s'inscrire dans le paysage de l'enseignement supérieur tout en s'adaptant à son impératif d'égalité face au savoir et d'inclusion républicaine ?
Enfin, je ne trahirai pas la pensée de mes collègues du groupe SRC et au-delà en me réjouissant que votre rapport, madame la présidente, confirme notre volonté de placer la connaissance et le monde de l'université et de l'éducation, durement éprouvé par les attentats de vendredi, au coeur de notre pacte républicain.