Intervention de Isabelle Attard

Réunion du 18 novembre 2015 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaIsabelle Attard :

Je vous remercie, madame la présidente, pour ce rapport juste, complet et très réaliste. La loi du 22 juillet 2013 a créé le comité pour la stratégie nationale de l'enseignement supérieur, la StraNES, dont l'objectif est de sortir par le haut de la crise que connaît l'enseignement supérieur français. Elle s'inscrit dans le prolongement des propositions formulées par les assises de l'enseignement supérieur et de la recherche, qui préfigurait la loi Fioraso mais dont les conclusions n'y ont été que très partiellement reprises.

La démocratisation que vous proposez est un objectif tout à fait intéressant, de même que le souhait d'y associer tous les acteurs de l'enseignement supérieur pour éviter d'en faire porter le poids aux seules universités. Refuser la hausse des droits d'inscription – cette fausse bonne solution qui mettrait en cause le modèle social et fiscal français – est une excellente proposition. Il s'agit de « repenser un système qui vise historiquement à former une élite, pour l'ouvrir à ceux qui ont le moins de chances au départ et mieux former tout le monde, pas seulement les jeunes ».

Le comité propose d'augmenter le budget de l'enseignement supérieur. Je pense que c'est là encore une excellente proposition ; les écologistes réclament cette augmentation depuis le début du mandat en proposant plusieurs pistes. Cette augmentation est d'autant plus indispensable que, ces dernières années, les effectifs ont augmenté. Reste à savoir si le Gouvernement acceptera de concrétiser cet engagement fort qui dépasse très largement la seule augmentation accordée dans le projet de loi de finances pour 2016. Il n'a pas tenu compte du rapport de notre collègue Anne-Christine Lang, selon lequel « 12 % du patrimoine immobilier est dans un état de vieillissement tel qu'une reconstruction complète serait moins onéreuse que leur réhabilitation, tandis que 27 % supplémentaires exigent des travaux lourds de remise à niveau ». Le Gouvernement n'a pas non plus été sensible aux très nombreuses photographies de ces bâtiments fortement dégradés qui ont été mises en ligne sur le site internet « Ruines d'université ». Nous espérons que votre rapport sera la goutte d'eau qui fait déborder le vase.

En revanche, la proposition consistant à flécher 25 % du produit de la taxe d'apprentissage vers l'enseignement supérieur doit être envisagée avec prudence, car les formations de niveaux 5 et 6 ont elles aussi besoin de financement, d'autant plus que les personnes qui les suivent sont souvent plus éloignées de l'emploi que les étudiants en formation dans le supérieur et, de ce fait, ont davantage besoin de formations adaptées. Il faudra donc veiller à ce qu'une augmentation du budget consacré à la formation tout au long de la vie dans le supérieur – qu'il faut encourager – ne se fasse pas au détriment de la formation tout au long de la vie pour les personnes les moins qualifiées.

Le renforcement de l'orientation à l'entrée dans le cycle supérieur prolonge le choix fait dans la loi Fioraso de donner la priorité aux bacheliers professionnels et technologiques en BTS et en DUT. Cette expérimentation est intéressante : elle permet d'encourager ces bacheliers à poursuivre leurs études dans de meilleures conditions. Elle s'accompagne d'une volonté d'en « finir avec la rigidité du système français linéaire ». La corrélation évidente entre milieu social et filière de baccalauréat doit nous interdire d'enfermer les bacheliers professionnels dans des silos : les passerelles sont nécessaires. Je cite encore le rapport : « Aujourd'hui, chaque institution – école, BTS… – sélectionne dans son coin et renvoie les bacheliers qu'elle ne choisit pas vers l'université. Nous devons sortir de cette hypocrisie et placer tous les établissements devant la responsabilité de l'accueil et de l'orientation des jeunes bacheliers ».

Enfin, une fois n'est pas coutume, un rapport sur l'enseignement supérieur réserve une place de choix à la pédagogie. Valoriser la partie « enseignant » de la profession d'enseignant-chercheur et reconnaître que cet aspect du métier s'apprend et se perfectionne grâce à la recherche en pédagogie, notamment, est une excellente chose. Il faut désormais envisager comment diffuser la culture de l'innovation pédagogique dans les universités afin de transformer les pratiques. J'espère que les écoles supérieures du professorat et de l'éducation, les ESPE, pourront servir de vecteur utile à ces fins.

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