…mais enfin, il faut regarder les choses telles qu'elles sont. Les contrats précaires pour les jeunes : 120 % de plus en dix ans, pas en vingt ou trente ans mais en dix ans. La proportion de chômeurs parmi les jeunes est aujourd'hui de 24 %, et cela fait de nombreux mois que le record en la matière a été battu en France.
Bref, nous partageons le constat. Laissez-vous donc aller à votre premier mouvement, celui d'une appréciation positive de notre texte, de la belle idée qui est la nôtre – je reprends vos termes – et qui devrait nous permettre de marcher ensemble, d'autant qu'un accord a été conclu par des partenaires sociaux unanimes, tant du côté patronal que du côté syndical.
Je le sais, il existe certains automatismes, nous avons nous-mêmes pu nous y laisser aller, mais on n'est pas obligé de toujours suivre le mauvais exemple, nous avons aussi pu apporter notre appui à des dispositifs que nous considérions comme positifs, y compris au cours des dix dernières années. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP.) Vous le savez très bien. Sur un sujet comme celui du chômage des jeunes ou du maintien dans l'emploi des seniors, il me semble qu'il serait possible de faire au moins une partie du mouvement ensemble.
Je veux juste donner deux ou trois éléments de réponse non sur des points techniques – la discussion des amendements nous permettra des échanges à ce propos –, mais sur quelques questions globales.
S'agissant tout d'abord du financement, sans parler d'une volonté de tromper, des erreurs d'appréciation sont commises. Ce système, personne n'est capable, bien entendu, de dire combien il coûtera cette année à un ou deux millions d'euros près. Si vous étiez à notre place, mesdames et messieurs de l'opposition, cela serait pareil. Pourquoi donc ? Vous le savez bien. Quand on met en place un dispositif en cours d'année, le coût de celui-ci pour l'année dépend de la rapidité de la montée en puissance. Si ce dispositif – certains indices me le laissent penser – monte rapidement en puissance, il coûtera cette année plus cher que s'il montait plus lentement en puissance ; chacun est capable de le voir. C'est la raison pour laquelle, avec une hypothèse raisonnable de 85 000 contrats en 2013 et une montée en puissance tout au long de l'année, nous arrivons à un dispositif qui pourrait coûter un peu moins de 200 millions d'euros.
Vous nous posez la question légitimement : « D'où sortez-vous ces 200 millions d'euros ? » Le ministre du budget a annoncé il y a quelques jours la mise en place de ce que l'on appelle en langage budgétaire un surgel sur l'ensemble des dépenses de tous les ministères, sauf, évidemment, celles du ministère de l'emploi. Un quart, au minimum, de ce surgel d'un montant de deux milliards d'euros sera consacré au financement des politiques de l'emploi au cours de l'année 2013. Je réponds donc à ceux qui se demandent légitimement où est l'argent qu'il se trouve là.
Évidemment, ces crédits seront mis à la disposition de mon ministère par la loi de finances rectificative, pour permettre à Pôle emploi, non sur ses propres fonds, déjà requis pour l'exercice de ses missions, de mettre en place ce dispositif. De même, sous la précédente législature, Pôle emploi s'était occupé de la mise en oeuvre du « zéro charge ». Pôle emploi disposera effectivement des crédits nécessaires, qui seront apportés par mon ministère pour la mise en place en 2013 du contrat de génération.
S'agissant de 2014, le financement se fera dans le cadre du pacte de compétitivité, et je veux éviter, à ce propos également, un faux débat. Vous raisonnez comme si le pacte de compétitivité était une enveloppe de vingt milliards d'euros, mais vous savez bien que ce n'est pas la réalité. Vous prétendez qu'il y a une enveloppe de vingt milliards d'euros et que, si l'on en retranche un milliard d'euros, soit le coût du dispositif quand il aura trouvé sa vitesse de croisière, il y aura de l'argent en moins pour les entreprises, pour le CICE, que vous n'avez d'ailleurs pas voté, vous avez même voté contre. Vous avez certes le droit de le défendre aujourd'hui, comme on le défend dans toutes les entreprises, mais ce n'est pas comme cela que les choses se passent. On ne prend pas un milliard d'euros dans une quelconque tirelire, ce n'est pas ainsi que les choses se présentent. Le dispositif du CICE, vous le connaissez, permettra à chaque entreprise de disposer de 4 %, puis 6 %, de la masse salariale hors salaires supérieurs à 2,5 fois le SMIC. Ce mécanisme est automatique, et le montant se calcule simplement. Bien entendu, l'État sera au rendez-vous de cet engagement. En plus de cela, il y aura le financement des contrats de génération.
Est-ce que le coût global de tout cela s'élèvera à 19, 20 ou 20,5 milliards d'euros ? Personne ne peut dire à l'avance, à 500 millions d'euros près, ce que cela coûtera. L'engagement de l'État, c'est que, grâce aux impôts déjà votés et aux économies qui seront indispensables au financement du pacte de compétitivité, l'ensemble des mesures en faveur des entreprises soient financées, qu'il s'agisse du CICE ou du contrat de génération. Je le dis maintenant pour qu'il n'y ait pas de faux procès. L'argent ne tombe pas du ciel, les uns et les autres nous le savons. Il faut faire les choses sérieusement, point par point, trouver des crédits, les mettre en oeuvre et permettre à Pôle emploi de les utiliser dans les meilleures conditions, et c'est ainsi, évidemment, que nous ferons pour le financement de l'ensemble de cette mesure.
Est-ce le contrat de génération qui va régler le problème du chômage en France ? Évidemment, à lui seul, le contrat de génération ne le peut pas, vous le savez tous. Ce sont les emplois d'avenir, le contrat de génération, la sécurisation de l'emploi, le soutien à la croissance qui, tous ensemble, permettent de créer un mouvement favorable à l'emploi, de nature à inverser la courbe du chômage.
À ceux qui me disent que le contrat de génération ne va pas lui-même créer des emplois, je réponds que je ne connais aucune entreprise qui créera un emploi au motif de la seule existence du contrat quand bien même elle n'aurait pas besoin d'un emploi. C'est évident ! Il n'est pas nécessaire d'avoir travaillé dans une entreprise pour le savoir, pour s'en rendre compte ; quand on a travaillé en entreprise, d'ailleurs, on s'en rend compte aussi. L'objectif de dispositifs comme celui-ci n'est pas de créer le besoin, c'est de permettre le passage à l'acte. Il s'agit de faire en sorte que l'entreprise qui se demande si elle va recruter ou pas, si c'est un jeune qu'elle recrutera, si c'est en contrat à durée indéterminée ou en contrat à durée déterminée, de faire en sorte que cette entreprise franchisse le pas de l'embauche, le pas de l'embauche d'un jeune en contrat à durée indéterminée. Ce sont donc en fait trois pas qui vont être franchis ensemble grâce à un dispositif. Franchement, je pense que tous ceux qui, en toute conscience, réfléchissent et regardent ce dispositif en face, devraient lui apporter leur soutien. Je vous remercie d'être le plus nombreux possible à le faire.